17 : Le dîner colombien chez les parents d'Athéna.
ATHÉNA
« Moral du vendredi 26 janvier 2018 : moyen.
Hier j'ai eu ma dix-huitième consultation avec Mathilde Satier, ma patiente anorexique de seize ans et demi. Elle ne va pas bien, même si elle me ment droit dans les yeux et qu'elle me jure le contraire, j'arrive à lire son mal-être rien qu'à travers ses yeux. Pourtant, je n'arrive pas à comprendre les causes de son malheur. J'aimerais l'aider, mais elle ne me laisse aucun indice, aucune porte. Si, juste une : son application de Fitness qui la rend dingue et celle sur le jeûne, qui la pousse à être encore plus maigre.
Elle m'avait expliqué que vers l'âge de quatorze ans, elle n'appréciait plus son corps. Elle cherchait à perdre du poids ou bien faire du sport pour dissimuler sa "graisse". Elle avait ensuite découvert son application de Fitness. Une simple application qui la poussait à faire vingt minutes de sport par jour. Rien de bien méchant. Jusqu'au jour où une pub sur son smartphone a attiré son attention. C'était une pub concernant une application sur le jeûne à base d'eau. Le principe ? Partager son jeûne et suivre celui des autres. Elle était tout simplement devenue dépendante à ces applications et elle avait développé une sorte d'addiction au fait de suivre son apport calorique.
Dès qu'elle quitte mon cabinet, j'ai envie de pleurer. Elle ressemble à un fantôme, sa pâleur me terrorise, et sa maigreur me retourne l'estomac. Plus rien ne lui fait peur. Même pas le fait d'être hospitalisée. Elle s'en fiche. J'ai l'impression que tout ce qu'elle veut : c'est effleurer lentement, très lentement la mort. Alors que manger n'est pas compliqué, il suffit d'ouvrir la bouche. Cela ne devrait pas être un calvaire, mais simplement un moment de pur plaisir. En plus, Mathilde est une jolie fille. Elle est grande, avec des grands yeux en amandes marron, un grain de beauté sur la joue droite et un petit nez. Je ne sais pas si elle se rend compte qu'elle fout sa vie en l'air.
Ce qui me donne le plus envie de vomir, n'est pas sa maigreur ou alors son envie de mourir – bien que cela me torture – mais c'est plutôt le fait que je me retrouve chez elle. Je connais cette sensation, je l'ai vécu. J'ai moi-même était victime de troubles alimentaires. Mais s'il y a bien une chose que je peux assurer, c'est une des pires conneries que j'ai fait, de tomber dans l'anorexie. Les troubles alimentaires, c'est une spirale qui vous aspire en entier, jusqu'à votre dernier kilo. Cette maladie est gravée à vie, qu'on le veuille ou non. Cette maladie est horrible, elle nous rend fou. Je me souviens encore de la petite voix dans ma tête qui faisait le calcul du nombre de calorie qu'il y avait dans n'importe quel aliment. J'avais surnommé cette voix Candy. Elle essayait à longueur de journée de me faire culpabiliser.
J'espère que Mathilde se rendra compte de la connerie qu'elle fait avant qu'il ne soit trop tard.
Choses positives de la journée : Jules vient dîner avec moi chez mes parents. J'ai hâte de le présenter à ma famille. »
J'ai refermé mon journal et j'ai reposé mon stylo sur mon petit bureau. J'avais l'impression de m'être relâchée d'un poids immense. Je me suis levée de ma chaise et je suis sortie de ma chambre pour ranger un petit peu mon appartement. Je faisais partie de ces personnes qui avaient besoin d'avoir un appartement bien rangé pour se sentir bien. Il était bientôt dix-huit heure et Jules passait me chercher dans une heure pour qu'on aille dîner chez mes parents. J'étais stressée, peut-être moins que lui, mais je l'étais. J'avais vraiment peur que mon frère, ma mère et mon père ne l'apprécient pas. Je ne présentais pas ma famille à tout le monde. Quand je le faisais, c'était parce que j'étais vraiment attachée, que ça soit pour des relations amicales ou amoureuses. Cela voulait dire que j'imaginais mon futur avec la personne.
