Chapitre 7

James regagne sa moto sans un regard en arrière alors que les autres sortent enfin de la station service. Mon père me demande rapidement si je vais bien et retourne lui aussi vers son bolide. J'ai à peine le temps de lui répondre un bref oui avant de remonter dans la voiture de Laura. Cette dernière arrive d'ailleurs alors que je boucle ma ceinture. A peine installée, elle démarre en trombe et reprend la route à vitesse élevée.

Même si elle ne dit rien, sa conduite montre qu'elle est clairement énervée par la situation. Enfin énervée n'est peut être pas le bon mot. Je pense qu'elle est profondément frustrée de ne pas avoir pu remettre à sa place ce type comme elle aurait voulu le faire. Personnellement je suis encore sous le choc de comment mon père avait calmé ce petit monde par sa simple présence. C'est comme si ils se calaient tous sur son attitude ou ce qu'il voulait. Je ne comprenais pas comment ni pourquoi mon père avait une telle emprise sur eux.

Agacée de ne pas comprendre et devinant que cela ne sert à rien de poser des questions. Je me cale dans mon siège et observe le paysage qui défile sous mes yeux pour essayer de me changer les idées. Pourtant je n'arrive pas à me détendre, je n'arrive pas à intégrer en quoi cela est si difficile de me dire quel est le métier de Jake. A croire que c'est un secret d'état. En tout cas une chose est sûre, il ne doit pas dire les choses deux fois. 

La conduite de Laura a beau être sportive, elle me berce. Et la fatigue de ces derniers jours aidant, je finis par m'endormir. En fait, je ne vois rien du reste du trajet qui nous mène à Portland. Laura me réveille à sa façon, une fois devant la maison de mon père.

_ Allez, la Belle au Bois dormant, on est arrivé, dit-elle sur un ton qui me dit que j'ai intérêt à faire vite.

Et j'ai raison, je n'ai pas le temps de me réveiller qu'elle me pousse déjà hors de son bolide. Je suis debout, l'air encore hagard quand elle enclenche la marche arrière à vive allure. Puis elle se stoppe nette dans sa manœuvre, ouvre sa fenêtre et me lance un jeu de clés, en disant avec un sourire.

_ Tes clés, on se retrouve dans deux heures au Bar, puis sans attendre la moindre réaction de ma part, elle s'engage sur la route.

Encore hébétée, je regarde quelques instants sa voiture s'éloigner à vive allure avant de reporter mon regard sur la maison dont je suis dans l'allée. Le quartier me semble résidentiel. Les maisons sont de bonnes tailles et assez jolies, les jardins sont entretenus. Celle qui est devant moi a une construction classique mais elle a un certain charme avec ses colonnes, sa terrasse couverte et son balcon à l'étage. 

Je souffle un bon coup, réajuste mon sac sur mon épaule puis avance vers la porte d'entrée. J'introduis la clé et ouvre la maison de Jake, mon père. Une fois à l'intérieur, je ne peux m'empêcher de demander s'il y a quelqu'un alors que je viens de déverrouiller moi-même la porte d'entrée. 

Alors évidemment, je pousse un cri strident en mettant ma main sur mon cœur quand un type d'une vingtaine d'année se matérialise devant moi tout sourire mais un brin embêté par ma réaction. 

_ T'inquiètes pas, merde ça va ? Désolé je voulais pas te faire peur. Vraiment . . . désolé, je m'appelle Andrew, Andrew Morgan, finit-il par me dire en détaillant de haut en bas pour voir si je ne vais pas tomber dans les pommes.

Je le regarde et prends quelques secondes pour reprendre mes esprits. Puis j'arrive à faire une timide sourire pour le rassurer car son nom ne m'est pas inconnu. Je suis même presque sûre qu'il n'a pas repris sa respiration depuis sa tirade.

_ Catriona. Comme Laura m'a donnée les clés, je pensais être seule, lui répondis-je.

_ Oui c'est logique en même temps, commence-t-il en passant sa main dans son épaisse tignasse brune, puis il reprend. Je suis Andrew Morgan. Ton père m'a demandé de te faire faire le tour du propriétaire  et ensuite de t'amener au club, . . . enfin au bar, je veux dire, termine-t-il gêné par ce lapsus.

_ Morgan, comme James ? Repris-je me rappelant pourquoi son nom de famille ne me semblait pas inconnu.

_ Oui, James est mon frère aîné, mais je suis clairement plus canon, non ? M'interroge-t-il avec un sourire moqueur. 

Je pouffe de rire face à sa remarque et je dois admettre que cela me fait un bien fou. Mais là encore, il est gêné.

_ Désolé si j'ai été trop familier. On me le dit souvent mais tu semblais avoir besoin de rire, poursuit-il un peu mal à l'aise. 

