25. Qui est le plus fort?

Je suis assise sur le canapé, ma poupée dans les mains. J'aime beaucoup cette poupée. Je l'ai même appelé Déborah, comme ma grand-mère. J'aime beaucoup mamie mais je la vois de moins en moins. J'ai l'impression que papa et maman ne veulent plus aller la voir même s'ils prétendent le contraire. J'entends la voix de maman dans le couloir. Elle est au téléphone.

-Je sais, maman, mais c'est plus compliqué ça. Abigaëlle est encore petite. Dit-elle en se passant la main dans ses cheveux.

Je me lève d'un bond et courre vers elle.

-C'est mamie?

Ma mère hoche la tête et pose un doigt sur ses lèvres pour m'intimer de me taire.

-Je peux lui parler? La supplié-je en joignant mes petites mains.

Maman soupire et réfléchis un instant. Elle pose son téléphone sur sa poitrine pour étouffer nos voix.

-Oui mais après. Pour l'instant c'est moi qui parle à mamie. Va dans ta chambre, je t'appelle pour te la passer.

Je repars toute joyeuse, Déborah dans mes bras. Je vais dire à mamie le nom de ma poupée, elle sera contente. Pourtant, au lieu d'aller dans ma chambre, je me colle contre une porte et écoute maman. C'est rigolo. J'ai l'impression d'être une espionne, comme les gens au travail de papa et maman. Ils m'ont dit qu'ils étaient astronautes mais je ne suis pas bête, j'ai vu des photos dans le hall d'entrée. C'est comme dans les films, avec les pistolets et les visages cachés.

La voix de maman me sort de mes pensées.

-Je ne sais pas si c'est une bonne idée. J'ai peur qu'ils s'en prennent à Abigaëlle... Oui... Je sais...Si je ne suis plus là un jour... oui je sais tout ça!

Je fronce mes sourcils. Mamie est-elle bête? Maman sera toujours là enfin!

-Je lui donnerai la puce, ne t'inquiètes pas. Je lui donnerai quand il faudra. Je sais que c'est le seul espoir. Mais c'est encore un bébé et Tomas et moi préférons ne pas la mettre en danger pour l'instant.

Je retiens mon souffle. J'essaie de réfléchir mais rien n'est logique. Je ne comprends rien à part que c'est grave.

-Oui, maman. C'est un peu dur de se voir mais bientôt promis. Bisous.

Elle raccroche et je bondis vers elle en criant.

-Non! Je voulais lui parler!

Elle pose sa main sur la bouche d'un air contrit.

-J'ai oublié! Je suis désolée ma chérie...

********

Je tourne en rond comme une furie dans ma chambre. Une puce? Et puis quoi encore? Elle a dû mourir avec sa puce de malheur! Elle ne m'a jamais donné ça! Je me jette sur le lit en soupirant.

J'ai renversé mon sac, relu mes papiers en boucle, inspecté toutes mes affaires et pourtant rien ne montre l'existence d'une puce.

Je regarde une énième fois cette chambre qui me sert de prison. J'aimerai tellement qu'Esteban soit là... En pensant à lui je me redresse directement. Dans toute l'agitation qu'a provoquée en moi la révélation de l'identité de mes parents, j'ai oublié de penser à lui! Serait-ce possible que...

Je sors en trombe de ma chambre et file jusqu'à l'ascenseur sous les regards suspects des femmes de ménage. Elles passent leurs journées à nettoyer les millions de vitre de l'immeuble et un jour j'irai leur dire que c'est moi qui laisse traîner mes mains dessus mais ce n'est pas le moment. Je ne supporte pas ces bonnes femmes que j'ai entendu me traiter de «maîtresse du président» ou de «prostituée de luxe» dans les couloirs. Comme si je rêvais d'avoir une chambre luxueuse et de passer mes journées avec Clarks!

Je trépigne d'impatience dans l'ascenseur, provoquant le regard gêné d'un homme d'affaire debout à mes côtés. Il doit se demander ce que je fais ici, vêtue d'un vieux survêtement et complètement décoiffée. L'homme descend bien avant moi et je continue jusqu'au dernier.

Un autre homme se tient déjà dans le bureau de William Clarks.

-Comment avez-vous osé? M'exclamé-je en déboulant dans la pièce. 

Les deux hommes sursautent et se retournent vivement.

-Bonjour Abby. Dit Clarks d'un air contrarié.

