Chapitre 12 : Duel
Je faisais tourner mon crayon entre mes doigts tout en écoutant d’une oreille distraite ce que dit le professeur. Mon regarde se pose sur Orphée à côté de moi puis sur le talisman noir qui tranche avec sa peau opaline. D’ailleurs, en la regardant, j’ai l’impression que celle-ci est moins blanche qu’auparavant. Elle semble avoir une légère couleur rosée désormais. Enfin je dois me faire des idées. Je croise son regard et mes pupilles restent encrées dans les siennes. Définitivement, ce n’est pas moi qui me fait des idées, ses iris autrefois totalement incolores, grises sont désormais délicatement bleutées. Je lui en parlerais après le cours.
« Comme de ton loyer trop élevé. » Cingla ma conscience.
Ouais, de ça aussi il faut que je lui parle.
Je reçois un message de Lyës me demandant de le rejoindre dans la bibliothèque le plus vite possible, de quitter les cours si jamais j’étais en classe en ce moment.
En gros c'est : venez si possible, si impossible, venez quand même...
Je me penche vers Orphée et lui souffle :
« Demande pour m’emmener à l’infirmerie. »
Il se tourna vers moi, intrigué, peut-être même un peu inquiet puis il demanda à m’emmener. En sortant de la classe, il me demanda :
« Tout va bien ? »
« Oui, t’inquiète, nous devons juste rejoindre Lyës à la bibliothèque, il dit avoir trouvé quelque chose concernant le duel. »
Une fois dans le couloir, je guidais Orphée jusqu’à la bibliothèque. Nous rentrons dans la pièce fraîche et silencieuse. Nous vîmes Lyës au fond, assis à une table, affalé sur Adryen. Quand il nous vît, il se releva, se détachant de son presque amant. A peine nous fûmes assis à la table que la porte de la bibliothèque s’ouvrit en un grand fracas, laissant entrer Alphy’.
« Alors, qu’est-ce que tu as trouvé ? » s’enquit Alphonse avant même d’être assise.
« Eh bien » commença Lyës « à l’origine, les duels ont été créés, non pas pour prendre la tête d’un clan mais pour créer de nouveaux clans. C’est exactement ce que Maël veut que l’on fasse, nous allons monter notre propre clan. »
« Quoi ? Mais qu’est-ce que tu racontes encore ? »
« Adry’ au moins pour une fois dans ta vie fait moi confiance ! »
« Mais je te fais confiance, c’est juste que monter un clan c’est un peu gros comme histoire. »
« C’est justement pour ça que cette idée est géniale, personne ne s’y attendra, on les prendra par surprise. »
« Mais quel est l’intérêt ? C’est un duel, pas une partie d’échec. »
« Le monde entier est une partie d’échec. Rappelle-toi ce qu’a dit Maël, la force physique ne vient pas à bout de tous les combats. Ici, ce qu’il nous faut, c’est réfléchir. »
« Bon, ok, expose ton plan. » Accorda Adryen.
Lyës sourit fier de lui avant de commencer ses explications.
« On sait ce que Marcel fera comme demande, il voudra la direction du clan Pemphrédo et sûrement notre expulsion de tous les clans. Nous allons donc faire en sorte de garder l’avantage, quelle que soit l’issue du duel. Si tu remporte la victoire, nous pourrons obtenir le droit de gestion d’un clan, nous n’avons pas à leur dire que le clan en question n’est pas le clan Pemphrédo mais un nouveau que nous allons créer. Et si tu échoue, cela n’aura pas d’importance, j’ai épluché tous les livres concernant la création d’un nouveau clan et pour cela, il y a trois moyens : le duel officiel qui est la loi ancestrale mais qui n’est plus usitée, la prise de pouvoir par la force, un coup d’état en quelque sorte, après avoir réuni assez de partisans pour créer un clan et enfin la dernière, celle que nous allons utiliser, la demande officielle ; celle-ci comme la prise de pouvoir par la force demande de réunir des partisans puis, en gros, de déposer sa candidature au principal du lycée, jusque-là, c’est facile le plus dur est donc de le convaincre de nous octroyer le droit de diriger un nouveau clan. »
« Ça me parait bien mais… dans le cas où je remporte le duel, que devient le clan Pemphrédo ? »
« Ce ne sera plus de notre ressort, enfin si tu veux tout savoir, une élection sera organisée, sûrement présidée par Maël et nous sommes sûr que Marcel ne sera pas élu, il aura prouvé qu’il n’en a pas l’étoffe. »
« Et si l’on perd, combien de temps aurons-nous pour déposer notre candidature ? »
« Il faudra réussir à contacter le proviseur. Pour le reste, le plus tôt sera le mieux. »
« Ok, ça va le faire. » Somma Adryen, plus pour lui-même que pour nous.
