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Kiera
Il est onze heures trente. Le soleil est chaud et je profite de ses rayons et de ses bénéfices sur ma peau. Parce que le soleil et la lumière m'aident à me sentir un peu plus légère alors que la pluie me rend morose et que le vent me rend anxieuse. C'est pour cela que l'été est tellement plus simple pour gérer mes crises. Alexis est dans le garage, juste en-dessous de notre appartement. Le bruit des boulonneuses résonne jusqu'à notre balcon mais bizarrement, ce son ne m'a jamais dérangé.
Nous avions craqué sur ce lieu en plein centre-ville un an seulement après notre rencontre. Il fallait absolument un endroit à Alex pour exercer son activité et le loft juste au-dessus était un très gros avantage.
Pour moi, un bureau, mon pc et mon matériel me suffisaient. D'ailleurs j'ai réussi à avancer sur la maquette d'une couverture, j'ai hâte de savoir ce que l'auteur va en penser parce que je me suis concentrée dessus depuis que je me suis levée, et il faut bien avouer que je suis assez satisfaite du résultat.
Aujourd'hui, j'ai décidé de passer à l'attaque et je suis anxieuse à l'idée de le faire. Mais je ne ne vais pas faire trainer les choses et j'ai vraiment envie qu'Alexis sache que je sais tout. Je saisis mon portable, me connecte sur « 2gether » et vais sur son profil. Mes mains sont moites de nervosité quand je tape le message privé.
Moi : Salut, je suis tombée par hasard sur ton profil. Ça te dit qu'on fasse plus ample connaissance ?
Voilà... C'est envoyé.
Et là, c'est le moment de stress. Et si jamais, il se doutait que c'est moi ? Je relis mon message, retiens mon souffle à la moindre recherche d'indice. Mais merde, Kiera ! Je m'énerve moi-même à tant douter. C'est à être comme ça que je vais me faire grillée. Mon téléphone vibre et d'une main tremblante j'ouvre la messagerie. Ah... C'est le fameux Amaury.
Am001 : Hey... Te revoilà... Alors, ton plan fonctionne ?
Je ne réponds pas, parce que d'un, ça ne le regarde pas et que de deux, je viens seulement de lancer la machine. Je me déconnecte en me promettant de revenir cet après-midi pour regarder si Alexis a répondu.Je me lève, coince mon portable dans ma poche et rentre. Alexis va bientôt remonter et je n'ai même pas encore préparer le diner.
∞∞∞∞∞∞
A midi quart, la porte s'ouvre sur mon homme sali de cambouis. Je le regarde enlever ses chaussures et les laisser sur le paillasson avant de s'approcher de moi.
—Ça va ?
—Oui et toi ?
J'entoure sa taille de mes bras et dépose un baiser sur sa bouche bien dessinée. Alexis est un très bel homme. Ses yeux bleus me transpercent et je m'y plonge avec bonheur avant qu'il ne m'embrasse sur le bout du nez. J'aime cet homme, surtout quand sa tendresse m'entoure et que mon corps l'accepte, quand mon esprit ne réclame que ça. Parce que même si je suis hideuse avec lui lors de mes crises, il est et restera toujours le centre de mon univers.
Son ventre qui gargouille me fait sourire contre son torse et je recule.
—Allez, go.
Dans la cuisine, je prends le plat de tagliatelles au saumon et me retourne pour le déposer sur le petit bar qu'Alexis a construit. Directement il prend les deux cuillères et se sert après m'en avoir généreusement données.
—T'as réussi à bosser ? demande-t-il.
Je m'installe à côté de lui et nous sers de l'eau plate.
—Oui, je suis même assez contente du résultat. Je pensais me monter un book, le proposer à de plus grosses boites et pourquoi pas travailler pour une d'entre d'elles. Imagine comme ce serait bien, ça ! J'aurais des collègues, des amies, et enfin une autre vie et avec tout l'argent gagné, je pourrais construire un petit appartement à côté du garage pour mon père.
