1. Le prodige (bis)

Un sursaut me sort de la torpeur. Je me redresse dans le noir. C'est encore arrivé. J'ai craqué une nouvelle fois et j'ai laissé mes démons reprendre le dessus. Je me suis encore oubliée cette nuit. Je passe une main sur mon front brûlant et dégage mes jambes nues entortillées dans les draps à présent humides. Mon cœur menace d'exploser et j'ai l'impression d'avoir une pierre dans la gorge. Un sentiment suffoquant m'étreint la poitrine et j'ai simplement envie de hurler. Mon débardeur est trempé et je le retire pour le jeter loin de moi. Puis je me recroqueville sur mon mince matelas et me laisse aller aux sanglots.

*********

Un vacarme me fait ouvrir les yeux.
Je suis recroquevillée sur moi-même, sans draps et je ne porte qu'un short de sport. Ah oui. Le cauchemar. Je me redresse pour regarder l'heure. 5:30. Je m'habille en quatrième vitesse et sort. L'avantage d'avoir les cheveux courts comme un garçon, c'est de ne pas avoir besoin de les coiffer.

J'ouvre ma porte et comme chaque matin, des soldats se bousculent et se crient dessus les uns sur les autres. Je me fraie un chemin à travers eux pour arriver jusqu'au pont supérieur. En chemin, une main s'accroche à mon bras.

-Salut!

-Salut Tom.

Sa veste est mal fermée et ses rangers sont enfilées à la va-vite.

-Tu es encore en retard. Lui reproché-je, rhabille-toi.

Il m'adresse son sourire qui ferait fondre une fille normale. Pas moi, donc.

-Oui, maman. Plaisante-t-il en réajustant sa veste.

Nous arrivons pile à l'heure sur le pont supérieur.
Alors que je m'aligne avec les autres aux côtés de Tom, celui-ci me glisse à l'oreille:

-Tu as une sale mine aujourd'hui. Qu'est-ce-qui se passe?

-Rien du tout. J'ai mal dormi.

Il m'observe pendant quelques instants l'air pensif puis se remet droit, face à notre commandant qui vient d'arriver.

-Tout le monde est présent? Braille celui-ci

Un garçon un peu plus jeune que moi, arrive alors en courant. Il essaie de s'aligner ni vu ni connu, avec les autres, mais mon lieutenant l'a vu. Il le pointe du doigt:

-Tu nettoieras toute la salle d'entraînement ce soir avec un seau et une éponge, comme punition. Je ne veux aucune trace de poussière.

Le garçon écarquille les yeux mais ne répond rien. Il le vaut mieux pour lui. Je comprends son regard: la salle d'entraînement fait 600 m² et contient de multiples appareils. Alors autant dire qu'avec un seau et une éponge, ça risque de prendre du temps. Mais je l'ai fait et je peux affirmer que c'est faisable en une nuit si on ne traîne pas.
Mon commandant nous annonce le programme de la journée. Entraînement et encore entraînement. Depuis bientôt deux mois, nous ne faisons que ça.

Je suis dans la salle d'entraînement depuis bientôt deux heures. J'ai déjà couru, lancé des couteaux et je me suis même entraînée en combattant avec un camarade. À présent, j'ai envie de faire quelque chose que j'aime. Je passe dans la salle d'à côté, la «salle de tir».

C'est une salle fermée possédant 8 stands. Au bout de chaque ligne, une cible de forme humaine avec un point rouge au niveau du cœur. Je prends un casque pour me protéger du son et un des pistolets mis à disposition. Nous n'avons que ça pour nous entraîner mais certaines journées sont réservées pour les mitraillettes et autres armes plus exceptionnelles. De toute façon, tant qu'il s'agit d'armes à feu, je suis douée.

Nous sommes cinq dans la salle. Trois garçons plus âgés que moi et une fille de mon année, Kristen James. Je l'observe quelques instants. Avant, je l'admirais. Elle est belle, a de longs cheveux blonds et de grands yeux verts. Aujourd'hui, je me demande ce qu'elle fait ici. Elle se plaint au moindre mal et se fait désirer par les 99% des garçons. Je la regarde lever son arme et tirer... dans la jambe de la cible. Elle peste et recommence.

Je décide de l'ignorer et m'installe le plus loin possible d'elle.

Je me campe sur les deux pieds, jambes légèrement écartées, lève mon arme avec mes deux mains et respire. J'aime cette sensation. J'aime sentir le poids du pistolet dans ma main, n'entendre plus rien à part ma respiration et avoir un tel pouvoir en moi grâce à un simple objet. Je me sens en sécurité.

Je vise, et tire. À quelques millimètres à droite du cœur. Je recharge et tire à nouveau. Cette fois en plein dans le rouge. Je souris satisfaite et me retourne sentant une présence.

Le soldat Esteban Torres m'observe. Il lève son pouce pour me féliciter, sans pouvoir parler à cause du bruit. Puis il s'approche de moi et se met sur la piste libre à ma gauche. Je l'observe se mettre en parfaite position et lever ses bras.

Il tire en plein dans le cœur rouge, du premier coup. Réussir son tir du premier coup, sans s'être entraîné au moins une fois auparavant, c'est être un excellent tireur. Je pensais être la meilleure des soldats, apparemment je me trompais. S'il excelle dans tout, aussi bien que dans le tir, je comprends sa note d'examen.

Il recule et me fait signe que c'est à mon tour. Je me place et me concentre. Hors de question de rater ce tir-là. C'est toute ma fierté qui est en jeu. Je tire en plein dans le mille. Fière, je me retourne vers Esteban qui sourit. À son tour.

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Voici le chapitre 2. Merci des lectures et n'hésitez pas à commenter ou voter! J'espère que la suite vous plaira.

Bonne journée ou bonne soirée 😊

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