6 : Le restaurant vietnamien d'Athéna

ATHÉNA

J'ai grimacé en regardant mon reflet dans le miroir de la salle de bain. Je ne savais pas si c'était parce que j'étais stressée à l'idée de dîner avec Jules, ou bien si j'étais vraiment laide dans cette tenue, mais j'avais l'horrible envie de vomir toutes mes tripes.

Mercredi soir, il y a deux jours, j'avais pris mon courage à deux mains et j'avais appelé Jules pour lui proposer qu'on voit. Il n'avait pas donné de signe de vie depuis que j'avais prétexté un subite mal de tête qui m'empêchait de passer le voir au café lundi. En réalité, je n'avais juste pas trouvé la force d'y aller. J'avais passé la fin de ma journée dans mon lit, emmitouflée dans mes couvertures à pleurer. J'avais même fait une crise de panique, même si j'avais l'habitude d'en faire, celle-là avait été drôlement violente et elle m'avait épuisé.

Mais soit, je lui avais donc proposé qu'on se voit. Il avait hésité un long moment, j'avais même pu entendre sa respiration de l'autre côté du combiné, puis il m'avait invité au restaurant. J'avais accepté sans réfléchir et une heure plus tard, je regrettais déjà. Non pas parce que je ne voulais pas le voir, mais plutôt parce que je n'aimais pas les rencards. Pour moi c'était synonyme de couple, de sentiments et d'attachements. Sans rencard, tout cela n'existait pas.

Évidemment, j'ai eu le droit aux menaces de mon meilleur ami : si je n'y allais pas, il ne m'adresserait plus jamais la parole. Même si je savais qu'il ne ferait jamais une chose pareil, j'ai pris ses menaces en compte et je l'ai écouté. Après tout, je m'étais déjà attachée à Jules, sinon je ne me mettrais pas dans un état comme celui-ci.

Je me suis regardée une dernière fois dans le miroir. Des mèches s'échappaient de mon chignon que j'avais passé une heure à faire. J'avais mis un fard noir sur mes paupières ainsi que du mascara pour faire ressortir mes yeux. Le blush que j'avais énormément estompé sur mes joues, se voyait toujours autant. Quant à mon rouge à lèvre, c'était la seule chose dont j'étais fière. Mes yeux se posèrent sur ma robe noire, je ne savais même pas si elle m'allait bien.

J'ai bruyamment soufflé et j'ai éteint la lumière de la salle de bain avant de changer d'avis. Je suis sortie de la pièce, j'ai pris mon portable et j'ai regardé l'écran. Un message.

De Paul :
T'es magnifique <3

J'ai secoué la tête, lâchant un petit rire. Il se doutait que je me trouvais affreuse dans la tenue qu'il avait pris soin de me choisir.

Je n'ai pas répondu et j'ai rangé mon portable dans mon sac à main, que j'ai attrapé à la volée en sortant de ma chambre. J'ai vérifié que j'avais bien éteint toutes les lumières et fermé toutes les fenêtres, et j'ai enfilé une veste. Il faisait encore très bon en cette fin de mois de septembre. Je suis sortie de mon appartement après avoir claqué la porte et j'ai descendu les escaliers en faisant extrêmement attention de ne pas me tordre la cheville avec mes escarpins.

*

Je suis arrivée devant le petit restaurant vietnamien qu'avait choisi Jules pour ce soir. C'était vraiment mignon. Il y avait plein de jolies guirlandes accrochées sur la devanture du restaurant, et cela lui donnait un réel charme. J'ai scruté les alentours, mais il se trouvait que j'étais la première. J'ai donc décidé de l'attendre à l'extérieur.

J'avais une espèce de boule au ventre, et je ne savais pas si c'était dû à de l'excitation ou à du stress. Dans tous les cas, je détestais cette sensation.

J'ai senti des mains s'enrouler autour de ma taille et je me suis instinctivement crispée. Je détestais ce genre de contact. Je me suis brusquement retourné et quand j'ai été face à sa petite tête d'ange, mon cœur a fait un bon dans ma poitrine. Il était super mignon.

Il a esquissé un petit sourire puis il a plongé ses billes noisette dans les miennes.

—  Salut, ai-je timidement dit.

