The U.N.K.N.O.W.N

Chapitre 2 (publié le lundi 26 décembre 2022)

Aux personnages fictifs qui m'ont inspiré le caractère de L'Inconnu..

Paint It, Black – The Rolling Stones

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Tu cours jusqu'à la cuisine pour mettre de l'eau fraîche dans ta gourde, sous le regard abattu de ta mère qui te répète depuis dix minutes de te dépêcher - action impossible à réaliser, en vue de ta lenteur.

Bouteille d'eau, trousse et cahier dans ton sac, tu enfiles ta veste et sors de l'appartement, en gardant la même vitesse de course que précédemment. Tu arrives à l'arrêt de bus en marche rapide et, t'apercevant que tu n'es pas en retard du tout, ralentis et t'assois sur le banc de l'abribus. Une chanson entraînante dans les oreilles, tu fourres tes mains dans tes poches et regarde la route alors que tu commences à te perdre dans tes pensées.

Tu sens ta carte de bus, dans ta poche, mais également un autre objet du même volume.

Tu t'en rappelles, à présent, c'est l'étrange carte argentée que tu avais ramassée la semaine dernière en rentrant du premier cours de théâtre. Tu l'avais laissé dans ta poche sans vraiment y prêter attention, par fainéantise ou par manque de temps. Mais maintenant que tu attends le bus - lequel va probablement être en retard -, tu peux y jeter un coup d'œil.

Tu tournes et retournes la carte dans tes mains en la détaillant des yeux. Rien ne t'alerte - sa surface et lisse et uniforme, d'un gris brillant, argenté, et un petit carré noir pixelisé orne l'une des faces -, sauf une minuscule inscription gravée finement. Tu passes ton doigt dessus.

   « La Vérité »

Un sujet intéressant, bien que vague. Le contraire du mensonge, ce qu'on dit et ce qu'on ne cache pas. Difficile de s'y fier.

Peut-être que le but de cette carte est de connaître la vérité, mais quelle vérité?

Le bruit de moteur reconnaissable parmi cent autres et indiquant que le bus arrive te sort de tes pensées. Tu montes rapidement dans le véhicule dès qu'il est arrêté et salue le conducteur, puis tu passes ta carte devant la borne qui émet le bip! de validation de ton titre de transport.

Tu t'assois à ta place habituelle dans le fond du bus et poses ton sac sur le siège libre à côté de toi, tu augmentes de volume de la musique de quelques pourcents et regardes le paysage urbain et monotone de la ville dans laquelle tu habites. Ton esprit vagabonde, se promène de droite et de gauche, en passant par ce qui s'est passé au collège ces derniers jours, par quels nouveaux films tu pourrais regarder et par ce que tu voudrais faire comme métier, plus tard; puis il repasse par cette étrange carte. Tu décides de la ressortir pour mieux l'étudier.

Allez, sors-moi mes quatre vérités, foutue machine! Dis-moi ce que je ne sais pas déjà sur ma joyeuse vie. Penses-tu, avec un brin d'agacement venu te chatouiller les pensées sans aucune raison apparente.

Tu n'avais pas remarqué que, juste en dessous de l'écran noir, il y a un petit clavier tout en longueur, ne comportant uniquement que des chiffres allant de 0 à 9. Tu tapotes dessus en espérant que le carré sombre s'illumine, ce qui marche. Une phrase s'écrit toute seule, lettre par lettre.

« Welcome to the World of Truth! »

Tes paupières se ferment à moitié, un peu plus, signe que tu es déçue, voire blasée.

— Comment on change la langue sur ce bidule? Je sens que tout ça va m'énerver... Murmures-tu pour toi-même.

Une nouvelle phrase est écrite sur l'écran.

« Pardonnez-moi, je pensais que j'étais en Australie. »

Tu restes bouche-bée et tétanisée, la carte tenant en équilibre dans tes mains moites. Tu peines à parler, et la seule phrase qui te viens en tête est une question pouvant paraître plutôt stupide.

— Attends... tu entends ce que je dis?