Je le regarde avec un sourire un peu triste consciente de l'image peu flatteuse que je dois renvoyer. On reste quelques instants l'un en face de l'autre sans oser parler.

_ Bon je te fais visiter, et ensuite on ira au Bar, me dit-il en avançant vers le salon.

Andrew commence la visite du rez-de-chaussée. Je visite et apprécie la vue d'un beau salon, d'une salle à manger de bonne taille transformée en coin bibliothèque ce qui me fait sourire quand on connaît ma passion pour les livres. Et enfin, une cuisine ouverte moderne avec un bar et des tabourets en cuir vieilli. Le tout est meublé dans un style contemporain industriel que j'aime beaucoup. Puis Andrew m'invité à monter. Il passe devant une porte mais ne l'ouvre pas m'indiquant qu'il s'agit de la chambre de mon père et que la suivante est son bureau. Il s'arrête enfin devant la dernière porte et fait une révérence avec un petit sourire taquin.

_ Votre royaume gente dame, lance-t-il en m'ouvrant la porte mais en prenant soin de rester à l'extérieur pour me laisser le loisir d'entrer et de visiter ma chambre seule.

Je dois avouer qu'elle est superbe et spacieuse. Il n'y a pas la moindre faute de goût. Tout est dans le style campagnard chic, même la salle de bain et le dressing. Mes yeux balaient la pièce et un sourire illumine mon visage car c'est exactement tout ce que j'aime. Alors que je vais vers le dressing pour poser mon sac et tombe sur un mot de mon père posé simplement sur le bureau. Je le prends non sans un pincement au cœur car cela me rappelle la lettre de ma mère que je garde précieusement.

Le mot est simple et concis. Il me demande de m'installer rapidement et de le rejoindre dans un bar appelé The Bar avec Andrew. Il me donne aussi l'adresse de la boutique qui a meublé ma chambre et si cela ne me plait pas. Je passe les voir pour faire les modifications. Mais je n'en aurai pas besoin.

Avant de quitter ma chambre, je passe par la salle de bain pour voir à quoi je ressemble. Et le moins que l'on puisse c'est que mon reflet n'est pas au meilleur de sa forme. Je me tapote légèrement les joues pour les rendre moins blafardes. Puis je relève mes cheveux blonds en chignon flou sur le haut de ma tête. J'inspire un bon coup et rejoins Andrew qui m'attend patiemment dans l'entrée.

_ Prête ? M'interroge-t-il pour la forme.

_ Oui. Tu es garé où ? Lui demandais-je car en arrivant je n'avais pas vu de voiture.

Andrew sort un trousseau de clés qu'il me lance en me disant. 

_ On prend la tienne, elle est dans le garage, poursuit-il avec un petit sourire en coin.

_ Mais, je n'ai pas de . . ., commençais-je mais Andrew termine à ma place.

_ Voiture. Et bien maintenant oui. Suis moi, termine-t-il en ouvrant la porte qui mène au garage.

Quand je vois la voiture, je ne peux pas m'empêcher de sourire avec une pointe de tristesse. C'est le même modèle de mini que celle de ma mère mais en plus récent. Je passe mes doigts sur la carrosserie en serrant les clés dans ma main.

_ Bon on y va ou tu continues ton câlin et je vous laisse, lâche Andrew en passant la main dans ses cheveux.

Encore une fois sa manœuvre pour me détourner de ma tristesse fonctionne et je finis par rire ce qui me fait du bien. 

_ On y va, dis-je en déverrouillant la voiture.

Une fois installée, je remarque le boitier qui commande l'ouverture à distance de la porte de garage et un autre légèrement plus gros à côté.

_ Celui là c'est la porte du garage, mais l'autre, il sert à quoi ? demandais-je à mon voisin.

Pour la première fois depuis notre rencontre, Andrew semble clairement mal à l'aise et au lieu de me répondre. Il hausse les épaules avant de changer de sujet comme si de rien n'était.

_ Bon t'es prête. Portland c'est pas L.A. pour la circulation, mais quand on connaît pas c'est un vrai labyrinthe de sens unique, commence-t-il alors que j'engage la voiture dans l'allée.

Je ne relève pas et me contente de suivre à la lettre les indications de mon copilote. Nous traversons une partie de la ville avant de nous diriger vers ce qui ressemble à une zone industrielle. Je suis surprise mais je ne fais aucune remarque. Et au moment, où je finis par croire que nous sommes perdus ou pire, mon regard est attiré par un néon vert au loin . . . The Bar. 

Je rentre sur le parking bondé à cette heure de fin d'après midi et pousse un ouf de soulagement quand je vois la voiture de Laura. Pourtant une question martèle ma tête, dans quoi suis-je tombée ?

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