[PeiKonan] La Face Cachée (2013)
[[ Illustration par Rinnagi | Montage par Iekazu ]]
NOTE: Il s'agit ici d'un ancien One-Shot que j'ai écrit en 2013 sur le site fanfic-fr.
L'histoire est assez sombre et plus trop dans mon style actuel mais j'avais envie de remettre cette histoire quelque part (tout comme mes autres fanfictions encore sur le site).
Elle paraissait si timide, si fragile mais en même temps si acharnée. Chaque jour passé lui permettait de faire un pas vers l'oubli, l'oubli d'un douloureux passé. Cruelle destinée qui ne lui avait jamais laissé le moindre répit, délicate créature au cœur tendre.
La jolie Konan avait tout juste vingt ans et sortait d'une relation amoureuse plutôt épineuse. Une passion qui avait fait voler son cœur en éclats, la laissant amère et bien décidée à ne plus jamais aimer. Pourtant, après avoir récemment acquis le diplôme qui lui avait ouvert les portes d'un avenir tout nouveau, celui du travail, elle avait fait une rencontre des plus stupéfiantes.
Cet étrange individu portait le nom de Pein Ikari et malheureusement pour elle, il s'était avéré être son supérieur.
D'un calme imperturbable, jamais il ne s'intéressait à quiconque. Jamais il ne parlait ni même souriait. Il semblait ancré dans ses souvenirs ou bien tout simplement dans son travail. Jamais il ne commettait la moindre erreur tant il était minutieux. Parfois, il lui arrivait de travailler excessivement tard le soir comme si personne ne l'attendait à son retour. Personne ne savait ce qu'il pensait, s'il était en couple ou non, si même il avait des amis ou non. Les seules fois où il s'exprimait, c'était pour hurler après ses collègues lorsque le travail n'avançait pas suffisamment à son goût, ce qui était fréquent.
Son visage fin était laiteux et orné de multiples piercings – plutôt surprenant pour une personne de son grade – et ses fines lèvres presque nacrées semblaient givrées tant elles restaient immobiles. Ses cheveux roux étaient soigneusement coiffés en pics et ses grands yeux gris dénués d'expression ne laissaient jamais passer la moindre trace d'émotion. Ses doigts fins inspiraient la délicatesse et devaient probablement être d'une douceur incomparable.
Quand bien même ses yeux n'exprimaient rien, Konan semblait comme foudroyée de plein fouet au moindre regard.
Quand bien même sa voix était morose et monocorde, elle lui semblait grave et lourde en secrets.
Je m'étais fait une promesse, celle de ne plus aimer et voilà qu'à ce jour, mon cœur s'anime de nouveau et saigne une nouvelle fois pour rien.
Déchirante passion qui débouchait sur une impasse inévitable, la charmante Fubiwa s'était déjà résolue à accepter que cet amour ne soit jamais réciproque. Car elle n'était pas dupe, un être aussi froid ne pouvait s'attendrir, il ne faisait même pas l'effort de sympathiser avec son entourage.
Cependant, malgré sa différence évidente, personne n'osait critiquer cet individu car tous savaient que le seul sentiment qu'il laissait évacuer était la colère. Ses iris ternes s'animaient dans son éclat de fureur et brillaient alors de mille feux.
Konan n'éprouvait pas cette folle affection délirante qui avait don de mettre les jeunes femmes dans un état second. Non, elle se sentait attirée mais quelque part, elle sentait que cet individu était différent, étrange et que très probablement, il renfermait une histoire peu enviable. Cependant, la jeune fille ne pouvait nier le fait que le jeune homme était attirant.
Dans sa contemplation pensive, la bleue ne remarqua pas que le concerné avait posé les yeux sur elle, la fixant intensément comme s'il allait exploser. Pourquoi le regardait-elle ? Après quelques temps à se fixer dans le vague, Konan se sentit observée, transpercée par les iris argentés du rouquin qui la défiait. Le cœur battant à la chamade, son joli teint s'empourpra et son attention tenta de se porter sur un objet posé sur son bureau.
« Un problème, Fubiwa ? lâcha-t-il froidement.
— Aucun, s'empressa de répondre la jeune fille en rougissant davantage.
— Alors continue ton travail au lieu de rêvasser. »
Rêvasser ? Etait-ce donc ce qu'elle faisait quelques instants plus tôt ? Le teint opalin du taciturne avait légèrement rosi sous l'effet de la froide colère qui l'envahissait. Pourquoi se fâchait-il pour si peu ? Se sentait-il irrésistible à ce point ?
Enviable, très certainement mais irrésistible, sûrement pas.
Ton visage n'est qu'un leurre, abject appât pour m'attirer dans l'infâme piège tourmenté de ton cœur. Tout me semble dérisoire lorsque j'y songe mais je ne peux m'empêcher que de me sentir envoûtée par les perles nacrées si sombres de tes yeux. Ton attitude me dépasse bien autant que ton égo démesuré. Jamais l'once d'un sourire ne brille sur ce minois, jamais l'infime espoir d'y lire quelque bonheur ne s'y présente. Qu'attends-tu des gens autour de toi ? Qu'espères-tu en rejetant les autres de cette manière si glaciale ?
Consultant sa montre, Konan remarqua qu'il était temps pour elle de se retirer. Après avoir rangé toutes ses affaires dans son petit sac à dos indigo, elle salua ses collègues après avoir jeté un bref regard à l'asocial qui ne broncha pas.
Plus tard, dans la soirée, la bleue se prépara pour aller retrouver sa meilleure amie dans un petit bar de quartier qu'elles avaient pour habitude de fréquenter chaque semaine. L'endroit semblait plutôt cosy et chic, le patron ainsi que les serveuses étaient tout aussi agréables et saluaient les deux amies comme de vieilles connaissances. Il fallait dire que lors de leurs études en école supérieure, les deux jeunes femmes avaient travaillé quelques temps à cet endroit afin de financer leurs cours et leur logement.
