Chapitre 6

Contre toute attente, je fais mon sac rapidement. Je le mets sur mon épaule et regarde une dernière fois ma chambre, non sans un pincement au cœur. Mais avant de rejoindre mon père, Jake, je passe par la chambre de ma mère, où je récupère un bracelet breloque et son claddagh. Je les glisse dans la pochette de mon sac à main.

Quand j'arrive en bas de l'escalier, le brun et le blond sont là ainsi qu'une jeune femme blonde. Ils sont tous en grande conversation avec mon père. Conversation qui stoppe nette lorsqu'ils me voient. Les deux hommes me saluent d'un bref signe de tête avant de sortir de la maison suivi par mon père.

_ Bon t'es prête ? Me demande la jeune femme blonde au style . . . j'aurais envie de dire vulgaire mais cela ne rend pas ça sur elle. Pourtant la combinaison entre le mini short, les bottes cloutées et le collant résille n'est pas des plus classe. Mais sur elle, je dois avouer que c'est à couper le souffle. 

_ Oui, répondis-je d'une petite voix timide que je détestais chez moi car elle montrait tout de suite que je n'étais pas à l'aise.

_ En route, reprend-t-elle en se dirigeant avec une démarche assurée vers une magnifique Mercedes SL550 blanche. 

_ C'est ça ta voiture ? lui demandais-je surprise de la voir au volant d'un tel bolide.

_ Bah oui, me répond-t-elle en haussant les épaules comme si ma réaction était déplacée de voir une fille aussi jeune au volant d'une voiture d'un tel prix, alors que pour elle c'était ce qu'il y avait de plus normal.

Je ne réponds rien mais mon visage doit traduire la vexation que j'ai ressenti face à sa réponse. Je n'aime pas avoir l'impression que je ne comprends rien ou pire d'être prise pour une petite fille. 

_ Est-ce que tu as la moindre idée de ce dans quoi tu t'embarques ? Finit-elle par me demander comme si elle avait pitié de moi. Ce que je déteste par dessus tout.

_ Et bien, commençais-je un peu énervée par son attitude condescendante, non pas la moins du monde pour être totalement honnête avec toi. Je me contente de suivre, Jake, qui se présente comme mon père car ma mère, tuée par balles devant son lieu de travail, me l'a demandée dans une lettre. Lettre qu'elle avait demandé à sa meilleure amie de me remettre le jour où elle mourrait. Satisfaite, terminais-je en claquant la portière de sa somptueuse voiture.

Je l'entends râler de l'autre côté de la vitre. Elle fait le tour, ouvre sa portière et se laisse tomber sur son fauteuil en cuir. 

_ Bon, commence-t-elle, on a quinze heures de route et sérieux, j'ai pas envie d'avoir ton air de chien battu pendant toute la route. Alors OK, tu as perdu ta mère, vous étiez proche et tu es triste. La belle affaire. Au moins, toi tu l'as connue et tu as de bons souvenirs avec elle, me lâche-t-elle avant de s'engager derrière le motard blond qui semble nous ouvrir la route. Alors que mon père et le brun restent derrière nous.

Le silence envahit l'habitacle alors que nous commençons à peine à sortir de L.A. Cette fille a une conduite sportive mais fluide. N'aimant pas les longs silences et ni jouer les victimes, je finis pas rompre le silence.

_ Désolée, dis-je doucement en regardant dans le rétro la ville qui m'avait vu grandir s'éloigner de plus en plus.

_ De quoi ? Me demande-t-elle surprise.

_ Que tu n'ais pas connue ta mère, repris-je mal à l'aise de parler de quelque chose d'aussi personnel alors que je connais même pas son prénom.

_ Oh ça ! Et bien, c'est pas ta faute. Et puis elle s'est barrée quand j'avais pas un an . . . donc c'est pas une grosse perte. Ce qu'on connait pas, ça manque pas vraiment, me répond-t-elle sans quitter la route des yeux.

_ Ah, est la seule réponse que j'arrive à formuler.

C'est à cet instant, que je mesure une fois de plus combien elle me manque. Les larmes commencent à me brûler les yeux. J'ai beau serrer les poings et me mordre les joues, car je ne veux pas pleurer devant quelqu'un que je ne connais pas. Je finis par refouler mes émotions au prix d'un effort qui me semble surhumain et décide de faire la conversation à cette fille qui est assise à côté de moi.