« Le plan est bon mais il est évident que tout restera plus simple si le combat est remporté. » Exposa Orphée. « C’est pour cela qu’il faut affiner tes techniques de combat. »
« C’est ce que je fais depuis une semaine. »
« Ouais, je sais mais je parle en termes d’entrainement purement physique, je parle de technique de combat. »
« Tu sais te battre ? » S’instruisit Adryen.
« Plutôt pas mal et je pourrai t’entraîner pour les jours qui restent. » Affirma fièrement l’ange, me faisant lever les yeux au ciel
« Ouais, cool. »
« Alors on est tous d’accord sur ce plan ? » S’enquit Alphy’, prenant la parole pour la première fois de notre rendez-vous.
Nous acquiesçons tous les quatre et il en fut ainsi, la fin de la semaine arriva de façon fulgurante, Orphée passant tout son temps avec Adryen -il semble avoir trouvé un nouveau moyen de m’éviter- et moi tenant compagnie à Lyës et Alphy’. Lyës semblait s’être passionné des coutumes du lycée, il passait le plus clair de son temps dans la remise de la bibliothèque depuis que je lui avais montré où était la clef. Ce n’est pas pour me déplaire, ça m’évite de lire seul comme j’en avait l’habitude précédemment. Orphée ne me laisse plus rentrer seul, nonobstant il cherche toujours à s’éloigner de moi et cette situation commence à me rendre fou.
Le jour du duel était enfin là et tout le lycée était en effervescence depuis le matin. Plus tard, dans l’après-midi, Maël s'avança au centre de la clairière où allai se dérouler le duel et appela la présidente du clan Enyo, Arélys, à prendre place à ses côtés. Il annonça ensuite les termes du duel. Il invita les deux partis en conflit à venir présenter leurs doléances à l'assemblée. Il fut décidé qu'Adryen commencerait. Fidel à ce que nous avons convenu ensemble, il demande la gestion d'un clan s’il remporte le duel et rien de plus. Le problème c'est plus du côté de Marcel qui nous a totalement prit de court avec ses doléances qui ne coïncidaient pas à nos attentes. Evidement il a demandé la présidence du clan Pemphrédo ; mais ce fut la deuxième partie de sa requête qui nous estomaqua : il demandait Lyës ! En fait, il voulait que Lyës soit obligé de rester dans son clan, il voulait le prendre à Adryen et sûrement pas pour être gentil avec lui. En entendant cela, Adryen se mit hors de lui. On ne peut décemment pas demander une personne comme trophée d'un duel, c'est inhumain. Malheureusement, rien dans les lois des duels ne l'interdisait, Lyës était bien placé pour le savoir, lui qui avait lu un fort grand nombre de vieux manuscrits cette dernière semaine. En comprenant cela, il sembla s'écrouler, désemparé. Adryen passa sa main sur son épaule pour le rassurer, lui disant de ne pas s'inquiéter, qu'il ne laissera jamais Marcel l'avoir, qu'il allait laisser la gestion du clan à ce dernier et annuler le duel pour ne pas risquer de le perdre.
« Mais tu ne comprends pas, c'est exactement ce qu'il attend, nous l'avons grandement sous-estimé, si tu ne te bats pas, il sera gagnant d'office et aura droit de récupérer ce qu'il a demandé, moi y comprit, il nous a piégé. »
« Merde ! » S'exclama Adryen. « Quel con ! »
Orphée marcha jusqu'à eux et prit Adryen à part.
« Ais fois en toi, je t'ai entrainé, je sais de quoi tu es capable, tu as largement le potentiel de remporter ce combat, fait de ton mieux. »
« Ouais, j'espère que je peux te croire parce que ce n'est pas comme si Marcel ne savait pas se servir des poings.»
« Tu auras l'avantage si tu effectues le coup que je t'ai appris. Il ne saura pas le contrer. »
« Et s’il y arrive ? »
« Cela ne se passera pas. »
« Ouais, ok, il faut que j'y crois, que je sois concentré. »
« C’est ça. »
Ils revinrent vers nous, une lueur de détermination nouvelle étincelant dans les prunelles d'Adryen. Il se pencha vers Lyës qui était assis sur un banc métallique et pris son visage en coupe.
« Ne t'en fait pas Bijou, je te lâche pas, je vais vaincre, je te le promets. »
Le petit bouclé rougit à l'entente du surnom que lui avait donné Adryen.
« Mais si jamais... » Il n'osa pas aller au bout de sa phrase, terrifié par l'idée de devoir appartenir à Marcel.