« Bonsoir Konan ! lâcha le patron avec un grand sourire. Je suppose qu'Aya devrait bientôt nous rejoindre ? C'est moi qui offre, qu'est-ce que je te sers ? »
Dans un sourire timide, la jolie Fubiwa s'installa au bar et commanda un cocktail sans alcool et discuta avec une serveuse en attendant l'arrivée de son amie. Le patron, un grand homme d'une trentaine d'années dont les longs cheveux blonds étaient noués dans le dos par un élastique, s'installa à proximité et demanda quelques nouvelles à son ancienne employée.
« Et toujours sous les ordres de ce chef impitoyable ? demanda-t-il avec intérêt.
— Hum... Il est vraiment odieux avec tout le monde. Je me demande s'il existe une personne dans ce monde sur qui il n'a jamais crié.
— Moi je pense qu'un type comme lui ne mérite pas un tel poste. Tout le monde le déteste ! s'exclama la serveuse blonde avec qui les deux amis discutaient. Aussi canon qu'il puisse être, il devrait être enfermé quelque part, loin de la population !
— Canon... répéta Konan peu convaincue. Il est pas mal mais vu son amabilité, je peux te garantir qu'il n'attire personne...
— J'aimerais bien voir sa tronche, rien qu'une fois ! s'exclama la serveuse en riant. Il est peut-être tout simplement timide mais en vérité, c'est peut-être une vraie bête au lit !
— No... Ikari-san ? » s'exclama alors la Fubiwa en regardant l'entrée d'un air ébahi.
Devant la porte vitrée se tenait l'imposant Pein Ikari, emmailloté dans son immense manteau couleur encre. La faible luminosité lui donnait une allure presque fantomatique et sa colère se lisait très facilement dans son regard tranchant. Sa bouche était légèrement entrouverte, découvrant partiellement ses dents blanches parfaitement alignées. Ses cheveux flamboyants étaient légèrement aplatis et dégoulinaient d'eau de pluie jusque sur son visage. Il avait le souffle court, comme s'il venait d'entamer une course effrénée à travers toute la ville. Etait-ce dû à ce qu'il venait d'entendre ?
Konan déglutit avec difficulté et le désarroi put se lire facilement dans ses yeux noisette. Ses lèvres remuaient sans que ses cordes vocales ne puissent émettre le moindre son, comme si elles étaient pétrifiées par la terreur que son supérieur lui inspirait. Qu'allait-il faire ? Comment réagirait-il ?
Contre toute attente, le taciturne se détourna d'elle puis s'empressa de prendre la sortie puis, après avoir hésité sur quelle direction il devait prendre, se mit à courir. Sans la moindre hésitation et le cœur serré par l'inquiétude, la bleue le poursuivit.
Pourquoi ? Elle n'en avait pas la moindre idée mais son instinct l'avait poussée à agir ainsi. Quand bien même ce garçon était un tyran, elle l'avait blessé et c'était une chose qu'elle détestait faire. Ikari ne le méritait pas alors elle devait s'excuser.
Visiblement, il n'avait pas vu qu'elle l'avait suivi puisqu'il s'arrêta dans une petite impasse pour reprendre son souffle. Tandis que la Fubiwa s'apprêtait à venir lui parler, une ombre se dessina dans le fond de la ruelle et fit sursauter Pein qui recula vivement.
« Alors comme ça on se retrouve, Pein ? lâcha l'individu d'une voix menaçante en attrapant le rouquin par le col.
— Qu'est-ce que tu fais ici ? » s'écria le taciturne avec anxiété.
Alors que Konan s'apprêtait à reculer pour se cacher, une puissante poigne se posa sur son épaule et la poussa vers l'avant, en vue de l'Ikari et de son agresseur. La jeune fille tremblait de tous ses membres tant elle était effrayée et son cœur semblait être sur le point de défaillir tant il martelait sa poitrine. Affolée, elle n'osa pas regarder le rouquin qui resta bouche-bée en la voyant là.
« Bordel ! tonna-t-il. Pourquoi m'as-tu suivie ?
— Je vois, lâcha l'assaillant dans l'ombre. Vous ne semblez pas inconnus... C'est ta petite amie ? Dis-le nous rapidement, je jouerais bien un peu avec elle...
— Putain ! jura Pein avec colère. Cette idiote n'est qu'une collègue de boulot, rien de plus. Je me fiche bien de ce que vous pouvez lui faire ! »
L'homme encore caché s'avança sous le lampadaire, affichant son visage au grand jour. Dans sa main, un poignard se mit à luire la lumière. Ses cheveux gris étaient plaqués contre son crâne et coiffés vers l'arrière de sa tête et son air mauvais étincelait, plaqué sur cet odieux sourire éclatant qu'il osait afficher.
Désemparée, Konan eut le sentiment qu'elle allait passer un mauvais quart d'heure. Pourquoi s'était-elle obstinée à suivre cet idiot qui se fichait éperdument de son sort ? Visiblement, il aurait volontiers laissé cette proie aux mains de ses ennemis afin de pouvoir fuir librement.
L'homme qui maintenait de force Konan la força à regarder dans sa direction : ses yeux étaient d'un vert électrique et une sorte de cagoule beige masquait une grande partie de son visage. Ses pupilles inspiraient la cruauté, le mal à proprement parler. Tandis qu'il émettait un ricanement rauque, il passa son doigt le long du visage de la bleue.
« Tu sais Hidan, une petite nénette comme ça, elle pourrait nous rapporter gros, expliqua l'homme avec intérêt, les yeux pétillants. T'en penses quoi, Ikari ? Les hommes se l'arracheraient...
— Je t'ai dit que tu en faisais ce que tu voulais, je m'en fiche ! bougonna Pein en baissant les yeux.
— Kakuzu, ma priorité de ce soir, c'est Ikari, pas une petite idiote de ce genre. Relâche-la.
— Mais Hidan ! Elle va nous dénoncer ! Il faut au moins la faire taire !
— Pas de mais. Si tu es suffisamment intelligente, tu devrais savoir que j'ai suffisamment d'informations à ton sujet pour te retrouver et t'écraser si tu parles de nous à quiconque, c'est bien compris ma jolie ? »
Lâchant un hoquet de frayeur, Konan plaqua sa main sur la bouche. Elle hocha fébrilement la tête, tremblante comme une feuille puis se recula légèrement tout en fixant Pein avec terreur. Ce dernier reçut un premier coup au visage, puis un second, puis d'autres encore... Le sang se répandit alors sur le béton humide, se mêlant à la flaque d'eau la plus proche dans une couleur rosée.
