Chapitre 08: La retenue
Enzo toqua à la porte de la salle de classe de Madame Guérin. Celle-ci lui accorda d'ouvrir la porte. Enzo le fit. Il regarda l'enseignante en déglutissant et s'ébouriffa les cheveux. Célestine passa une de ses mains dans ses longs cheveux noirs et lui sourit avec un sourire forcée. Les étudiants regardaient avec intriguassions Enzo qui se triturait les doigts derrière son dos.
— Bonjour Monsieur Levalier, vous êtes venus pour votre retenue ? demanda l'enseignante, l'humiliant.
Il hocha la tête. La professeure sourit et se leva. Elle passa à côté de son bureau et arpenta les allées des étudiants. Elle fixa Enzo d'un œil mauvais et releva la tête pour amplifier son autorité sur l'étudiant. Celui-ci baissa immédiatement la tête vers le sol, mal à l'aise.
— Suivez-moi. *Se tourne vers ses étudiants* Restez à votre place et travaillez la pièce de Beethoven en attendant mon retour.
Suivant précipitamment la prof de musique qui avait quitté la classe sans un mot de plus à son égard. Il suivit tant bien que mal sa rapidité à marcher. Ses talons retentissaient contre les parois et claquaient le sol frénétiquement. Ses cheveux bouclés tombaient en cascade derrière son dos, s'arrêtant à mi-dos. Deux grosses touffes de cheveux comme des couettes ornaient le devant, rebondissant sur sa poitrine volumineuse à chacun de ses pas, comme pour s'aguicher autour des hommes. Sa jupe blanche serrée lui collait ses fesses et les rendaient plus attirante, plus fermes, plus sexy.
Enzo déglutit à cette vue et détourna rapidement le regard. Les mains moites, il faillit se cogner contre le dos de sa prof lorsque celle-ci s'arrêta brusquement devant une porte et une salle un peu isolée des autres. Enzo se courba sur le côté pour mieux apercevoir la salle qu'il allait squatter pendant une bonne heure. Intrigué, il haussa les sourcils tandis que la prof ouvrit la salle où une odeur nauséabonde de renfermée parvint au nez d'Enzo.
— C'est la salle de rangement de la salle de Musique. Elle n'a pas été nettoyée depuis belles lurettes. Je demandais au concierge de t'amener les outils nécessaires pendant que tu te familiariseras avec la salle, déclara l'enseignante par sa question muette.
— Qu'est-ce que je dois faire exactement ? demanda Enzo.
— Je viens de le dire. Tu n'écoutes pas ce que l'on te dit ? Je vois que tu es bien plus qu'un étudiant turbulent, Enzo. Tu es aussi sourd qu'un rat mort.
Enzo s'offusqua de cette insulte. Il nargua Célestine qui releva son menton pour le toiser de son regard froid.
— Ne me regarde pas comme, sinon je t'accorderais plus de temps avec ton nouvel ami, la salle de rangement, menaça-t-elle.
Enzo déglutit et baissa le regard. Il était impuissant face à cette enseignante qui lui semblait dangereuse sur tout les points et dans tous les sens du terme. Enzo finit par rentrer dans la salle de rangement qui puait le renfermé et il amena sa main droite à son nez qui se plissait face à l'odeur. Le sol était rempli de papier de partition de musique, tous aussi vieux les uns que les autres. Il toussota face à la poussière qui voltigeait autour de lui. Les meubles étaient poussiéreux et à chaque mouvement d'objet qu'il changea de place, une énorme voler de poussière tournoya autour de lui, le narguant et l'étouffant.
— P-Professeur, ça va prendre du temps à ranger tout ça ! Je vais manquer mon cours de latin ! s'indigna-t-il en se retournant.
Mais l'enseignante était déjà partie. Il souffla. Il regarda autour de lui. Une grande fenêtre en vitraux ornait le mur du fond, partant en pique tandis que les dessins partaient en carreaux pour se joindre dans une rosace. Les verres étaient structurés parfois unis, plongeant dans les tons bleus, rouges, jaunes, verts, noirs et blancs. Un homme agenouillé jouant de la harpe y était représenté. Une femme se tenait devant lui, courbé et dansant au rythme de la musique invisible. Des oiseaux tournoyaient autour d'eux et un arbre aux pommes d'or ornait le jardin verdoyant qui les entouraient. Quelques tulipes et marguerite ou des jonquilles frémissaient dans un vent invisible. La lumière de l'extérieur passait à travers ce vitrail resplendissant et le rendait plus vivant puisque les personnages se reflétaient à travers la pièce.