« Évidemment. »

Tu refermes à présent ta main droite sur l'objet chétif et te passes la gauche dans les cheveux, la tête renversée en arrière.

— Holy shit... Je me retrouve avec une carte qui parle.

De brèves vibrations synonymes de l'écriture d'une nouvelle phrase se font ressentir. Tu te redresses donc pour lire.

« Un peu de respect. Je ne parle pas, j'écris! »

— Bien sûr, ça fait toute la différence. Et... pourquoi je me retrouve avec une carte qui écrit? On ne trouve pas ce genre d'objet tous les jours. Ironises-tu.

« Je vais refaire ma phrase d'introduction, sans la rater, cette fois, et je vous explique après! »

— Alors vas-y...

Tu soupires. Tu as l'impression de devenir folle puisque tu entames la conversation avec un bout de plastique.

« Je ne suis pas qu'un bout de plastique! »

Tu te redresses vivement.

— Pardon?

« Vous prétendez que je ne suis qu'une pauvre puce électronique dans un misérable carré de plastique, or je suis bien plus! »

— C'est pas flippant du tout... marmonnes-tu.

« Bref. Bienvenue dans le Monde de la Vérité! »

Alors que tu soupires d'agacement, la chose bien plus incroyable qu'une puce électronique dans un misérable carré de plastique a l'air plutôt enjouée.

— Mais oui... ça existe! Un monde remplit de gens honnêtes qui ne mentent pas à tout bout de champ et qui ne cachent pas leur sentiment!

« Alors, pas exactement, mais si vous acceptez de me garder et m'utiliser, ça pourrait devenir vrai! »

Des souvenirs remontent dans ta mémoire, des mauvais souvenirs que tu n'as pas envie de revivre. Tu hésites, pourquoi pas, après tout? Tu devras te confronter à la dure réalité, un jour ou l'autre... Le sentiment que tu connais si bien te serre le cœur. Plus jamais.

— Peut-être, mais ce n'est pas ce que je veux. Je préfère continuer à mentir pour qu'on ne s'inquiète pas pour moi, je préfère continuer à mentir pour qu'on croit que je suis en sécurité et je préfère qu'on continue à me mentir pour que je ne connaisse pas les horreurs de ce monde.

La Carte semble hésiter, elle aussi.

« Vous n'avez pas tout à fait tort, et je ne peux pas dire le contraire... mais ne seriez-vous pas tentée de connaître le passé de vos proches et de savoir ce qu'ils vivent ainsi que ce qu'ils ressentent derrière leurs sourires forcés? »

Tu réfléchis en imaginant tout ce que ces découvertes t'apporteraient si tu acceptais - de la satisfaction comme de l'horreur. La proposition est alléchante, mais les conséquences de tes actes pourraient être désastreuses.

« Alors Samantha, c'est oui ou c'est non? »

Un frisson d'effroi traverse tout ton corps et si tu te n'étais pas assise, le sol t'ouvrirait ses bras. Tu ne lui as jamais dit ton prénom, encore moins ton prénom complet que tu détestes tant.

Lentement, seulement après avoir retrouvé l'usage des tes membres, tu entrouvres la bouche pour essayer de construire une phrase à peu près structurée.

— Co-comment est-ce que tu sais quel est... mon nom?

Un sourire s'inscrit sur l'écran.

« :) »

L'angoisse qui te ronge de l'intérieur depuis toujours, depuis tes trois ans, du moins, est grandissante et tes mains en tremblent.

— S'il-te-plaît, réponds-moi.

« Je connais tout de vous. »

Puisque la peur n'est qu'abstraite, il faut que tu arrives à ne pas montrer que tu es effrayée, et tu vas essayer de l'avoir à son propre jeu.

— Très bien. Alors, chère Carte, quelle est ma chanson préférée?

« One, de Metallica, even if you can't remember anything. »

Un sourire plein de sens s'affiche sur ton visage, sans que tu ne puisses l'effacer.

— Tu as raison. Mmh... plus compliqué: quel est mon jeu de société préféré?

Trois petits point sont en suspens sur le carré noir.

