A peine mon père parti, je rassemble mes affaires et mon sac à main dans lequel je cherche mon portefeuille. Une fois trouvé, je me fraie un chemin jusqu'au bar. Au bout de plusieurs minutes, j'arrive à attirer l'attention du barman. L'homme marque une pause et m'observe avant de me dire avec un sourire bienveillant. 

_ C'est bon, c'est pour moi.

_ Merci mais je peux payer, répondis-je avec politesse.

_ Non ça va, reprend-t-il. Ton père sait que tu rentres ? Me demande-t-il avec un petit sourire en coin.

_ Oui, il le sait. Vous êtes ? Finis-je par demander commençant à être agacée que tout le monde semble me connaître.

_ Jeffrey, et toi c'est Catriona, reprend-t-il comme nostalgique quand il prononce mon prénom.

_ Oui, dis-je en baissant les yeux. Apparemment tout le monde me connait, terminais-je mal à l'aise d'être le centre d'attention, ce que je déteste depuis toujours. Sentant mon trouble, Jeffrey reprend avec beaucoup de douceur et de bienveillance.

_ Ne t'en fais pas, tu seras bientôt comme un poisson dans l'eau ici. Et puis tu ne seras pas toujours la petite nouvelle. C'est idiot mais cette gentillesse et cette réplique me rappellent ma mère, et me font légèrement sourire. 

_ Merci Jeffrey. Passez une bonne fin de soirée, dis-je avant de sortir du bar.

Il fait déjà nuit dehors. L'air est plus vif qu'à Los Angeles à la même période. Instinctivement je croise les bras sur ma poitrine pour me réchauffer quelque peu. A part le néon du bar, il n'y a que très peu  d'éclairage sur le parking. J'inspire un bon coup et me dis que je ne risque rien étant garée tout près. Et puis, je me dis que c'est normal d'être mal à l'aise. Je suis dans une nouvelle ville et je dois tout reprendre à zéro. Après avoir fait, quelques pas dans la pénombre, je sors les clés de mon sac et déverrouille ma voiture à distance. 

_ Mauvaise idée, dit une voix rauque dans mon dos. 

Je sursaute car je pensais être seule. Tout de suite les battements de mon cœur s'accélèrent mais je me dis que cet homme est probablement un des clients du bar. 

_ Pardon ? Demandais-je d'une voix légèrement tremblante alors que j'aurai voulu être sûre de moi.

L'homme ne me répond pas mais je sens qu'il se déplace sur le côté et qu'il reste en arrière sur la gauche. Ne voulant rien laisser paraître de mon malaise, je rassemble mon courage et me retourne vivement pour faire face à mon interlocuteur, qui n'attend pas que je sois retournée pour reprendre.

_ J'ai dit mauvaise idée. Tu vas devoir apprendre à être plus prudente, termine-t-il en faisant deux pas pour se retrouver à seulement quelques centimètres de moi.

Quand je lève la tête pour croiser son regard, je me retrouve face à cet homme, Declan O'Riordan. Face à lui, je me sens petite, parce qu'il doit faire deux bonne tête de plus que moi, mais pas que. Je suis aussi très intimidée, et je déteste cette sensation. Et ce qui m'agace au plus au point, c'est que mon malaise semble l'amuser. Ajoutez à cela que je commence à rougir, je me dis que question crédibilité, on a vu mieux. 

Je me ressaisis en me disant que je dois me faire des idées. Ce genre d'homme ne peut pas être intéressé par une fille comme moi. Seules des filles comme Naomi peuvent attirer ce genre de type. Et j'avoue que je suis totalement l'opposé. Je prends sur moi, et relève la tête pour le regarder droit dans les yeux et lui montrer que quoiqu'il en pense, il ne m'impressionne pas le moins du monde. Pourtant je marque un temps d'arrêt quand mon regard percute le sien. Ses yeux ont quelque chose d'hypnotique. Je déglutis avant de reprendre.

_ Et qu'est-ce qui est une mauvaise idée ? réussis-je à articuler en reprenant un peu d'aplomb.

Surpris par ma question, il ne doit pas avoir l'habitude qu'on lui réponde. Mais après tout, je ne vois pas pourquoi je ne le ferai pas. Face à ma réaction, son visage se ferme encore un peu plus, puis il reprend avec sa voix rauque.

_ De te balader seule, la nuit, sur un parking mal éclairé que tu connais pas.

J'ouvre la bouche pour lui répondre espérant avoir une répartie bien cinglante qui le remettrait à sa place mais . . . rien, rien ne vient. Ce qui semble amuser mon interlocuteur quand je vois un fin sourire étiré ses lèvres.

_ Monte dans ta voiture, je te ramène, dit-il simplement en m'invitant à poursuivre mon chemin jusqu'à la mini.

Je voudrais lui répondre que c'est bon, que je suis capable de rentrer seule. Mais rien ne sort de ma bouche. Je suis incapable de l'envoyer voir ailleurs lui disant que je suis assez grande pour me débrouiller toute seule. Pourtant pendant un bref instant, la vision de ce colosse dans ma petite voiture m'arracherait presque un sourire mais je n'y arrive pas tant il me rend nerveuse.

Arrivée devant la mini, je me rends compte que mon chaperon ne me suit plus mais reste en arrière.

_ Vous ne montez pas ? Lui demandais-je. Voyant qu'il ne répond pas, je répète ma question. Et là il ne rit pas non, il explose de rire alors que ses yeux restent glacials.