J'ai respiré un bon coup, vidant mon esprit des ondes négatives qui s'étaient accumulées dans mon esprit en quelques secondes. Il ne fallait pas que je pense au pire. On ne pouvait qu'apprécier Jules.
Je suis retournée dans ma chambre et j'ai choisi une tenue simple. Même si j'allais manger chez mes parents, je voulais être jolie pour mon copain. J'ai donc filé dans la salle de bain et j'ai sauté dans ma douche. Je suis passée de l'eau chaude, à l'eau froide, sans oublier de me laver, puis je suis sortie de la cabine de douche enroulée dans une serviette molletonnée. Je me suis séchée les cheveux, j'ai enfilé mon jean et mon pull préféré et je n'ai pas oublié de mettre du déodorant ni même du parfum. J'ai ensuite regardé mon reflet dans mon miroir, analysant lentement mon visage. J'ai décidé de mettre du mascara sur mes cils, un rouge à lèvre clair sur mes lèvres et de l'highlighter. J'adorais ma poudre nacré qui faisait briller ma peau. Après m'être extasiée sur mon maquillage, je suis sortie de ma salle de bain et j'ai enfilé mon unique paire de talons sans oublier de mettre une paire de basket dans mon sac à main. Toujours avoir une paire de chaussures plates sur soi, c'est une règle d'or.
Comme par hasard, Jules est arrivé. Il était chiquement vêtu, il avait même mis du gel et son fidèle parfum.
— T'es magnifique, m'a-t-il dit en déposant un baiser sur la commissure de mes lèvres.
J'ai souri, j'ai attrapé le col de sa chemise et je l'ai embrassé avant de dire :
— Toi, t'es super sexy.
Il m'a lancé un sourire fier et m'a fait un clin d'œil. Je l'ai invité à entrer et il s'est assis sur mon canapé, attendant que je finisse de ranger la vaisselle que j'avais lavé toute à l'heure.
— Excuse-moi de t'avoir laissé la dernière fois.
J'ai tourné la tête vers lui en refermant mon placard. La dernière fois que nous nous étions vus, j'avais eu la chance de revoir mon horrible voisine. Elle avait osé me dire que j'avais fait du mal à Thomas, elle avait osé prendre sa défense alors qu'elle savait très bien qu'il me battait. Cela m'avait chamboulé.
— T'en fais pas, Chloé avait besoin de toi, tu as bien fait d'aller la voir, lui ai-je répondu en m'asseyant sur ses genoux.
— Toi aussi, tu avais besoin de moi.
J'ai souri. Mes mains ont entouré sa nuque et j'ai déposé un chaste baiser sur ses lèvres.
— On y va ?
Il a acquiescé, et je l'ai senti légèrement stressé.
— Ça va bien se passer, l'ai-je rassuré.
— C'est ce que ma mère n'a pas arrêté de me répéter, a-t-il ri de manière nerveuse.
— Les mères ont toujours raison, lui ai-je rappelé.
Je me suis levée, je suis allée chercher mon manteau dans la chambre et j'ai retrouvé Jules dans mon entrée. Nous sommes sortis, j'ai refermé la porte et nous sommes entrés dans mon petit ascenseur, que je ne prenais que très rarement par peur de me retrouver coller à l'un de mes voisins.
— C'est trop joli le truc que t'as mis sur ton visage, ça brille de partout.
J'ai souri et je l'ai remercié.
*
— Holà cariño ! s'est exclamée ma mère quand nous sommes entrés.
Elle m'a immédiatement serré dans ses bras, me parsemant de baisers un peu partout sur le visage, puis elle s'est tournée vers Jules. Elle a esquissé un petit sourire malicieux après l'avoir longuement observé.
