•Chapitre 54 (1/2)• «I don't want to lie...»

LYLIAN

Quand je me réveillai ce matin là, j'avais le cœur battant et la respiration haletante. Je m'extirpai de mon lit difficilement et allai me passer le visage à l'eau, transpirant de sueur. J'essayai d'effacer le cauchemar que j'avais fait, en vain.

Aujourd'hui, je devais témoigner en faveur de mon père et j'avais fait un songe horrible durant lequel ma mère racontait des choses atroces pour condamner mon père. Tout à la fin, mon père se faisait décapiter vivant pour divers atrocités qu'il n'avait même pas commises.

Je retournai dans ma chambre et cherchai mon téléphone. Il était sept heures et demi. Je savais qu'appeler quelqu'un à sept heures et demi un dimanche n'était pas vraiment cool, mais j'avais besoin de parler à quelqu'un.

ZÉLINA 

Je décrochai encore endormie, tenant contre moi ma peluche en forme de chat que j'avais récupéré à Torquay ces vacances dernières.

«-Allô ?

-Zéli, s'enquit une voix désolée. Excuse-moi de te réveiller.»

Je souris malgré moi à l'entente de la voix de Lylian.

«-Pas grave, baillai-je.»

J'entendis Lylian remuer quelque chose à l'autre bout du fil, puis il relança :

«-Tu es sûre que je te dérange pas ? Je peux raccrocher si tu veux.

-Non, m'empressai-je de le contredire. Non ça va. Il est sept heures du matin pas trois. Qu'est-ce qu'il y a ?»

Lylian garda le silence un petit moment. Une fois entièrement réveillée, je me rappelai que nous étions un jour spécial aujourd'hui. Je demandai d'une petite voix :

«-C'est à propos du témoignage pour ton père ?»

LYLIAN

J'acquiesçai dans le vide, avant de me rendre compte que Zélina n'était pas avec moi et qu'elle ne pouvait pas me voir :

«-Oui, je... j'ai fait un cauchemar...»

Ma formulation était celle d'un enfant de quatre ans devant sa mère. Cependant, je ne perçus aucune moquerie de la part de Zélina, qui m'incita à lui raconter ce qu'il s'était passé. Je lui narrai tout dans les détails -enfin, du moins, ce dont je me rappelais. À la fin, elle tenta de me rassurer :

«-Je sais que tu n'es pas en bon termes avec ta mère, mais je suis sûre qu'elle ne fera pas quelque chose comme ça. Elle aime ton père, j'en suis sûre. Même si ce qu'elle a fait ne s'explique pas, il faut que tu saches qu'elle l'a fait pour toi, elle était sincère quand elle t'a dit ça.»

Comme je restai muet, méditant les paroles de Zélina, cette dernière reprit, de manière plus détendue :

«-Et ne t'inquiète pas, on n'est pas en 1789, ton père ne se fera pas guillotiner.»

Je rigolai légèrement.

«-Lylian, reprit Zélina. Tu as parlé à ta mère ?»

Je soupirai. Depuis que ma mère m'avait appris qu'elle avait dénoncé mon père, je ne lui avais pas vraiment reparlé. Disons que nous nous parlions qu'en cas de nécessité absolue et que nous nous évitions la plupart du temps.

«-Oui, hier je lui ai demandé de me passer le sel.»

J'entendis Zélina soupirer à l'autre bout du téléphone.

«-Lylian, grogna-t-elle. Il faut que tu lui parles. Vous souffrez tous les deux de cette distance. Et puis, tu as besoin de quelqu'un qui soit derrière toi.

-Tu es là, toi, affirmai-je.

-Ce n'est pas pareil. Je suis ta petite amie, pas ta mère.

-Je n'ai pas besoin de parents pour vivre, dis-je de manière un peu trop précipitée.»

Je me mordis la lèvre en me rendant compte de ce que je venais de dire.

«-Désolé Zélina, ce n'est pas ce que je voulais dire...

-Je sais Lylian, ne sois pas désolé. Je suis bien placée pour savoir qu'on n'a effectivement pas besoin de parents pour vivre savie, mais sache que je ferai tout pour les avoir prêt de moi. C'est quand on perd quelque chose qu'on se rend compte à quel point on y tenait.»

Je sentis ma gorge se serrer en me rendant compte que tout ce qu'elle disait était vrai. J'avais mes deux parents en vie et en bonne santé, deux parents qui tenaient à moi. Je ne devais pas laisser de côté cette chance. Je me promis de parler à ma mère le plus tôt possible.

ZÉLINA

La conversation dériva vers un autre sujet, puis encore un autre, jusqu'à revenir sur celui de départ :

«-Qu'est-ce que je dois dire à l'avocat ? demanda Lylian, stressé. Et si je disais quelque chose qu'il ne fallait pas et que cela condamnait mon père ?

-Lylian, dis-je en essayant d'avoir la voix la plus calme possible. Si tu as vraiment envie d'aider ton père, dis ce que te dicte ton cœur. Ne mens pas. Dis juste la vérité. Je ne sais pas, raconte des souvenirs de ton enfance avec lui, comment il se comportait avec toi, son amour, tout ce qui fait qu'il était vraiment un bon père pour toi.»