Konan était pétrifiée sur place et malgré les injonctions du prénommé Kakuzu, elle ne put esquisser le moindre mouvement. Ses jambes étaient engouées et son estomac noué. Elle ne pouvait laisser un tel acte se dérouler sous ses yeux horrifiés.
Pein souffrait, chaque coup lui arrachait un cri de douleur et désormais, il gisait à terre, le corps recouvert d'hématomes. Lorsqu'il leva les yeux vers Konan, des larmes luisantes et brûlantes ruisselèrent sur ses joues crasseuses.
Prise d'un haut-le-cœur, une vague de fureur l'envahit, lui offrant une puissante poussée d'adrénaline. Elle ne savait pas si ce qu'elle s'apprêtait à faire était raisonnable mais ça valait le coup d'essayer.
Ses sourcils se froncèrent puis, dans un violent coup de pied, elle renversa Kakuzu qui ne s'attendait pas le moins du monde à une telle manœuvre de la part de la chétive Konan. Bien que surpris, le rouquin en profita pour se relever d'un bond et se jeta sur Hidan. Fou de rage, Kakuzu se releva et voulu se jeter sur Konan mais cette dernière l'intercepta avec un couvercle métallique de poubelle. Voyant la situation s'aggraver, Pein attrapa Konan par le bras et l'entraîna à travers les petites ruelles sombres.
« Tu es malade ! s'écria l'Ikari avec rage. Est-ce que tu te rends compte de ce que tu as fait ? Il fallait fuir lorsqu'ils te l'ont dit ! Maintenant, tu ne réalises pas dans quel pétrin tu viens de te mettre ! Idiote !
— C'est bon ? ronchonna Konan en plaquant un linge humide sur le visage de son supérieur. Tu as fini de râler ? Alors maintenant, laisse-moi te soigner. »
Sans même s'en rendre compte, la Fubiwa s'était mise à tutoyer Pein, le réprimandant comme s'il avait s'agit là d'un enfant. Alors qu'ils fuyaient, ils s'étaient retrouvés vers l'immeuble dans lequel vivait Konan et la jeune fille l'avait donc forcé à la suivre, malgré sa réticence.
« Tu sais, je ne t'aurais pas protégée si Kakuzu s'en était pris à toi !
— Je le sais, se contenta de répondre le bleue en tamponnant un coton imbibé sur le visage du rouquin qui grimaça.
— Alors pourquoi m'as-tu aidé ?
— Parce que même si nous ne sommes pas amis, je ne vous aurais jamais laissé dans une telle situation. Nous sommes différents, voilà tout.
— Tu ne sais pas à qui tu as affaire, bougonna Pein. C'est risqué de m'emmener ici, chez toi ! Et cesse donc de me tutoyer, ça m'agace !
— Hum... Je vois que tu es surtout un roquet et que tu ne rouspètes plus que tu n'agis.
— Tu ne sais même pas ce que tu dis, un instant tu me tutoies, le suivant tu me vouvoies ! ricana l'Ikari en la repoussant une nouvelle fois.
— Tu ne mérites pas le respect que j'ai eu pour toi jusqu'à aujourd'hui, lâcha Konan froidement.
— Ben tiens ! Parlons-en du respect ! s'enflamma l'asocial. C'est plaisant de me cracher sur le dos devant tes amis en dehors du travail ?
— Je ne dis que la vérité : tu n'es qu'un sale asocial à l'égo démesuré qui prend son pied en s'en prenant à ses collègues. Tu n'es qu'un tyran, un vrai sale con.
— Tu sais que tu t'adresses à ton chef, là ? aboya Pein.
— Tu voulais savoir ce qui se disait sur toi dans l'entreprise, c'est chose faite. Je te respecte autant que toi tu ne me respectes. Je te rappelle qu'il y a encore quelques instants, tu étais prêt à me vendre à tes ennemis pour avoir la vie sauve. Une belle preuve de courage, ma parole !
— Hum... Et tu ne m'interroges pas sur ce que me veulent ces individus ?
— Non, répondit simplement Konan. Je me fiche bien de tes problèmes. Ce n'est pas à moi de les régler. Si tu veux appeler ta famille pour les prévenir, je t'en prie, utilise le combiné derrière toi, je vais te chercher de quoi te sécher.
— T'es amoureuse de moi, pas vrai ? l'interpella-t-il avec un sourire narquois.
— Tu ne mérites même pas qu'on s'intéresse à toi, lâcha la bleue tout en cherchant un linge dans la commode à l'autre bout de la pièce.
— Alors pourquoi est-ce que tu rougis ? Pourquoi est-ce que tu ne me regardes pas ? »
Pour toute réponse, la Fubiwa lui jeta une serviette propre au visage et s'éclipsa dans la salle de bain attenante au salon. Elle n'en sortit que dix minutes plus tard, le téléphone à l'oreille et rassurant l'amie qu'elle devait retrouver ce soir-là. Après avoir jeté un regard noir à Pein, elle raccrocha puis coupa le téléviseur que son invité s'était permis d'allumer.
« Ca ne t'ennuie pas si je reste ici ce soir ?
— Fais comme tu veux mais interdit de venir dans ma chambre sinon tu risques de le regretter.
— Où est-ce que je peux dormir ?
— Tu es assis sur ton lit. »
Baissant les yeux vers le canapé d'angle, il soupira légèrement puis attrapa un coussin et s'installa dans une position confortable. Tandis qu'il commençait à somnoler, un nouvel objet vint percuter son crâne : une couverture.
« Pas besoin qu'en prime, tu me files des microbes. Bonne nuit. »
Sans même que Pein ne puisse répondre, la porte de la chambre sur sa gauche était déjà fermée et verrouillée à double tour. Cette réaction fit sourire le jeune homme qui resta fixé un instant sur la barrière qui le séparait de cette étrange fille.
Elle était si différente...