— Bienvenida Julio, soy Carolina.
J'ai senti Jules se tendre. Le pauvre, lui qui ne parlait pas un seul mot d'espagnol.
— Mama, il parle pas espagnol, lui ai-je rappelé.
— Ah sí, c'est vrai !
Elle a éclaté de rire en tapant dans ses mains puis lui a dit :
— Enchantée Jules, je suis la maman d'Athéna. Tu peux m'appeler Caro.
Elle lui a fait la bise et nous a fait entrer. J'ai débarrassé Jules de son manteau, et on s'est avancé dans l'appartement de mes parents. Cela me faisait toujours bizarre de revenir ici, j'avais vécu dans cet appartement pendant très longtemps mais ce n'était plus chez moi.
— Tu ressembles énormément à ta mère, m'a soufflé Jules.
— Tu trouves ?
Il a vivement hoché la tête et ça m'a fait rire. On me le disait souvent, on me disait aussi que j'avais le même truc qui pétillait dans le regard qu'elle.
Mon père est rapidement venu nous accueillir, dès qu'il eu échangé sa poignée de main avec mon copain, j'ai compris qu'il l'appréciait. J'arrivais à percevoir ce genre de chose à travers le regard de mon père. Nous nous sommes assis dans le salon et mon frère nous a immédiatement rejoint.
— Salut Pablo, ai-je dit, je te présente Jules.
Mon frère s'est tourné vers Jules, sans laisser paraître la moindre émotion. Il a simplement hoché de la tête, lui a tendu la main, puis après avoir échangé une poignée de main extrêmement viril, il s'est assis à mes côtés.
Depuis que mon frère avait compris qu'il avait échoué à sa mission de me protégé lorsque j'avais mis un terme à ma relation avec Thomas, il s'inquiète tout le temps pour moi. Il prend tous les jours de mes nouvelles, demande en plus à Paul si je vais bien, et essaie de passer me voir dans mon appart assez régulièrement. J'ai bien compris qu'il se méfiait de Jules. J'espérais seulement qu'il comprenne vite que mon copain était le plus gentil du monde.
Ma mère est arrivé avec un plateau d'apéritif et nous a tous servis un verre qui contenait une boisson colombienne qu'elle venait sûrement de faire.
— C'est une spécialité de Colombie, ai-je soufflé à l'homme que j'aimais.
Il m'a jeté un petit regard avant d'acquiescer. Nous avons tous trinqué, puis nous avons bu et manger les apéritifs qu'avait préparé ma mère.
Nous sommes ensuite tous passés à table, et Jules a eu le droit à un interrogatoire. Mes parents lui ont demandé ce qu'il faisait comme étude, ce qu'il voulait faire plus tard, où est-ce qu'il habitait, de quelles origines il était, si il avait des frères et sœurs...
L'ambiance était super agréable, nous étions tous détendus et nous rigolions beaucoup. Ma mère était ravie de voir que Jules adorait sa cuisine, et mon père extrêmement content de pouvoir parler de foot avec lui. Même mon frère avait baissé ses gardes et avait participé à la discussion. J'étais tout simplement ravie.
— On y va ? ai-je demandé à Jules.
Il a haussé les épaules, l'air de dire qu'il me laissait le choix. Je me suis donc levée de table en déclarant.
— Vale, nos vamos, es tarde y tenemos que descansar, ai-je déclaré.
— Claro cariño, a dit ma mère.
Nous nous sommes tous levés, et malgré le fait qu'ils soient tous déçus que nous partions ils nous ont accompagné jusqu'à la porte. Nous avons salué ma famille.
— Vous revenez vite manger à la maison, nous a dit mon père.
Jules a souri, il a hoché de la tête et nous sommes tous les deux rentres chez moi.
« Chose positive de dernière minute : j'ai eu un orgasme »
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