Le lendemain matin, la milice est rentrée de sa mission chez les Sages.

- Disparue ? s'étonne Shoto.

- Ils nous ont affirmé avoir placé la prêtresse dans sa chambre de purification, explique le chef de milice. Ce n'est qu'au lendemain de son arrivée qu'ils se sont aperçus de sa disparition, Altesse.

Shoto tape du poing et bondit de son trône, faisant sursauter Yaomomo, assise à ses côtés. Ses serviteurs baissent les yeux en gardant leurs genoux à terre.

- Et il a fallu que j'envoie une milice pour être prévenu ??

- Todoroki... tente de calmer Momo.

Ce dernier attrape sa main sans décolorer pour autant.

- Qui a fait ça ? Je veux un nom, ordonne-t-il fermement.

- La servante qui devait s'occuper de la prêtresse dans ses derniers instants a vu un démon roder autour de son lit de mort et lui faire ingérer quelque chose, avoue un membre de la milice.

Le prince blêmit mais reste confus. Midoriya, non loin de lui, écoutait à la conversation sans interrompre, réfléchissant de son côté. Les deux amis échangent un regard et leurs pensées se connectaient. Sur ordre de Shoto, la milice dispose en silence.

- Tu penses que ça pourrait être le démon qu'elle a faite épargner ? demande le prince, pas convaincu.

- C'est possible... Il aurait pu vouloir la sauver pour payer sa dette envers elle, suppose Midoriya en haussant les épaules.

- Je doute. Tu sais bien que les démons sont rarement empathiques.

- Mais ça reste une théorie probable, autrement pourquoi le cerisier serait en fleur si elle était réellement décédée ? 

- Je vois bien, mais dans ce cas si ce n'était que pour payer sa dette, pourquoi l'avoir enlevé par la suite ? soulève Shoto sans comprendre. Je me demande surtout si elle est en danger en ce moment même...

Peu importe comment ou pourquoi, ce qui comptait était que la princesse soit saine et sauve. Shoto réfléchit de long en large afin de deviner où pouvait-elle se trouver au delà du monde de l'Abysse. La nature ne bourgeonnerait pas si elle avait quitté le monde de la lumière, alors cela ne pouvait que signifier qu'elle se trouvait forcément quelque part dans le pays.

- Je me dis qu'on est peut être passé à côté sans nous en rendre compte... s'excuse Midoriya en baissant la tête.

- Non personne ne pouvait deviner qu'elle serait en vie. J'enverrai mes hommes fouiller le territoire et il me faudra me rendre à la Capitale. On ne sait jamais.

- Mais Todoroki... s'impose Momo. Tu ne peux pas y aller avant le prochain printemps. Notre mariage tombe hélas à la même période que ton Sacre...

- C'est pourquoi j'organise des fouilles le plus tôt possible et j'aurais besoin de toi.

La générale aux cheveux de jais rougit en regardant leurs mains entrelacées. Shoto allait être sacré dans le cercle des Empereurs à la Capitale, bientôt il n'aura plus de temps à consacrer à son bon vouloir puisqu'il entrera désormais en âge de gouverner son peuple, bien qu'il ne garde encore son statut de prince.

Peu après dans la journée, Sada sortait du Onsen en séchant se cheveux et rangeait son nécessaire de toilette. Ses pensées tournaient principalement autour des propos de Toga, bien que cet échange n'ait changé en rien ses motivations, mais elle comprenait une part de vérité qui remet en cause son jugement vis à vis de la guerre. Elle qui avait tué de nombreux démons de sang froid, sans prendre en compte leur vécu et leurs revendications peut être plus nobles qu'on ne le pense ; elle commençait à culpabiliser d'être au même niveau que les humains qui l'ont chassé de leur camp. Tout compte fait, les humains comme les démons ne sont pas si différents, en effet. Ils se battent pour protéger même si cela signifie tuer. Mais dans le cas de sa famille, elle ne pouvait pardonner la cruauté faite à sa pauvre mère.

- Si seulement j'avais eu plus de temps pour m'excuser Papa... soupire-t-elle, la tête vers le ciel.

- ITE !!!

Sada se tourne aussitôt vers le bain des hommes en y apercevant Katsuki seul avec Kirishima. Le dragon aidait son ami et maitre à nettoyer ses plaies doucement cicatrisées, mais la délicatesse n'était pas sa qualité principale.

- Arrête de bouger aussi ! râle Kirishima.

- T'as fais exprès Enfoiré !!

La brune retient un rire en se cachant pour les écouter. Kirishima bandait premièrement l'épaule du dragonnier une fois que ce dernier ait enfin décidé de ne plus bouger.

- Shirosaki a fait un bon travail, complimente le rouge en parlant des sutures.

- Hm... marmonne Katsuki en regarde ailleurs.

- Ta fièvre a baissé en plus, tu devrais la remercier.

- Ferme la, je sais ce que je dois faire !

Mais le dragon boude en serrant le bandage d'un coup sec.

- ITE !!

- Elle a été gentille avec toi, ça te tuerait de l'admettre ?? gronde-t-il.

- Espèce de--!! jure Bakugou avant de soupirer bruyamment et tourner la tête. Je sais...

- Mais tu ne lui fais toujours pas confiance hein ?

- ...

