17
Victoire,
Ce matin en me levant, j'ai fait les choses comme je les fait habituellement et étonnement j'étais prête avec 45 minutes d'avance. Chose qui ne m'arrive jamais ! J'ai donc enfilé mon long manteaux gris, pris mon sac et mon dossier pour me diriger lentement vers la station de métro.
Une fois dans la rame, je me place au même endroit que d'habitude, au milieu prêt de la rampe de soutien. Ce moyens de transport a ses particularités dont l'hygiène désastreuse, qui ne convient pas forcément, mais à défaut d'avoir une voiture pour me déplacer, j'ai le transport en commun...
Comme à chaque fois, j'observe les gens et les classes dans différentes listes que j'ai créer : il y a les gens qui pissent partout, d'autres qui sentent la transpiration, et ceux qui se frottent. Il y a aussi des gens bizarres qui lèchent les rampes de maintien , puis les ceux qui sont normaux, ou tout du moins qui en ont l'air. Pas croyable, mais je vous assure que c'est vrai... Même les bancs ont leur particularité, ils sont spécialement conçus pour que les sans abris ne puisses pas s'y installer pour dormir ! Enfin, il faut supporter la musique et le discours des mendiants qui ne changent pas. Alors pour passer le temps, j'ai aussi un petit jeu : Bailler et compter les personnes que j'entraîne dans ma somnolence. Ça marche à tout les coup ! Ça ... et Candy Crush !
Quand j'arrive enfin à mon aire, il est 8h15. Mon rendez vous avec De Balzac n'est qu'à 9h00, celui avec Noam, une demi heure après. Je marche donc en direction du Centre, en m'arrêtant au passage au Starbuck du coin ou je commande un Moka rose pistache pour moi, ainsi qu'un Latte crème brûlé à emporter pour Noam. Je sais que cela lui fera plaisir, il faudra juste que je trouve un moyen de le faire réchauffer avant. Une fois devant le centre, je m'adosse à un coin de mur pour attendre, mais ce froid glaciale me fait changer d'avis. J'appuie sur l'interphone afin de pouvoir rentrer au chaud.
-" Centre Le Panthéon "
-" C'est..."
-" Victoire !" crie une voix derrière moi.
Je me retourne et aperçois De Balzac qui avance d'un pas pressé vers moi, sourire aux lèvres.
-" Centre Le Panthéon." dit la voix derrière l'interphone qui commence à s'impatienter.
-" Oui, c'est Mlle Delagloire !"
-" Maître De Balzac à sa suite." ajoute celui-ci.
Je me retourne une nouvelle fois et me retrouve étonnamment proche de lui. L'agent nous ouvre le portail, et De Balzac se penche encore un peu plus pour passer sa main au dessus de ma tête et tenir le portail ouvert. La proximité qui nous sépare devient gênante, ce qui n'a pas l'air de le déranger... il sourit toujours.
-" Comment allez-vous Victoire ?"
Je me faufile sous son bras pour passer, et surtout pour me dégager de cette odeur de cuir tanné qui provient de son parfum qui doit être composé principalement de bouleau et de tabac.
-" Très bien merci. Et vous ?"
-" En pleine forme ! Rentrons au chaud, je vous offre un café ?"
-" Euh... je viens déjà d'en boire un merci."
-" Oh..."
Il affiche alors un air vexé, tout en regardant le deuxième gobelet que je tiens pour Noam mais se reprend très vite en m'ouvrant la porte du hall d'entrée. Au moment de passer le seuil, je sens sa main se poser sur le bas de mon dos. Je ne sais pas ce qui lui prend, ou ce qui lui passe par la tête mais je me sens réellement gênée de sa proximité.
-" Nous pourrions aller nous installer dans la cafétéria privée du personnel du centre, me lance De Balzac, nous pourrions discuter du cas Harrys, avant notre entretien avec Mr Vigor."
Je n'aime pas quand on parle de Noam comme d'un "cas" ou d'un "dossier", c'est une personne comme une autre qui doit être traité comme tel. Je profite de sa question pour m'ecarter de sa main, toujours posé au bas de mon dos. Et me retourne dans sa direction.
-" Oui, je bois une gorgé de mon moka, hum bonne idée, surtout que j'ai bien avancé dans le dossier et j'ai une nouvelle à vous faire part."
Il me lance un sourire et m'indique la direction à prendre.