« Le Monopoly, sauf quand on achète toutes les gares à votre place. Vous et votre grand-père vous battez à chaque partie pour les acheter avant l'autre. »

Tu es frappée par sa malice innocente, mais tu ne sais pas de quelle façon il parvient à obtenir toutes ces informations te concernant, et ça t'agace.

— Oui, c'est ça. Dernier question, Carte. Pourquoi est-ce que j'aime pas le personnage d'Hermione Granger? Demandes-tu avec du mépris dans la voix.

Les films Harry Potter sont sûrement ceux qui t'ont appris le plus de choses sur la vie – en plus de tout ce que tu as vécu – et en parler te procure presque toujours une joie intense, tout comme parler de tout ce qui t'intéresse profondément.

L'écran s'assombrit jusqu'à devenir entièrement noir. Peut-être a-t-il abandonné, ne trouvant pas de réponse à t'apporter.

— Eh, réponds, insistes-tu. Tu ne vas pas lâcher aussi facilement, si?

« Elle est antipathique à votre égard à cause de sa soif de savoir et de la façon dont elle veut prouver au monde qu'elle lui est intelligemment supérieure. Et malgré le fait que c'est quasiment elle qui sauve le personnage personnage à chaque fois, vous faites tout pour lui trouver des défauts, comme, par exemple, que son sang impur ou alors que son épouvantard représente l'échec. »

Un rictus dégoûté déforme ton visage. Il a totalement raison.

— Je n'aurais pas dit mieux... Mais comment est-ce que tu sais ça?

« Je vous l'ai dit, je sais tout sur vous... »

Tu relèves la tête et jettes un coup d'œil à ce qui se passe dehors. La paysage défile et tu t'aperçois que tu arrives bientôt à l'arrêt du conservatoire. Tu appuies sur le bouton servant à demander l'arrêter, puis tu te lèves pour te placer devant la porte jusqu'à de que le bus s'arrête et te laisse descendre. Ton sac ajusté sur ton dos, tu reprends ta route, alors que le petit objet est toujours dans tes mains.

— Dis-moi quel âge j'ai.

Sans hésitation, la Carte répond:

« Vous avez eu quatorze ans et demi il y a deux semaines, vous êtes née le 5 mars 2008 »

— C'est frustrant, à quel point tu as l'air de connaître toute mon existence, mais c'est d'autant plus effrayant quand on sait que, moi, je ne te connais pas et je ne t'ai jamais croisé de ma vie. Enfin, si on admet qu'on peut croiser une carte, soupires-tu.

Les gens que tu croises dans la rue te regardent bizarrement, mais pas plus que d'habitude. Tu ajustes tes écouteurs dans tes oreilles pour leur faire croire que tu es au téléphone avec quelqu'un, sauf que tu as les yeux fixés sur cette carte que tu tiens fermement entre tes mains, alors tu continues à marcher sans te préoccuper de cette vieille femme pliée en deux et de son chihuahua emmitouflé dans un manteau pour chien rose, cette dernière marmonnant des insultes envers les jeunes dans sa barbe.

« Ignorez-la. »

Tu fronces les sourcils et reportes ton attention sur la Carte.

— Tu es en train de me dire qu'en plus d'entendre tu vois?

« Non, je distingue uniquement les formes, mais j'ai entendu quelqu'un marmonner à côté de vous, et j'ai fait la déduction »

Tu souris, ce sourire rare qui fait rayonner ton visage. Il semble s'inquiéter pour toi, et que ça soit vrai ou pas, tu laisses le sentiment d'importance t'envahir et se transformer en joie.

— Ne t'inquiète pas pour moi, j'ai l'habitude des regards pleins de reproche qu'on m'envoie quand je sors dans la rue. Les gens "normaux" pensent que ce n'est pas bien que je m'habille différemment des autres adolescentes de mon âge.

« Et comment vous habillez-vous? »

— Tu sais, mon style vestimentaire est très variable, passant du gothique au grunge, et à ce style qu'ont certains métalleux.