Il m'a caressé la joue puis il m'a salué à son tour. Il a pris ma main et m'a invité à entrer dans le restaurant. Il avait réservé une table à son nom et je ne pus m'empêcher de me le répéter dans ma tête. Jules Folati. Je l'ai donc associé à mon prénom comme le font les petites filles avec le nom de leur amoureux. Athéna Folati. J'aimais beaucoup.

Le serveur nous a indiqué notre table, qui se trouvait dans un coin isolé du restaurant. La lumière était tamisée et créait une ambiance tout de suite beaucoup plus intime. Jules m'a laissé m'assoir sur la banquette en cuir et il pris place devant moi. Le serveur nous a tendu les menus, que nous avons pris avec plaisir, puis il nous a laissé tous les deux. Je sentais que Jules me dévorait du regard et cela me déstabilisait.

—  Je suis content de te voir, a-t-il fini par dire.

Mon cœur s'est emballé et mes joues se sont empourprées, ce qui eu le don de le faire sourire. Moi aussi, j'étais ravie de le voir.

—  J'espère que tu aimes la cuisine vietnamienne, a-t-il dit.

—  J'adore ça !

Il a paru soulagé puis il a porté son attention sur le menu. J'ai fait de même, laissant mes yeux parcourir le papier. Un autre serveur est venu pour prendre nos commandes. Je lui ai demandé des nouilles sautés accompagné de porc au caramel tandis que Jules a choisi un bobun. Il a également demandé une bouteille de champagne, ce qui m'a fait sourire. Il était extrêmement mignon.

Le serveur est parti mais il est vite revenu avec la bouteille de champagne pour nous servir. Une fois la tâche accomplie, il nous a laissé profiter l'un de l'autre. Nous avons tous les deux levé nos verres, avec le même sourire malicieux scotché sur le visage.

—  Santé !

Il m'a raconté son début de semaine, ses heures passées au café, à la salle de sport ou avec ses amis. Puis, je lui ai raconté la mienne, qui était nettement moins passionnante. Je lui ai rapidement parlé de mon meilleur ami et j'ai précisé qu'il avait insisté pour choisir ma tenue de ce soir, mais je n'ai pas parlé de lundi et de ma crise de panique, refusant d'aborder ce sujet dont j'avais honte.

—  Tu es vraiment très jolie avec cette robe, m'a-t-il complimenté.

Je l'ai remercié avec un simple sourire. Ses compliments me touchaient plus que ce qu'il ne pensait.

—  Sinon, ai-je dit, tu reprends quand tes cours de droit ?

Il a grimacé. Oui, j'étais l'horrible fille qui lui rappelait que nos vacances allait bientôt toucher à leur fin.

—  Lundi prochain, a-t-il bougonné, et toi ?

—  Dans une semaine.

Il a souri, l'idée avait l'air de lui plaire bien que je ne comprenais pas pourquoi.

—  Tu viendras me chercher alors, m'a-t-il lancé.

J'ai lâché un petit rire et j'ai hoché la tête. Je viendrai le chercher.

—  Chloé m'a dit que le père de ton meilleur ami travaillait dans un studio d'enregistrement et qu'il pourrait la recevoir, m'a-t-il raconté.

J'ai de nouveau hoché de la tête.

—  Oui, je vais me renseigner mais ça devrait pouvoir se faire, l'ai-je informé.

Il m'a souri, ravi. Je savais que sa meilleure amie comptait énormément pour lui. Cela me faisait plaisir d'aider Chloé. C'était une fille très gentille.

—  C'est génial, merci beaucoup Athéna.

—  Ça me fait plaisir.

Il a porté sa coupe de champagne à sa bouche et il a bu une gorgée. Il adorait me voir l'observer dans ses moindres faits et gestes, pourtant je pourrais vous jurer que je ne le faisais pas exprès. Mes yeux étaient comme intrigués, dans les bons sens du terme, par sa façon d'agir.

Le serveur nous a apporté nos plats puis s'est éclipsé comme il était venu. Nous nous étions légèrement rapprochés et sa main était posée sur la mienne. J'avais extrêmement chaud et son regard qui me détaillait me faisait rougir. Heureusement que l'obscurité de la pièce l'empêchait de voir la couleur de mes joues. Je sentais son souffle et ses pupilles dilatées me transmettait un message que j'avais déjà compris.