_ Hors de question. Je te suis en moto. Je ne monte pas dans çà, monte dans ta voiture et verrouille tes portières, j'arrive, termine-t-il en se dirigeant vers le garage à l'arrière du bar.

Sans un mot de plus, je monte dans ma voiture en bouillant d'être considérée comme une gamine. En fermant les portes de ma voiture et une fois installée, je me dis que Declan O'Riordan est sans nul doute la personne la plus détestable au monde. Du coup lui et Naomi vont très très bien ensemble.

N'étant pas plus bête qu'une autre, je démarre la voiture et enclenche le GPS. Je vais dans les favoris et remercie mon père d'avoir pré enregistré l'adresse de la maison. Décidément il avait pensé à tout. Je démarre et m'engage sans vérifier si Declan me suit. Je souris dans ma voiture quand j'arrive en ville. Je me dis que Declan est resté sur le parking quand j'entends le vrombissement caractéristique de son engin. Je continue mon chemin comme si de rien n'était mais c'est difficile de ne pas voir ses appels de phares. Arrivée devant le garage, j'active ma télécommande et entre pour garer ma voiture sans me soucier de mon chaperon. Comme quoi je pouvais très bien rentrer toute seule.

Je ferme ma voiture, ainsi que la porte du garage. Ensuite, je regarde si l'alarme est bien réactivée. Une fois certaine d'être seule et en sécurité dans la maison, je quitte le garage pour regagner ma chambre et prendre une bonne douche.

Je pousse un cri de surprise quand je passe la porte et que je me retrouve face à Declan, bras croisés sur la poitrine et un regard noir à vous tuer sur place si vous le regarder plus trois secondes dans les yeux. Lui comme moi ne prononçons pas un mot, mais il est très clairement en colère. On dirait un volcan sur le point d'exploser et pour être honnête j'ai pas franchement envie de voir ce que cela peut donner. 

Je prends le peu de courage et de dignité qu'il me reste juste après avoir crier, et le contourne sans une parole avant de monter les escaliers. Arrivée dans ma chambre, je jette mon sac sur le bureau et récupère un pantalon de jogging marine, un tee-shirt blanc ainsi que des sous vêtements propres avant de filer dans la salle de bain. Une fois sous la douche je profite pleinement de l'eau pour me détendre. Ce Declan a le don de mettre mal à l'aise tout en m'exaspérant. J'essaie de me détendre. Je sors, m'habille en vitesse avant de filer sous la couette où je m'endors rapidement. 

Alors que je suis sur ma moto, prêt à filer chez Naomi pour finir la soirée de façon agréable mon portable vibre. A cette heure si, je sais déjà sans même regarder que je peux dire adieu à ma soirée détente. Gagné, c'est un message d'Alvaro qui veut me voir au garage tout de suite. Je relève la tête et voit Naomi en train de bouder. Elle sait que quoiqu'il se passe, le club est ma priorité numéro un. Pour une fois, elle a la délicatesse de ne rien dire. Elle m'embrasse sauvagement avant de me susurrer à l'oreille.

_ Si tu finis pas trop tard, n'hésite pas à passer, puis elle fait demi tour et regagne sa voiture en se déhanchant plus que nécessaire.

Je fais rapidement le tour et me gare sur le côté du bâtiment. Alvaro arrive à ma rencontre.

_ Bon je vais pas y aller par quatre chemins, tu vas pas aimer, commence-t-il. Il va falloir jouer les baby-sitters avec Catriona. Jake trouve qu'Andrew est un bon gars mais pas assez aguerri en cas de problème.

J'accuse le coup, parce que normalement c'est pas dans mes attributions mais en même temps il s'agit de la fille du boss donc je pose pas de questions et fais ce qu'on me dit.

_ D'accord. Combien de temps ? Demandais-je curieux de savoir combien de temps aller durer la corvée.

Alvaro passe la main sur sa nuque puis il reprend.

_ Le temps que la p'tite comprenne qu'elle doit faire attention et qu'elle ait les bons réflexes.

_ Espérons qu'elle comprenne vite, répondis-je simplement.

Ma remarque fait rire Alvaro, mais il regagne vite son sérieux avant de m'interpeller à nouveau. 

_ Quand Jake sera rentré, tu pourras repasser au club. J'aurai besoin de toi pour une visite de courtoisie, termine-t-il avec un sourire en coin. 

_ Pas de problème, un peu d'action pour finir la soirée ça me plait ça, dis-je en regagnant le parking à pied.

A peine suis-je sur le coin du bâtiment que je vois la gamine sortir du bar. Je reste dans l'ombre pour voir comment elle se comporte et ce qu'il va falloir lui apprendre pour qu'elle se débrouille seule. Et c'est exactement ce à quoi je m'attendais. Elle fait attention à rien, n'a pas garé sa voiture sur une place éclairée. Bref c'est une proie facile. En tout cas va falloir qu'elle se dégourdisse rapidement car je déteste jouer les chaperons. Le point positif, c'est qu'elle a l'air malléable, le point négatif, elle me semble un peu trop fragile. 

Alors que je l'interpelle sur le parking, je vois qu'elle essaie de garder une certaine constance ce qui m'amuse.  Je décide de jouer un peu pour voir à qui j'ai à faire. Alors que je suis persuadé qu'elle va m'attendre bien sagement avant de rentrer chez elle, elle me surprend en quittant le parking avant mon retour. Je rage qu'elle ne m'ait pas écouté mais en même cela m'amuse un peu. Après tout c'est pas la fille de Jake pour rien.