Je n'arrive pas à me sentir à mon aise. De Balzac me fixe, assis en face de moi, et ne détourne pas les yeux. Ho mon dieu ! C'est si... gênant comme situation...
Mon maître de stage serait-il en train d'essayer de flirter avec moi ?
-" Alors Vic, avez-vous progressé dans votre affaire ?"
Vic... ?! Là, je ne m'y ferais jamais ! Il ne me connait même pas et me parle comme si on avait élevé les cochons ensemble ! Non pas que je sois hautaine, associable ou un truc du genre mais bon, même si il est jeune, ça n'en reste pas moins mon supérieur !
Il commande un café, et me montre le mien d'un signe de la tête, du genre : "allez bois le avec moi !"
-" Je ... Heu ... j'ai déjà fini le mien, de café, je... ce café est pour mon client, il faudra que j'utilise le micro onde de la cafétéria avant de le rejoindre."
Il me regarde comme si j'étais une extra terrestre et je change vite de conversation en répondant à sa question précédente :
-" Je pense être en mesure d'obtenir la liberté conditionnelle."
Je fouille dans ma large besace pour en sortir le dossier comprenant toute les pièces nécessaire pour la demande de remise en liberté conditionnelle, accompagné de la lettre préparé avec Noam.
De Balzac examine le tout, très concentré et relève la tête...
-" Et quel est donc ce deuxième dossier que vous tenez ?" me demande t'il
Mince... je ne voulais pas lui en parler maintenant, je veux encore attendre pour être sur que tout est fin prêt.
-"Je...je....c'est un dossier que je suis encore en train de peaufiner avec les éléments que vous m'avez fournit la dernière fois que nous nous sommes vus... je serre le dossier contre moi. Je ne veux pas vous en dire plus pour le moment, mais sachez juste que je compte bien ré-ouvrir le dossier et innocenter No... Mr Harrys !"
Je range à la hâte tout mes papiers et De Balzac, me lance encore une fois ce sourire qui en devient perturbant.
-" C'est du bon travail Vic. Vous pouvez être fière. Même si le juge refuse cette remise en liberté, cela va de soit que vous validerait tout de même votre année avec un tel dossier. Vous allez réussir ! J'en suis certain. "
Non mais de quoi il parle ? Je rêve ! Je bouillonne, je bouillonne tellement que si je collais le gobelet de Noam à mes joues ça le réchaufferait certainement !
-" Mr De Balzac ..."
-"Jean, appelez moi Jean..."
-" Mr ..., pardon, Jean, avec tout le respect que je vous dois, je n'ai rien gagné du tout ! Il est évident que la validité de mon année est en jeu, et ce serait mentir que de prétendre ne pas vouloir l'obtenir du premier coup, mais je n'ai rien gagné du tout ! Je n'aurais rien gagné tant que Mr Harrys sera toujours enfermé ! Tant que la justice ne lui aura pas présenté ses excuses pour toutes ses années de souffrance et de maltraitance, ces années de sa jeunesse et de sa vie gâchées, par manque de bon jugement... C'est pour No.. c'est pour mon client que je me bats tous les jours, pour sa liberté, il n'y a pas « que » mon diplôme en jeu !
-" Je suis désolé si je vous ai donné cette impression Victoire, ce n'est pas ce que je voulais dire, je me suis mal exprimé et bien entendu, je suis conscient que l'avenir d'un homme est entre vos mains, mais votre diplôme est tout aussi important..." il me prend la main droite, que je retire aussitôt.
-" Écoutez, je suis de votre avis, je pense que cette affaire à été volontairement bâclée, le fait que ce jeune homme issu de la DDASS, ayant vécu dans plusieurs foyers, et ayant eu des problèmes avec la drogue adolescent, à fait peser la balance dans le mauvais sens. Il était le coupable idéal et personne n'a cherché à savoir la vérité. Personne n'a songé à l'écouter, personne n'a pensé qu'il pouvait être réellement innocent...Pardonnez moi Vic si nous nous sommes mal compris, mais ne vous méprenez pas, dans cette histoire, je suis de votre côté, et du côté de ce jeune homme. Je ferais tout mon possible pour vous aider. Nous pourrions peut être en discuter autour d'un dîner ? Ce soir ? Je pourrais ainsi vous exposer divers conseils que vous pourrait mettre en pratique pour le jour de l'audience... Qu'en pensez-vous ?"