« Hey, regarde-moi. Je t'ai toujours protégé non ? Alors il sera pareil aujourd'hui. Tu me fais confiance ? »
« Ouais. » Souffla simplement le plus petit tandis qu'Adryen, toujours accroupis devant lui, l'enlaçait pour le rassurer, avant de se relever et d'aller prendre place au centre de la prairie qui allait servir d'arène à ce tournoi. Un peu en retrait, on pouvait voir un portant où se trouvaient toute sorte d'armes. Maël demanda au deux combattant de reculer de vingt pas, l'un vers la droite, l'autre vers la gauche. Il rappela les termes du combat et ce dernier pu commencer au coup de feu tiré par Arélys.
Les deux combattants se ruèrent vers les armes, Adryen qui avait l’avantage question agilité et vitesse parvint au portant avant Marcel, ce dernier étant indéniablement plus lourd et plus lent. Il se saisit alors des deux premières armes qu'il trouva, des lames de lancer, petites et légères, il les passa dans la poche intérieure de sa veste, facilement accessibles puis prit un pistolet à fléchettes neurologiques, simulant la douleur d'une véritable balle pendant quelques secondes puis il s'écarta des autres armes. Son choix d'armement, selon Orphée était plutôt bon, il pouvait atteindre son adversaire à distance mais ne serait pas handicapé s'il était obligé de se défendre en combat rapproché. Marcel avait lui aussi choisi ses armes, un couteau à cran d'arrêt avec une lame de quinze cm environ, un coup de poing américain particulièrement pointu et tranchant et un pistolet également.
« Ses armes sont essentiellement offensives et utiles en combat rapproché, en combat longue distance, il sera désavantagé car seul le pistolet lui sera utile et le nombre de fléchettes dans le chargeur est limité, quand il n'en aura plus, il sera obligé de s'approcher d'Adryen or il est moins rapide que lui, Adryen pourra donc certainement creuser l'écart entre eux et le conserver, empêchant ainsi son adversaire de l'atteindre, seule difficulté, il ne devra jamais s'arrêter et se fatiguera donc vite. C'est pourquoi il doit attaquer en premier et essayer de blesser Marcel tant qu'il est loin de lui. » M'expliqua Orphée doucement.
Le duel avait commencé, et pour le début, tout se passa exactement comme Orphée l'avait annoncé, combat éloigné à armes égales, cachés derrière les éléments présents sur le terrain, les arbres, les rochers, les butes de terre, pour se protéger des coups de l'autre. Adryen visant les jambes de Marcel pour réduire sa mobilité. Mais tout dérapa quand Adryen fut touché le premier, à l'épaule, l'empêchant de tirer pendant une minute tant la douleur était grande. Il arracha la fléchette et Marcel profita de cet instant pour lui tirer dans la cuisse, cet acte lui permettant de considérablement se rapprocher.
« Merde, il a compris qu'Adryen essayait de l'immobiliser alors il essaye de le prendre de vitesse, de l'empêcher de bouger avant d'être lui-même contraint à l'immobilité. »
Marcel fut bientôt à cours de balle et ne perdit pas un instant pour courir vers Adryen qui clopinait pour s'écarter le plus vite possible. Quand Marcel fut prêt à l'avoir, il fit rapidement volte-face et lui tira une fléchette, visant d'abord son ventre puis, avec un sourire mauvais descendis le canon de l'arme et le coup parti directement dans son entre-jambe.
Charmant.
Marcel tomba à genoux, sifflant de douleur. Adryen en profita pour disparaitre dans les fourrés.
« Pourquoi il n'a pas fini pendant que Marcel était à terre ?»
« L’honneur sans doute, il vient déjà de lui tirer dans les bijoux de famille, il ne va pas lui porter son dernier coup quand il est à terre, on ne frappe pas un homme à terre. Même si c'est une enflure comme Marcel. »
« Wow, t'es sacrément remonté contre lui, d'où vient toute cette haine ?»
« J’aime pas la façon qu'il a de te regarder. »
C’est la deuxième fois qu’Orphée fait ce genre de réflexions à propos de la façon dont certaines personnes me regardent pourtant je n’ai jamais remarqué de regards particuliers sur moi. Il doit être vachement attentif pour déceler ce genre de choses.
« Quoi, moi ? Mais il sait à peine qui je suis. »
« Même, quand il te regarde, il a un regard lubrique. »
J'haussais les épaules et ne dit rien, me reconcentrant sur le duel. Au centre de la prairie, Marcel lança son poing muni du coup de poing américain dans la pommette d'Adryen, faisant couiner Lyës d'effroi, obligeant Alphonse à le retenir pour ne pas qu'il descende dans l'arène.
