Trois jours de fête ont été organisés suite à la naissance des jumeaux. Le peuple démon que Sada a recueilli partageait ces moments de joie, bien qu'ayant des difficultés d'intégration. Certains habitants se méfiaient encore, mais ce n'était qu'une question de temps. Malgré la froideur entre les peuples ainsi tous regroupés en un seul lieu, les enfants n'avaient aucun mal à partager les jeux en ne faisant aucune différence entre l'ombre et la lumière. C'était un détail qui apaisait néanmoins les tensions, alors que les chants résonnaient jusque dans les montagnes et la danse autour d'un grand feu de joie usait bien des souliers.

Le point commun entre tous, c'était la sympathie de Sada et son empathie sans aucun favoritisme. Elle avait tenu sa promesse dès le jour où son peuple avait accepté de la suivre jusqu'à la surface. Il mangeait à sa faim, jouissait de logements aménagés, travaillait sans aucune discrimination, et chacun tenait un rôle pour le bon fonctionnement du village.

On pourrait dire que la paix était maitre de la vallée... ou presque.

- Moi aussi j'ai besoin de ce riz, j'ai une famille à nourrir ! s'énerve un grand démon cornu.

- Z'avez qu'à bouffer des cailloux, après tout vous vivez sous terre non ?! réplique un fermier en s'appropriant le sac. C'est MOI qui ai cultivé ce riz pendant que VOUS dépouilliez le cadavre des honnêtes gens !

- Vous insinuez qu'on est des voleurs ?!!

- Hé on se calme vous deux ! coupe Mina en séparant les deux hommes. Il y a assez de riz et de charbon pour tenir tout l'hiver, ça sert à rien de vous battre ok ?!

- Ce vioc nous traite de parasites, j'ai quand même de bonnes raisons de gueuler ! rétorque le démon.

- Si tu te vexes c'est que j'ai raison !

- Taisez vous !! rugit Mina en cognant leurs têtes.

Etant également une proche cousine des démons, Mina secondait étroitement et remplaçait Sada dans de rares occasions, et le village était témoin de son fort caractère qui se cachait derrière son sourire enfantin lorsqu'elle faisait la classe aux enfants.

- Franchement vous êtes pires que des gosses, vous auriez donc oublié pourquoi vous logez ici ?! Rappelez moi les règles du village !

- ... "Aucun conflit n'est toléré"... grommelle le fermier.

- Mais encore ?!

- "Nous sommez tous égaux"... soupire le démon.

- "Partage des biens et des ressources fournies, ainsi que le respect envers chaque individu", termine sèchement la Hungür en croisant les bras. Shiro-chan vous donne des terres fertiles et un toit pour vivre et c'est comme ça que vous la remerciez ? Ne profitez pas de sa convalescence pour faire les cons !

Les deux hommes baissaient la tête, coupables. Outre la guerre, Sada usait de son temps et de son énergie afin de s'assurer que son village ne manquerait jamais de nourriture ni de savoir-vivre, investissant dans la construction d'une école non seulement pour les enfants, mais aussi les adultes analphabètes ou en situation de handicap. Lorsque la classe se termine, cette même école se transforme en centre de retraite où les doyens pouvaient se reposer et exercer quelques petites activités pour passer des journées paisibles, telles que les échecs, ou profiter de certains spectacles organisés par les plus petits. La démone les autorisait même à conter des histoires pendant les heures de classe afin de garder un lien fusionnel entre l'ancienne et les futures générations.

- Est-ce que Dame Sada va bien au juste ? demande le démon.

"Dame Sada", tel était le surnom donné par le peuple démoniaque qui lui vouait une gratitude éternelle. Mais la démone se sentait mal à l'aise face à ce "titre"...

- L'hiver est déjà arrivé, répond Mina. Elle a besoin de calme et de repos au moins jusqu'au printemps, compris ? Ne lui causez pas plus de soucis.

- Aye !

- Partagez le riz et je dirais même de rajouter un autre sac, on sait jamais.

Au même moment...

"Far over the Misty Mountains cold
To dungeons deep and caverns old

We must await, ere break of day,
To find our long forgotten gold.

The pines were roaring on the height,

The winds were moaning in the night.

The fire was red, it flaming spread;
The trees like torches blazed with light."***

Sada s'éveillait d'un long sommeil sous un chant si joliment conté d'une voix discrète et apaisante, puis tournait la tête vers Katsuki, assis près du berceau des jumeaux, la tête reposée sur son bras, le petit doigts piégé dans ceux de sa fille qui l'écoutait fredonner.

***Paroles de Misty Mountains Cold - Le Hobbit

https://youtu.be/BEm0AjTbsac

L'enfant souriait, émerveillée de ses yeux d'une couleur rubis plus scintillantes que les prunelles de son pauvre père qui peinait à l'endormir. Le dragonnier se montrait étonnamment patient malgré un léger épuisement, et couvrait son fils déjà au pays des rêves. Depuis leur naissance, l'air des montagnes et des forêts avaient changé, ce qui préoccupait Katsuki. Ses sens étaient plus sensibles aux sons, aux odeurs, semblant à l'affût du moindre mouvement inhabituel.

Il n'était pas le seul cependant, Kirishima sentait parfois le vent tourner subitement et se réchauffer le temps d'un alizé. Un vent chaud en plein mois hivernal, c'était loin d'être un phénomène météorologique naturelle.

