Chapitre 5
Je n'ai jamais été très tactile, voir pas du tout. Je n'ai jamais vraiment aimé les accolades, ou d'autre marque d'affection. Je supporte encore moins lorsque des gens me touchent pas inadvertance dans les transports en communs ou dans les magasins. D'ailleurs je déteste les endroits où il y a trop de monde, les moments où tu te sens tellement compressée que tu n'arrives plus à respirer. Et quand je marche dans la rue, je ressens toujours une légère angoisse lorsque je croise quelqu'un sur le même trottoir que moi, j'ai toujours peur que cette personne se mette à me parler ou encore pire m'agresse alors je me met à presser le pas pour m'en éloigner le plus possible. Je sais, c'est stupide.
Aujourd'hui, nous sommes le trente août. Les vacances approchent de leur fin. C'est pour cette raison que je suis restée au lit, jusqu'à onze heures. De toute façon, Nadia et moi sommes seules jusqu'à la fin d'après midi. Ma mère et Alessandro sont partis déjeuner chez Dominique : la mère de mon beau-père. ( Je ne l'ai vu qu'une seule fois dans ma vie mais tout ce que j'ai retenu c'est qu'elle ne doit à priori pas savoir se servir d'une brosse à dents. Et puis, elle n'arrête pas de parler et de raconter les moindres détails de sa vie ce qui peut vite agacer. ) Et donc, après le repas, ma mère et Alessandro vont faire des courses pour le barbecue de ce soir. Ils ont invité beaucoup de personnes. Sauf que moi, bien évidemment, je n'ai pas pu inviter qui je désirais :
Nous étions tous dans le salon quand ma mère a parlé de son barbecue. Nadia s'était tout de suite enflammée :
- Je peux inviter Enzo ?
Enzo c'est son petit-ami, depuis quelques semaines. Je trouve qu'il ressemble à un castor, franchement Nadia n'a pas su choisir cette fois-ci. Enfin, ça ne reste que mon avis...
- Bien-sûr, a accepté ma mère en sortant une feuille, sans doute la liste des invités.
- Et moi je peux inviter Lysandre et Callista ? ai-je ajouté d'une façon très enthousiaste.
- Nous allons être trop nombreux Isis, choisis un seul des deux, de préférence celui qui mange le moins pour nous éviter trop de dépense.
Venait-elle vraiment de me dire ça ?
- A t'entendre j'ai l'impression que mes amis sont des ogres ! me suis-je énervée.
- Non, seulement nous allons être beaucoup. Et puis sans vouloir être méchante, il y a une de tes amies qui a l'air de beaucoup apprécier la nourriture.
- Si tu parles de Vanessa, ce n'est plus mon amie depuis la sixième.
Et puis Alessandro a décidé d'intervenir :
- A mon avis nous sommes déjà beaucoup trop, tu ne peux inviter personne, désolé Isis.
Lui, j'avais vraiment envie qu'il soit le repas de ce soir. Il se permettait de donner son avis alors qu'il n'était même pas concerné, comme d'habitude.
- Sur le grill, ai-je murmuré en serrant les dents.
- Je te demande pardon ? a-t-il dit.
Moi qui pensais avoir parlé assez doucement pour que personne n'entende, me suis-je dit.
- Rien !
Je suis ensuite repartie énervée comme je ne l'avais jamais été.
Revenons-en à aujourd'hui. Je suis donc censée participer à ce fichu barbecue sauf que je vais vraiment m'ennuyer étant donné qu'il n'y aura personne avec qui j'ai envie de passer cette soirée. Pas que je n'apprécie pas les gens mais plutôt que je serai la seule adolescente avec ma sœur et son copain. Bref. Je vais m'amuser !
* *
La journée est finalement passée vite mais je n'ai aucune envie que les invités arrivent. Je me suis préparée rapidement. C'est à dire que je n'ai pas fait grand chose à part enfiler mes vêtements, mettre des chaussures, un coup de mascara et brosser mes cheveux. De toute façon ce n'est pas comme si j'allais rencontrer l'homme de ma vie à cette soirée.