Un toussotement le fit se retourner, coupant court à sa contemplation admiratif face à ce tableau. Il avait tout le temps de l'observer plus tard. Il regarda un homme vieilli et courbé. Les cheveux grisonnant et coupé court, tombant difficilement sur ses épaules frêles. Une tunique turquoise couvrait son corps endolori par la vieillesse. Le concierge lui faisait face, tenant dans ses mains un saut, des produits surplombants les rebords du saut et un balai avec une serpillière en main. Il se rapprocha d'un pas effrayant et timide vers le concierge.
Il ne l'aimait pas et lui non plus. Il secoua la tête pour dégager ses cheveux bruns de ses yeux et prit d'une allure désinvolte les objets de nettoyage que le concierge lui accordait avec jouissance. Lui, il n'allait pas nettoyer cette pièce renfermée au moins.
— Je suis content que tu m'aides à nettoyer cette pièce, jeune homme. Avec mon vieil âge, tu comprends que je ne peux la nettoyer de fond en comble. Mais avec ta carrure et ton allure sportif, je suis sûr que tu vas faire du bon travail d'ici la fin de l'année. Amuse-toi bien avec les rats et les araignées, railla le concierge.
Enzo sursauta face à la dernière phrase du concierge. Il se retourne avec un regard méfiant et son corps rempli de tremblement. Des rats et des araignées ? Il était hors de question qu'il touche à ces bestioles qu'il déteste le plus. Juste à y penser, son corps était rempli de frissons qui lui faisait des nœud d'estomac.
Penaud et méfiant, il déposa les outils nécessaires de ménage à l'entrée. Il retroussa ses manches de sa chemise blanche et dénoua enfin sa cravate noire. Cravate qu'il finit par laisser tomber au sol et déboutonner les trois premiers boutons de sa chemise pour mieux respirer. L'air était étouffant. Appliqué à faire sa retenue non loin de midi, il commença à ramasser les partitions qui étaient éparpillé au sol. Regardant parfois, curieux comme il est, les auteurs inscrits sur le haut de la partition. Il y avait du Beethevon, Mozart, Vivaldi, Richard Wargner, Claude Debussy, Frédéric Chopin et de Jean-Baptiste Lully à son grand étonnement. De célèbres compositeurs musicales des temps anciens.
Il plaça en ordre chaque auteur avec les thèmes de leur partition, impressionné de retrouver tant d'auteur dans une seule et même salle. Au fond de la pièce, près du vitrail, il retrouva un tas de lutrin mal en point, salie par la poussière qui avait pris possession des trous des lutrins et du rebord du pupitre. Enzo regarda les grands meubles qui allaient jusqu'au plafond, collé de chaque côté du mur.
Les meubles étaient remplis d'instruments qu'il n'avait vu que de nom et d'image sur la grande toile virtuelle. Il y avait des violoncelles, des pianos, des cors, des flûtes-traversières, des trompettes, des percussions, des baguettes pour la batterie, des guitares, des basses et des clarinettes. Beaucoup d'autres instruments ornaient les trous des meubles et posés délicatement dans leur housse pour ne pas attraper la poussière.
Il ne savait pas depuis combien de temps il était dans cette salle à ranger les lutrins et à les dépoussiérer un par un. Il y en avait tellement qui avait été mis en braque dans la salle et qui n'a pas été utilisé depuis belles lurettes. Il s'épousseta le front en tenant dans sa main le torchon et le gant qu'ils tenaient pour nettoyer. Enzo tenait de sa main gauche le manche du lutrin qu'il avait acquis pour le nettoyer.
Il tourna son regard fatigué vers la seule source de lumière et se leva intriguer en entendant des exclamations de voix. Il se leva en jetant nonchalamment le torchon sur le dossier du lutrin et le gant mouillé dans le saut que le concierge avait préalablement rempli d'eau. Enzo se pencha vers le vitrail et regarda les autres étudiants jouer à l'extérieur.
Il les enviait. Eux, ils n'avaient pas à faire une retenue lancé par leur professeure de musique et seuls les étudiants savaient à quels points ses retenues étaient longues et pénibles. Enzo posa sa mâchoire sur le creux de sa main droite tandis que son bras longeait le rebord du mur.