Alexis avale de travers et je lâche ma fourchette dans mon assiette, irritée.
—Quoi ?
—Kiera, chérie...
—Attends... Tu vas encore me dire que non, ce n'est pas possible tout ça et que c'est parce que je suis surexcitée que je dis ça ?
—Et tu sais que c'est vrai !
—Et bien ça me saoule d'être cloitrée ici, de ne pas avoir de vie sociale. Tu ne me crois pas capable d'avoir une vie comme les autres ?
—Je n'ai jamais dit ça. Tu déformes mes paroles. Je dis simplement que pendant tes épisodes maniaques, tu as tendance à faire de grands projets irréalisables.
—Ce n'est pas irréalisable.
—Et vivre aux Etats-Unis, ça ne l'était pas ?
—Ce n'est pas pareil, grogné-je en croisant mes bras.
—C'est un exemple, Kiera. Tu sais bien que ton trouble t'empêcherait d'aller travailler chaque jour.
—Tais-toi.
Je me lève et prends mon assiette. Il me gonfle à toujours casser mes envies et viens de me couper l'appétit. Et même si mes projets sont énormes, qu'est-ce que ça peut lui faire ?
Je vide mon assiette dans la poubelle, la tape dans l'évier et sors sur le balcon. Je m'assieds dans le fauteuil et m'allume une cigarette.
—Pourquoi tu prends la mouche à chaque fois qu'on tente de discuter ? Demande Alexis en me rejoignant.
Exaspérée, je penche ma tête en arrière, plisse les yeux à cause du soleil et crache la fumée en l'air.
—Parce que t'es chiant. Va pas plus loin.
—Arrêtes.
Il s'assoit face à moi et même si je ne le vois pas, je sens son regard posé sur moi, ce qui a le don d'encore plus m'horripiler.
—Tu n'as pas des voitures à aller réparer ? craché-je.
—Si mais t'es ma femme, Kiera. J'aimerai bien savoir ce à quoi tu penses là.
J'ouvre un œil, retire sur ma clope et le toise.
—A rien, soufflé-je. Tu ne crois pas en moi, en mes capacités, ni en mes rêves. Alors à quoi bon parler ?
Il soupire, je respire. Quand il se lève, l'air triste marqué sur le visage et qu'il embrasse mon front, je retiens mon souffle.
—Ce n'est pas contre toi, bébé. Je te connais et quand tu iras mieux, tu verras que j'avais raison.
Je garde les yeux fixés sur l'immeuble qui me fait face, les mâchoires serrées pour ne pas fondre en larmes tant qu'il est là.
Pourquoi au lieu de me soutenir, de me dire que je suis capable de faire tout ça, il casse toutes mes ambitions ? Ne suis-je pas apte à vivre une vie normale ? La porte de l'appartement claque quand il sort et je laisse mes pleurs inonder mon visage. Ça fait mal d'être ce que je suis, d'être sous-estimée, d'être incomprise. Et pourquoi je n'arrive pas à rester calme quand il ne va pas dans mon sens ? Je m'en veux tellement, je m'en veux tellement de l'aimer et de le faire souffrir malgré mon amour. Et putain ! Mais pourquoi ces merdes de cachets ne m'empêchent pas d'être si méchante avec lui ?! Je pousse un cri de rage, un cri de désespoir qui perce dans le bruit de la ville, en contrebas. Alexis déteste quand je hurle comme ça alors que ses clients peuvent m'entendre, mais là, je l'emmerde. Je me lève, shoot dans la table basse et donne un coup de poing dans le châssis avant de grimacer sous la douleur.
∞∞∞∞∞∞
Allongée dans mon lit, je tente de me calmer sans casser quoi que ce soit. Je me connecte sur le compte de Lovamour69 et y découvre avec surprise qu'Alexis a répondu :
Leo83 : Salut :) T'es nouvelle ? Bienvenue à toi ;) Ton profil m'a l'air pas mal aussi !