Sada baisse la tête derrière le mur. Elle se doutait bien que le dragonnier était le plus difficile à approcher, surtout en sachant qu'il avait remarqué ses yeux changer. Elle essayait de le cacher tant bien que mal et pour le moment, Katsuki pense encore à un mirage, mais tôt ou tard il connaitra la vérité. Seulement Sada tenait à ne rien dévoiler. Ce garçon, très loin d'être un idiot, était celui dont elle se méfiait le plus...

- Je la sens pas cette fille, grogne-t-il en se levant. C'est tout. Et à la fin vous verrez tous que j'avais raison depuis le début.

Le cerveau de la soldate disjoncte et le rouge colorait vivement ses joues en voyant le dragonnier se lever de son bain... entièrement nu ! Evidemment, c'était la première fois qu'elle voyait le corps d'un homme de cette façon. L'image de leur baiser dans sa rêverie lui revenait en mémoire et la curiosité la titillait de plus en plus à propos de désirs plus étranges.

<< N'y pense même pas Sada !! >> pense-t-elle en secouant la tête, cachant son visage entre ses mains. << Tu es un putain de démon, jamais ça se fera ! >>

- ... Et même si ce que tu dis est vrai, reprend Kirishima. Si elle était réellement un démon, tu ferais quoi ?

Le visage du dragonnier s'assombrit alors qu'il sortait du bain en enroulant une serviette propre et chaude autour de sa taille.

- Je la tuerai. Sans hésiter.

Un ange passe tandis que Sada sentait comme son coeur se briser, non pas parce que ce garçon commençait à lui plaire inconsciemment, mais plutôt parce qu'elle n'y pouvait rien. Malgré tous ses efforts, jamais elle ne pourra sortir de cette faille qui séparait les deux mondes. La réponse de Katsuki n'a donc fait qu'appuyer sa décision de repartir, seule, et de rentrer chez elle...

La journée touche à sa fin quand une violente douleur réveille brusquement Katsuki alors qu'il était plongé dans un sommeil si paisible.

- Hé, souffre-t-il en se tenant l'épaule. Où est la carafe d'eau ?

Mais le silence l'interpelait aussitôt et le forçait à se tourner vers le futon de Sada, étonnamment replié avec les draps.

- ... Sada ?

Quand Sada prend une décision, elle l'exécute sur le champ, hélas...

Cela faisait déjà deux bonnes heures qu'elle avait filé en douce, galopant sans relâche vers le Sud. Elle laissait son cheval suivre le chemin alors que le crépuscule tombait dans la plaine enneigée. Abandonner ses amis la déchirait, elle espérait assister au moins à l'accouchement de Mina officiellement prévu pour un été proche, mais elle commençait à ne plus supporter de devoir continuer à leur mentir et leur cacher ses secrets. Ses vivres pouvaient la rassasier jusqu'au prochain village et sa cape en fourrure blanche la protégeait assez du froid polaire.

Ses yeux brûlaient à cause du vent glacial et de ses larmes qu'elle refusait de verser. Elle en avait assez de pleurer... À présent, elle ne pouvait qu'aller de l'avant sans craindre le moindre remord et tenter d'oublier ceux qu'elle aurait aimé remercier plus convenablement pour leur bienveillance et leur chaleur humaine.

Hélas, depuis la perte de ses proches, Sada n'éprouvait que de profonds regrets qui l'empêchaient de tourner la page. Mais comment se pardonner ? Elle avait dans l'idée de rester dans son village natal, qu'elle s'efforcerait de reconstruire à l'identique, et y passer le restant de ses jours loin de toute vie humaine, seulement apprécier la compagnie des animaux de sa forêt. Tout ce châtiment pour espérer se repentir de ses fautes.

L'étalon trottait dans l'épaisse forêt séparant les frontières entre le Nord et l'Est, dans la nuit dépourvue de lune. Sada choisit de camper près d'un cours d'eau en laissant sa monture s'abreuver et paître tranquille, puis crée un petit feu pour se rassurer d'un peu de lumière. Le silence l'oppressait et ses sens étaient aux aguets. Les meutes de loups hurlaient dans la montagne, le vent tombait doucement et seul le crépitement du feu brisait le chant silencieux.

Sada fixait les flammes, mélancolique, en s'emmitouflant dans sa fourrure, tandis qu'Acero calait sa tête contre la sienne.

- On rentre chez nous... caresse-t-elle le chanfrein du l'animal. Ca ira vite, on connait le chemin de toute façon...

Puis elle regardait ses mains.

- Maman ne m'a jamais rien enseigné sur le fait d'être à moitié démon. Quelle mentalité je dois avoir, est-ce important d'apprendre à connaitre cette moitié ? Dois je en avoir peur...? Est-ce que je vais devenir comme eux ? Je déteste les démons mais je ne me connais pas moi même... Au fond, c'est peut être moi que je déteste le plus.

Elle déglutit en se concentrant légèrement, avant de sursauter en voyant ses ongles pousser comme des griffes et sa vue devenir plus perçante dans la nuit. Sous sa capuche, de longues oreilles animales s'agitaient sur son crâne et plusieurs queues dédoublaient sa colonne vertébrale. Avec appréhension, Sada s'approchait du point d'eau avant de prendre peur.

- Une Kitsune ??? panique-t-elle en touchant ses joues.

À suivre...

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Un fanart de Sada en Kitsune est en cours.