—   Me estoy muriendo por comer tus labios, ai-je murmuré.

Je savais qu'il ne comprenait pas le sens, et je me suis servi de son ignorance pour casser cette ambiance qui m'angoissait.

— Ça veut dire que c'est chaud, tu te souviens ? lui ai-je rappelé.

J'ai vu qu'il était déçu. Mais je ne voulais pas qu'il m'en veuille, j'étais seulement terrifiée. Il a baissé la tête avant de grommeler :

— Ah oui, c'est vrai.

*

Nous sommes sortis du restaurant, j'avais passé une excellente soirée et j'avais super bien mangé. Je n'avais fait que rigoler à la fin du repas, lorsque Jules me racontait des petites anecdote sur lui, étant petit.

Nous sommes arrivés, beaucoup trop vite à mon goût, devant mon immeuble. Je me suis arrêtée devant la porte de l'immeuble et je me suis tournée vers lui.

— Merci beaucoup, j'ai passé une excellente soirée, lui ai-je dit.

Il m'a souri et m'a dit que c'était réciproque. Il a attrapé ma main pour entremêler nos doigts. J'ai plongé mes yeux dans les siens et j'ai été comme hypnotisée. Il avait des yeux magnifiques, qui pétillaient de bonheur et de malice. Il s'est rapproché un peu plus de moi, nos visages n'étaient plus qu'à quelques centimètres loin l'un de l'autre. Cela ne me dérangeait pas, étrangement ça ne me faisait pas peur, j'aimais ça même. Nous étions comme dans une petite bulle, à l'abri de toutes ces choses horribles qui pouvait se dérouler dans cette rue parisienne. Mon cœur battait tellement vite que c'en était même inquiétant.

—   Me estoy muriendo por comer tus labios, ai-je chuchoté.

Ses sourcils se sont froncés et j'ai immédiatement regretté ce que je venais de dire. J'avais dit ça sans réfléchir et j'étais maintenant dans une galère pas possible. Je lui ai offert un petit sourire timide avant de lui avouer mon mensonge :

— En réalité, cela veut dire que je meurs d'envie de manger tes lèvres.

Mes joues se sont empourprées et j'ai honteusement baissé la tête. Ses doigts sont venus délicatement attraper mon menton et ils m'ont forcé à le regarder.

— J'en meurs d'envie, moi aussi, a-t-il répliqué.

Et il a posé ses lèvres sur les miennes.

Mes mains sont venues encercler sa nuque et je l'ai embrassé passionnément. Mon ventre a laissé échapper un millard de papillons et à cet instant précis, je me sentais incroyablement bien. C'était comme si le temps s'était arrêté et je ne regrettais plus du tout ma gaffe. Je ne pensais a rien hormis à ce que j'étais en train de faire, j'étais comme invincible.

Notre baiser a pris fin et nous avons repris notre souffle. Je ne l'ai pourtant pas lâché du regard et un sourire est venue fendre mes lèvres. Oui, je ne regrettais rien et je ne me rendais pas encore compte de l'ampleur des sentiments que j'éprouvais pour lui.

— Bonne nuit, mon trésor, a-t-il chuchoté avant de déposer un chaste baiser sur mes lèvres rouges.

J'ai souri et j'ai tourné les talons. Je me suis apprêtée à ouvrir la porte lorsque je me suis vivement retourné. Il y avait toujours cette chose qui me tracassait et j'avais besoin de lui en parler. Je voyais qu'il s'inquiétait, et je me suis dépêchée de lui dire ce qui me tracassait.

— J'ai besoin de prendre mon temps Jules. Tu sais je crois que je ne me rends pas compte que je t'aime vraiment bien. J'ai peur et je ne veux pas me précipiter. Je ne veux pas te faire de faux espoirs, d'accord ?

Il a souri et je me demandais si il avait bien compris ce que je venais de lui dire.

— Ça veut dire que nous sortons ensemble ?

J'ai lâché un petit rire, il me faisait craquer.

— Oui.

Ses lèvres ont laissé apercevoir ses dents et il m'a attrapé par la taille pour me coller à lui.

— On va prendre tout notre temps alors, m'a-il répondu.

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