Visiblement pas très fatigué, le taciturne examina les environs malgré l'obscurité. L'intérieur était moderne. De l'autre côté du canapé d'angle, le salon débouchait sur une cuisine équipée design. Une corbeille de fruit décorait le bar, couvrant un e infime partie de l'imposant réfrigérateur américain. Quelques plantes exotiques étaient dispersées dans toutes les pièces. A côté de la cuisine, un mur le séparait de la chambre de Konan, petit espace d'intimité qui lui était interdit. Et dans l'angle suivant, le portail qui le séparait d'elle puis la porte de la salle de bain ? Face à lui, la porte d'entrée puis le téléviseur et une petite table basse en verre, lui renvoyant l'image détraquée de son portrait et finalement, à sa droite, une grande baie vitrée voilée de fins rideaux blancs et donnant sur une jolie terrasse fleurie offrant une vue imprenable sur le lever du jour rongeant le sommet des immeubles de ses rayons.
Le lieu inspirait la sérénité, cette même quiétude qui se lisait sur le joli minois de son hôte. Il la savait belle, aussi éclatante que le soleil mais affreusement déterminée, butée et il ne supportait pas ça. D'ailleurs, il n'existait personne dans ce monde qu'il puisse supporter. Pas pour le moment en tout cas et ce n'était pas cette idiote qui le ferait changer d'avis.
Une idiote qui avait risqué sa vie pour lui.
Alors, le sourire aux lèvres en resongeant à la mine boudeuse de son hôte, le taciturne sombra dans un profond sommeil, bercé par la réconfortante présence de ce petit être si combattif...
Le lendemain, le réveil fut beaucoup moins agréable. Le taciturne reçut un coussin en plein visage tandis que Konan l'ignorait complètement. Déjà douchée, elle était en train de prendre un petit déjeuner composé d'un bol de céréales, un thé et une pomme.
Encore endormi, Pein se leva puis s'installa à la petite table ronde métallique qui occupait le centre de la cuisine. Il attrapa un croissant puis le dévora tout en buvant un grand verre de jus d'orange qu'il avait trouvé dans le réfrigérateur.
Konan ne lui adressait pas la parole et évitait soigneusement de croiser son regard. Cette attitude eut tôt fait d'agacer le rouquin qui s'agita sur sa chaise.
« Tu m'ignores ? ronchonna-t-il en la fixant intensément. Bien, fais comme bon te semble et...
— En fait, j'aimerais juste que tu enfiles des vêtements, dit-elle en rougissant légèrement.
— Boarf ! bougonna-t-il. Tu vas pas me dire que ça te choque de voir un homme en caleçon à ta table ? A moins que... Hum, ok. »
Non, ce n'était pas le premier homme qui venait dormir chez elle. Elle avait déjà eu des petits amis par le passé mais à chaque fois, la situation était différente de l'actuelle : Pein et elle ne sortaient pas ensemble et le fait de voir son supérieur ainsi dénudé la gênait terriblement. Surtout lorsqu'elle se rendit compte à quel point son corps était parfait en tout point. Une peau lisse et pâle qui devait être si douce au toucher, un corps digne d'Apollon et une aura qui ressortait du lot : tout en lui était désirable. Une inaccessible perfection qui le rendait encore davantage attrayant.
« Tu ferais bien de prévenir ta famille, ils doivent se faire un sang d'encre pour toi, suggéra la bleue sans le moindre enthousiasme.
— Bien tenté ma jolie, s'esclaffa l'asocial. Les femmes font vraiment preuve de subtilité de nos jours pour arriver à leurs fins...
— Mais qu'est-ce que tu racontes ? s'exclama Konan en s'empourprant.
— Bien joué ! continua le jeune homme tout en épluchant une clémentine. Je n'ai ni femme, ni enfants. Je vis seul et personne à qui m'accrocher. Pas même l'ombre d'une prétendante... A moins que tu n'acceptes de venir dîner avec moi ce soir... ajouta-t-il en souriant.
— Tu peux toujours rêver...
— Tu ne résisteras pas longtemps, crois-moi ! Bon, je vais prendre ma douche ! »
Pas même un remerciement ni la moindre explication. Konan était désormais furieuse après son supérieur qui s'était replongé dans son état effroyable habituel lorsqu'ils avaient quitté l'appartement. Dire qu'à peine une heure plus tôt, cette enflure avait osé lui faire des avances !
La journée se déroula dans la même routine que les jours précédents. L'Ikari passait son temps soit au téléphone, soit à crier sur les autres employés lorsqu'ils ne se pliaient pas à ses quatre volontés. Konan garda le silence, ignorant l'asocial comme s'il n'avait jamais existé, ce qui avait don de le mettre hors de lui.
« Fubiwa ! hurla-t-il. Je t'avais demandé ce rapport pour aujourd'hui ! Pourquoi n'est-il pas encore sur mon bureau ?
— Parce qu'il l'est, juste sous le paquet de feuilles que tu as posé il y a cinq minutes... lâcha-t-elle sans même le regarder.
— Regarde-moi quand je te parle ! Je n'aime pas les gens sournois !
— Et moi je ne supporte pas les colériques dans ton genre, pourtant je fais avec. Maintenant, ajouta-t-elle en le fixant, si tu le permets, j'aimerais pouvoir aller en réunion, merci.
— Un tel comportement peut te coûter très cher, tu en es consciente ? »
Alors que la jeune fille faisait mine de quitter la pièce, un lourd silence tomba. Tout le monde regardait la scène d'un air ahuri, chacun se demandant comment la petite timide du service avait pu se dresser ainsi contre lui alors que personne ne l'avait fait auparavant. Konan, bien qu'exaspérée, afficha une mine neutre tout en se détournant vers son chef qui ricanait désormais.
« Tu viens de manquer de respect à l'un de tes supérieurs. Tu pourrais très bien être mise à la porte pour ça. Ce serait dommage de devoir rendre les clés de ce si beau logement que tu possèdes, pas vrai ? »
La bleue fulminait désormais. Elle savait très bien que Pein la provoquait pour lui faire payer son refus concernant cette invitation à dîner. Son teint blême vira au rouge au niveau de ses pommettes, trahissant sa fureur. Les poings serrés au point de planter ses ongles dans la chair, elle prit la direction de la sortie sans mot dire.
Ils allaient tous penser qu'elle entretenait une liaison avec lui, cet enfoiré allait détruire sa réputation et la faire mettre à la porte. Déjà très gênée dans ses relations à cause de sa grande timidité, cette fois, elle n'oserait plus adresser la parole à quiconque sans craindre ce que cette personne penserait d'elle à cet instant.