Je n'ai pas eu d'autres choix que d'aider à cuisiner. Ma mère et la chose qui me sert de beau père, ont acheté beaucoup de choses donc il ne reste plus beaucoup de nourriture à préparer sauf les salades et d'autres plats ou dessert dans ce genre.
Je suis donc en train de découper soigneusement des pommes de terres pour réaliser une magnifique salade de piémontaise avec amour. Non, je plaisante. Je n'en ai strictement rien à faire et je découpe les pommes de terres n'importe comment. De toute façon, ce n'est pas censé être un repas cinq étoiles alors ça m'importe peu. Et puis, étant donné que je jette les féculents avec force dans le saladier, ça n'arrange pas la chose !
- Isis ? Quand tu auras fini, tu voudras bien te charger de la salade de fruits ? m'interroge ma mère en sortant des assiettes et des couverts.
- Oui, oui...
De toute manière ce n'est pas vraiment comme si j'avais le choix. Autant faire ce qu'elle demande.
Je finis de m'occuper de la salade et la laisse à ma sœur. Puis, je vais dans le frigo et tire le bac à légumes. J'attrape des bananes, des fraises et le referme après avoir pris du jus d'orange. Je fais simple comme dessert, je n'ai pas que ça à faire de passer mon temps libre à découper des fruits. De toute façon, ma mère a déjà fait une tarte citron meringuée et quelqu'un va sans doute apporter autre chose. Et puis si quelqu'un a encore faim, il n'aura qu'à manger Nadia ou Alessandro.
Une fois ma salade de fruits préparée et placée au frais, je décide de rejoindre tout le monde dehors, sur la terrasse. La table est déjà mise, ce sera déjà ça de moins à faire. Ma sœur est au téléphone, sans doute avec son cher Enzo. Elle ne peut pas s'empêcher de parler fort et de glousser stupidement, une vraie dinde, désespérante. Bref, moi je n'ai rien à faire comme toujours alors je prends place autour de la table et observe le ciel. Il est bleu, sans aucun nuage et dehors il fait toujours aussi chaud. Une chaleur étouffante qui ne me donne qu'une envie, celle de sauter habillée dans une piscine.
- Je crois que nos premiers invités arrivent, se réjouit ma mère en se dirigeant vers le portail du jardin.
Je lâche un très long soupire. J'ai rarement eu aussi peu envie d'être sociable.
Les "premiers invités" sont Micheline et Bertrand. La femme tient dans ses mains un gâteau dégoulinant de crème tandis que son mari porte un plateau recouvert de papier aluminium. Qu'est-ce qu'ils ont ramené encore ?
- Bonjour tout le monde, sourit Micheline en posant le dessert pour aller serrer ma mère dans ses bras comme si elle ne l'avait pas vu depuis des milliers d'années.
Alessandro arrive ensuite et serre la main de Bertrand tandis que je me lève à contrecœur pour être polie. Étonnement, même Nadia raccroche le téléphone et le glisse dans sa poche.
Deux minutes après avoir salué tout le monde, les autres personnes commencent à arriver. Il y a ma tante que je n'ai pas vu depuis plusieurs mois avec ses fils de quatre et six ans, ainsi que mon autre tante avec sa fille de huit ans et leur mari respectif. En tout cas, je trouve ma cousine magnifique. Elle s'appelle Samantha et ses cheveux bruns bouclés lui arrivent en bas du dos. Elle est adorable avec sa robe blanche, par-contre je ne suis pas sûre qu'elle y reste très longtemps.
Reprenons donc la liste des invités. Il y a aussi quelques personnes de la famille d'Alessandro dont je ne vais pas retenir le nom et enfin des collègues et amis à lui et à ma mère. Enzo est le dernier à arriver ce qui fait que Nadia est très en colère contre lui et qu'elle lui en veut énormément. Oh... Quelle tragédie !