Lylian resta silencieux après mes paroles, puis, au bout d'un moment, il me questionna :

«-Est-ce que tu as envie qu'il sorte de prison ?»

Je ne m'attendais pas à une telle question. Est-ce que j'avais envie que Tim Johnson sorte de prison alors qu'il avait tué mes parents ? La réponse était que je n'en savais rien.

Il y avait à peine un an, la question m'aurait été aussitôt posée que j'aurais répondu non. Automatiquement et immédiatement. Avant, c'était une évidence. Le meurtrier de mes parents devait finir derrière les barreaux en étant passé devant la justice. Mais maintenant que le meurtrier en question était le père de celui que j'aimais, rien n'était plus sûr.

«-Je veux juste que tu sois heureux, répondis-je sincèrement.

-Tu ne m'en voudrais pas, si c'était le cas, s'il sortait de prison ? demanda Lylian, fébrilement.»

Je rigolai.

«-Non, bien sûr que non. Je veux juste que tu sois heureux, répétai-je.

-Merci Zélina. Sincèrement.»

Nous nous éternisâmes au téléphone, jusqu'à ce que Lylian fut contraint de partir voir l'avocat. Après m'avoir promis qu'il m'appellerait dès qu'il sortirait du cabinet, il raccrocha.

Pour ma part, je n'avais rien de prévu aujourd'hui et Erika et Matt avaient prévu d'aller voir un film au cinéma. Je poussai un long soupire et m'étendis sur mon lit. Une longue attente commença.

LYLIAN

Je me préparai la boule au ventre. Ma mère s'activait silencieusement dans la maison. Quand je sortis de ma chambre et que ma mère m'aperçut, elle me dit, en me détaillant du regard ma tenue :

«-Tu es très beau Lylian.»

Il était vrai que j'avais passé une chemise et un costume pour l'occasion. Alors qu'habituellement j'aurais ignoré sa remarque, je me rappelais de ma discussion avec Zélina et décidai de commencer dès maintenant de mettre en pratique ce que je m'étais promis :

«-Merci, Mum.»

Elle parut surprise et me sourit, visiblement heureuse de ma réponse. Je lui rendis son sourire avant d'enfiler une veste. Ma mère attrapa son sac à main et les clés de la voiture et nous nous mîmes en route.

Le trajet fut dans un premier temps silencieux. Au bout d'un moment, je pris la parole, désireux de briser de silence brimant :

«-Tu penses que ça va durer combien de temps ?

-Pas très longtemps. Une heure tout au plus.»

Une heure me paraissait être très long pour un simple témoignage mais je gardai ma réflexion pour moi.

«-Tu stresses ? me demanda ma mère.»

Jehochai la tête silencieusement. À quoi bon mentir ?

Elle posa une main sur ma cuisse pour me rassurer et dit :

«-Ne t'inquiète pas. Rien de ce que tu diras ne pourras se retourner contre toi.»

J'eus un mouvement de recul et je fronçai les sourcils :

«-Contre moi ? Mais ce n'est pas de ça que j'ai peur ! J'ai peur d'incriminer Papa !»

Ma mère se mordit la lèvre sans rien dire. Mon cauchemar me revint et je fus parcouru d'un long frisson.

«-Mais de toute façon, toi, tout ce qui t'intéresse, c'est qu'il finisse en prison, n'est-ce pas ? lâchai-je froidement, ayant oublié toutes mes bonnes résolutions de ce matin.

-Non ! Bien sûr que non ! s'offusqua ma mère. Je veux qu'il s'en sorte aussi !»

Je ne répondis rien, ruminant mes pensées.

«-Lylian, je suis désolée si je t'ai déçu et blessé en faisant ce que j'ai fait. Crois moi, je regrette beaucoup. Je ne sais pas si tu comprendras un jour pourquoi j'ai fait ça, mais sache que je l'ai fait pour toi Lylian.»

Elle se tut, et reprit dans un souffle :

«-Je t'aime.»

Je sentis un boule se former dans ma gorge. Je ravalai mes larmes qui menaçaient de couler et dis simplement :

«-Je sais, avant de rajouter : Moi aussi.»

Le silence retomba dans l'habitacle de la voiture et cette fois, il resta présent jusqu'à la fin du trajet.

ZÉLINA

Après m'être habillée et avoir révisé ma leçon d'histoire sur la puissance des Etats-Unis dans le monde, je fis quelques exercices sur la fonction exponentielle et revisai mon vocabulaire d'allemand en vue de quelques contrôles à venir. Cela m'occupa une grande partie de la matinée, mais pas assez pour ne pas sentir l'ennui me gagner, aux alentours de onze heures. Comme je n'avais rien à faire et que rester sans rien faire me pesait, je mis la télé en marche et tombai sur un épisode de MacGyver. Alors que le héros fabriquait une bombe à partir d'un chewing-gum et d'un bout de sucre, je ne pus empêcher mes pensées de dériver vers Lylian. Est-ce qu'il stressait ? J'espérais de tout mon cœur que ça allait bien se passer.

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