Enflure !
Le soir suivant, Konan s'empressa de quitter son travail, profitant d'un moment d'absence de Pein. Elle s'engouffra dans la rue qui la menait jusqu'à la gare tout en consultant sa montre : encore une fois, elle ne s'était pas ménagée. La jeune femme faisait souvent des heures supplémentaires pour arrondir ses fins de mois et il lui arrivait de sortir alors que la nuit était déjà tombée, ce qui était le cas ce soir-là.
Tandis qu'elle tournait à l'angle d'une rue, elle se heurta contre un homme de haute taille. Enveloppé dans une épaisse écharpe, elle ne put pas reconnaître de suite à qui elle avait affaire. Ce ne fut que lorsqu'une deuxième silhouette se dessina dans la brume que son cœur se mit à battre à la chamade : Hidan et Kakuzu. Elle n'avait pas oublié ce regard malsain, ni cette aura meurtrière planant autour d'eux.
« Salut beauté ! ricana Hidan. Tu es seule ce soir ? Hum, c'est gênant... J'avais espéré voir cette enfoiré d'Ikari arriver en même temps que toi. Tant pis, on se contente de ce qu'on trouve !
— S'il vous plait... Je... Je ne suis pas proche d'Ikari ! Loin de là ! Il n'arrête pas de me pourrir l'existence au travail ! Il m'a encore gâché la journée aujourd'hui alors...
— Et c'est pour ça que tu le défends alors ? se moqua Kakuzu. Je n'ai pas encore digéré ce coup que tu m'as balancé. Se faire ainsi ridiculiser par une nana...
— Tu prétends n'avoir aucune valeur aux yeux d'Ikari ? C'est le moment ou jamais de vérifier tes dires ! » s'amusa Hidan en affichant un sourire éclatant.
Tandis que la jolie Konan esquissait un mouvement pour prendre la fuite, elle fut immédiatement interceptée par Kakuzu qui passa son bras autour de son bassin pour l'empêcher de se sauver. Son rire mauvais provoqua une boule angoissée dans la gorge de la bleue qui dut se contenir pour ne pas verser quelques larmes. Elle refusait de tomber aussi bas et de montrer le moindre signe de faiblesse face à eux. D'un autre côté, elle se sentait furieuse car tout cela était lié à Ikari, cet infâme chef qui la tourmentait depuis son arrivée dans cette entreprise...
A quoi s'attendaient-ils ? A ce que Pein vienne la secourir telle une princesse en détresse ? Ils pouvaient toujours attendre. Ce serait tout juste s'il s'apercevrait de son absence.
« Pourquoi en voulez-vous à Ikari ? osa-t-elle demander tandis que son agresseur commençait à l'entraîner au travers des rues sombres.
— Hum... répondit alors Hidan en faisant mine de réfléchir. Tu sais que tu es la seule à ne pas savoir ce que vaut vraiment ce type ?
— Si c'est pour me dire que c'est une enflure de première, pas la peine de me le répéter, je le sais déjà, vous savez...
— A toi de chercher si tu tiens à le savoir, les journaux sont faits pour ça, non ? »
Konan se retourna et croisa le regard sombre de son supérieur qui semblait furieux. Furieux ? Cette rage dévastatrice ne lui était pas destinée, c'était certain. La voir dans cet état éveillait une certaine angoisse dans le cœur de la bleue.
« Pourquoi lui avez-vous dit ? s'égosilla le rouquin hors de lui. Mes collègues n'ont pas à connaître mon passé !
— Parce qu'elle est en droit de savoir tout cela, je ne voudrais qu'elle tombe dans les bras de l'enfoiré que tu es. Je vous ai vus hier soir aller chez elle, tu as passé la nuit là-bas.
— Mais ce n'est pas ce que vous croyez ! s'indigna aussitôt Konan en se débattant.
— Du calme, ma jolie ! s'impatienta Kakuzu. Sinon tu risques de me donner envie de te vendre au premier venu !
— Tu vas me faire croire que tu as gentiment invité Pein chez toi pour une partie d'échecs ou pour parler de la pluie et du beau temps ? s'exclama Hidan en se tournant vers elle. Je sais bien que ce type n'est pas comme ça et quand bien même tu aurais voulu lui résister, tu n'aurais pas pu car ce type n'en fait qu'à sa tête et je vois bien qu'il n'est pas indifférent à toi sinon, pourquoi viendrait-il te sauver ?
— Ta gueule ! » hurla l'asocial en lui bondissant dessus.
Profitant que son acolyte soit occupé avec Ikari, Kakuzu entraîna Konan un peu plus loin, dans une rue voisine et la força à s'asseoir à côté de lui, sur le pavé glacé du sol. Tout en gardant un bras autour de ses épaules, il leva les yeux vers le ciel puis il sembla qu'il se mit à sourire au travers de son étoffe.
« Tu n'as pas à subir la colère qui oppose ces deux-là. Ce sont leurs histoires et cela ne te concerne pas alors restons tranquilles un moment et ensuite, je te reconduirai chez toi.
— Mais ces histoires vous concernent vous aussi ! protesta Konan.
— Non, répondit l'homme cagoulé en la regardant. Hidan est mon ami, c'est moi qui l'ai recueilli après qu'il ait eu ces problèmes avec la famille Ikari. Mais un conseil que je puisse te donner : ne flirte pas avec Pein, il ne le mérite pas.
— Mais qu'a-t-il fait au juste ?
— A toi de découvrir, les journaux en ont suffisamment parlé... Il est temps de retourner chez toi et encore une fois : évite ce type. »
Peu rassurée par la présence de l'individu, Konan resta méfiante tout le long du trajet. Kakuzu ne dit pas un mot de tout le trajet puis se retira sagement après que la bleue ait regagné son immeuble.
Lorsqu'elle rentra chez elle, sa première réaction fut de consulter les journaux via Internet. Sa main tremblait légèrement lorsqu'elle entre le nom de son chef dans la zone de recherche de son navigateur. Qu'allait-elle découvrir ? Visiblement, le fait qu'elle s'y intéresse avait mis Pein dans tous ses états.