Autre qu'eux deux, les seules personnes les plus proches de mon âge sont les jumeaux Hugo et Clara. Ils ont treize ans. Sauf qu'il y a un léger problème : je ne les aime pas.
- Tu joues au foot avec moi ? me propose mon cousin de six ans après avoir fini son verre de jus de fruits.
Cet enfant me fait penser à Jack. Ils se ressemblent physiquement et il est aussi adorable que mon petit frère l'était...
- Plus...
- Excusez-moi pour le retard, s'exclame le voisin en arrivant avec une salade de taboulé dans les mains.
Oh non... J'avais complètement oublié qu'il devait venir. Je pensais qu'on était tous déjà là et que plus personne n'allait venir. Ce dîner va être un véritable enfer.
- Oh ce n'est rien, rigole ma mère en le saluant.
Il vient vers moi et me fait la bise en posant ses mains sur mes épaules alors que je n'avais rien demandé. Je me dégage rapidement et me dirige à l'autre bout de la table. Je ne ressens en aucun cas l'envie de rester un instant de plus en sa présence. Cet homme m'insupporte. En plus de ça, il a mis un parfum absolument immonde qui m'a presque coupé l'appétit. Une horreur.
Je m'ennuie déjà, appuyée contre le mur blanc de la maison. C'est donc pour cette raison que je me met à compter les secondes qui défilent, le bruit des conversations loin de moi comme si une barrière invisible se dressait entre moi et les convives. Je n'ai trouvé que cette "activité" pour m'occuper, de toute manière je suis aussi utile à ce dîner qu'une plante verte. Personne ne me voit et je ne me soucie de personne. Bizarrement, ça me convient parfaitement. Je n'ai pas envie d'être sociable pour le moment. C'est au-dessus de mes forces.
J'en suis à 194 quand mon passe temps commence à m'ennuyer. Je saisis mon téléphone, le déverrouille et m'apprête à envoyer un message à Callista quand je m'aperçois de la présence de quelqu'un à ma gauche. Furieuse qu'on m'observe en train d'écrire - oui j'ai toujours détesté que quelqu'un observe ce que je suis en train de faire quoique ce soit-, je tourne brusquement ma tête avant de reconnaître mon cousin, celui de six ans.
- Dis, tu as quoi comme jeux sur ton portable ? me demande-t-il en tirant sur mon débardeur.
- Je n'en ai pas mais si tu veux j'ai des jeux de société, proposé-je.
J'ai bien un jeu sur mon téléphone, sauf que je ne suis pas sûre qu'un gamin de six ans soit capable d'y jouer. J'en installerai d'autre si je le pouvais sauf que ce fichu "espace de stockage saturé" m'empêche de le faire.
- Et tu joueras avec moi ? sourit-il.
Comment lui résister ? Il est si mignon.
- Bien-sûr, accepté-je en poussant la porte coulissante pour passer à l'intérieur.
Le petit me suit tandis que je me dirige vers une armoire, dans le couloir, où s'entasse des dizaines de jeux. J'ouvre le meuble en douceur, et désigne d'un geste de la main tout ce que peut prendre mon cousin.
Il a l'air intéressé par pleins de jeux et je les sors donc au fur et à mesure qui me les demande jusqu'au moment où un attire en particulier mon attention. C'est l'un des plus vieux que l'on possède, la boite est abîmée et je sais qu'il manque quelques cartes à l'intérieur pourtant il compte beaucoup pour moi. Je sens les larmes me monter aux yeux en repensant aux souvenirs qui s'y rapporte. Moi, Nadia, Jack, ma mère et... mon père. Le fameux jeu du dimanche après-midi quand il ne faisait pas assez beau pour sortir et s'amuser à l'extérieur. Savourant un délicieux chocolat chaud tout au long de la partie qui pouvait s'éterniser pendant des heures sans que nous, nous arrêtions. Je perdais souvent. Très souvent. La faute au dé qui ne tombait pas sur les faces dont j'avais besoin pour avancer. Ah... Ce fameux jeu... Je ne me souviens pas d'y avoir rejoué depuis la mort de Jack, je ne savais même pas que nous l'avions encore, je pensais qu'il était resté dans notre toute première maison lorsque nous avions déménagé et que mon père l'avait encore en sa possession.
