•Chapitre 33• «Long stories...»
Le lendemain matin, ce fut mon réveil qui me sortit de mon sommeil. J'avais les yeux lourds de fatigue et la tête encore en feu à cause de la dispute d'hier. Je me forçai à quitter le confort et la chaleur de mon lit et me rendis dans la cuisine. Ma mère était debout, en train de préparer le petit-déjeuner. Elle avait les yeux rouges et j'en déduisis qu'elle avait dû pleurer. Je voulus l'interroger quant à la raison de ses pleurs, mais je me stoppai net, ne voulant pas raviver sa tristesse. À mon avis, elle avait dû avoir une conversation enflammée avec mon père hier soir et je les avais entendu hausser la voix plus d'une fois.
J'avalai rapidement mon bol de céréales, sans réel appétit, en me demandant ce que cette journée me révélerait. Je me rappelai alors que j'aurais sûrement la chance de parler à Callum dans le bus. Cela raviva le peu de motivation que j'avais en moi et je terminai mon repas en pensant à ce que je pourrais lui demander. Les questions ne manquaient pas, mais le temps, oui.
Après une douche réalisée à la va-vite en me rendant compte que le bus passait dans une dizaine de minutes, je m'habillai, saisis mon sac et sortis de la maison, en lançant un vague :
«-À ce soir, Mum !»
Ma mère ne répondit pas, perdue dans ses pensées et je n'insistai pas. Dehors, le froid encore hivernal me fit frissonner et je m'engageai dans l'allée qui menait à l'arrêt de bus, les deux bras collés contre mon torse, dans le vain espoir de me réchauffer.
Alors que je marchai tranquillement, en prenant mon temps, sachant que le car passait encore dans cinq bonnes minutes, j'entendis soudainement des bruits derrière moi. Des bruits de pas. Pourtant, j'étais le seul à marcher dans la direction de l'arrêt de bus à cette heure-ci d'habitude. Malgré ma forte envie de me retourner, je demeurai de face, ne voulant pas m'attirer des ennuis. Peut-être était-ce juste le fruit de mon imagination ? Ou alors juste le bruit du vent dans les branches des arbres qui bordaient la route ? En tout cas, j'essayai d'avoir l'air tout à fait naturel.
Pourtant, les pas continuaient d'avancer, aux bruits des miens. Je sentis ma respiration s'accélérer brutalement, mais, à nouveau, je pris sur moi. Mine de rien, je pressai légèrement ma marche. Il ne me restait plus que quelques mètres avant l'arrêt de bus, mais celui-ci se situait juste après un virage, si bien que personne ne me voyait d'où j'étais. Tout pouvait se passer, il n'y avait aucun témoin...
Prenant sur moi pour ne pas faire défiler dans ma tête tous les scénarios de films catastrophes, je ravalai un début de panique et regardai droit devant moi. Plus que quelques mètres. Je tendis quand même l'oreille, mon cerveau ne pouvant pas se détacher des bruits maintenant très distincts de pas. J'avais l'impression qu'ils étaient tout proches de moi désormais. Je commençai vraiment à flipper.
Je ramenai mes mains devant moi pour ne pas que mon "suiveur" ne me voit et serrai les poings, prêt à répliquer. Mon esprit réfléchissait à mille à l'heure, pour trouver un plan d'attaque qui ne mettait pas en danger ma vie. Je n'en trouvai aucun et les pas continuaient affreusement de se rapprocher. Cela jouait sur mes nerfs.
Mes tympans analysaient chacun des pas me suivant, tentant de localiser le plus précisément possible l'individu. Apparemment, il n'était pas très loin derrière moi. Quelques mètres tout au plus. Un flot pur d'adrénaline s'infiltra dans mes veines. Je stoppai ma marche, poings serrés, déterminé à savoir ce que me voulait la personne qui me suivait.
Je fis volte-face et je ne vis...
...personne.
Il n'y avait personne. Le rue était déserte. Une feuille de saule parcourait la route, soulevée par les bourrasques de vent. Les voitures étaient garées de part et d'autre de la rue et les maisons dormaient encore. Le silence glacial me fit froid dans le dos, tandis que je laissai tomber mes poings le long de mon corps. J'eus beau parcourir des yeux la rue infinie, je ne trouvai aucune trace du moindre mouvement.
Je passai une main sur mon visage, en essayant de me convaincre que la fatigue me jouait des tours, mais je ne parvenais pas à chasser de mon esprit les bruits de pas traînants derrière moi. Je frissonnai, tandis qu'une pensée vint à moi : j'étais persuadé de ne pas avoir rêvé ces bruits de pas. Quelqu'un me suivait.
J'arrivai à l'arrêt de bus, sans dommage. La fin du trajet n'avait posé aucun problème et les bruits de pas n'étaient pas réapparus. Je parvins à me détendre un peu, même si le doute subsistait. Mon taux d'adrénaline retombant peu à peu, ma respiration retrouva son cours normal, tandis que je me plongeai dans la faune d'élèves déjà présents, tous discutant activement avec leurs amis. Je demeurai à l'écart, encore un peu secoué par ce début de journée. Décidemment, je ne pouvais pas vivre une journée sans qu'il se passe quelque chose moi !