« Famille Ikari : un ancien employé se venge.
Suite à l'histoire houleuse au sujet de l'Ikari industrie, un ancien employé Hidan Rioji a décidé de se venger de ses bourreaux en s'en prenant à l'héritier de Hitoshi Ikari. Il a été intercepté hier soir et risque jusqu'à sept ans d'emprisonnement pour séquestration.
Après plusieurs jours de calvaire pour le jeune héritier, son bourreau l'a libéré de plein gré mais a été rapidement retrouvé par les forces de l'ordre. La victime, grièvement blessée et en état de choc, a été conduite à l'hôpital le plus proche puis placé en soins intensifs.
Rioji clame son innocence malgré les preuves accablantes retrouvées à son domicile de fortune : la veste de sa victime ainsi que plusieurs armes blanches couvertes de sang. »
Konan resta un peu pantoise devant cet article qui plaçait plutôt Pein comme victime que comme bourreau. Ayant constaté la foule de documents liés à cette affaire, la jeune femme poussa sa recherche un peu plus loin en consultant un nouvel article.
« Aux origines de l'affaire Ikari.
Tandis que Hitoshi Ikari envisageait de se retirer de son poste de Directeur Général, son fils faisait ses premiers pas dans la direction du site. Après un arrangement avec son prédécesseur, il avait augmenté la cadence de travail et diminué les salaires, poussant les salariés dans des conditions extrêmes afin d'obtenir un salaire honorable. Cette action avait pour but de couvrir l'énorme déficit qui risquait pousser l'entreprise à sa faillite. Cette dette colossale avait été accumulée par Hitoshi Ikari qui n'avait jamais su gérer ses dépenses. Malgré de nombreuses lettres de menaces de mort, Pein continue son œuvre, persuadé d'être capable de sauver l'entreprise familiale qui s'engouffre dans un déficit toujours plus grand. Finalement, les actionnaires se retirent peu à peu de l'affaire et les banquiers n'accordent plus aucun crédit. Beaucoup témoignent alors d'un changement radical de leur nouveau patron qui semble sombrer avec son navire : totalement absent aussi bien mentalement que physiquement, il délaisse totalement son affaire et abandonne les employés seuls face à leur sort. Finalement et suite à de nombreuses plaintes et poursuites, Hitoshi Ikari décide de mettre la clé sous la porte tandis que son fils semble disparu dans la nature.
Un employé bien décidé à se venger.
Subissant le contrecoup de la crise, de nombreux employés ont été victimes de surmenages et beaucoup d'entre eux ont démissionné ou se sont retrouvés en arrêt maladie, ce qui n'a pas facilité les choses. Hidan Rioji faisait partie de ces personnes restantes qui luttaient pour conserver leur emploi dans un souci de préserver leur famille. A cette époque, il attendait un premier enfant – ou plutôt des jumeaux d'après nos sources – et sa femme ne travaillait pas depuis longtemps déjà et n'apportait aucune source de revenu. Pour eux, Hidan s'est accroché à son poste luttant contre son supérieur direct qui n'était autre que Pein Ikari qui était toujours plus impitoyable avec lui. Jusqu'au délaissement total. Des employés témoignent avoir entendu Pein se confier à un proche : « Il disait qu'il regrettait ce qu'il avait fait, qu'il était allé beaucoup trop loin mais qu'il n'y avait plus de marche arrière possible : son entreprise coulait à pic submergée par une dette colossale qu'il ne parvenait plus à boucher. Tous ses clients se retiraient, on savait déjà qu'on se battait pour de vent. Au final, les Ikari n'étaient même plus en mesure de nous verser un salaire. C'est ce qui a marqué la fermeture définitive du site. »
Du côté de Hidan, les dettes se multiplient alors qu'il venait de s'offrir un logement pour accueillir sa progéniture. Son supérieur ne réagit plus, ne lui donne plus d'ordres et semble déconnecté du monde environnant. Excédé par ce comportement, Rioji décide alors d'aller lui parler dans son bureau. C'est alors qu'une violente dispute éclate. « Je n'ai jamais entendu de tels échanges de cris, témoigne un ancien employé présent ce jour-là. Hidan était hors de lui et semblait tout retourner dans le bureau de son chef. Ce qui était surprenant, c'était qu'Ikari ne semblait pas se débattre ni rebondir aux propos insultants de son employé. Après un fracas inouï, le silence s'est imposé dans le bureau mais jamais personne n'en est sorti. Tout le monde pensait que Hidan avait assassiné Ikari mais finalement, ils avaient tout simplement disparu. »
Les employés préviennent alors les autorités locales pour signaler cette disparition. Rapidement, il s'avère que Pein ait été enlevé par son employé qui ne le ménagera pas durant quatre jours. Réalisant l'ampleur de son geste et alerté par sa femme de son accouchement, Rioji laissera sa victime s'enfuir et alerter la police qui retrouvera rapidement la trace de l'agresseur.
Depuis ce jour, les proches de Pein Ikari témoignent d'un profond changement chez lui. « Il est devenu froid, distant et ne parle à personne. D'une certaine manière, on a l'impression que son esprit est resté enfermé dans cette cave. Personne ne sait ce qui s'y est vraiment passé mais une chose est sûre, le choc pour Pein l'a marqué au fer rouge. »
Soupirant légèrement, Konan eut un léger rire nerveux en lisant le dernier paragraphe.
Depuis cette époque, il s'était bien rattrapé.
Tandis qu'elle s'apprêtait à consulter un nouvel article, une personne vint sonner à sa porte. Se souvenant qu'elle avait invité Aya à lui rendre visite, elle se leva allègrement puis s'empressa d'ouvrir la porte. Seulement, ce n'était pas Aya qui lui fit face mais Pein Ikari lui-même.
« Ikari ? s'étonna-t-elle. Mais qu'est-ce que tu fais ici ?
— Laisse-moi entrer s'il te plait, lui demanda-t-il.
— Non ! s'exclama-t-elle plus vivement qu'elle ne l'avait voulu.
— S'il te plait, Fubiwa...
— C'est hors de question ! Je ne veux plus jamais te revoir ici, c'est bien compris ? tonna la jeune fille en tentant de refermer la porte.
