"Sauver la vie d'un homme, vaut plus que ..."

"Sauver la vie d'un homme, vaut plus que de construire une pagode de sept étages" 

Proverbe Chinois 

Un rayon de soleil vint chatouiller le visage d'Isobel. Elle fronça les sourcils et souleva doucement ses paupières pour les refermer aussitôt éblouit par l'astre solaire. Elle s'étira de tout son long, et s'assit dans son lit, ses longs cheveux rouges retombant en cascade sur ses genoux. Elle soupira. Ouvrant finalement ses yeux, elle dégagea son visage et observa sa chambre d'un œil morne.

Il faisait vraiment froid et la distance qui la séparait de sa salle de bain lui semblait infranchissable. Se faisant violence, elle dégagea ses couvertures, posa ses deux pieds par terre et rassembla toute son énergie pour courir se réfugier dans la pièce visée. Elle s'enferma à double tour, ôta à la hâte ses habits de nuit et plongea dans son bain brûlant. Elle soupira, de bien-être cette fois-ci et embrassa mentalement madame Garde-robe pour son travail.

Une fois savonnée et les cheveux rincés, elle les enroula dans une serviette éponge et sécha ses mains avec soin. Elle se rallongea dans l'eau et attrapa la tablette informatique qui se trouvait posée non loin d'elle. Elle l'alluma, en prenant garde à ne pas la mouiller et commença à faire défiler les informations du jour. Une annonce attira tout particulièrement son attention et elle se redressa d'un bon, se rattrapant de justesse au bord de céramique quand elle faillit perdre l'équilibre.

Son père était accusé de détournement de fonds. Elle cliqua sur le lien et parcourut l'article aussi vite que sa vue le lui permit. Il était dit qu'une source anonyme avait contacté la police pour accuser Maurice Lemarchand de détourner des fonds de son entreprise à des fins personnelles, d'abuser de la confiance de ses employés et de faire du favoritisme envers les membres de sa famille.

Une enquête était en cours, mais un élément semblait condamner l'homme : il avait disparu. Une chasse à l'homme était lancée pour le retrouver lui et le secrétaire de sa fille la duchesse de Galloway, Ferdinand. Un appel à témoin était lancé et quiconque avait des informations concernant l'affaire était prié de se manifester.

Isobel sortit de la salle de bain avec précipitation et se jeta sur son téléphone portable pour tenter de joindre Ferdinand. Au bout de la troisième sonnerie, il décrocha.

« Mon Dieu Ferdinand ! Mais qu'est-ce donc toute cette histoire ! Pourquoi mon père à disparu et où est-ce que tu es ?

— Bonjour à toi, petite sœur.

— Jade ? Mais ... Que ...

— Tant de questions. Si tu veux sauver papa, reviens ici, et ne parle à personne de tout cela.

— Quelles sont mes garanties ?

— Tu penses être en position de marchander ? »

Un cri, qu'elle identifia sans peine venir de son père, s'éleva au travers du combiné.

« Arrête ça immédiatement ! Comment peux-tu lui faire du mal, c'est aussi ton père !

— Oh, tu sais, les liens de sangs, tout ça, c'est quelque chose de tellement factuel. L'important dans la vie, c'est l'argent. Alors si tu veux le sauver, rends-toi à cette adresse, seul, et j'insiste particulièrement sur ce point, ou sinon, ce sera pour des funérailles que tu seras revenue. »

Elle raccrocha sur ses derniers mots, laissant Isobel glacée d'effroi. Elle se laissa tomber par terre, ses jambes refusant de la porter. C'est ainsi que la trouva sa femme de chambre, une dizaine de minutes plus tard.

« Mon Dieu ma pauvre fille, on dirait que tu as vu le diable ! Allons, allons relève-toi tout de suite, avant d'attraper la mort, ainsi prostrée par terre, dévêtue de la sorte. »

Elle se laissa faire quand la bonne l'aida à se sécher et à s'habiller. Elle était dans un état second, incapable d'accepter la réalité de la situation. Ce n'est que lorsqu'elle sentit la brosse passer dans ses cheveux et la douleur qui accompagna la rencontre d'un nœud qu'elle prit conscience qu'elle ne rêvait pas.

