22 - Se revoir

Izana était accroupi sur le bord du toit, son uniforme rouge de boss du Yokohama Tenjiku flottant autour de lui.

Dans son dos, les membres dirigeants du gang étaient dispersés sur la terrasse. Les quatres Rois Célestes Kakucho, Ran Haitani, Kanji Mochizuki et Shion Madarame – et deux exécuteurs – Rindo Haitani et Mucho.

– Il fait lourd, lâcha Izana dans le silence tout juste rompu par instant par le souffle du vent. J'ai toujours pensé que ce genre de météo accompagnait les événements inhabituels et, la preuve, te voilà Kisaki.

Au centre, Kisaki et son complice Hanma regardaient Izana sans un mot.

Izana se redressa de ce mouvement souple et presque félin qui avait toujours été le sien. Il se retourna et il ajouta :

– Tu vois ce que je veux dire ? Dit-il. Une tempête se prépare...

Il s'éloigna du rebord de la terrasse pour s'avancer vers Kisaki.

– Pourquoi tu veux nous rejoindre maintenant ? Lui demanda-t-il.

– Disons, répondit Kisaki, que j'ai une revanche à prendre.

Izana le regarda. 

Puis il rit.

– Très bien, dit-il. Discutons dans ce cas.

– Mais avant, reprit Kisaki, je dois te dire qu'il y a quelqu'un qui veut se joindre à nous.

Izana le regarda sans comprendre et Kisaki ajouta :

– Mon associée a insisté pour être là.

– Ton associé ? Répéta Izana. Tu m'intrigues... Vas-y, fais-le venir. J'ai envie de voir quel genre de personnes s'associe avec toi.




Quelques étages plus bas, un bubble tea posé devant elle et son téléphone à la main, Nao consultait ses messages pour passer le temps. 

Elle s'était installée à la terrasse d'un café du centre commercial qui occupait les étages, au milieu de la tour, et la foule du dimanche soir bruissait autour d'elle. Dehors, la nuit de février était froide et beaucoup préféraient la chaleur des restaurants et des boutiques en intérieur durant l'hiver.

Tandis qu'elle parcourait un sms, son téléphone sonna et un message de Kisaki s'afficha.

Elle le lut et sourit.

Il était l'heure.

Elle abandonna son bubble tea à moitié plein et se mit en route vers les ascenseurs au bout de l'allée.




– Je n'imaginais pas qu'un homme comme toi avait des associés, dit Izana.

– Pourquoi cela ? S'étonna Kisaki. Une personne compétente peut te faire gagner un temps précieux que tu peux employer à autre chose.

– Hmm, personnellement je préfère les serviteurs, répondit Izana. Ils font ce que tu leur demandes sans poser de questions.

Kisaki remonta ses lunettes sur son nez du bout des doigts.

– C'est une façon de voir les choses...

La porte du toit s'ouvrit dans leurs dos interrompant leur discussion.




Nao repoussa la porte menant à la terrasse du building et le souffle du vent rabattit un instant ses cheveux sur son visage. Elle les retint d'une main et s'avança.

La première personne qu'elle vit, ce fut Ran Haitani. Il avait toujours ses absurdes tresses décolorées et cet air insolent plaqué sur le visage. Son frère se tenait à quelques pas de lui, en retrait. Les autres étaient dispersés alentour.

Presque tous portaient l'uniforme rouge frappé du logo du Tenjiku et ils étaient plus grands que dans son souvenir. Rien de plus normal. Après tout, cela faisait presque quatre ans qu'elle ne les avait pas vus.

Elle s'arrêta au niveau de Kisaki et sourit.

– Bonjour Izana, dit-elle, ça faisait longtemps.

Izana ouvrit des yeux surpris, mais celui dont la réaction fut la plus vive, ce fut Kakucho. Pendant une seconde sa mâchoire parut se décrocher.

Izana fit un pas vers elle.

– Nao chan ! S'exclama-t-il. Alors ça je ne m'y attendais pas ! C'est toi l'associée de Kisaki ?

– Comme tu vois, répondit-elle.