- Hé Isis ! Viens !
Mon cousin me sort de mes pensées en me tirant la main pour que je le suive. Je croise les doigts pour qu'il choisisse tout sauf ce jeu. Je n'ai vraiment pas le courage de me remémorer encore plus de souvenirs qui s'y rapporte. C'est déjà suffisamment douloureux pour qu'on n'est pas besoin d'en rajouter une couche.
- Isis ! Où étiez-vous passés ? semble s'inquiéter ma mère quand je reviens sur la terrasse, une pile de jeux à la main.
Ils ont apparemment profité du peu de temps que je me sois absentée pour mettre une musique - que je n'apprécie pas -. Malheureusement, elle n'est pas assez forte pour couvrir le bruit des conversations inutiles et sans intérêt.
Pour répondre à la question de ma mère, mon cousin lui montre les boîtes que nous portons avant de s'asseoir à table et de se servir à boire.
Je prends place à sa droite pour pouvoir jouer avec lui et il choisit enfin ce dont il a envie.
Je me retiens de lâcher un soupire de soulagement quand son doigt se dirige vers une boîte ayant la forme d'un long rectangle. Cependant, il n'a pas choisi le jeu le plus pratique. Il s'agit d'une tour constituée de morceaux de bois que l'on doit enlever un par un sans que la construction ne s'écroule. Je sens que je vais le regretter.
Je me charge de l'installation et laisse mon cousin commencer. Tout en jouant, ma tante vient me poser des questions toutes plus gênantes les unes que les autres :
- Alors, Isis, comment ça va l'école ?
- Bien, marmonné-je en tentant de me concentrer.
Ce n'est absolument pas le moment de me déranger, est-elle stupide pour ne pas comprendre quelque chose de si simple ?
- Tu vas au lycée à la rentrée ?
- Oui.
- Et tu vas faire quoi comme études ?
- Je n'en sais rien.
Elle m'agace à la fin. Je ne veux pas discuter avec elle, je veux qu'elle me fiche la paix.
- Toujours pas de petit-copain ?
- Non.
Je déteste cette question. C'est comme remuer le couteau dans la plaie.
- Il n'y a pas un garçon qui t'intéresse dans ton entourage ?
Je serre les poings pour garder mon calme et me force à répondre d'une voix presque chaleureuse :
- Non.
- Tu as encore le temps de toute façon ! Sais-tu quand j'ai rencontré ton oncle ?
Je ne le sais pas et ça ne m'intéresse pas. Je suis déjà pire qu'agacée qu'elle me pose des questions sur ma vie privée devant tous les invités alors si elle pouvait éviter de raconter sa vie, ce serait légèrement mieux.
- Moi je sais ! intervient son fils après avoir joué.
- J'avais vingt trois-ans. La première fois que je l'ai vu c'était lorsque je suis allée chez le fleuriste. C'était lui le vendeur, qu'est-ce qu'il était charmant. Il m'a même offert les fleurs en me glissant son numéro de...
Je ne l'écoute plus, ne tenant pas à écouter ses histoires de cœur dépourvues d'intérêt mais pour lui faire croire le contraire, j'hoche la tête de temps à autre comme si j'étais intéressée.
Elle ferme enfin sa bouche quand la tour s'effondre ce qui fait de moi la gagnante car c'est mon cousin qui l'a fait chuter. Cela fait par-contre un bruit épouvantable qui fait sursauter toute la table laissant ensuite place à un blanc des plus gênants.
- Pff, j'ai perdu, râle mon cousin en ramassant les pièces.
- Vous devriez jouer à quelque chose d'autre, vous risquez de casser quelque chose, dit Alessandro en retirant une pièce en bois qui a atterri dans son verre de bière, éclaboussant son assiette et la moitié de la table.
