Noam,

Jour 1.

Lorsque j'ouvre un œil, j'aperçois pour la première fois depuis quelques années, un rayon de soleil que le rideau opaque n'a pas réussi à filtrer. Je peux y voir des milliers de particules qui volent à travers la pièce. La deuxième chose que je remarque, c'est Victoire.

Je réalise que nous nous sommes endormis devant la télé hier soir, et au fil de la nuit, nous nous sommes retrouvés allongés, elle dans mes bras.

J'essaies de me redresser lentement pour pouvoir la regarder dormir mais mon bras et caler sous sa tête. Je remarque aussi ses doigts enlacés aux miens, mais je ne les sens pas.

Le bras engourdit, et les fourmillements se faisant ressentir, une douleur commence à s'installer et c'est avec regret que j'essaie de me dégager du corps de Victoire. Par chance, je ne la réveille pas. J'attrape le plaid qui la recouvre à peine, et le remonte jusqu'à hauteur de son cou pour pas qu'elle n'ai froid. Quand je me redresse, son téléphone portable reposant à l'autre bout de ma table basse me fait de l'œil. Pris par un élan de curiosité, je m'en empare et avant de le déverrouiller, la regarde une dernière fois. Elle dort paisiblement. Je fais glisser mon doigt sur l'écran, qui me laisse apparaître son fond d'écran.

Alors qu'elle sourit en regardant l'objectif, Louis, lui n'a d'yeux que pour elle. Il aborde ce même regard sincère, et remplit d'amour et compassion qu'il m'avait exprimé en me parlant d'elle la dernière fois.

Le déroulement de la soirée d'hier, me revient alors par flash.

-" J'ai été vraiment naze..." je me chuchote à moi-même.

D'un soupir, j'ouvre l'application "Message" et vais sur le contact "Mon amour" et commence à rédiger un rapide texto :

Rdv à 11h com d'hab, si tu veux + d'explication. Noam.

Une fois envoyer, j'efface le message, verrouille le mobile, et le repose délicatement au même endroit où je l'ai pris puis me dirige dans la cuisine sur la pointe des pieds.

Après avoir pris mes repères, et fais l'inventaire de ce qui se trouve dans ses placards, je me charge de préparer le petit déjeuner : m'emparant d'un saladier et d'un fouet dans un tiroir, je m'attèle à la préparation de pancakes. Mis à mon aise, en ayant retiré mon t-shirt, je lance la cuisson. Pendant que la première fournée repose sur une assiette posée sur le comptoir, j'en prépare une autre que je tartine de pâte à tartiner et d'autre que je recouvre de sirop d'érable. Le café ayant terminé de couler, je pose le tout sur un plateau accompagné d'un verre de jus d'orange frais.

-" Tout y est !" dis-je fier de moi.

Je m'empare de chaque poignet du plateau puis me retourne pour mener à Victoire sont petit-déjeuner, quand je l'a voit appuyée au comptoir, me regardant son magnifique sourire aux lèvres.

-" Oh tu es déjà réveillé ?"

-" Depuis un moment."

-" Pourquoi ne pas me l'avoir dit ?" je demande sans comprendre.

-" Je t'avoues que c'est très agréable de voir un homme torse nu dans ma cuisine, en train de me préparer mon petit déjeuner..." me dit-elle en trempant son doigt dans le pot de pâte à tartiner avant de le mener à sa bouche pour le lécher.

D'un geste brusque, je baisse le plateau au niveau de ma taille pour cacher l'érection qu'elle vient de me déclencher, mais me renverse la tasse de café chaude sur le torse.

-" Aaah merde, PUTAIN ! C'est chaud !" je crie en lâchant le tout.

Le plateau s'explose au sol, éparpillant les pancakes et leurs garnitures, le jus d'orange dégoulinant à travers le verre brisé, et moi, ouvrant le robinet d'eau froide et me jetant de l'eau sur le torse.

Cette scène est pitoyable, quelle honte...

-" Noam ! Est ce que ça va ?! me dit Vic en se précipitant à mes côtés. Attends, il faut qu'on te mette de la crème pour les brûlures avant que cela ne cloque !"

Elle attrape ma main avec vigueur et me tire en direction de la salle de bain.

