23

Noam,

Jour 8.

Je suis devant le miroir de la salle de bain en train de regarder la blessure qu'a causé Louis, l'autre soir, à mon arcade sourcilière. Ça pissait tellement le sang que Vic voulait absolument m'emmener aux urgences pour faire des points de sutures, chose que j'ai refusé bien évidemment. C'est vrai qu'à cet endroit là c'est toujours impressionnant mais c'est rarement grave. Elle a donc finit par faire l'infirmière et m'a soigné elle même en posant des sutures cutanées adhésives sur la blessure.

-" Putain, l'enfoiré, il a bien amélioré sa frappe !" je me murmure à moi même.

Avant d'aller en prison Louis et moi allions plusieurs fois par semaine à la salle de sport pour nous "défouler" et oublier notre train-train quotidien. On avait pris pour habitude de taper dans un sac  de boxe et bien sûr on pariait sur celui qui frapperait le plus fort. Jeu auquel je gagnais à chaque fois, mais cette fois ci je me demande si ça aurait été pareil.

Je viens de finir de me préparer, aujourd'hui j'ai décidé d'aller chercher un boulot. Comme le Juge de l'application des peines a dit, j'ai un mois pour trouver un job et une semaine est déjà passée. Il est temps que je me bouge le cul. Mais cette blessure fait tâche et n'est certainement pas un bon point pour un entretien avec un employeur.

Je retire les strip...AÏE ! putain ça fait mal ! J'entends toquer rapidement à la porte.

-" Noam ! Est ce que ça va ?!"

Merde Victoire... j'ai du crier plus fort que je ne le pensais.

-" Euhh oui oui, je suis juste en train de retirer les sutures."

Elle explose de rire et repart en criant "CHOCHOTTE !".

Quel honte sérieux ! J'suis un homme ou pas ?! Merde.

J'arrache le dernier strip d'un coup sec en serrant les dents. Voila une bonne chose de faite. Maintenant il faut que je trouve un moyen de cacher ce bleu qui s'est formé autour. Réfléchi, réfléchi....Ah je sais ! Vic doit bien avoir du fond de teint qui traîne quelque part dans cette salle de bain. Je commence à fouiller dans les tiroirs qui se trouvent sous l'évier.

Alors voyons tampons...non...fer à lisser...non...pince à épiler...rhaaa bordel ou range t-elle sa trousse à maquillage ?  Une boîte de préservatif....hmm pourquoi pas, je m'en prend un ou deux, on ne sait jamais sur qui on peut tomber. Ahhhh la voilà ! J'attrape la poudre et commence à la mettre sur mon arcade. Qui aurait cru que je me foute un jour de la graisse d'animal sur la gueule ?

-" Le résultat est plutôt potable..."

Je regarde mon profil sous tout les angles avant de juger que mon apparence suffira pour des entretiens. J'enfile la tenue que Victoire m'a préparé pour l'occasion, un jean noir et une chemise blanche, ça devrait faire l'affaire. Classe mais décontracté, un style qui me correspond plutôt bien. J'attache mes cheveux en un chignon plutôt réussi histoire de faire bonne figure et de ne pas paraître négligé avec mes cheveux bouclés.

-" Voilà, enfin prêt."

Je sors de la salle de bain, et retrouve Vic m'attendant affalée sur le canapé, des feuilles éparpillés un peu partout, crayon en bouche. Elle bosse sur ses cours théoriques afin d'avoir un discours exemplaire pour mon audience.

-" Wow, Noam, tu fais vraiment très pro ! me complimente t-elle. Il ne te manque plus que ça, elle me tend une pochette noir, remplit de CV et lettre de motivation que nous avons fait ensemble, et puis merde... ! Rentre avec un job !"

Elle sourit, m'arrange  les épaules avant de me taper une petite claque douce et amicale sur le torse.

***

A peine sorti de l'immeuble, je commence à stresser grave. Je n'ai pas osé l'avouer à Victoire mais mon enfermement a fait que j'ai perdu toute confiance en moi, en ce qui concerne mes capacités intellectuelles. Je suis loin d'être con, je le sais, et j'ai pris des cours du soir en taule, mais ce que l'on ne nous apprend pas, c'est comment faire bonne impression, surtout quand tu as un trou de 5 ans dans ton parcours pro. Je ne sais pas ce que je dois dire... La vérité quitte à me faire refouler à chaque entretien ? Ou mentir, quitte à me faire chopper et virer illico ?

J'aurais dû mettre ma fierté de côté et oser parler de mes craintes à Victoire, elle aurait surement été de bon conseil. Résultat, je me retrouve pommé, dans la rue à pas trop savoir comment m'y prendre. Avant de démarcher quelques commerçants je dois avoir une ligne de conduite en tête. J'ai d'abord pensé à trouver un cyber café pour faire des recherches sur le net, mais ce n'est pas gratuit, il faut consommer son café pour accéder aux pc et je n'ai pas un rond, et, il est hors de question que j'emprunte à Victoire, elle en fait déjà bien assez.