- Vous verrez ça après, nous allons commencer à manger, décide ensuite ma mère en apportant des salades.
Elle repart de suite, sans doute pour aller chercher la suite du repas tandis que je finis de ranger l'intégralité du contenu du jeu dans sa boite. Puis, je fais de la place sur la table avant de me servir un verre de limonade. Même si ça ne gênerait personne que je boive de l'alcool, je n'en consomme pas. Je déteste ça de toute manière, à se demander pourquoi...
* *
Le reste du repas s'est déroulé d'une manière parfaitement normale. Dans l'ennui en ce qui me concerne mais sans encombre. Je me contentais de manger ma brochette avec des salades sans dialoguer avec quiconque. De toute façon, je ne vois pas ce que j'aurai pu dire et les sujets abordés ne me concernaient pas alors ce n'était pas intéressant.
- Isis ? Bingo doit faire sa promenade, on peut aller le sortir si tu le souhaites, suggère David (mon voisin) en quittant sa chaise.
- Je...
- Oui, vas-y Isis, m'encourage ma mère comme si je n'étais pas capable de répondre. Tu t'entends si bien avec ce chien !
Je ne peux m'empêcher de me lever en lâchant un soupire. Je commence à être fatiguée et je n'ai pas envie de me retrouver en compagnie de David. Mais apparemment, je n'ai encore pas le choix. Un jour peut-être, j'aurai le contrôle de ma vie et pourrais prendre mes propres décisions. Un jour...
Nous sortons donc du jardin avant d'entrer dans la maison de mon voisin pour aller chercher Bingo. Je ne comprends pas pourquoi nous y allons d'ailleurs car le chien se trouve dehors.
Je ne me suis jamais sentie à l'aise dans cette maison, même si je n'y suis allée que quelques fois. Pourtant, elle n'est pas de nature angoissante mais je ne sais pas, l'atmosphère est si étrange, à moins que ce ne soit la présence de David qui me dérange.
- Il est déjà très tard, remarqué-je en jetant un rapide coup d'œil à l'imposante horloge murale.
- Ça ne gênera pas Bingo de sortir tard, je crois qu'il aime bien la nuit, comme moi, tout est différent.
J'hoche la tête avant de poser mes mains sur le plan de travail de la cuisine et d'observer par la fenêtre. La nuit est presque tombée.
- Oui, j'imagine.
J'en ai strictement rien à faire de ce qu'il vient de me dire. Je veux juste rejoindre le chien dans le jardin pour aller le promener, rien d'autre.
Alors que je m'apprête à sortir de la maison pour effectuer ce que je dois faire, je sens une présence derrière moi. Je n'ai pas besoin de me retourner pour savoir de qui, il s'agit. Nous ne sommes que deux dans cette pièce de toute manière. Il est tellement près de moi que je peux sentir son souffle dans mon cou ainsi que son odeur de parfum mélangée à tout l'alcool qu'il a imbibé lors de la soirée.
- On... On devrait y aller, réussis-je à dire, commençant légèrement à paniquer.
Comme je le disais tout à l'heure, je déteste être serrée de cette façon, d'être aussi proche d'une personne. Je haïs même ça.
- Nous avons encore tout notre temps, ne t'en fais pas pour ça.
Je veux tenter de partir sauf qu'il me maintient par les poignets contre son fichu plan de travail. Je suis toujours de dos mais je sens désormais son corps contre le mien. L'angoisse m'envahit, pourquoi ne me laisse-t-il pas tranquille ? Je ne lui ai rien fait pourtant.
- Je... Je ne pense pas non. Laisse-moi s'il te plaît...
- Ce serait dommage de laisser passer une occasion pareille, depuis le temps que nous attendons ça, me murmure-t-il avant de se mettre à embrasser mon cou.
Son geste me donne des frissons, mais en aucun cas des frissons de désir. C'est plutôt du dégoût. Et sa bouche en contact avec ma peau me répugne.