Je ne réponds pas et me contente d'observer les deux hommes qui me fixent. Au bout d'un moment, comprenant que je ne partirai pas, l'inconnu bafouille qu'il repassera et sort de la pièce.

-Tu n'as pas à venir comme ça, Abby. J'avais du monde aujourd'hui. Dit calmement le président.

Je m'avance et pointe le doigt sur lui.

-Vous avez envoyé Esteban sur Newearth dans le seul but de me ramener ici!

-C'est exact.

-Et une fois sur Neworld, vous m'avez fait passer pour l'immigrante suspecte! Vous saviez depuis le début qui j'étais! Vous mentez depuis la première où nous nous sommes rencontrés!

Le président s'assoit et inspire profondément.

-Je n'ai jamais menti Abby. Tu étais suspecte, je ne te connaissais que de nom. Je ne savais pas qui tu étais. Je devais m'assurer que tu n'étais pas une menace. Assieds-toi on va parler.

-Hors-de-question. Je ne m'assoirais plus jamais ici. Esteban n'était qu'un pion pour vous. Il devait juste me ramener ici et vous me prendrez de force par la suite.

William Clarks lâcha un rire bref.

-Esteban Torres était parfaitement conscient de ce qu'il faisait. Il est arrivé sur le Triomphe en sachant qu'il devait te ramener à moi, coûte que coûte.

Je passe ma main dans mes cheveux, abasourdie.

-Vous voulez dire qu'il savait qui j'étais? Tout était une mascarade pour lui aussi?

-Bien sûr. Je pensais que tu l'avais compris. Esteban est un jeune espion de notre nation. Il est surentraîné et a mené plusieurs missions à bien. Celle-ci était la plus importante et la plus dangereuse. Il devait quand même intégré une armée étrangère. Il n'y a jamais eu de prodige. C'est lui-même qui a inventé cette expression. On a juste eu à trafiquer les données, et hop un peu de manipulation et tu es parmi nous.

Mon souffle se bloque. Tout n'est donc que mensonge? Je parviens à bredouiller:

-Et... Les sentiments... C'est faux?

Clarks relève brièvement les yeux vers moi.

-Ah oui. J'avais oublié ça. En effet, j'ai demandé à Esteban de jouer la carte de la romance car tu n'étais pas si facile que ça à manipuler. Tu n'a jamais eu de parents, c'était logique que tu cherches de l'amour. Quelques jolies phrase, un ou deux baisers et le tour était joué. Tu es une adolescente prévisible après tout, fille de génies ou pas.

-Tout... Tout était faux...

Le président hausse les épaules.

-Et oui. On dit bien que nos pires ennemis sont parmi nos plus proches. Dommage.

J'enfonce mes ongles dans mes paumes pour m'empêcher de pleurer. J'ai envie de vomir. De lui vomir dessus, même. Mais si je lui saute dessus, je me ferais tabasser par le garde du corps que j'aperçois du coin de l'œil, derrière moi. Je dois être plus maligne. Je ferme les yeux pour calmer la nausée.

-Les données pour sauver l'île sont sur une puce. Lâché-je, comme j'aurais lâché une bombe.

Clarks se redresse sur son siège et me fixe, les yeux écarquillés.

-Comment le sais-tu?

-Je le sais.

-Tu as la puce.

-Oui. Mentis-je avec aplomb. Pas sur moi, mais je sais où elle est.

Il m'observe d'un air attentif. Il se demande sûrement si je mens ou pas. Je garde un visage impassible.

-Ma mère me l'a donné avant de mourir. Je vous la donne à une condition. Vous me laissez retourner sur Newearth et vous ne m'approchez plus. Et je veux de l'argent aussi. Assez pour ne plus jamais mendier et pour ne jamais vivre dans les mauvais quartiers.

Un ange passe, puis Clarks ricana.

-Tu ne devrais pas jouer à ce jeu avec moi, Abby. Je suis le plus fort.

Je secoue la tête, déterminée à gagner.

-Je ne vous dirais rien, alors.

Il sourit. Un sourire lent, un sourire horrible.

-Oh que si, tu parleras.

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Bonjour!

Voici la suite. Je n'ai rien de plus à dire à part que j'espère que cela vous plait et de vous inciter à voter.

A votre avis, qu'est-ce-que Clarks va faire subir à Abby?

Bonne journée,

Séléna

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