•Chapitre 15• «When I fell in love...»

En me réveillant, j'eus une pensée pour mes camarades de classe qui étaient en train de plancher sur leur bac blanc pour la plupart. Je dis la plupart parce que j'étais persuadé que les plus malins d'entre eux avaient dû trouver une bonne excuse pour ne pas être là ce jour-là. Je pensai alors à Zélina. Je n'avais aucun souci à me faire quant à sa réussite sur le bac blanc, je savais pertinemment qu'elle s'en sortirait, mais je me demandai si elle pensait à moi...

Je chassai bien vite cette idée en espérant plutôt qu'elle ait réussi à tourner la page, bien que cette pensée me fit mal. J'espérai bien évidemment de tout mon coeur que Zélina réussisse à faire fi de tout ce qu'on avait vécu, même si, au fond, une partie de moi, souhaitait ardument qu'elle se souvienne. Qu'elle se souvienne de notre amour, qu'elle se souvienne de nos baisers, qu'elle se souvienne de ces quelques mois si intenses, où j'avais vraiment cru, l'espace d'un instant, que je pourrais finir ma vie heureux.

L'irruption du médecin dans ma chambre m'offrit une pause dans mes pensées douloureuses, mais je me rappelai bien vite que ce n'était plus Matt qui s'occupait de moi et ma joie soudaine s'évapora aussitôt.

Comme hier, le docteur Theffrey affichait une mine totalement neutre. Elle réalisa les examens habituels avec une diplomatie surprenante. Elle regardait constamment sa montre, comme si elle chronométrait chacune de ses actions. Ses mains s'affairaient à palper mes muscles avec un calme froid et elle n'ouvrit pas la bouche de la consultation.

Alors qu'elle s'apprêtait à sortir de la chambre, elle lâcha, sans même prendre le temps de se retourner :

«-Cet après-midi, nous commenceront les séances de kinésithérapie.»

Après avoir eu une brève pensée en me disant que plus personne ne disait"kinésithérapie" de nos jours, je poussai un long soupir, un peu décontenancé par son manque de... sentiments.

Ma mère entra dans ma chambre un peu après et elle déposa sur ma table de chevet une pile incroyable de papier. Je fronçai les sourcils.

«-Les cours, s'empressa de me mettre au courant ma mère. Anaïs a eu la gentillesse de passer hier soir, mais je me suis dit que tu devais dormir, alors elle est partie aussitôt.»

Je remerciai intérieurement ma mère. Je n'aurais pas su comment réagir devant elle. La dernière fois que nous nous étions vu, nous nous étions embrassés et je me demandai si elle pensait vraiment que quelque chose pourrait se passer entre nous.

D'un revers de main, je chassai à nouveau ce souvenir et apprit à ma mère que mes séances de kiné devaient commencer cet après-midi. Ma mère s'en félicita en me disant que cela était sûrement une bonne idée. Elle m'apprit en retour que, dès que l'on pourrait me déplacer, je participerait à une "thérapie de groupe". Cette idée me répugna :

«-Super, je vais rejoindre un groupe de tarés ! grommelai-je, très refroidi par cette annonce.

-Lylian ! s'offusqua ma mère. Je pense que ça peut te faire du bien de...

-D'expliquer à tout le monde pourquoi j'ai tenté de me suicider ? Non merci !»

Après une minute de silence, ma mère reprit, voulant sûrement me convaincre que c'était une idée de génie :

«-C'est une idée du docteur Theffrey.

-Alors là , ça me donne envie d'y aller, tiens ! ironisai-je, sur un ton pas très poli, je dois avouer.

-Arrête de te montrer si méchant Lylian ! me réprimanda ma mère.

-Ce n'est pas ma faute si on a remplacé mon médecin par une espèce de statue qui...

-Lylian!»

La voix de ma mère me coupa dans mon élan et je sentis mon corps retomber sur le lit, sans que j'eus le souvenir de mettre redresser. Ma mère me fusilla du regard et reprit, énervée par mon comportement "irresponsable" :

«-Ces gens font tout pour toi, alors cesse tes jérémiades et pense plutôt à les remercier !»

Après avoir eu cette nouvelle pensée : qui emploie encore le mot "jérémiades" en 2017, je songeai que je n'avais même pas remercier Matt pour tout ce qu'il avait fait pour moi. Je me promis de le faire, dès que je pourrais me déplacer.

Ma mère, froissée, se leva, prétextant une envie de caféine urgente, et sortit, sans un mot. Elle en avait sûrement sa claque de ma mauvaise humeur constante, mais je ne pouvais pas m'empêcher de lui parler comme cela. Etre forcé à demeurer allongé sur ce lit à longueur de journée sans pouvoir rien faire me mettait les nerfs à rude épreuve. L'ennui était mon pire ennemi et je n'avais aucunearme pour le battre.

Afin de faire passer le temps, je commençai d'abord par tenter de compter le nombre de carreaux qui composaient le plafond. Après avoir compté trois fois de suites et être tombé sur trois résultats différents, j'abandonnai. Je m'employai alors à faire travailler mon imagination en essayant de bâtir une histoire, mais je me rendis compte que j'étais très nul pour cela alors j'arrêtai. Je voulus lire un livre, mais la seule chose que j'avais sous la main était la lettre de Zélina et je savais très bien que cela me ferait mal de la relire, alors je laissai tomber l'idée. Je pensai également à pianoter sur mon téléphone, mais à part m'envoyer des messages à moi-même, je ne trouvai rien à faire.