Qu'est-ce que je dois faire ? C'est mon maître de stage, mon maître conseil... J'ai réellement besoin de lui pour cette affaire, mais je ne peux en aucun cas lui faire croire qu'il puisse y avoir quelconque possibilités entre-nous...
Ça devient de plus en plus gênant ! Je me suis peut être trompée sur son professionnalisme ou, je l'ai peut-être mal jugé, mais je pense ne pas me trompée en affirmant que ce type me drague ! Je reviens alors à la réalité quand je l'entends insister.
-" Victoire ? Qu'en pensez-vous ? Si cela peut vous rassurer, cela sera purement professionnel..."
Je ressens alors mon corps se détendre et comprend alors qu'il a du remarquer ma crispation suite à son dialogue.
-" Oui... Oui d'accord."
Quoi ? Fais chier ! C'était pas ça que je voulais lui répondre !
De Balzac se lève un immense sourire aux lèvres, ravi de ma réponse à son invitation.
-" Très bien, disons que je pourrais passer vous prendre à 19h, chez vous ?"
-" Non. Mon petit ami me déposera au lieu de rendez-vous, et viendra me récupérer." dis-je me levant à mon tour.
-" Oh... Oui. Tout à fait." dit-il avant de se diriger jusqu'au bureau de Vigor, le dos voûté de contrariété.
***
-" C'est complètement délirant !" s'exclame Vigor, en rejetant la lettre de Noam que je rattrape comme un bien précieux.
-" Comprenez Mr Vigor, que cette démarche est entièrement dans nos droits ainsi que dans ceux de Mr Harrys. Il vous est impossible de refuser cela, vous n'en avez aucune autorité, c'est au Juge d'en décider." lui rappel De Balzac d'un ton ferme que je ne lui connaissais pas.
-" Alors pourquoi me montrer cette merde ?!"
-" Cette merde, est un outil dans l'avancement du dossier de libération de Mr Harrys !" dis-je en m'emportant à mon tour.
Jean pose une main sur mon épaule.
-" Calmez-vous Victoire. Nous avons exposer la situation à Mr Vigor, dit-il en le regardant, maintenant qu'il est au courant, nous pouvons désormais poster cette lettre et attendre une réponse du JAP."
D'un grognement rauque, Vigor s'affale dans son fauteuil de cuir et s'empare de l'un de ses cigares.
-" Très bien, sortez maintenant !" braille t-il.
Nous nous exécutons sans autres protestations et sortons pour nous rediriger vers l'entrée.
Dans le hall, De Balzac s'arrête à l'accueil et me tend la main. Je la regarde sans comprendre.
-" La lettre Victoire. C'est d'ici qu'elle doit partir."
Je sors celle-ci de mon dossier et la pli avec précaution avant de lui tendre, et que celui-ci la glisse dans une enveloppe à l'en-tête du Centre. L'agent de l'accueil, l'a gratifie d'un coup de tampon et la fourre dans le sac "départ du jour".
-" Un bonne chose de faite ! dit Jean, en se retournant vers moi. Passez une bonne journée Victoire, et... nous nous revoyons ce soir, devant chez Pino ?"
-" Pizza, ça me va... je lui dis d'un sourire forcé. A ce soir."
Avant que Jean, ne puisse me dire quoique se soit de plus, je me retourne et m'éloigne en direction de la cafétéria afin de pouvoir aller faire chauffer le café de Noam. A mon grand soulagement, la cafétéria est vide, et les hommes d'entretiens s'affairent à nettoyer les sols avant le repas de midi.
Je fais chauffer rapidement le gobelet, avant de me diriger vers le couloir des cellules.
-" Tiens tiens tiens... Qui voilà ?" dit le pénitencier de son sourire vicieux.
-" Bonjour... Amenez moi jusqu'à la cellule de Mr Harrys, s'il vous plaît."
-" Mmm... Rien ne vous fait peur à vous..." grogne t-il.
-" Pourquoi dites vous cela ?"
-" Comme ça... il hausse des épaules. C'est bien la première fois que je vois une femme aussi forte dans un trou rempli de malades..."
Ils ne sont pas tous malades... dis ma conscience.
Je suis le pas lourd du maton, d'assez loin, mais reste tout de même assez proche de lui pour éviter les remarques désagréables et déplacées de certains incarcérés. Cette allée me fais frisonner de peur, tout est tellement glauque ici, et quand je repère enfin au loin la cellule de Noam, étonnamment mon cœur se serre. Je stress à l'idée de le voir, mais je suis en même temps tout aussi excitée...
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