Adryen, qui tenait dans sa main une des lames qu'il avait prises, se défendait rageusement, comme une bête sauvage. Il réussit à s'éloigner de son adversaire de quelques pas, c'est alors que, bien face au regard de Marcel, il lâcha sa lame, déconcentrant ainsi ce dernier qui suivit le mouvement de l'arme tombant au sol du regard, laissant juste assez de temps à Adryen pour ressortir son pistolet et faire une clef de bras à Marcel, le bloquant ainsi, posant le canon de son arme contre son cou.
Je crois que c’est de ce coup-là qu’il parlait avec Orphée avant le combat.
« T’es fini Cohàn, abandonne. »
« P’tit merdeux, ta pute ne s'en sortira pas ainsi, tu as beau te démener, tu ne pourras pas toujours le protéger. Et je vais lui faire mal, très mal et pourtant, comme la putain qu'il est, il en redemandera. »
« Va te faire, fumier. »
Dédaigneux, Adryen repoussa Marcel, faisant trébucher ce dernier puis il alla retrouver Lyës. Dans son dos, Marcel ramassa la lame au sol mais son geste fut stoppé par la main de Maël et son regard réprobateur. Adryen rejoint celui qui représente en quelque sorte le porte-parole de tous les élèves, prêt à recevoir le titre qu'il mérite.
Soudain, je fus prit de vertiges, ma blessure à la hanche se mettant à me brûler furieusement. Alerté par mon petit couinement de douleur Orphée se tourna vers moi, inquiet. Instinctivement, je répondis que tout allait bien.
De toute façon ça va passer rapidement.
Ma vue est légèrement brouillée, j’essaye de me concentrer pour voir clair, regardant Alphy' se lever pour rejoindre Adry' et Lyës qui conversent avec Maël, mais cela ne fait qu'intensifier les bourdonnements dans mes oreilles. Orphée se lève à son tour et je suis le mouvement -ou du moins essaye de le suivre-.
Le monde tangue autour de moi et par deux fois je manque de retomber mollement sur le banc.
Finalement, ça ne va peut-être pas juste passer.
Voyant que je ne suis pas, Orphée revient vers moi et sourcils froncés, il posa sa main sur mon front.
« Mahé t’est brûlant de fièvre !»
Vidé de toute énergie, je me contente de me laisser glisser contre son torse chaud, musclé et rassurant, posant mon front contre sa clavicule, expirant bruyamment.
« Hey, t'endors pas, je te ramène chez toi, essaye de tenir jusque-là. »
Je ne dis rien et le laisse passer ses mains sous mes cuisses pour me porter. Je m'accroche à lui et hume son odeur pour me concentrer sur autre chose que la douleur me vrillant les entrailles. Je le sens se mettre en mouvement sans réellement savoir depuis combien de temps il me porte dans cet état comateux qui est actuellement le mien.
« On est presque arrivé, tu vas pouvoir te reposer. Hey bébé tu m’écoutes. »
« Laisse-moi juste dormir, s’il te plait. »
« Pas tout de suite, bientôt, bientôt. » Même sa voix douce paraissait tranchante, rugueuse et âpre comme du verre pilé à mes oreilles sifflantes.
Il déposa un baiser doux sur mon front, écartant une de mes mèches bouclées collée par la transpiration.
« Et, pourquoi tu me touche les fesses. » Articulais-je difficilement.
Il rit un peu avant de me répondre, le plus naturellement du monde :
« Je cherche tes clefs, pour ouvrir la porte. »
« Et pourquoi tu cherches les cherche à cet endroit ? »
Il rit de nouveau.
« Parce que tu mets toujours tout dans tes poches arrière de jeans d’habitude. »
« Ah. » Lâchais-je seulement, sans me rappeler de quoi il était question, l’esprit trop embrumé par la fièvre.
« Du coup, elles sont où ? »
« De quoi ? »
« Les clefs. » Soupira-t-il.
« Ah ! Euh… dans la poche de ma veste, à droite »
« Ok… »
J’entendis la porte se déverrouiller puis je sens les bras d’Orphée me quitter étant substitué par le moelleux du canapé. Je me mets directement à frissonner, perdant la chaleur du corps de l’ange.
Pendant tout le reste de l’après-midi, il m’a veillé, rassuré et rafraîchi avec un gant de toilette humide. Me parlant doucement, une main constamment perdue dans mes cheveux, apaisante.
Voyant que je n’arrivais pas à trouver le sommeil, bien que je tombais de fatigue, il a même été demander à Alphy’ de lui prêter ses pilules somnifères. M’obligeant à en prendre.
Et moi qui avait juré je jamais avaler de ces choses-là…
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A partir d'aujourd'hui, je compte essayer de publier tous les jours.
Donc à demain.
Avec amour et dévotion,
ParadoxalementParadoxale.
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