Finalement, juste avant l'heure du repas, quelqu'un décida de me rendre visite. Je reconnus Ashley et me mis à sourire. A vrai dire, je n'avais jamais été aussi heureux de la voir.

«-Je suis désolée de ne être pas venue plus tôt, je travaille.

-Pas de soucis Ash, il n'y a pas que moi dans ta vie, souriai-je.»

A ces mots, elle eut un regard rêveur et je sus que je venais de toucher quelque chose de précieux en elle. Je lui lançai :

«-Dis-moi Ash, tu ne me cacherais pas quelque chose ?»

Elle secoua la tête, mais ses joues rougissantes la trahissaient. Devant mon regard insistant, elle souffla, un peu renfrognée d'avoir été prise en flagrant délit :

«-Ok, j'aime quelqu'un, mais...»

Elle se tut, guettant la moindre de mes réactions. Je compris alors pourquoi elle ne m'en avait pas parlé. Elle ne voulait pas me blesser, parce qu'intelligente comme elle était, elle avait dû comprendre que ma tentative de suicide avait un rapport direct ou indirect avec Zélina.

«-Ash, c'est génial ! Tu sais, tu aurais pu m'en parler, je... ça ne me fait rien !

Phrase totalement ironique et fausse, puisqu'à la notion de "j'aime", j'avais senti mon coeur se serrer au point de me faire faire un arrêt cardiaque, mais je ne voulais pas qu'elle se sente obliger de cacher cela.

«-Tu es sûr ?»

Elle avait les yeux fixés dans les miens, comme pour détecter si je disais la vérité. Je hochai la tête, tout en essayant de conserver un regard neutre et totalement indifférent. Cela dut marcher, puisque le sourire d'Ash s'alluma et elle se mit à débiter, à une allure incroyable :

«-T'es génial Lylian ! Elle s'appelle Jeanne, elle travaille comme moi.»

Le fait d'apprendre qu'Ashley soit homosexuelle ne me surprit absolument pas. A vrai dire, Ashley était cette fille qui aimait un peu tout le monde et qu'aucun stéréotype n'arrêtait. Elle était libre de tout et l'assumait de toute sa hauteur. Ce n'était pas non plus ce genre de personne qui allait faire son coming-out devant ses parents, parce qu'elle jugeait être tout à fait normale et elle avait raison. Est-ce que, moi, j'allais aller me planter devant mes parents et leur dire : "je suis hétéro", non. Pour elle, c'était la même chose.

«-...Elle a juste un an de plus, mais elle très cute, tu sais. Je suis sûre que tu l'aimes bien, si tu la vois. On a parlé quelques fois et puis, je fell in love, tu sais.»

Je ne pus empêcher mon cerveau de me replonger quelques mois auparavant, quand moi, j'étais tombé amoureux...

Un petit bruit me fait tourner la tête. Je remarque alors un stylo sur le sol, ou plutôt la fille qui a fait tomber son stylo sur le sol. Elle semble concentrée sur ses exercices et n'a pas remarqué la chute de son stylo. Ses cheveux bruns lui tombent en cascade sur les épaules. Je ne peux m'empêcher d'admirer son visage plissé par la concentration.

Je me penche et ramasse le stylo tombé sur le sol. J'hésite quelques instants et me lance. Je ne sais pas pourquoi, je sens mon coeur battre si fort.

«-Hem...Excuse moi ?»

Trop concentrée dans ces exercices de dérivées, elle ne m'entends pas. Elle est vraiment belle. Quoi ? Je viens de penser ça, moi ? J'avale ma salive.

«-Excuse moi.»

Cette fois, ma voix la tire de ses calculs et elle se tourne vers moi. Son visage est crispé et je comprends qu'elle n'aime pas être dérangée. Elle me dévisage et je suis incapable de dire un mot. Enfin, elle fait l'aller-retour entre moi et son stylo. Je reprends mes esprits :

«-Je crois que tu as fait tomber ça.»

Ouf, ma voix ne tremble pas.

En un éclair, ses yeux se figent dans les miens. Elle a des yeux si particuliers, qu'il en est difficile d'en extraire la couleur. Ils semblent être bleus au centre, mais une traînée marron empêche de trancher sur cette couleur. Le tour de ses pupilles est doré, comme si on y avait inséré une bague d'or. Soudain, elle fait volte-face, brisant brutalement le lien que nous avions créé. Je me retrouve à la contempler, tandis que son amie, celle qui est rousse, lui lance un regard étrange.

«-Lylian ?»

Ses cheveux bruns tanguent sur ses épaules. Sa copine me lance un regard empli de sous-entendus et ricane.

«-Lylian ?»

Ellee st si belle...

«-Lylian ?»

«-Lylian ?»

La voix d'Ashley me tire de mes rêveries. Je cligne des yeux, comme après une longue nuit de sommeil.

«-Hé, ça va ?

-Oui, je pensais à...»

Je refermai aussitôt la bouche, conscient que je n'avais pas envie de m'aventurer là-dedans. Ashley me regarda avec un sourire triste. Je secouai la tête. Je ne voulais pas qu'elle soit triste.

«-Et si tu me présentais Jeanne ?»

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Même question que le dernier chapitre : dîtes moi si vous voyez des lettres collés ou des caractères étranges au milieu du texte ! Je suis désolée si c'est le cas, mais je n'arrive pas à faire autrement :/

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