Chapitre 31
Quand elle ressortit sa tête de l'eau pour reprendre son souffle, sûre qu'elle s'était cachée suffisamment longtemps pour que l'intrus soit partit, elle aperçut Rayhan bin Malik Muharib sur la berge qui la regardait malicieusement.
« Alors Leith bin Malik Khazar, c'est ça que tu fais chaque soir ? Les entraînements ne suffisent pas à t'achever pour que tu t'infliges plus de sport ? Ou es-tu simplement trop pudique pour te laver avec nous ? »
Elle le regarda bouche bée, priant secrètement pour que la lueur de la lune, qui heureusement n'était pas pleine, soit suffisamment faible pour que ses formes féminines ne soient pas visible de là où il se trouvait. Elle souffla de découragement quand elle comprit qu'il attendait sincèrement une réponse à sa question.
« Un peu des deux. Je tiens à garder un minimum d'intimité et j'en profite pour m'entraîner encore un peu afin de ne pas trop être en retard devant les autres.
- Je peux me joindre à toi ?
- Non, s'il te plaît ! Ne vient pas ! »
Elle avait hurlé sa réponse du plus profond de son cœur. S'il l'approchait, elle était finie !
« Je te fais peur ? »
Il ne la prenait pas du tout au sérieux et son sourire éclatant lui fit craindre le pire. Il la taquinait ce bougre et ne partirait pas tant qu'il n'aurait pas eu ce qu'il voulait.
« Oui ! J'ai peur de toi ! »
Elle espérait sa réponse le fasse changer d'avis. Elle était terrifiée à l'idée qu'il puisse découvrir son secret.
« Je ... J'ai ... Je ne suis vraiment pas à l'aise avec les autres. Je veux dire je suis vraiment trop ... »
Elle n'eut pas le temps de finir sa phrase que le jeune homme sauta dans l'eau, l'éclaboussant au passage.
« Là, je suis vraiment dans la panade. »
Il ressortit de l'eau juste devant elle.
« Tu sais, tu devrais t'entraîner à côtoyer d'autres hommes, aujourd'hui tu as l'avantage du cadre qui te permet cette intimité, mais au combat, tu n'auras pas le loisir de faire cela, tu devras te laver devant tout le monde. Alors pourquoi ne pas essayer avec moi ? Je te promets de ne pas me moquer de toi. »
Il lui offrit un sourire qu'il voulait rassurant en approchant doucement ses mains vers sa chemise pour l'aider à la retirer sans l'effrayer. Mais elle se recula d'un bond protégeant du mieux qu'elle put son vêtement afin qu'il ne la découvre pas d'avantage. Elle ricana gênée par leur proximité mais aussi face à l'absurdité de sa réplique.
« Parce que tu crois qu'on aura la possibilité de se laver là-bas. Si c'est le cas, tu es bien naïf. »
Son visage s'assombrit et il se passa la main dans ses cheveux en soupirant. Son geste fit ressortir chacun de ses muscles et elle se fit la réflexion qu'il était vraiment magnifique ainsi, les cheveux mouillés, la lumière de la lune se reflétant sur les gouttes ruisselantes le long de son corps. Il devait faire fureur auprès de la gent féminine. Peut-être était-il déjà marié ? Sa réponse la sortit de ses pensées.
« Je ne le suis pas. Contrairement à ce que tous les autres pensent, moi je sais que là-bas, ce n'est pas une promenade de santé. Nos professeurs auront beau nous entraîner de leur mieux, nous ne serons jamais prêts à ce qui nous attendra au cœur des combats. »
Elle l'observa avec plus d'attention intriguée de sa réponse. D'après ses souvenirs, il avait une personnalité très enjouée et aimait beaucoup faire le clown. Elle avait pensé qu'il était plutôt du genre insouciant mais en réalité, il comprenait vraiment bien la gravité de la réalité qui l'entourait. De toute façon, on n'aurait jamais confié la tête d'une unité à un inconscient et elle était contente que ses préjugés ne se soient pas avérés exact.
« Quel âge as-tu ?
- Pourquoi veux-tu savoir mon âge ?
- Par simple curiosité, j'imagine.
- 26 ans. Et toi ? »
Il avait croisé ses bras sur son torse et l'observant de haut en bas évaluant sans doute son âge.
« Je viens d'avoir 21 ans. Tu as raison, nous ne serons jamais prêts à ce qui se passera et je sais de quoi je parle, j'ai déjà été confronté à la mort et à la misère mais ... Mais le lieu d'un affrontement entre deux armées aussi puissantes que les nôtres, ça, ce sera une véritable boucherie.
-Tu es bien mature pour ton âge. Comment se fait-il que tu aies été confronté la misère ? Tu n'as pas l'air d'être issu d'un milieu défavorisé.
- Tu ignores donc qui je suis ? Ou plutôt qui est ma sœur.
- Je devrais ?
- Le nom Khazar ne te dit vraiment rien ?
Ce nom lui disait en effet quelque chose, mais il ne savait plus où il l'avait déjà entendu. Il secoua simplement la tête en signe de dénégation. Elle soupira et se passa les mains dans ses cheveux.
« Leïla ibn Salim Khazar est ma sœur jumelle et elle vient de devenir notre reine. Ma sœur s'est prise d'une envie d'améliorer les conditions de vie des miséreux de Siloé. C'est comme ça qu'elle a attiré l'attention du roi. Je l'ai souvent suivi dans ses déplacements pour lui donner un coup de main lorsque je m'ennuyais. »
Elle mentait bien évidemment. Elle avait beau adorer son frère, sur ce point ils étaient vraiment différents, il avait toujours refusé de l'accompagner. Mais c'était le seul moyen qu'elle avait trouvé pour expliquer ses compétences ou comme ici son expérience du macabre.