_ Donc tu as été élevée par ton père ? Repris-je pour penser à autre chose et faire un peu connaissance.

_ Oh putain ! Tu veux ma mort ou quoi ? Crache-t-elle en manquant de s'étouffer avec le pepsi qu'elle buvait.

_ Désolée, . . . 

_ Tu t'excuses toujours de tout et de rien, me balance-t-elle sans quitter la route des yeux.

J'allais lui répondre par une réplique cinglante, mais rien, . . . , rien  ne  me vient. Car elle a raison en fait. Je ne suis pas comme ces filles, pas comme elle, qui arrivent à dire ce qu'elles pensent au moment où elles le pensent. Moi quand une bonne répartie me vient cela fait trois heures que le moment est passé.

Après un court silence, la voiture devant nous fait une embardée et le motard blond freine brusquement. L'obligeant, elle aussi à piler pour ne pas le renverser.

_ Putain Charly, râle-t-elle en klaxonnant le blond qui lui répond par un des plus charmant doigt d'honneur, avant de redémarrer de plus belle pour la narguer.

_ Attends ce soir à la maison, p'tit con, commence-t-elle en riant. T'as de la chance que j'ai la fille du boss dans ma caisse, termine-t-elle en le klaxonnant de nouveau mais pour attirer son attention pour elle aussi lui faire un doigt d'honneur.

Je m'attendais à une réponse de Charly quand un seul appel de phares de mon père calme tout le monde immédiatement. Sans réfléchir, une habitude chez moi, je lui demande.

_ Le motard blond devant, . . .Charly, c'est ton, . . . ton copain ?

_ Oh que non ! Répond-t-elle en pouffant de rire comme si ma question était la blague la plus drôle de l'année. Cet abruti devant, c'est mon frère aîné, Charly Miller. Ah oui et moi c'est Laura. Et pour information, le mec ou la nana qui me rendra monogame est pas encore de ce monde. Quoique t'es plutôt mignonne, termine-t-elle avec un clin d'œil qui me mets mal à l'aise. Mais j'essaie de ne pas le montrer car je suis presque sûre que c'est fait exprès.

_ Et moi c'est Catriona Starkson . . . O'Connell, dis-je à mon tour pour changer de sujet et terminer les présentations.

_ Oui je sais, reprend-t-elle plus calme à présent.

Le silence se fait de nouveau dans l'habitacle et je finis par m'endormir. Je me réveille quand Laura gare la voiture pour refaire le plein. Je descends pour me dégourdir les jambes et me prendre une boisson chaude. Car plus on avance vers Portland plus la température extérieure se rafraîchit. C'est aussi dans cette station service que je vais commencer à comprendre que mon père est un homme que l'on respecte et que l'on ne contredit pas.

Alors que j'attends que mon cappuccino se prépare à la machine, j'entends que le ton monte entre le pompiste et Laura. Ce dernier a eu un geste déplacé à son égard d'après ce que j'ai compris. Et Laura lui fait clairement comprendre que son attitude ne lui a pas plu avec un langage des plus fleuri. Charly, alerté par le ton de sa sœur,  arrive près à découdre pour soutenir Laura. Et au moment où je pensais que tout allait partir en vrille, un homme entre dans la boutique et d'un seul regard calme tout ce petit monde. Le pompiste s'excuse, Laura et Charly restent calme. Et tout cela car mon père est entré dans la boutique.

Je suis si stupéfaite par ce qui se passe devant moi que je regagne la voiture en oubliant mon cappuccino sur le comptoir. J'entends mon père sortir derrière moi et il parle avec Charly et Laura. Je sursaute quand j'entends mon prénom prononcé par une voix que je ne connais pas encore.

_ Catriona, c'est ça ? Me demande le motard brun avec un petit sourire.

_ Oui, répondis-je.

_ Tiens, me dit-il en me tendant ma boisson chaude.

_ Merci, répondis-je simplement

_ James, James Morgan. Je suis l'avocat du bar et du club, commence-t-il mais je ne le laisse pas terminer sa phrase, ce qui m'étonne moi-même.

_ James, quel est le travail de mon père exactement ? 

_ Tu devrais avoir cette conversation avec lui, clôture-t-il la conversation avant de retourner vers sa moto. 

Laura a raison sur un point, je ne sais pas du tout dans quoi je m'embarque. Mais une chose est certaine, je n'allais pas tarder à le découvrir.

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