« C'est tout? Je veux dire, les gens vous jugent à cause de ça? »

Tu pouffes. Ça te paraît si insignifiant et pourtant si choquant pour les gens, et cette Carte doit bien avoir le même avis que toi.

— Ils estiment que les personnes comme moi sont des mauvaises fréquentations et qu'elles pourraient entraîner leurs enfants dans des sectes où on pratique le satanisme.

« C'est très cliché. »

— Ouais... Bienvenue dans le Monde Réel!

L'écran reste noir pendant quelques secondes, puis s'allume une nouvelle fois.

« Je voulais vous poser une question, ce n'est pas commun "Adkins" comme nom de famille en France, vous avez des origines américaines ou anglaises? »

Tu pensais qu'il savait tout de toi, dont l'origine de ton nom de famille. Tu es déçue.

— Je suis cent pour cent française. Seulement, ma grand-mère a eu un premier mariage avec un américain nommé Alfred Adkins, il l'a abandonnée sans lui donner aucunes nouvelles quelques années plus tard. Elle s'est remariée avec mon grand-père, mais elle a préféré garder le nom de son ancien mari, pour montrer aux autres qu'elle avait des origines. Je n'ai jamais aimé ma grand-mère, elle a des manières insupportable pour qu'on croit qu'elle a de l'argent et pleins d'amis. Mais la petite fille de paysan est née dans un ferme au fin fond des Alpes et n'a pas fait d'étude par manque d'argent, toutes les personnes qui lui ont fait confiance l'ont laissée tomber quand elles ont appris qu'elle leur avait menti sur toute la ligne, sur ses études en droit et sur sa famille américaine. Elle s'est retrouvée toute seule, sans amis, sans famille. Enfin... ma mère m'oblige à la voir une fois par semaine. Elle se permet de toujours critiquer la façon dont je m'habille, dont je me coiffe et même comme je mange!

Le bâtiment imposant du conservatoire s'affiche dans son entièreté devant toi et tu accélères le pas pour ne pas être en retard, toi qui as déjà beaucoup traîné.

— Au fait, est-ce que tu as un nom, ou quelque chose comme ça?

« Appelez-moi L'Inconnu »

— Et un vrai nom?

« L'Inconnu. »

— Si tu insistes...

Arrivée devant la porte automatique du conservatoire, tu envoies un message pour la prévenir que tu es arrivée, pour qu'elle ne s'inquiète pas. Tu poses la Carte sur l'écran de ton téléphone afin de faire croire à un curieux malvenu que tu es en appel vidéo avec quelqu'un.

— Dis-moi, L'Inconnu, pourquoi est-ce que tu me vouvoies? Après tout je n'ai que quatorze ans et on pourrait dire qu'on est amis maintenant.

« Peut-être, mais c'est une forme de respect. »

— Ça veut dire qu'on est amis?!

Ta voix est pleine d'espoir, et L'Inconnu le remarque bien.

« Oui, oui mais n'attends pas beaucoup de moi... »

Tu souris.

— Ce n'est pas grave. Tu as quel âge?

« Seize ans, enfin... »

— Et tu es une fille ou un garçon?

« Un garçon, c'est évident si je ne mets pas de e à la fin de "L'Inconnu" »

— C'est vrai. Bon, je dois te laisser, le cours va commencer, enfin tu dois le savoir puisque tu es le connaisseur de ma vie!

Avant même que ton nouvel ami n'ait pu répondre, tu ranges la carte dans ta poche et salues ton professeur de théâtre en entrant dans la petite salle.

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Vous êtes arrivés à la fin du deuxième chapitre!

✨2386 mots✨

Sachez que j'ai été touchée par touts les votes et tous les commentaires que vous avez laissé sur le premier chapitre, alors j'espère que The U.N.K.N.O.W vous aura autant plus que le précédent chapitre.

J'ai été étonnée que vous l'ayez autant aimé, et j'aimerais vous dire merci <333

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N'hésitez pas non plus à me dire si il y a des choses qui ne vous ont pas plu, ou des choses que je devrais modifier >>>>>>

Biz guys 🖤

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