Chapitre 13

Bizarre. Il avait à peu près bien dormi, s'était réveillé avec une sensation de faim douce lui caressant le ventre et non une attaque agressive au creux de son estomac. Stiles n'irait pas dire qu'il était en forme, bien au contraire, mais l'idée s'en rapprochait tout de même un peu plus que les jours précédents. Et pourtant, il n'arrivait pas encore réellement à s'en réjouir, parce que... Difficile à dire. Déjà, il n'allait pas mieux grâce à ses propres moyens – il avait reçu de l'aide. Or, Stiles avait l'habitude de se débrouiller seul et de ne pas abuser de ce que l'on pouvait lui proposer. Et en étant chez Derek, alors que celui-ci insistait pour le nourrir – comme il l'avait fait cette nuit –, c'était exactement ce qu'il avait l'impression de faire.

Et ce qui ne l'aidait pas, c'était de voir que l'ancien alpha ne semblait pas être plus en forme que lui alors... Que tout était censé aller bien de son côté. Alors automatiquement, Stiles se sentait légèrement coupable. Pour lui, il était impensable que l'on souffre à le soutenir. Il s'agissait notamment de la raison pour laquelle l s'était fait la promesse de se remettre au plus vite pour ne plus avoir à rester ici. Il savait n'imposer rien à Derek, mais commençait à connaître celui-ci : aussi bougon soit-il, il n'abandonnait pas les gens dans le besoin. Cet idiot avait un fond foutrement bon. Sa manière de faire paraissait parfois un peu brutale, elle ne partait toutefois jamais d'un sentiment mauvais.

- T'as dormi cette nuit, ou t'as réfléchi à la meilleure manière de me gaver ? Je te préviens tout de suite, je ne suis toujours pas un canard, une oie ou... Un truc à plume.

Ça sonnait mieux dans ma tête, se dit-il alors qu'une certaine confusion mélangée à un semblant de perplexité se peignait sur la figure fatiguée de Derek. Alors oui, ça sonnait effectivement mieux dans sa tête, parce que Stiles suivait sa propre réflexion aisément, sans qu'elle lui paraisse étrange. Il se connaissait parfaitement et savait dans quelles directions son esprit était capable de partir.

Mais pour Derek, il était un alien depuis le départ. Ainsi l'ancien alpha devait-il faire l'effort de se répéter mentalement ce qu'il lui avait dit à plusieurs reprises dans l'espoir de comprendre le lien entre sa question et sa remarque. C'était en tout cas de cette manière que Stiles se figurait cette idée.

La vérité, c'est que Derek se demandait encore et toujours ce qui pouvait bien lui passer par la tête pour qu'il pense de façon aussi... Aléatoire. Ses idées étaient liées, mais... De si loin qu'il n'y aurait jamais pensé si on le lui avait demandé.

Enfin le fait est qu'il était effectivement fatigué et que ce jour-là, il n'arrivait pas vraiment à le cacher. De façon générale, Derek n'exprimait que ce qu'il sentait et ce, bien malgré lui. S'il avait l'habitude de ne pas être en forme, ça allait puisqu'il faisait toujours quelque chose, de sorte à ne pas ressentir cette lourdeur familière pesant à la fois sur ses épaules et ses paupières.

Ce matin, il avait bien du mal.

- J'ai dormi, répondit-il toutefois simplement.

L'inspiration pour trouver une excuse lui manquait, ainsi Stiles devrait se débrouiller avec ce mensonge-ci, pour lequel il n'aurait pas droit à davantage de détails – détails que Derek n'avait pas franchement envie d'inventer pour le moment.

- Donc tu vas me faire croire, loup-garou borné que tu es, que t'as toujours l'air d'un ours mal réveillé le matin ?