L'éclat de Izana avait étonné Kisaki. Il savait que Nao et Izana se connaissaient depuis qu'ils étaient enfants, mais il n'imaginait pas qu'il y avait de véritables liens entre eux, en tout cas pas des liens qu'un homme comme Izana reconnaîtrait.

Nao fit un pas, elle jeta un œil à la ronde et reprit.

– Le Tenjiku a grandi, félicitations, dit-elle avant d'ajouter acide :  Cela dit, ça manque toujours un peu d'envergure tout ça...

Elle tourna vers lui un regard insolent et ajouta :

– Mais je ne suis pas vraiment surprise.

Les expressions de stupeur sur les visages étaient tout ce qu'elle voulait voir. Une fois son objectif atteint, elle pivota sur ses talons.

Elle posa en passant la main sur le bras de Kisaki.

– Je vais y aller, dit-elle, Je vous laisse discuter entre hommes. Tu n'auras qu'à me dire quand tu as besoin de mes services. Merci de m'avoir permis de revoir de vieux amis Kisaki, ça m'a rappelé des souvenirs.

Une fois parvenue à la porte, elle se retourna.

– Kakucho ? Dit-elle. Tu devrais fermer la bouche.




Nao redescendit les escaliers menant à l'étage en dessous, le cœur battant à toute allure dans sa poitrine. C'était une sensation grisante et vraiment agréable. Pour un peu elle aurait éclaté de rire.

Elle se prit la gorge dans une main et inspira plusieurs fois pour se calmer.

Ça s'était passé encore mieux qu'elle l'avait imaginé. Enfin la plaie béante que Kakucho lui avait infligée s'était refermée et de la manière la plus satisfaisante possible.

Maintenant, nous allons pouvoir jouer.

Hors de question qu'elle en reste là.




Un peu plus haut sur la terrasse, Kakucho n'était toujours pas remis de son effarement. Il semblait avoir été foudroyé sur place. 

C'était Nao ? C'était bien elle ? C'était la fillette qu'ils avaient connue à l'orphelinat ?

Elle a changé... et pourtant, pas vraiment.

– Tu étais au courant, toi Kakucho ? Dit Izana.

La voix de Izana le ramena à la réalité.

– Non, je n'en savais rien Izana.

– Puisque ces émouvantes retrouvailles sont finies, reprit Kisaki, revenons à l'objet de notre rencontre.

Il était irrité. Il avait l'impression d'avoir perdu le contrôle de la situation pendant un moment et cela ne lui plaisait pas.

De toute évidence, ils sont plus que des vieux amis...

Il avait le sentiment de s'être fait doubler, voire manipuler, et il ne pouvait pas le tolérer.

Il se promit d'éclaircir ce qu'il y avait entre ces trois-là.

Izana revint vers lui.

– Bien sûr Kisaki !




Lorsque Kisaki et Hanma quittèrent le toit terrasse à leur tour, l'accord était conclu. Kisaki était désormais le Général des Armés du Tenjiku.

Pour ce que cela veut dire... Songea-t-il à part lui.

Izana avait une fascination pour les titres ronflants et lui-même voulait être qualifié de Roi.

Je lui donnerais de l'Empereur si ça l'amuse, se dit Kisaki, du moment qu'il fait ce que je lui dis.

Sur ses talons, Hanma était silencieux.

Quand ils arrivèrent à l'étage en dessous, il finit par laisser échapper un rire.

– Tu n'as pas aimé hein Kisaki, ce qui s'est passé un peu plus tôt avec cette fille ?

Kisaki grimaça.

Hanma avait une fâcheuse tendance à se montrer observateur par moments. C'était d'autant plus irritant qu'il tapait souvent juste.

– Je n'ai rien à foutre de ce qu'il y a entre ces trois-là, mentit Kisaki, du moment qu'ils font ce que je leur demande ils peuvent bien se haïr cordialement, c'est pas mon problème. Au contraire, ça m'arrange.

Il parlait trop. Comme toujours quand il était contrarié. Cela n'avait sûrement pas échappé à Hanma, mais ce dernier se contenta de pouffer discrètement.

Tandis qu'il appuyait sur le bouton de l'ascenseur, Kisaki se promit à nouveau de tirer cette histoire au clair.

Hors de question de me faire doubler par cette salope.

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