Sada se levait lentement avant de s'approcher du jeune papa sur le point de sommeiller sous sa propre berceuse, malheureusement sans succès pour la petite Mio qui prenait plutôt la main de son père pour une peluche ; puis l'enlace de ses bras glissant autour de son cou.

- Je t'ai dis de rester couchée, grommelle-t-il, les yeux clos.

- Désolé mon cher, mais je n'obéis à personne. C'est toi qui devrais te reposer, tu es à la limite de t'endormir sur le tapis.

- Hmm... Si tu trouves un moyen pour endormir la diablesse qui te sert de fille.

- Hélas c'est peine perdu, même avec tous les efforts du monde, rit-elle doucement. Dis moi... Je ne savais pas que tu connaissais cette contine.

- J'ai voyagé avant de te rencontrer je te rappelle.

- Tu as donc traversé les montagnes désolées des nains ?

- Hmhm.

Katsuki n'osait le dire, mais à l'époque où il rencontrait le peuple des nains, il espérait suivre les traces des dragonniers. Ce n'était encore qu'un enfant...

Mio mordillait le doigt de son père et râlait lorsqu'il l'éloignait de ses petites joues.

- Tch... Aussi chiante que ta mère.

- Tu veux dormir à la niche ? menace Sada, boudeuse.

Soudain, les pensées du dragonnier le rendaient sourd.

- ... Sada.

- Quoi ?

- Reste ici avec les jumeaux. Je veux pas que tu viennes sur le front.

La démone fronce les sourcils sans l'interrompre.

- Malenia n'est pas n'importe qui, dit-il. Et les fins de guerre sont les plus meurtrières, alors selon comment les choses se passent j'aime autant savoir que ces gosses soient auprès de leur mère.

- Kat'... Tu pourras dire ce que tu voudras, j'agis indépendamment de tes choix.

- Je sais... Je te connais trop bien pour ça.

- J'ai foi en mon chemin de vie Chéri...

Elle enroulait ses bras autour de son cou en blottissant sa joue contre la sienne.

- Mon heure est encore loin de sonner... Bientôt, ces cauchemars seront oubliés. Ces petits amours ne seront pas orphelins, ils retrouveront leurs deux parents entiers et souriants. Je peux même te prédire qu'il fera beau temps ce jour là.

- Si tu le dis...

De l'autre côté, Shoto dirigeait son armée pour un premier assaut, en quête d'affronter Malenia sans plus tarder. La trace de cette déesse maudite menait vers un monde semblable à une illusion. Un château médiéval tombé en ruine et enseveli sous les racines robustes d'un arbre gigantesque trônant en son centre. Cet arbre n'était nul autre qu'Yggdrasil, l'Arbre-Monde dont les racines reliaient chaque royaume. Le prince constatait que la garde chargée de seconder Malenia n'étaient plus réellement vivants, mais il n'étaient pas morts pour autant. Ce n'était plus que des spectres sans âme ni conscience, alors l'armée d'Inokuni n'hésitait pas à abréger leurs souffrances quand elle en avait l'occasion.

Momo s'approche d'une statue de la déesse enlaçant son frère tendrement.

- ... Ils souffrent tellement... dit-elle tristement.

- Si ce que Bakugou dit est vrai, qu'All for One a bien ingéré Miquella, j'imagine la peine et le désespoir de Malenia, soupire Shoto. Nous n'avons plus le choix Yaomomo.

- Je sais... C'est tout de même cruel de devoir l'abattre...

- On ne peut qu'essayer...

Le prince attrape doucement ses épaules afin de la faire pivoter vers lui.

- Yaomomo. Je veux te dire quelque chose... On ne sait pas combien de soldats nous perdrons dans cette mission, ni ce qu'il pourrait m'arriver quand on arrivera à Malenia, mais je veux que tu exécute un ordre pour moi.

- Shoto-kun...?

- Fuis. Aussi loin que tu le pourras, rentre auprès des autres et mène notre peuple à la victoire. Entre nous, la personne qui doit survivre c'est toi.

La capitaine écarquille les yeux avant de reculer.

- Non, je ne veux pas entendre ça ! Pas de la bouche de mon époux... Pas de la bouche de son Altesse !

- Momo, insiste-t-il en relevant son menton. Ecoute moi pour une fois. Ce sera le seul ordre où je ne te donne pas le droit de désobéir.

- Shoto-kun... Tu es l'héritier d'Inokuni, s'il t'arrivait malheur j'appliquerai le Harakiri. Ce sera ma punition pour ne pas avoir rempli mon devoir--

Mais le prince ne voulait pas l'entendre prononcer des mots qui portent malheur, alors il l'embrassait pour la faire taire dans une tendresse qu'il ne cachait pas même devant son armée. Momo répondait tristement, appréhendant les événements à venir.

- Tu es mon épée... murmure-t-il, le front contre le sien. Continue de frapper pour moi...

La gorge nouée, ayant conscience du danger qui les attendait, elle fermait les yeux en acceptant son ordre à contre coeur.

- Longue vie à votre Majesté...

À suivre...

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Je le dis pas, mais dans les prochains chapitres vous allez beaucoup gueuler. Voilà voilà vous êtes prévenus ;-;