Je me retrouve assis sur le rebord de la baignoire, à regarder Vic, penchée sur le lavabo, en train de farfouiller dans l'armoire à pharmacie. Je ne peux m'empêcher de loucher sur ses jolies petites fesses rebondies enfermées dans ce legging. Je resserre les jambes pour cacher une nouvelle fois mon plaisir grandissant.

Reprends toi...merde !

-" Ah la voilà, enfin !"

Elle s'agenouille devant moi, ouvre le tube et commence à me passer la biafine à l'endroit où le café m'a brûlé. Lorsque son doigt effleure ma peau, je ressens un courant électrique me traverser le corps, elle me fait de l'effet c'est indéniable !

Je la surprends en train de me détailler, ses joues rosissent sous l'effet des ses gestes. Un silence s'est installé entre nous, jusqu'au moment ou elle décide de le briser tout en continuant à étaler la crème.

-" Est ce que je peux te poser une question Noam ?! Mais je ne t'oblige pas à y répondre si tu ne veux pas..."

-" Bien sur, je t'en prie..." je lui souris.

-" Ces tatouages, qu'est ce qu'ils représentent ?"

Je baisse les yeux pour observer ses doigts glisser sur les traits noirs de mes deux hirondelles, réparties de chaque côté de mon torse sur chaque pectoraux.

-" Je me les suis fais faire pendant ma première année de prison. Plusieurs détenus se concoctent des talents sur place, mais l'un d'eux, était tatoueur de métier. Un jour, alors qu'un des matons l'a lancé au défi de tatouer quelqu'un avec le strict minimum, je me suis porté volontaire."

-" Mais tu as du avoir mal ! " dit-elle ne quittant pas les courbes des yeux.

-" Je suis rodé. Regarde mon corps Vic, il en est rempli... J'ai plus de 52 tatouages sur mon corps, tous ayant une signification bien précise."

-" Et ça ?"

Je trésaille au contact froid de la nouvelle couche de crème qu'elle badigeonne sur ma brûlure.

-" Ses hirondelles signifient trois choses : la première, est qu'ils est annonciateur de bonnes nouvelles, la deuxième, ils expriment la joie et la gaieté, et la troisième..."

-" La liberté..." chuchote t-elle.

-" Et l'évasion... Oui, j'y ai déjà pensé, mais la liberté à gagné."

***

Sapé d'un nouveau skinny noir, d'un t-shirt blanc à l'effigie des Rolling Stones et d'un manteau marron en peau de daim, j'enfile mes vieilles bottines de cuir pour partir rejoindre Louis au point de rendez-vous que je lui ai fixé. J'observe mon reflet dans le miroir de l'entrée et trouve mon nouveau look plutôt cool. Victoire à su choisir quelques vêtements pour moi tout en satisfaisant mes choix vestimentaires.

-" Où vas-tu ?" me demande t-elle en sortant de la salle de bain, surprise de me voir sur le point de partir.

-" Je... vais acheter du pain. J'aimerais me rendre utile, et la boulangerie n'est pas très loin ?"

-" Oh... Noam si tu as besoin de te retrouver un peu seul tu peux me le dire tu sais..."

Je prends cette remarque comme une idée et l'exploite.

-" Oui aussi, mais je ne veux pas que tu crois que tu es de mauvaise compagnie bien au contraire... Je veux aussi me rendre utile. En plus, je dis en soulevant mon skinny, on me suit à la trace."

Elle regarde le bracelet électronique m'entourant fermement la cheville, objet de sécurité, qu'il m'ont placé hier avant que je ne quitte Le Centre. Un petit clignotement rouge se laisse apparaître, signifiant qu'il est bien actif.

-" Très bien... elle s'avance vers le petit buffet situé près de l'entrée et dans une petite boîte en sort une clef. Tiens, c'est le double de l'appartement. Fais attention à toi."

Et avant qu'elle ne s'éloigne, je lui claque une bise sur la joue.

-" Merci."

Après dix minutes de marche, j'aperçois l'entrée du Square à quelques mètres. Je continue ma marche jusqu'au banc habituel ou nous avons l'habitude de nous retrouver et y aperçois Louis, déjà assis, une clope au bec.