— Je pense... commença le taciturne d'une voix morose. Que tu as le droit de savoir la vérité. »
La voix du rouquin laissait paraître ses émotions pour la toute première fois depuis qu'elle le connaissait : beaucoup de mélancolie, de remords semblaient résonner dans sa voix si grave. Prise de compassion pour lui, elle l'autorisa à entrer bien qu'elle resta méfiante malgré tout.
« Je sais que je suis une enflure, lâcha-t-il en évitant soigneusement les prunelles noisette qui le dévisageaient. Tu l'as découvert par toi-même en regardant les articles de journaux parlant de moi. J'ai voulu sauver cette foutue affaire, j'ai agi comme un con parce que mon père me mettait une pression monstre. Tandis que je tentais de sauver l'affaire, il continuait à avoir une vie de débauche et accroissait notre dette. C'est pour cette raison que j'ai baissé les bras. J'ai laissé couler l'entreprise, ignorant ses employés parce que ce n'était pas les miens mais ceux de mon père. Malgré tout ce qui était dit, c'était lui qui me manipulait comme un pantin. J'ai refusé de signer le moindre document d'héritage. J'ai finalement coupé les ponts avec ma famille. J'ai ruiné les espoirs de nombreuses familles pour l'argent, dont celle de Hidan. Il m'a poursuivi car j'ai refusé de le dédommager, il est allé en prison et a dû laisser sa famille presque à la rue. Sa femme m'a retrouvé et m'a supplié de les aider. Comme il m'a agressé, il me devait de l'argent. Des dédommagements, tu vois ? Je lui ai dit de se démerder. C'est Kakuzu qui les a aidés à remonter la pente. Mais je regrette, non pas parce qu'il me poursuit, mais parce que je suis responsable de sa condition. Je lui ai promis de retirer ma plainte contre lui.
— Quelle mouche t'a piqué ? s'étonna Konan perplexe. C'est la première fois... Excuses-moi, tu as raison, c'est vrai, reconnut-elle en se rendant compte de sa gaffe. C'est bien de réagir ainsi même si c'est plutôt tardif. Mieux vaut tard que jamais, tu sais.
— Je t'aime Fubiwa, lâcha soudain Pein en la fixant de ses yeux si sombres et si profonds.
— Co... Comment ? balbutia-t-elle interloquée.
— Tu m'as bien compris : je t'aime.
— N'importe quoi... Allez, tu devrais rentrer chez toi, il est tard et je reçois une amie ce soir.
— Je t'aime ! »
La retenant par le bras, le rouquin la força à le regarder droit dans les yeux. Terriblement embarrassée par cette réaction si soudaine, la bleue évita soigneusement les iris gris la scrutant avec insistance. Son teint s'empourpra et son cœur se mit à battre avec violence dans sa poitrine. Malgré tout, la confusion se maintenant au fond d'elle : ce type ne méritait pas d'être aimé. Ce n'était qu'un sale capricieux qui mettait tous ses désirs au premier plan et faisait passer les autres en dernier. Un sale égoïste.
« Désolé... Je n'aurais pas dû te le dire de cette manière, dit alors l'Ikari en baissant les yeux. Mais en vérité, depuis ton arrivée, je t'ai toujours trouvée si rayonnante par rapport aux autres, si délicate et fragile mais je n'ai jamais osé t'aborder parce que... Parce que j'avais peur. Je ne suis pas l'homme que tu crois, en fait, je ne sais pas exactement ce que je suis. Condamne-moi pour mes erreurs passées, je le mérite. Tout à l'heure, lorsque je me suis retrouvé face à Hidan, je me suis demandé ce que tu aurais fait. C'est grâce à toi que je lui ai fait cette promesse. Excuse-moi, vraiment, mais tu es la première femme à qui j'ose parler alors j'ai tout déballé sans penser aux conséquences. Au revoir, Konan. »
Sans même que la jeune femme puisse le retenir ou lui répondre, le rouquin avait fui, disparaissant dans les couloirs sombres. La déclaration de Pein lui revenait sans cesse à l'esprit, formant une boule dans son estomac. Elle finit même par annuler sa soirée avec son amie, prétextant des douleurs au ventre. Sa nuit fut agitée et elle ne dormit que très peu.
A son arrivée au bureau le lendemain, un brouhaha général l'interpella. Toute l'équipe s'était rassemblée dans un coin du bureau et discutait avec animation. Lorsque Konan les rejoignit, les discussions augmentèrent et l'un d'eux s'approcha d'elle en plaquant une main sur son épaule :
« Fubiwa ! Te voilà ! Je pense que tu seras la plus à même de nous répondre puisque tu es la seule à être proche de lui. Est-ce que tu sais pourquoi il a fait ça ?
— Mais de quoi parlez-vous ? s'étonna-t-elle.
— D'Ikari ! Mais voyons, tout le monde ne parle que de ça depuis ce matin ! Tu ne vas pas dire que tu ne sais pas !
— Non, qu'a-t-il fait au juste ? demanda-t-elle de plus en plus surprise et inquiète.
— Il a donné sa démission ce matin même, bien avant que tout le monde n'arrive, bien sûr. Il n'aura pas de préavis, il a posé congé jusqu'au bout. Il ne t'en a pas parlé ?
— Mais pourquoi aurait-il fait ça ? Je ne suis pas plus proche de lui qu'aucun d'entre vous ! Il me déteste !
— A d'autres ! Il n'arrêtait pas de te regarder ! C'est obligé, il était amoureux de toi ! »
Ne relevant même pas la dernière remarque, digne d'un adolescent sortant tout droit d'une classe de secondaire*, Konan ignora ses collègues puis entama son travail de la journée. Une secrétaire apporta les bulletins de salaires et déposa celui de Pein face à Konan, ignorant l'absence de celui-ci.
Vérifiant qu'elle était bien seule dans les environs, elle attrapa l'enveloppe et la fourra dans son sac à dos. La jeune fille ne put s'empêcher de songer à Pein toute la journée, se demandant ce qu'il pouvait bien faire, à quoi il pensait... Lui qui semblait si acharné dans son travail avait tout laissé tomber sur un coup de tête. Ca ne lui ressemblait pas, il était bien trop combattif.
