25 : La décision catégorique d'Athéna.
ATHÉNA
« Moral du Samedi 9 Avril 2018 : ... je ne sais pas.
Actuellement, je m'occupe d'un patient très attachant. Jacques Pichet a vingt-quatre ans et il est atteint d'autisme. C'est un garçon extrêmement attachant, qui, à chaque séance m'apporte un bouquet de fleur. Jacques est intéressé par énormément de choses et déborde d'imagination. Il porte beaucoup d'intérêt pour tout ce qui est écologie.
Toutes mes séances avec lui sont extraordinaires. Parfois, il lui arrive de ne pas être de bonne humeur mais cela n'empêche pas que j'apprends énormément. Il peut arriver très énervés et repartir complètement calme. Il est incroyable. Il peut avoir certaines réactions étonnantes, cependant cela reste un individu très sensible.
A chaque séance, il me pose une question qui lui semble importante. En ce moment ce qui l'intéresse, concerne l'Amour. Il espère au plus profond de lui qu'un jour il aura la chance de connaître ça. Et je l'espère également. Ce n'est pas facile pour lui. Il a été habitué à ce qu'on le juge, qu'on ricane en le voyant, à ce que les autres prennent peur à cause de lui et de ses réactions. Aucune fille le regarde et ça le chagrine. Ce que je comprends totalement.
Il me dit souvent qu'il se sent rejeté, regardé comme quelqu'un d'anormal. C'est triste. Pour moi, les gens ont du mal à paraître normal face à ces différences. Autisme est associé à plein de termes péjoratifs qui n'ont rien à voir avec la maladie en question. Les gens sont parfois effrayés, parfois méchant... mais surtout parfois ce n'est même pas voulu. Nous devrions apprendre à intégrer ces personnes atteintes d'autisme. Ces dernières sont si fascinantes.
Sa mère l'attend toujours dans la salle d'attente. Elle est très patiente. C'est une personne adorable. L'amour qu'elle porte à son fils est tellement visible que parfois cela me perturberait presque. Parfois elle a l'air de souffrir, cela ne doit pas être facile de voir son fils seul, observé par tout le monde comme s'il s'agissait d'une bête de foire. Et puis en plus de ça, elle doit être tout le temps disponible, et je pense qu'à la longue même si l'on a beau aimé dur comme fer son enfant, cela doit être épuisant.
Choses positives de la journée : J'ai regardé trois épisodes de Oggy et les cafards. Je me suis levée à 10 heures. Je vois Paul dans une demi-heure. »
La sonnette a retenti de nombreuses fois dans mon appartement pour que je me décide enfin à lâcher mon stylo et à aller ouvrir. Paul se tenait devant ma porte, essoufflé. Il portait un sweat violet qui rappelait légèrement les années 80, et une veste en velours que je lui ai offerte l'année dernière pour son anniversaire. J'ai arqué un sourcil, surprise de le voir si épuisé.
— J'ai monté les escaliers en courant, m'a-t-il informant en me poussant pour rentrer.
J'ai hoché de la tête et je l'ai laissé rentrer chez moi.
— On y va ? Je pensais que t'étais prête ! Qu'est-ce que t'attend ? s'est exclamé mon meilleur ami en fronçant les sourcils.
Je suis allée dans ma chambre en râlant pour attraper une veste et enfiler une paire de basket puis je l'ai rejoint. Nous sommes ensuite sortis de mon appartement.
Cela faisait quelques jours que je devais prendre un café avec Paul. On faisait ça de temps en temps, quand on voulait sortir tous les deux. Il y a plusieurs cafés sympa autour de chez moi, et les prix sont raisonnables. Paul m'a fait découvert plein de beaux endroits et m'a changé mon habitude.
Aujourd'hui nous avons choisi celui à deux rues de chez moi. L'ambiance chaleureuse, l'odeur de café et le bruit pas trop important me plaisaient dans cet endroit. Nous nous sommes adressés à un serveur qui nous a immédiatement indiqué une table près d'une fenêtre. Je me suis installée sur la banquette et j'ai attrapé la carte que je connaissais assez bien maintenant.