Lorsque le car arriva, je me dirigeai sans attendre vers le fond, dans un unique espoir : voir Callum. J'avais passé tout la deuxième partie de ma nuit à penser à ce que je pourrais lui demander, sans avoir trouvé de réponse concluante à cette interrogation (la première partie de la nuit, je l'avais passée à écumer la colère qu'avait provoquée mon père). Je trouvai Callum, tête posée contre le vitre, l'air vague, sans sembler s'attendre à ce que quelqu'un s'intéresse à lui. Arthur me fit signe, assis un peu plus loin, je lui rendis la pareille et, d'un signe de main, lui indiquait que j'allais m'asseoir là. S'il parut surpris, il ne me contredit pas, se contentant juste de froncer les sourcils.
Ce fut après quelques minutes que Callum s'aperçut de ma présence. Il sourit et il ne parut étrangement pas étonné de me voir, comme s'il savait qu'il avait attisé ma curiosité hier. D'abord, nous ne parlâmes pas, puis je finis par dire :
«-Hier, quand j'ai demandé à ... à quelqu'un de me parler de toi, cette personne m'a répondu qu'il valait mieux que je ne mêle pas des affaires des autres. Et un peu plus tard, j'ai entendu Evan s'inquiéter parce que je m'intéressais à toi.»
Callum resta silencieux, ses yeux bleus intenses me fixant. Son visage n'exprimait rien. Je le trouvai décidemment bien mystérieux. Il y eut un nouveau silence, puis Callum lâcha :
«-Qu'est-ce qu'il a dit exactement ?»
Désemparé par sa question, je répondis tout de même :
«-Heu... il a dit que si tout le monde commençait à savoir... et il s'est interrompu.»
Une ombre passa dans les yeux de Callum, mais il ne dit rien. Une seconde plus tard, il retrouvait son expression neutre d'il y avait quelques secondes.
«-Il n'a donc pas oublié, lâcha-t-il pragmatiquement, tout en tournant son visage vers la fenêtre, loin de moi.»
Je faillis lancer un très impoli "oublié quoi ?" avant de me reprendre. Zélina avait raison dans un sens, ce n'était pas mes affaires. Si je voulais découvrir ce qu'il se tramait, je devais me montrer patient et inintéressé.
«-Pourquoi tu t'intéresses à lui ?»
Bon, pour le côté inintéressé, on repassera. Je le dévisageai et remarquai soudain quelque chose. Jamais, encore, il n'avait prononcé le nom de son jumeau, comme si... comme s'il le craignait. Un peu comme s'il avait peur que le simple fait de l'évoquer provoquerait une catastrophe surnaturelle, comme dans un film d'horreur où les personnages refusaient de prononcer le nom de l'esprit de peur de l'invoquer, quoi que c'était plutôt stupide car tout le monde savait que connaître le nom de l'entité nous donnait de l'emprise sur lui. Son silence ne fit qu'attiser davantage ma curiosité.
«-Cela m'intrigue juste qu'Evan ne parle jamais de toi, c'est tout, rétorquai-je, en haussant les épaules, mimant une indifférence factice.»
Callum ne sembla pas être dupe, car il reprit, son visage exprimant toujours cette neutralité perturbante :
«-Tu connais bien Evan ?»
Je haussai une seconde fois les épaules.
«-Pas tant que ça... On était amis avant que...»
Je me tus et poussai un long soupir. Dès le premier contact, j'avais immédiatement aimé Evan. C'était un être pétillant, plein de bonne humeur, débordant d'énergie, croquant la vie de pleines dents et toujours enthousiaste. Mais apparemment, il avait aussi un côté plus sombre et plus secret...
«-Avant que ?»
Avant qu'il apprenne que j'étais le meurtrier des parents de sa meilleure amie.
Je me mordis la lèvre, et évitai les yeux turquoise de l'ado assis à côté de moi.
«-Vous vous êtes disputés ?
-Ouais, on peut dire ça comme ça... Une longue histoire...»
Nos regards se croisèrent et nous dûmes penser à la même chose, car nous nous mîmes à rigoler à l'unisson. Je venais de lancer exactement la même phrase qu'il m'avait lancé hier, à propos d'Evan et de toute l'histoire qui les a conduits à se séparer.
Quand le rire finit par se calmer, Callum ne se départit pas de son sourire et affirme :
«-Apparemment, on a des histoires à se raconter...»
Je hochai la tête. Au même moment, le car s'ébranla, annonçant que le trajet était terminé. Ne pouvant pas me permettre d'arriver en retard, je poussai un soupir. Je descendis du bus et me retournai, m'attendant à voir Callum à ma suite, mais il était déjà parti. Je soupirai de nouveau. Visiblement, ce garçon était vraiment mystérieux.
~~~
Que pensez-vous de Callum ? Des idées quant au fait qu'il ne s'entende pas avec Evan ?
Vous connaîtrez dans quelques chapitres leur histoire. ^^
LetTheMagicHappen
Bạn đang đọc truyện trên: AzTruyen.Top