8. Au plus bas

Une larme coule le long de sa joue, atterrit sur le sol.

Depuis combien est-elle là, adossée contre la baignoire, à ruminer ses sombres pensées ? 

Elle ne sait pas, et n'a sûrement aucune envie de le savoir.

Ellana ne sent plus rien, hormis cette douleur dans sa poitrine, qui lui compresse les poumons. La maison est silencieuse, et ce silence contraste parfaitement avec les cris de tout à l'heure. Ceux d'une mère et de sa fille.

Sa mère est fatiguée en ce moment, elle a tendance à s'énerver pour un rien, Ellana le sait. Mais la jeune fille sait aussi qu'elle n'avait pas à s'emporter comme elle l'a fait.

Maintenant, c'est trop tard, et elle s'est enfermée dans la salle de bain, seule pièce de la maison où elle peut se laisser vraiment aller.

Tout serait tellement plus simple si il n'y avait que ça. Mais Ellana était déjà sur les nerfs depuis un bout de temps.

C'est fou comme elle peut passer d'un éclat de rire à un sanglot en si peu de temps.

Ellana est à bout, elle recherche en vain le bouton "pause" de la télécommande de sa vie. Un rien la ramène au plus bas, plus bas qu'elle n'aurait jamais cru atteindre.

Elle d'ordinaire si souriante. Mais un sourire peut en cacher un autre.

Pourquoi ? Pourquoi se sent-elle mal pour ça ?

Seul le silence lui répond.

Les minutes défilent. Ellana a fermé les yeux, tentant de trouver un échappatoire à ce qui l'attend. Elle en a assez de lutter, elle voudrait juste que ça s'arrête. Que tout s'arrête. Maintenant.

Elle a besoin qu'on la prenne dans ses bras. 

Elle a besoin qu'on lui tienne la main.

Qu'on lui chuchote des paroles rassurantes.

Mais personne n'est là, et cette pensée lui amène un nouvel assaut de ces larmes qu'elle a réussi à refouler.  

Ellana se relève péniblement et fait face au miroir devant elle. Elle fait peur à voir. Ses cheveux en batailles aux bouts légèrement teintés en rose à cette soirée qui lui semble si lointaine retombent piteusement sur ses épaules. Ses yeux sont rougis, cernés par le manque cruel de sommeil.

Même si quelqu'un était là, aurait-il envie de la prendre dans ses bras ?

La réponse négative s'insinue lentement dans son esprit, malgré les efforts que décuple la jeune fille pour la refouler.

Elle est seule. Et personne ne viendra l'aider.

Mais tout comme elle fait face à son reflet affligeant, elle doit continuer à faire face à sa vie. Continuer à se battre contre vents et marrées, et ce, même lorsqu'elle a la sensation de toucher le bonheur du bout des doigts.

Ellana essuie à l'aide du revers de sa manche les sillons humides qu'on laissées les larmes sur son visage. Elle rattache ses cheveux en une queue de cheval qu'elle soigne le plus possible, et redresse fièrement le menton.

Elle sourit à son reflet, l'image lui renvoie celle de l'adolescente souriante qu'elle est.

Mais en regardant bien, ses yeux ne trompent pas. Leur éclat pourtant habituel n'est pas présent, et ils semblent vides.

Ellana prend une grande inspiration, et déverrouille la porte de la salle de bain.

Prudemment, elle s'avance dans le couloir, et descend les escaliers en veillant à ne pas faire de bruit. Elle ne voudrait surtout pas croiser un des membres de sa famille.

Le jeune fille ressent le besoin de sortir. De faire rentrer dans ses poumons un air frais, comme si elle allait expirer tout ses problèmes, et que irait mieux.

Elle atteint la porte du jardin sans encombre, et se glisse à l'extérieur.

Le vent lui fouette le visage, tandis qu'elle s'avance vers le fond du jardin.

La chaleur de la journée a laissé place à l'air frais de la nuit, et Ellana savoure cette fraîcheur tant attendue.

Elle relève la tête, surplombée par des dizaines d'étoiles, et sourit tristement.

Ellana se sent seule, et minuscule. Minuscule face à cet univers dont elle ne peut voir qu'une infime partie. Souvent, regarder le ciel étoilé lui donne une sensation de vertige et lui oppresse légèrement la poitrine.

Mais aujourd'hui, elle sourit à la nuit, à l'étoile filante qu'elle vient de repérer du coin de l'œil.

Aujourd'hui, sa poitrine est déjà oppressée par un poids bien trop lourd à porter, et que les disputes avec sa mère n'arrangent pas.

Malgré tout, Ellana embrasse le ciel étoilé du regard, et fait le vœu de ne jamais abandonner ce pour quoi elle se bat.

Un jour, ce poids sur ses épaules s'en ira. Et ce jour-là, elle se souviendra de l'étoile qui vient de croiser son chemin, laissant derrière elle une traînée scintillante.

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