Sa tête reposant sur le vitrail froid de l'intérieur et chauffé par le soleil à l'extérieur. Enzo soupira de lassitude et croisa le corps charnel de son prof d'histoire qu'il appréhendait. Quelque chose l'énervait dans le comportement de son prof. Comment s'appelait-il déjà ? Il n'avait pas une très bonne mémoire pour retenir les prénoms des enseignants, surtout lorsqu'ils étaient nouveaux dans l'établissement.
Ah oui ! Gaspard Venderdrake. Quel étrange prénom. Prénom mélangé à du français et à de l'anglais. Quelle intrigue. D'où venait leur professeur d'histoire ? Pourquoi était-il intervenu au beau milieu de l'année pour remplacer le précédent ?
Le précédent. Il pouffa de rire. Il a lâchement abandonné son cours à cause de lui. Il était trop turbulent, insolent et son cours ne l'intéressait aucunement. Il ne faisait que lire ses manuels sans passion et sans autorité face à ses élèves. Les élèves avaient tout les droits dans la classe. C'était un gringalet avec des lunettes et des cheveux frisés gris. Des boutons ravissant son visage déjà pâle. Toujours habillé de ses éternels costard vert qui ne lui allaient absolument pas. Ce prof-là n'avait aucun sens de la mode. Enzo était content qu'il était parti, mais moins quand il avait appris qu'il y allait avoir un nouveau prof.
Un prof qui lui tenait tête. Il détestait ça. Il tenait tête aux professeurs, mais quand les élèves se ruaient sur lui pour lui faire mal, il était une toute autre personne. Il n'avait pas le temps de riposter et de répliquer qu'il était déjà au sol, inconscient et se faisant ruer de coups par les pieds de Guidever Ramtaigne. On pouvait le signaler comme bipolaire par sa personnalité, mais il ne l'était aucunement.
Reportant son attention sur son prof d'histoire, il le vit parler au prof de Latin, Monsieur Courtney-Hash. Il tiqua lorsqu'il vit un caillou retentir sur le carreau, dans un bruit métallique qui ne le rassurait pas. Il baissa son regard et vit le groupe d'ami de Guidever, lui au centre. Il le narguait et le regardait avec un sourire méfiant. Il leva son pouce et fit un jeu qu'il put reconnaître en lisant sur les lèvres de Guidever avant de regarder sa main levé. Enfin, son index lever vers lui, signe d'un doigt-d'honneur.
Il siffla de mécontentement et croisa le regard de Gaspard avant de reculer pour juter contre le lutrin. Il tomba à la renverse, le lutrin accompagnant sa chute. Il gémit de douleur en se massant le dos. Il ramena sa main à son visage en sentant un coulis inhabituel. Il grimaça en voyant qu'il saignait.
Mauvaise journée de merde, jura-t-il entre ses doigts.
— Monsieur Levalier ! Je suis outrée de votre langage ! Pour la peine, vous allez faire une autre retenue demain soir ! Allez à votre prochain cours de l'après-midi ! Vous avez assez travaillé votre retenue ! hurla la voix jacassant de Madame Guérin.
Cette intervention le fit sursauter et grimacer par la douleur lancinante de son dos. Il se releva avec difficulté et vit le concierge ramasser les outils de nettoyage en le regardant d'un œil mauvais. Il était négligé dans cet école. Mais comment pouvait-il la quitter alors qu'il n'avait aucun droit sur les décisions de son père, sénateur du pays ? Il allait avoir de la remontrance. Il plaint déjà le prochain coup de fil avec son père. Il se redressa et tenait son bas du dos en se dirigeant vers la sorti afin de se diriger vers les dortoirs, mais une voix ferme le fit se retourner en grimaçant.
— Monsieur Levalier ?
Gaspard Venderdrake se tenait devant lui, sa mallette de cours qu'il ne quittait jamais durant la journée était dans sa main droite. Son regard le traversa et il baissa le regard, gêné. Il entendit ses pas venir vers lui et lui relever la tête en lui tenant son menton de sa main droite.
— Vous êtes blessé ? demanda-t-il en lui faisant tourner la tête de gauche à droite, le reluquant sans gêne.
Enzo rougit et balbutia.
— Suivez-moi.
Sans plus ni moins, Enzo le suivit sans rechigner.
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