6. Comme des championnes
ARY
Je poussais la porte du vestiaire des cheerleaders. Ça me rappelait l'époque des sélections. J'avais voulu m'inscrire, mais pour des problèmes de souplesse, la capitaine Riley la populaire et la coach m'avaient gentiment fait comprendre que je n'avais pas ma place dans l'équipe. C'est donc avec déception que je rentrais dans ce vestiaire dans lequel seuls les sportifs étaient autorisés à mettre les pieds.
- Commence à la mouiller, dis-je à Angel en pointant l'un des lavabos du vestiaire du bout du doigt, je vais chercher la lessive, je te rejoins
- Merci
On se sépara. J'allais à l'opposé de mon amie, à la recherche du détachant que les filles de l'équipe utilisaient souvent. Mais alors que je contournais l'un des bancs de la pièce pour le tendre à Angel, mon regard fut attiré par le « mur des récompenses ».
C'était là qu'ils affichaient toutes leurs victoires. Sur ce tableau en liège. Il y avait plein de photos épinglées avec des punaises multicolores. Beaucoup d'elles mettaient en valeur la capitaine, qui visiblement était aussi la voltigeuse du groupe. Ces filles avaient une tenue parfaite, des corps parfaits, des coiffures et maquillages parfaits. Aucun faux pas.
Je regardai juste à côté et au bout de plusieurs clous alignés un peu aléatoirement, elles y avaient suspendu une rivière de médailles toutes dorées. Au moins je pouvais être sûre que mon école était très bonne en cheerleading. Je finis par m'éloigner et tendis la bouteille que j'avais en main à Angel, qu'elle prit comme si elle recevait le Messi dans les bras.
- Tout est gâché, geint-elle
- Mais non ! Tu vas laver ta robe, commençais-je en m'asseyant sur le banc de sport derrière elle. On va aussi la sécher d'abord au sèche-cheveux puis on va la surprendra dehors par la fenêtre et elle sera sèche en un rien de temps, je te le promets. En plus elle est très fine, essayais-je de la rassurer
- Tu as raison
- Je sais, éclatais-je de rire
Elle rit avec moi en me fixant à travers le miroir au-dessus du lavabo en face d'elle.
- Et puis, je pense que Peter comprendra. Il t'a vu faire un effort ce matin, suffira de lui expliquer l'incident de ce matin
- Mais je vais tout gâcher. Je devais me faire belle
- Tu es déjà belle. Et Peter le sait mieux que quiconque
- Si tu le dis
- Non mais et puis le plus important, c'est le moment que vous passez ensemble non ? Pas vraiment ce que tu portes. S'il t'aime, et je n'en doute pas, il ne dira même rien par rapport au changement de vêtements
- J'espère, soupira t - elle
- Et puis, tout n'est pas gâché. Tu as encore ton maquillage, et aujourd'hui, il compte faire chaud, ta robe aura vite séché, fais-moi confiance
- Tu es sûre que tu es digne de confiance ? Dit-elle d'un ton qui me fit légèrement douter de son second degré
Elle baissa les yeux en versant un peu de liquide blanchâtre sur son vêtement sans me regarder.
- Je ne sais pas comment je dois prendre cette remarque, essayais-je de rire maladroitement.
Elle ne dit rien. Elle se mit simplement à frotter.
- Angel ?
- Qu'est-ce que tu as dit à Peter par rapport à hier ? Tu ne m'as parlé que de ta dispute avec Alex, mais tu ne m'as pas dit d'où venait vraiment le problème, tu sais, ce qui a fait démarrer le truc
- Qu'est-ce que Peter t'a dit ?
- Ce n'est pas important ça, j'aimerais juste que tu m'expliques
Comme je ne dis toujours rien, elle insista :
- C'est en rapport avec le fait que tu aies quitté la soirée si tôt ?
- Partiellement
- Dis-moi, m'ordonna t-elle
- Hier, je suis restée avec le groupe que tu m'as fait rencontrer, même si j'en connaissais déjà quelques, j'ai fait la rencontre de ce mec-là, Lucas. Il était sympa, on a bien parlé.
J'inspirai en déglutissant sans poursuivre. Après un cours blanc, mon amie reprit :
- Ah oui Lucas ! Je ne lui ai jamais vraiment beaucoup parlé, mais c'est vrai qu'il est assez gentil, dit-elle heureuse
- À un moment, tu t'es éclipsée et avec les autres, on a fait une multitude de jeux. D'alcool évidemment, précisais-je. J'étais alors un peu ailleurs et donc... eh bien, il a proposé de m'accompagner me reposer, parce que je n'étais vraiment plus en état
- D'accord ? Continua - t - elle sans vraiment voir là où je voulais en venir.
Ma jambe tremblait compulsivement. J'allais devenir folle. Je la fixai du regard, la suppliant de se calmer. C'était toujours ça. Les angoisses, le stress... Quand ça venait, ça envahissait chaque muscle.
- Et au moment de me laisser dormir, au lieu de partir, il s'est dit qu'on était peut-être mieux à deux
- Tu as trompé Alex ? Me coupa t-elle violemment, sincèrement apeurée
- Non ! Jamais ! Tu es folle
J'aurais presque aimé que ce soit ça.
Je ne comprenais cependant pas d'où cette idée pouvait bien lui venir. Jamais je n'aurai trompé Alex.
- Alors ?