Elle se redressa d'un bond et courut aussi vite qu'elle le put vers le bureau d'Adam laissant derrière elle une Garde-robe affolée qui lui hurlait de s'arrêter. Elle buta contre le torse de l'homme, qui alerté par les cris et le raffut était sorti de son antre pour en connaître la raison. Il repoussa Isobel et la tint à bout de bras au niveau de ses épaules. Il scanna rapidement son corps de haut en bas et se détendit légèrement, quand il n'aperçut aucune blessure.

« Que Diable se passe-t-il là ?

Je ... Je dois rentrer chez moi. »

Isobel tremblait légèrement et son teint pâle alerta le mafieux. Il la traîna à l'intérieur de la pièce, qu'il n'avait pas eu le temps de quitter, et la fora à s'asseoir dans un des fauteuils placé devant la cheminée. Il la couvrit d'un plaid et lui servit du thé qui heureusement était encore assez chaud pour être but. Quand il vit que le liquide menaçait de se déverser hors du récipient, tant ses mains tremblaient, il la lui reprit des mains et la posa sur une table à proximité.

Il s'agenouilla devant elle et emprisonna ses mains dans les siennes. Elles étaient glacées. L'inquiétude grandit en lui et il essaya d'accrocher son regard pour connaître la raison de son état.

« Racontez-moi. »

L'ordre claqua et elle plongea enfin ses yeux dans les siens, pour les détourner quelques instants plus tard. Elle était sur le point de tout lui expliquer quand le souvenir de ce que sa sœur lui avait dit lui revint en mémoire. Elle ne pouvait pas lui dire.

Elle savait qu'Adam l'aiderait. Elle était presque sûre qu'il mettrait à sa disposition les forces de la KR pour exterminer les criminels. Mais elle ne pouvait pas le faire. Déjà parce que ses sœurs étaient imprévisibles. À la minute où elles sauraient qu'elle n'avait pas respecté sa part du contrat, elles tueraient Maurice.

Ensuite, tant de gens avaient déjà souffert par sa faute. Ferdinand... Elle ne voulait pas penser à lui. Si Jade avait son téléphone, c'est qu'il était inconscient ou pire. Et elle refusait d'imaginer cette possibilité. Adam pourrait-être blessé et elle ne pourrait jamais se le pardonner. L'image de cet homme si fort, allongé, le corps meurtrit lui donna la nausée et une irrépressible envie de pleurer la saisit à la gorge.

Elle se jeta dans ses bras et s'effondra en sanglots bruyants. Adam, surpris par son geste la serra doucement dans ses bras et tenta tant bien que mal de la réconforter. Isobel finit par se calmer et se redressa pour regarder son ami. Parce que c'est ce qu'il était devenu au fil des jours. Son ami.

Adam se leva et apporta une boîte de mouchoirs qu'il plaça sous son nez. Elle en tira un et le remercia, les joues rouges de honte. Quand elle se fut mouchée et que son visage fut à nouveau sec, elle leva à nouveau la tête vers lui.

« Mon père a été injustement accusé d'un détournement de fond. À cause ... À cause de la panique, il a pris la fuite et ... comme mon secrétaire est ... indisponible. Je ... Eh bien, je dois rentrer à la maison pour l'aider à être innocenté. »

Elle avait toujours été une piètre menteuse. Elle avait baissé les yeux à peine les trois premiers mots prononcés et savait ses pommettes écarlates, tant elle lui brûlait. Son bégaiement soudain n'aidait pas son plaidoyer, mais elle pria en silence pour qu'il la croie.

« Je vous accompagne dans ce cas.

— NON ! »

Son refus catégorique le surprit.

« Enfin, c'est que ... Je vous remercie de votre considération, mais j'ai bien peur que votre présence ne joue pas en notre faveur. Si ... Enfin, ce que je veux dire, c'est que si la police découvre que vous faites partie de la mafia, tout ça, tout... ça ... hum ... ça rendra tout plus compliqué vous ne croyez pas ? »

Il avait le sentiment qu'elle ne lui disait pas tout. Son langage corporel, sa diction, le léger tremblement de sa main, qu'elle n'arrivait pas à dissimuler, tous ces petits signes l'alertait. Mais il n'avait pas le temps de creuser.