- Je n'attends rien du tout, lâche-moi ou je crie ! paniqué-je de plus en plus.
- Tu peux toujours essayer Isis, je doute qu'on ne t'entende.
Le pire c'est qu'il a raison... Avec la musique personne ne va nous entendre et puis, nous sommes censés aller promener Bingo alors personne ne va se soucier de mon absence... Comment vais-je m'en sortir ? Je n'arrive même pas à bouger et à respirer convenablement, pas comme si j'étouffais mais comme si je ne savais plus comment inspirer et expirer.
- Pourquoi moi ? murmuré-je à bout de souffle.
Il caresse mes cheveux et place son doigt devant ma bouche pour me faire signe de me taire. Je pourrais toujours le mordre mais je crains que ce ne soit efficace...
- Chuuuut, me dit-il doucement en passant sa main gauche sous ma jupe.
Pourquoi ai-je mis une jupe ? Je n'en possède qu'une dans toutes mes affaires et je ne la met que très rarement mais il a fallu que ce soit ce jour-là... Quoique, avec un short, ça n'aurait pas été vraiment mieux finalement.
J'ai désormais le bras gauche de libre mais mon poignet est tout endolori ce qui fait que je ne parviens pratiquement pas à le bouger. De toute façon ça ne servirait pas à grand chose, je ne sais pas me défendre et je ne fais pas le poids contre lui, il est beaucoup trop puissant. Ça me ferait presque rire : à l'école nous apprenons à écrire, à lire, à compter, à résoudre des problèmes de mathématiques dont je n'ai rien à faire comme Pierrette qui fait de la confiture, à jouer au basket, faire des figures d'acrosport, parler des autres langues, apprendre ce qu'il s'est passé dans notre pays, savoir des choses sur la nature, les animaux, faire des expériences dont j'ai horreur en physique-chimie, nous passons même différents tests et "formations" comme pour savoir comment sauver une personne mais jamais, je dis bien jamais, on m'a appris à me défendre. A croire que ce n'est pas important, à croire que j'aurai du m'entraîner toute seule et m'inscrire quelque part spécialement pour ça. Bref, tout ça pour dire qu'on a beau apprendre des tas de leçons à l'école et avoir des bonnes notes, ce n'est pas forcément ça qui va nous aider dans la vie de tous les jours...
- ...
J'ai tenté de parler mais aucun son n'a réussi à sortir de ma bouche. Je suis bloquée, je ne bouge pas et j'essaye d'oublier que cet homme est là sauf que c'est impossible.
- Nous allons nous amuser, tu verras Isis, continue-t-il en me retournant de manière à ce que je sois face à lui.
Il est encore plus près de moi. Je n'ai jamais été si proche du visage de quelqu'un et je m'en serai très bien passé. J'ai envie de lui cracher à la figure mais j'ai peur de la réaction qu'il aura et de ce qu'il me fera alors je préfère ne pas le faire.
- Nous... Nous n'avons pas la même... La même définition du... Verbe s'amuser...
Je vois un sourire se dessiner sur son visage avant de sentir ses lèvres collées aux miennes. Je ne sais pas si c'est lui où l'odeur d'alcool qu'il dégage mais tout ça me donne envie de vomir. Il passe ensuite ses mains sous mon haut tout en m'embrassant et je me sens de plus en plus perdue. Comme si je ne trouverais plus jamais d'issue possible pour me sortir de là. Je ne suis plus que sa proie et lui mon prédateur...
- ISIS !
- Callista, cesse d'hurler de la sorte.
- Mais je te dis qu'elle a bougé !
- Tu as du mal voir et tu vas ramener toutes les infirmières à te comporter de cette façon.
Mes paupières s'ouvrent avec une telle difficulté. J'ai l'impression que je ne vais jamais y arriver. Et cette lumière, si aveuglante. J'ai si mal. Dans chaque muscle de chaque partie de mon corps. Où suis-je ?
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