Très bien, au moins il est venu.

Je m'approche du banc sur lequel il est installé. Il ne me remarque pas, trop concentré sur son smartphone.
Je finis par me racler la gorge pour lui montrer que je suis enfin ici.

Il relève la tête vers moi, me fait un faible sourire et tire une dernière fois sur sa cigarette.

-" Tu comptes rester debout ou tu viens t'asseoir ?!"

Son ton n'est pas méchant,je décide de me mettre à côté de lui. Je ne sais pas par quoi commencer. Nous restons un petit moment sans rien dire, à regarder la vie suivre son cours autour de nous.

Il faut que je crève l'abcès, explique lui tout, simplement....

-" Louis je suis désolé de ce qui s'est passé hier....je...je ne voulais pas que tu apprennes comme ça que j'étais sorti mais surtout que j'étais chez Victoire..."

Je regarde toujours l'horizon en lui disant cela.

Je ne me suis jamais disputé avec Louis. Nous avons toujours été comme les deux doigts de la main. Nous nous sommes toujours tout racontés...

Voyant qu'il ne répond pas, je décide donc de continuer.

-" Il y environ un mois, Vic m'a proposé de faire une demande de remise en liberté conditionnelle, ce que j'ai accepté de suite. C'est bien la seule qui ai eu cette idée d'ailleurs avec tous les avocats que j'ai croisé....Bref. Finalement j'ai eu un rendez-vous hier avec le juge, qui m'a accepté cette demande."

Finalement il me lance un sourire de contentement.

-" Oui, je souris, elle a réussi mec, je suis sous liberté conditionnelle avec ce petit truc."

Je lui montre le bracelet électronique placé autour de ma cheville. Louis se penche et pose ses coudes sur ces cuisses.

-" Je suis super content pour toi Bro, me lance Louis, mais ça ne m'explique toujours pas pourquoi je t'ai retrouvé hier chez ma copine. Pourquoi tu ne m'as pas dit qu'elle était ton avocate ?"

Je souffle, je comprends tout à fait sa réaction. J'aurais sûrement été pareil à sa place.

-" Si je suis chez elle c'est parce que le juge l'a ordonné. Il me fallait une résidence pour mon dossier et je ne voulais pas encore m'imposer chez toi et être un fardeau..."

-" Noam, je ne le pense en aucun cas, me coupe t'il, je ne comprend pas pourquoi un truc pareil t'a traversé l'esprit. Tu sais très bien que je serais toujours là pour toi..."

-" Maintenant c'est fait et je ne peux pas revenir en arrière...je savais que c'était ta petite amie mais je ne voulais pas interférer dans votre couple. Surtout que tu ne lui avait pas dit qu'un "ami" à toi était en prison..."

Un silence s'installe...

-" Tu sais, elle était mal hier soir, je veux dire, après ton départ..."

Je n'ai pas envie de jouer le médiateur, le Docteur Love, et encore moins lorsqu'il s'agit de Victoire et de Louis. Je sais que c'est salaud de ma part car je devrais être heureux que mon pote ai trouvé une nana comme Vic, mais je n'y arrive pas. J'ai pris énormément sur moi pour lui sortir cette phrase, à laquelle il semble réfléchir.

-" Je ne sais pas No'. C'est... je veux dire, Vic est une fille bien mais je me demande parfois si elle n'est pas justement trop bien pour moi. Je ne me sens pas à l'aise dans son monde, ses parents sont si différents et si...exigeants. Je l'aime c'est indéniable mais je ne sais pas. J'ai du mal à encaisser le fait que tu vives chez elle alors que je ne devrais pas ; je devrais être heureux mais, tu sais, c'est compliqué tout ça, et je ne sais plus trop en j'en suis dans cette relation..."

-" Tu déconnes ? Merde Louis ! Franchement mec, je te comprends pas. Tu as la perfection et ça ne te conviens pas ?! Tu as la fille dont tout le monde rêve merde! Victoire elle est jolie, très jolie, elle est gentille, simple, bosseuse, déterminée, amusante et ..."

-" Et elle te plait..."

Ces quatre mots dit d'un ton franc viennent de me foutre une claque.