Je erre dans la rue comme un idiot, lorsque j'aperçois la bibliothèque du quartier. Bingo Harrys, consulter un livre c'est gratos ! Tu vas peut être pouvoir trouver des conseils.

***

Une heure que je farfouille dans les rayons de cette bibliothèque à la recherche de manuels sur la recherche d'emploi, j'en ai déniché quelques un mais aucun ne fait allusion à ce qu'un ancien taulard doit dire à son éventuel employeur. Désespéré, je m'apprête à repartir bredouille lorsqu'une petit bonne femme aux cheveux grisonnant m'interpelle.

-" Monsieur, je peux vous aider ? "

-" Je ne trouve pas ce que je cherche ... j'allais partir en fait."

-" Je suis désolée. Je n'ai pas eu le temps de m'occuper de vous plus tôt, ma stagiaire m'a lâché ce matin, je suis toute seule et je n'ai pas une minute à moi."

- " Ce n'est rien, je n'aurais pas trouvé les réponses à mes questions ici de toutes manières.."

Mes yeux sont attirés par un exemplaire du Rouge et Le Noir, que Vic m'a offert à Noel, et je souris instantanément.

La vieille dame a l'air de tiquer et me demande gentiment

-" Vous lisez ce genre de littérature ? Je pensais que de nos jours les hommes n'étaient plus trop amateurs de romances ! "

-" Vous rigolez ? J'adore ce bouquin, il fait partit de mes auteurs préférés !"

Je lui explique un peu mes différents goûts littéraires, ca me destresse un peu, je ne pense pas à ma recherche de boulot ...

-" Intéressant..." bredouille t-elle en se grattant la tête

-"Je vois que vous lisez de tout, vous avez des goûts variés pour un jeune homme de...."

-" 24 ans madame, depuis 3 jours." je lui souris et elle écarquille les yeux surpris de ma révélation.

-" Et bien je ne pensais vraiment pas tomber, au jour d'aujourd'hui, avec les temps qui courent, sur un jeune adulte aussi cultivé sur la littérature."

Nous nous étions assis autour de l'une des tables de la bibliothèque, je suis à l'aise avec elle.

-"A vrai dire, j'ai passé ces quatre dernières années à ne pouvoir faire que ça... elle me regarde en penchant la tête se demandant ce que je veux dire. Hmmm oui en fait, je viens de passer ces quatre dernières année à la prison du Panthéon..." je baisse la tête, je n'aime pas parler de ça, je ne sais pas pourquoi je lui raconte tout ça d'ailleurs.

Elle ne dit rien, pas de signe de peur ou quoi que ce soit sur son visage, elle reste stoïque à ma révélation. Elle doit être pétrifiée, ne sachant pas trop quoi me dire et se retrouvant devant un jeune taulard tatoué. Je crois qu'il est temps que je parte et que je continu mes recherches ailleurs... Je n'ai pas de temps à perdre.

-" Bien... je me lève je vais devoir vous laissez, il faut absolument que je me trouve un job avant le mois prochain pour respecter les conditions de ma conditionnelle. Merci de votre aide..."

-" Marthe, appelez moi Marthe. Dîtes moi Monsieur...?!"

-" Harrys, Noam Harrys. "

-" Monsieur Harrys , seriez vous intéressé de travailler ici même, dans cette bibliothèque ? Comme je vous l'ai dit tout à l'heure, la stagiaire ma laissé tomber et il me faut absolument quelqu'un pour me venir en aide et je pense que vous avez le bon profil pour ce job. Alors qu'en dites vous ?!"

Je suis sur le cul, je n'en crois pas mes oreilles, après ce que je viens de lui avouer, elle est prête à me laisser travailler ici et à me donner ma chance. J'ai envie de sauter sur place tellement je suis content, mais ne le fait pas, je me retiens et lui répond :

-" Marthe, se serait avec grand plaisir, merci beaucoup, merci de me laisser ma chance ! Vous m'offrez  une opportunité incroyable et ça, même après ce que je viens de vous dire." je lui serre la main, ravi.

-" Vous savez Monsieur Harrys, personne n'est parfait. Je ne fais pas parti de ces personnes qui vous mettent dans des cases prédéfinies par la société parce que vous avez fait telle ou telle chose. Nous faisons tous des erreurs, et, le passé reste le passé. Tout le monde à le droit à sa deuxième chance. Donc si vous êtes d'accord, vous commencerez dès demain à huit heures précisément. Je vous prépare votre contrat ce soir, et nous le signerons dès demain. Cela vous convient il ? "

-" C'est parfait Marthe, parfait... je souris de toute mes dents. Demain matin à huit heures pétantes ! Je serais là !"

Je lui lance un dernier "merci", puis un signe de la main, avant de ressortir de la bibliothèque, extrêmement satisfait de l'occasion qui vient de se présenter à moi. Mon sourire est contagieux, et je cours en faire profiter à Victoire.

Elle sera fière de moi.

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