Le soir suivant, juste avant de partir, elle entra l'adresse du bulletin de salaire sur son navigateur puis se prépara un itinéraire pour s'y rendre. Son logement était un peu en retrait de la ville, dans les environs d'une zone industrielle.
Ce soir-là, elle ne fit pas d'heure supplémentaire et quitta les lieux à la minute près. Si bien qu'il lui fallut qu'une demi-heure pour se rendre au domicile de l'Ikari.
Konan s'attendait à un coin calme et à des logements modernes, propres rappelant l'esprit de la personne y vivant. Seulement, elle fut très surprise d'atterrir dans un quartier ancien, visiblement peu entretenu à en témoigner l'état des pelouses. L'immeuble en question était très haut et peint d'un beige Sali au fil des années. Le rez-de-chaussée était tagué de toutes parts et le sol crasseux. Ne se laissant pas impressionner par le décor qui l'environnait, la bleue passa la porte du hall qui n'était même plus verrouillée car le système de fermeture avait été fracturé.
La jeune femme n'était pas très rassurée à l'idée de pénétrer dans un tel environnement mais encore une fois, elle prit son courage à deux mains pour continuer, fermement décidée à mettre les choses au clair avec son ancien chef. S'approchant de l'ascenseur, elle lut un écriteau qui indiquait que celui-ci était en panne. Son désarroi augmenta d'un cran lorsqu'elle relu l'enveloppe : « Etage onze, appartement F. »
Après une longue ascension, elle se retrouva dans un couloir qui paraissait plus propre que le hall, tout était peint d'un gris sombre et le sol était constitué d'un linot anthracite. Aucune fenêtre ne donnait sur l'extérieur, seule une faible lueur lugubre donnait un peu de jour dans le corridor. S'approchant de la porte F, elle dut inspirer profondément avant d'oser frapper.
Un bruit de pas se fit entendre puis un déclic, puis le visage blafard de Pein se dessina dans l'embrasure. Ses yeux étaient gonflés par le manque de sommeil et sa peau était livide. Il n'avait même pas pris la peine de mettre ses piercings et sa tenue désordonnée affichait une claire absence de volonté. Il était vêtu d'un débardeur gris et d'un bermuda noir.
Sa surprise se lut clairement sur le visage lorsqu'il reconnut Konan puis le malaise s'empara de lui lorsqu'il songea dans quel état il s'affichait devant elle.
« Je suis venue t'apporter ça, annonça-t-elle en lui tendant sa paye. Je l'ai trouvée sur ton bureau.
— Mon chef me l'aurait fait expédier chez moi, tu sais, lâcha-t-il d'une voix morne. Ce n'était pas la peine de te déplacer pour ça.
— Pourquoi as-tu donné ta démission ? osa Konan. Tu aimais ce que tu faisais et...
— Je n'ai jamais aimé quoique ce soit, je travaille pour financer mes dépenses, rien de plus. Tu ferais mieux de retourner chez toi maintenant.
— Laisse-moi entrer... s'il te plait !
— Tu l'auras voulu... » soupira Pein en ouvrant la porte en grand.
L'appartement était minuscule : au fond à droite, un lit simple, au milieu, la fenêtre et de l'autre côté, une petite table et une chaise. Sur la gauche, une petite gazinière et un frigo et le rideau séparant la salle de bain du reste de l'appartement. Il faisait frais à l'intérieur et Konan grelotta lorsqu'elle retira ses chaussures de ville. Aussitôt, son hôte lui apporta une veste et la déposa soigneusement sur ses épaules.
« Je suis désolé, on m'a encore coupé le chauffage, je pense qu'il y a encore un problème au niveau de la chaudière.
— Tu devrais utiliser un chauffage d'appoint, non ? suggéra la bleue en se frottant les mains.
— Le soleil réchauffera la pièce demain matin, la pièce est bien orientée !
— Ikari-san ! Un chauffage d'appoint ne coûte que 2000 yens**, tu sais...
— Je... Je n'ai pas les moyens de m'en offrir un.
— Co... Comment ça ? Tu es ingénieur et...
— J'ai moi aussi mes dettes à rembourser. Ce n'est pas toujours facile mais je m'en sors pas trop mal. Tout sera réglé d'ici deux ou trois ans si tout va bien. Mon nouveau travail paye mieux, je pourrai rembourser davantage en une seule fois.
— Excuse-moi... Je ne savais pas... Je ne devrais pas me mêler de ça, après tout, ce sont tes affaires ! Je... Je devrais peut-être rentrer chez moi.
— Non, reste ! S'il te plait ! »
Ne me laisse plus seul !
Les mots ne purent sortir de la gorge douloureuse de Pein. Il n'en revenait toujours pas de la voir ici, à ses côtés. Pourquoi ? Pourquoi le suivait-elle ainsi ? Son cœur souffrait suffisamment depuis qu'il la connaissait, délicate créature si inaccessible, si belle et si franche.
Ses grands yeux chocolat le scrutaient avec tant de douceur qu'il ne put s'empêcher que de succomber. Avec une certaine crainte, il passa ses bras autour de la taille frêle de sa nouvelle protégée puis déposa un baiser sur ses lèvres, le premier de toute son existence. Ce fut comme une décharge électrique, les propulsant instantanément dans un autre monde, un monde dans lequel tous leurs soucis s'évaporaient et où l'Amour régnait.
C'était le début d'une nouvelle ère dans nos vies. C'était comme le printemps durant lequel tout se renouvelle. Comme si le sang coulait de nouveau dans nos veines, comme si le bonheur naissait dans nos cœurs, nous nous découvrions enfin. Je refusai alors de le laisser sombrer ainsi. Je ne pouvais pas l'extirper de ce logement miteux mais je pouvais au moins le soutenir en lui préparant de petits plats pour lui faire réduire ses dépenses.
L'Amour nous avait tant cherchés et ce ne fut que la découverte de cette face cachée qui nous avait sortis de cette étrange torpeur, nous figeant sur nos positions, nous bloquant l'un face à l'autre.
Aujourd'hui, fleurissant et passionnant, notre affection avait eu raison du reste.
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*Enseignement secondaire : Equivalent du collège en France.
**2000 yens : environ 16€
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