Oh putain! Oh putain! Oh putain!
Mon cœur bat la chamade, des sueurs froides me font frissonner, et je suis tellement sous le choc que mes mains se mettent à trembler méchamment. Je me mords la lèvre inférieure. Tellement fort qu'une goutte de sang tombe sur le dos de ma main. Je plaque mes lèvres dessus et fixe ces lettres qui dansent sous mes yeux. Qu'est-ce que je peux répondre ?
Sans réfléchir, j'écris à Amaury.
Moi : Hey... Oui ça marche... T'es toujours ok pour m'aider ?
Dès que le message est parti, je m'en veux. Comment va-t-il m'aider ? Je ris tellement je me sens bête alors que sa réponse arrive rapidement.
Am001 : ;) bien sûr... Dis-moi, t'en es où ?
Moi : Il me demande si je suis nouvelle...
Am001 : Ah... T'en es au début quoi... Ben réponds !
Moi : Mais je réponds quoi ?
Am001 : Tu veux que je te dise ce que tu dois dire pour draguer un mec ???
Je réfléchis...
Moi : Oui. Enfin, subtilement... Ecoute, je n'ai jamais fait ça alors ça me parait dingue de draguer comme ça.
Am001 : Ok... Dis-lui que oui, tu es nouvelle. Demande-lui ce qu'il aime faire dans la vie. Les hommes adorent qu'on s'intéresse à eux.
Moi : D'accord... Merci.
J'envoie ce qu'il m'a dit à Alexis, le cœur au bord des lèvres.
Am001 : T'es une pucelle du web, alors ?
Moi : N'importe quoi...
Am001 : Je plaisante ;) Mis à part draguer ton mec sur le net, tu fais quoi dans la vie Lovamour ? Au fait, je peux avoir ton prénom ? Tu connais le mien...
Je ne sais pas pourquoi mais son message me fait sourire. Il a l'air assez sympathique mais il est hors de question que je lui donne mon prénom.
Moi : Je suis illustratrice et je suis Lovamour69.
Am001 : Enchanté l'inconnue. Joli métier ! Je suis maçon.
Alexis me répond et je décroche un instant de ma discussion avec Amaury.
Leo83 : J'aime les voitures déjà ;) Et le sport en général et toi ?
Je fais un copié/collé à Amaury, avec l'envie de vomir. Donc il n'y a pas que cette Madison... Je dois prendre sur moi pour ne pas descendre dans le garage et lui faire bouffer mon portable. Il n'y a pas des bagnoles à retaper au lieu de chatter ?
Am001 : Dis-lui que t'adore les belles carrosseries... Enfin, si tu ne veux pas le faire douter, dis quelque-chose de complètement opposé à toi.
Il a raison. Qu'est-ce que je hais ? Le cinéma, déjà. Je n'ai jamais compris pourquoi les gens payent pour s'enfermer dans des salles obscures qui sentent la transpiration pour voir un film. Je prends ses idées et réponds à Alexis, en tentant de ne pas me trahir.
Moi : Maçon ? c'est quand-même cool... dit... Ça va te paraitre indiscret de ma part mais j'aurais voulu savoir pourquoi tu traines sur ce genre de site ? Je sais que tu t'ennuies dans ton couple, tu me l'as déjà dit... Mais es-tu vraiment obligé de tromper ta femme comme ça ?
Après quelques secondes d'attente, la réponse d'Amaury arrive, me clouant le bec.
Am001 : L'inconnue... Penses-tu que l'infidélité puisse être virtuelle ? Mes lèvres sont uniquement dédiées à ma femme. Elle est la seule à s'empaler sur ma queue et la seule que ma bouche dévore...
Penses-y, l'inconnue.
∞∞∞∞∞∞∞
Coucou, je vous annonce ici que les prochains chapitres seront en mode privés et que pour poursuivre votre lecture, il faudra vous abonner à mon compte ;)
Bisous
Amandine
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