C'était dingue comment un peu de repos et un début de reprise en main donnaient l'impression à Stiles que tout allait bien mieux. Même parler s'avérait plus facile que ces derniers jours ! Il se sentait légèrement essoufflé, mais pas assez pour que la chose le décourage. L'humain ressentait l'étrange besoin de parler, de s'exprimer... De détourner, dans un sens, l'attention qui pouvait être portée sur son propre état. Plus vite je rentre chez moi, plus vite cet idiot se reposera. Stiles n'oubliait pas cette angoisse légère, cette petite chose qui le dérangeait dans l'attitude de son bienfaiteur inattendu. Cette fatigue qu'il lui connaissait trop peu pour qu'il l'accepte de visu.

- Je n'ai pas forcément l'habitude de me faire alpaguer et harceler de paroles au réveil, alors je te prierais bien gentiment de la fermer.

- Difficile effectivement de te faire emmerder quand tu es seul, releva l'hyperactif sans ironie aucune. Heureusement que je suis là pour te changer un peu ton quotidien.

Sauf que Stiles ne partait pas dans la direction qu'il s'était fixée quelques instants plus tôt. Ainsi, alors qu'il s'apprêtait à dire autre chose, il se ravisa, ferma la bouche pour tenter de ne pas prononcer un mot de plus. Au moins, son énergie aléatoire obligeait le loup-garou à se réveiller. Il retint toutefois un début de sourire lorsqu'il vit que l'expression de Derek commençait à tendre vers le désespoir. Dans ces moments-là, son visage avait quelque chose de comique... Et c'était justement ce « quelque chose » qui le poussait à l'embêter régulièrement. Là, ce n'était pas son envie, bien au contraire. Stiles ne voulait rien de plus que le laisser tranquille... Mais force était de constater qu'à force de tenter de chasser le naturel, celui-ci revenait au galop.

Et c'était d'autant plus vrai que Stiles était légèrement plus en forme que la veille. Pourquoi ce simple fait le poussait-il à parler, parler... Parler ? Alors qu'il venait justement de se faire la réflexion qu'il lui faudrait partir au plus vite pour que Derek ne se fatigue pas davantage ? Ils n'en étaient qu'au petit-déjeuner. Stiles plaignit sincèrement son hôte dans sa tête – faillit d'ailleurs le verbaliser. Mais là aussi, il se retint. Il était certain que s'il était au courant de l'intégralité de ses pensées, le loup-garou le remercierait pour chaque mot gardé pour lui, réduit au silence.

- Mon quotidien me convient très bien comme il est, rétorqua finalement Derek après avoir croqué dans sa tartine de confiture.

Qu'il était étrange de se dire qu'ils partageaient le petit-déjeuner ensemble, d'ailleurs ! Il s'agissait là d'une scène que Stiles n'aurait jamais imaginée auparavant – parce qu'il n'aurait eu aucune raison de le faire et qu'elle représentait quelque chose d'impensable. Il baissa alors le regard sur son yaourt et ses biscuits. Cela avait beau être un étrange menu, ces choses-là étaient peut-être tout ce qu'il pouvait manger en une fois. Pour l'instant, évidemment. Stiles comptait bien réhabituer son estomac à des quantités plus importantes au plus vite. Ce n'est pas avec ce que tes placards vides que tu vas te remplumer, intervint sa petite voix intérieure. Et elle avait raison. Stiles ne perdit pas sa bonne humeur pour autant. Il se sentait étrangement bien, même s'il était clair que marcher de façon autonome et sans avoir besoin d'aucune aide, ce n'était pas pour tout de suite.

Et ressentait le besoin de dérider un peu cet homme qu'il savait mériter bien plus qu'une existence aussi triste et fade. Qu'il n'essaie pas de lui faire croire qu'il n'était pas capable d'empathie : pas après ça. Derek l'avait plus ou moins... En quelque sorte... Sauvé. Stiles ne se considérait pas en danger de mort, même lorsqu'il commençait à dépérir sur son canapé, mais il ne pouvait pas nier que l'aide que lui apportait l'ancien alpha était précieuse. Le genre d'aide qui ne s'oubliait pas.

- Ça, c'est parce que t'as jamais connu mieux, mon pote. Laisse l'effet Stilinski entrer dans ta vie et tu verras que tu voudras plus jamais revenir en arrière.

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