Ils avaient une piste pour faire tomber le réseau des contrebandiers et il était préférable qu'elle parte d'ici. Ils n'étaient pas à l'abri d'une vengeance et sa demeure en sera la première cible. Et quoiqu'il se passe en Lapanzie, il était certain que c'était moins dangereux que de rester à Gorod.

« Bien, vous pouvez rentrer. »

Le soulagement qu'il lut sur son visage l'inquiéta davantage.

« Mais je veux que vous me fassiez une promesse ! »

Il capta à nouveau son attention avec ses quelques mots et l'inquiétude qui avait quitté son beau visage revînt dans la minute.

« Promettez-moi de m'appeler au moindre danger.

— Promis. »

Après l'avoir salué, elle repartit dans sa chambre, l'âme en peine. Adam se dirigea vers la fenêtre de son bureau et observa la vue qui se trouvait en contrebas. Il avait besoin de tous ses hommes pour traquer sa proie. Isobel n'aura donc pas de garde du corps sur qui compter en cas de problème et cette idée le contrariait. Elle était impétueuse et défiait la mort comme si elle ne la craignait pas. Il avait peur que cette insolence ne lui soit fatale.

Il trouva du réconfort dans le fait que ses ennemis avaient besoin d'elle vivante et que leur finance les limiterait certainement dans leurs actions. Le doute subsista quand même en lui. Il ne comprenait pas son comportement. Pourquoi ce besoin de veiller sur elle ? Et d'où venait cette angoisse qui le prenait aux tripes à chaque fois que le danger la guettait ?

Décidant de postposer la recherche de ces réponses, il prit l'un des téléphones qui se trouvaient dans son bureau pour aller le lui donner. Il était équipé d'une puce GPS ingénieusement dissimulée. Il devait traiter une chose à la fois. D'abord sa sécurité, ensuite la traque et enfin, il se torturera le cerveau pour comprendre les émotions et les réactions qu'il avait à son contact. Car oui, tout irait bien pour elle, il ne pouvait en être autrement, il s'en persuada.

La valise de la jeune fille bouclée, elle prit son manteau et se dirigea vers la porte d'entrée où Adam l'attendait.

« Voilà pour vous. Gardez-le toujours sur vous. Si un problème à lieu appuyer longtemps sur la touche du milieu, cela m'enverra un signal et activera la puce GPS qui se trouve à l'intérieur. J'organiserais une expédition pour venir vous chercher. »

Elle fut touchée par ce geste et le poids sur ses épaules s'allégea un peu. Elle le remercia, et prit l'appareil fin et élégant, d'une simplicité à faire pleurer son côté artistique. Elle allait le customiser pendant son voyage, cela lui permettrait de se changer les idées. Elle monta dans la voiture qui l'attendait déjà. On l'a déposa à l'aéroport où elle prit le premier vol pour son pays natal.

Le voyage fut loin d'être agréable malgré son activité manuelle, mais elle s'obligea à avoir des pensées positives. Aussi cruels soient-ils, ses opposants ne feraient rien à son père tant qu'elle coopérait avec eux. La question étant de savoir jusqu'où elle était prête pour sauver son père. Elle se rendit au lieu du rendez-vous indiqué par sa sœur. Elle se retrouva dans une forêt, perdue au milieu de nulle part.

Malgré la température bien plus élevée qu'à Gorod, elle frissonnait. C'était un lieu idéal pour une embuscade et elle savait qu'elle venait de mettre les deux pieds dans un piège. Elle se répéta sans cesse qu'ils avaient besoin d'elle vivante pour réaliser leur plan. Elle serra très fort le petit poignard qu'elle dissimulait dans la poche de son manteau et attendit patiemment que ses opposants se montrent.

Elle entendit du bruit derrière elle et se retourna brusquement afin d'en identifier la provenance. Elle scruta la zone avec insistance, mais ne vit rien. Elle sentit soudain une douleur vive à la gorge, comme une piqûre d'insecte. Elle n'eut pas le temps de comprendre ce qu'il se passait, qu'elle perdit connaissance et tomba de tout son long sur le sol terreux. 

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