- Dans la chambre, on était à peine rentré qu'il a commencé passé sa main sous mon t - shirt.
Elle s'arrêta alors de frotter avant de me fixer dans le reflet, puis elle se tourna vers moi :
- Quoi ?
- Oui, il a fait ça, j'ai eu du mal à le repousser même en lui disant que j'étais en couple. Puis, il a essayé de glisser sa main à travers mon short
- Pourquoi tu ne me l'a pas dit ! S'exclama t - elle choquée
Je voulais prendre de la distance avec tout ça. Je ne voulais pas en faire tout un drame, ou du moins, je voulais dramatiser toute seule. C'était ça mon rêve. Ne plus en parler et dramatiser toute seule.
- Je ne savais pas comment réagir et puis t'avais l'air d'être à fond dans ta soirée. Ce n'est pas facile d'avoir une réaction rationnelle dans ce genre de moment. Je ne veux plus en parler
- ET ALORS
Je ne dis rien
- Tu vas porter plainte quand ? Je t'accompagnerai
- Je ne vais pas porter plainte, riais-je sincèrement amusée
- Tu te moques de moi ?
- Et puis ce n'était pas si grave que ça
- Putain, mais si !
- Il était bourré et moi aussi
Je voulais me faire une idée. J'aurais dû tout faire pour dire non. Je ne savais même pas comment réagir, ni maintenant, ni hier. Mais simplement... Je ne savais pas quoi dire. C'était difficile de garder la tête sur les épaules. Ce n'était pas ma faute. C'est tout ce que j'avais à me répéter.
- Ce n'est pas une excuse, se tourna t - elle de nouveau avant de se remettre à sa tâche
Je ne savais plus trop quoi en penser. J'avais été choqué sur le moment point. Et je l'étais peut-être encore un peu mais bon.
Je ne sais pas si j'étais dans une phase de déni extrême ou si c'était juste pour moi une façon simple et efficace d'oublier.
Je me levai alors étant prise de fourmi aux hanches et entre les cuisses. J'avais les idées embuées c'était tout.
- Et donc Alex n'est pas au courant ?
- Non, il ne me répondait pas parce qu'il avait plus important à faire, j'imagine
- Il faudra que vous vous expliquiez ;
Je ne voulais pas lui en parler. Du moins, si. Je voulais lui en parler, mais je savais que ça allait conduire à une énième dispute, il allait vouloir faire quelque chose ce que je voulais éviter.
Alors même si je voulais lui en parler, j'avais quand même une partie de moi qui était hésitante.
- Merci, je n'y avais pas pensé, je lui répondis après un minute de réflexion
Elle sortit sa robe de l'eau avant de l'essorer à la main. Elle l'agita rapidement, m'envoyant quelques gouttes d'eau au visage.
- Viens, on va la suspendre par la fenêtre, dis-je en me tournant vers l'une des grandes fenêtres du vestiaire. Je voulais profiter de cette occasion pour changer de sujet
J'ouvris l'un des battants pendant qu'Angel piquait un cintre abandonné non loin d'elle. Elle finit par monter avec moi sur le banc sur lequel j'étais perchée. On passa la robe dehors, suspendue au petit objet en fer avant de la laisser pendre contre le mur à l'extérieur du lycée.
Alors qu'on se débattait pour correctement la faire tenir sans qu'elle ne se salisse en rentrant en contact avec le mur, un bruit sonore retentit nous faisant ainsi sursauter.
On manqua de lâcher la robe, mais je rattrapai celle-ci de justesse alors qu'elle faillit tomber en contrebas.
- Putain
Je venais de m'écorcher sous l'avant-bras et ça faisait un mal de chien. Mais alors que je retirai mon bras, la robe enfin accrochée, un second bruit retentit.
C'était quoi ce bordel.
Je n'eus pas la force de descendre correctement de mon perchoir, si bien que je tombai.
Que se passait-il ?
Angel se jeta à côté de moi, paniquée.
- C'est quoi cette merde, dit-elle le souffle coupé.
Pourquoi me posait-on toujours des questions auxquelles je n'avais ps de réponse.
Je me relevai en tenant mon bras ensanglanté, tout en essayant de retrouver mes esprits.
J'étais sûre que ce n'était pas une fusillade. Ce n'était pas possible.
- C'est encore ceux qui sèchent la réunion qui s'amusent avec des pétards. T'en fais pas, dis-je en lui souriant sans vraiment croire à ma théorie. Ce bruit était particulier. Il était fort, il résonnait
- J'espère, dit-elle silencieusement, mais visiblement inquiète
Le mieux cependant qui était à faire pour nous ? Je ne sais pas. Moi qui avais toujours l'habitude d'être responsable et de trouver des solutions à chaque problème, eh bien maintenant cette situation me posait une énorme colle : que faire ?
Si en ce moment, une fusillade était vraiment en train d'avoir lieu, - ce que je n'espérais vraiment pas - on devait faire quelque chose. Sortir nous permettrait peut-être de nous sauver, mais on ignorait où le tireur était. Et si on restait ici, on prenait le risque de se retrouver sur son chemin lorsqu'il déciderait de passer par les vestiaires à la recherche des derniers élèves.
On n'avait donc en conclusion, aucune solution.
Et puis on n'allait pas abandonner Alex et Peter c'étaient nos copains et amies, hors de questions de nous en aller sans eux.
Mes yeux restaient figés dans le vide... On allait mourir.
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