Quand je me suis enfin décidée à prendre un chocolat chaud et une gaufre maison, le serveur est de nouveau apparu pour prendre nos commandes. Le personnel était super agréable, et nous n'avons jamais attendu trop longtemps.
— T'as passé une bonne semaine, ai-je enfin demandé à Paul.
Il a hoché de la tête.
— J'ai vu pas mal de fois Chloé. Je suis content, on arrive de plus en plus à passer du temps ensemble.
J'ai souri, heureuse pour lui. Chloé était quelqu'un de très gentil et cela me rendait triste de ne plus vraiment la voir. Nous nous sommes croisés une ou deux fois grâce à Paul mais pas plus.
— Et toi, ça va ?
— Je suis exténuée, la semaine était interminable. J'ai quelques épreuves qui arrivent bientôt en plus...
Il a secoué la tête et m'a interrompu :
— Athéna, chérie, tu sais très bien où je veux en venir, n'évite pas le sujet.
J'ai dégluti en comprenant que j'étais entièrement piégée. Il voulait que je lui parle de Jules, pourtant il n'y avait rien à dire sur ce sujet clos depuis déjà quelques temps maintenant.
— Rien de neuf.
— Il t'envoie toujours quelques messages ?
— Non, plus du tout.
Paul ne souriait plus, contrarié par mes réponses.
— Je ne comprendrais jamais ce qu'il s'est passé. Pourquoi tu lui en veux autant pour une histoire aussi ridicule. Il t'aime tellement. Et toi aussi, tu l'aimes. T'essaies de me prouver le contraire, mais je te connais Athéna, t'as plus ce même regard joyeux que tu as avec lui.
J'ai froncé les sourcils, n'appréciant pas ce qu'il me disait. Il n'avait pas le droit de se mêler de cette histoire. C'était ma décision qu'il soit d'accord ou non. En plus de ça, il était quand même très mal placé pour me dire ce genre de chose, étant donné qu'il sortait avec la meilleure amie de mon ex.
Cela faisait au moins un mois que je n'étais plus avec Jules. La semaine qui a suivi notre séparation brutale, il m'a harcelé nuit et jour d'appels et de messages. Il faisait tout pour me contacter. Je lisais chacun de ses messages et ne répondais à aucun de ses appels. Je ne souhaitais pas revenir sur ma décision. Malgré tout, ses messages adorables m'avaient touché plus d'une fois. Mais c'était plus fort que moi, je n'étais pas capable de le pardonner. Je lui en voulais énormément.
Il s'est finalement lassé de m'envoyer tout un tas de messages et de n'obtenir aucun signe de ma part. Peut-être s'est-il rendu à l'évidence, nous ne nous remettrons pas ensemble.
— Tu n'es pas moi Paul, lui ai-je durement répondu.
— C'est clair puisqu'à ta place je serai encore avec lui.
Sa réponse m'a blessé. En tant que meilleur ami, il se devait au moins d'essayer de me comprendre. Hors depuis le début, il ne cessait de me répéter que je faisais n'importe quoi. Et cela m'agaçait. Il me donnait l'impression d'avoir choisi son camp : définitivement pas le mien.
— Malheureusement pour Jules, tu n'es pas à ma place. Donc lâche-moi.
Paul m'a lancé un regard hargneux. Il s'apprêtait à répliquer mais le serveur nous a gentiment interrompu. Ce dernier a déposé notre commande sur la table en bois et nous a ensuite laissé, dans un silence pesant.
J'ai attrapé ma cuillère et je l'ai enfoncé dans mon chocolat chaud. Je l'ai machinalement tournée, faisant mine d'être très concentrée.
— Je dois aller acheter une nouvelle table pour ma cuisine, m'a informé Paul. Tu voudrais bien m'accompagner ?
J'ai relevé la tête, le fixant des yeux. J'ai finalement accepté, mettant fin à notre légère querelle.
Au bout d'une heure, après avoir fait le tour de toutes les petites histoires dont nous devions parler, nous avons quitté le café. Il pleuvait des cordes, l'air était glacial. Nous avons dû regagner mon appartement en courant le plus vite possible. Arrivés dans le hall de l'immeuble, nous étions entièrement trempés. De la tête, aux pieds. Paul est alors monté chez moi pour se sécher et je lui ai proposé de rester dîner chez moi.
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