« C'est là que j'ai vécu ma première rencontre avec la mort. »
Au fur et à mesure de son récit, les yeux de l'autre s'agrandirent de stupeur et ses bras se décroisèrent pour se retrouver ballant le long de son corps.
« Tu es le beau-frère du roi ? »
Son expression était tellement comique qu'elle explosa de rire. Il profita de son moment d'inattention pour lui arracher sa chemise d'un coup sec. Elle hurla de rage en refermant les pans de sa chemise sur elle.
« Mais tu es complètement malade !
- Tu ... Tu ... Tu ... »
Il était maintenant écarlate et ses yeux allaient de son visage à sa poitrine ayant visiblement du mal à comprendre ce qu'il venait de voir.
« Tu es une fille !? »
Elle ne lui répondit rien et plaqua sa main sur sa bouche car elle venait d'entendre un bruit. Elle l'entraîna de force avec elle pour se cacher derrière un rocher. Elle se retrouvait dos à la pierre, le dos de Rayhan collé contre elle, sa main toujours sur sa bouche.
« Ne fait pas un bruit, j'ai entendu quelque chose. »
Il hocha doucement la tête pour lui faire comprendre qu'il avait compris.
« Y a rien ! »
La voix de la sentinelle les fit sursauter et ils se tassèrent plus encore contre la paroi rocheuse. Elle soupira de soulagement quand elle l'entendit partir et relâcha doucement sa prise sur la bouche de Rayhan. Ce dernier en profita pour se retourner immédiatement et plaça ses mains de part et d'autre de sa tête lui bloquant toute tentative de retraite. Il la fixa avec une expression grave.
« Qui es-tu ? Pourquoi es-tu là ?
- Si je ne réponds pas, tu vas faire quoi ? Me dénoncer ? »
Elle le défiait du regard.
« Je devrais peut-être le faire, mon père est l'un des généraux, c'est un homme juste, il ne te tuera pas, j'en suis sûr, mais tu mourras certainement au combat.
- Parce que je suis une fille ? »
Rayhan ne répondit rien, mais continua de la fixer, en colère, attendant une réponse à sa question. Vaincue, Leïla soupira.
« Ce que je t'ai dit est vrai. Mais dans le sens inverse. Leith bin Malik Khazar est mon frère jumeau. Nous nous ressemblons comme deux gouttes d'eau, si ce n'est qu'il est un petit peu plus grand et beaucoup plus musclé que moi. J'ai pris sa place car il s'est cassé la jambe la nuit de mon mariage et que je ne voulais pas rester en arrière protégée dans un château doré pendant que mon mari se battait. Et puis, je me sens responsable des raisons qui ont conduites à cette guerre. »
Il la regardait maintenant avec de gros yeux.
« Tu ... Vous ... Vous êtes en train de me dire que vous êtes la reine de mon pays !? »
Elle hocha lentement la tête.
« Admettons que je vous crois, vous rendez-vous compte de ce que votre présence signifie ? »
Elle hocha à nouveau sa tête.
« Vous êtes soit folle soit complètement dévouée à votre peuple, ou peut-être les deux à la fois, mais je ne puis vous laisser rester ici. »
Il s'était reculé d'elle en disant ses mots, et secoua sa tête refusant de croire à cette histoire. Elle le supplia du regard.
« Je t'en supplie Rayhan. Je dois rester ici. Je me dois d'aller au front. Je ne sais pas encore pourquoi mais j'ai l'intime conviction que si j'y vais cela fera une différence. Je t'en prie. Tu as toi-même vu comment je me battais !
- Mais vous êtes la reine ! »
Il fulminait. Elle était complètement inconsciente des dangers qui l'entouraient. Il comprenait pourquoi son roi l'avait choisie, elle était belle, intelligente et tellement dévouée aux autres qu'elle était prête à risquer sa propre vie pour eux. Mais, il ne pouvait pas la laisser faire.
« Si mes souvenirs sont bons, vous possédez des compétences médicales, si impressionnantes que les médecins de tous le royaume sont venus vous voir pour échanger avec vous. Est-ce vrai ?
- Oui. »
Elle ne comprenait pas où il voulait en venir et fronça ses sourcils pour le lui exprimer.
« Alors je vous propose un marché. On manque cruellement de médecins sur le front. Vous continuez l'entraînement et arrivés là-bas, je demanderai à mon père votre changement d'affectation. S'il accepte, vous continuez l'aventure, s'il refuse, je lui dévoile votre identité. C'est bien compris ? »
Il la fusillait des yeux sévèrement. Elle n'eut d'autre choix que d'accepter, priant pour que le général accepte sa demande.
- Marché conclu !
Elle lui tendit sa main qu'il empoigna, scellant ainsi leur accord. Il finit par la relâcher pour qu'elle aille se rhabiller avant qu'elle ne tombe malade, à cause du froid qui commençait à lui faire claquer des dents.
« Allez-vous rhabiller.
- Seulement si tu recommences à me tutoyé. On remarquera quelque chose si tu venais soudainement à modifier ta façon de t'adresser à moi. Je suis peut-être une reine aujourd'hui, cependant, il y a moins de 2 ans je n'étais rien. Alors tutoie-moi je te prie ! »
Il approuva d'un hochement de tête et lui indiqua les rives du pouces. Elle capitula et pris la direction indiqué alors qu'il la suivait. Il resta en retrait pendant qu'elle se changeait. Après cela, Rayhan l'accompagna chaque soir à la rivière pour faire le guet pendant qu'elle se lavait. Il développa un côté très protecteur envers elle et une amitié finit par naître entre eux, qui s'affermit de jours en jours.
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