34. TRANSFORMATION

𝐒𝐘𝐌𝐏𝐇𝐎𝐍𝐈𝐄 𝐃𝐄 𝐍𝐎.𝟖
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chapitre trente-quatre —— Transformation
« Parfois, la vie peut être injuste, mais ce n'est pas une raison pour renoncer à elle. »




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Aika avait toujours été gentille avec tout le monde.


Ce monde était injuste.


Aika s'était toujours donnée du mal pour aider les autres.


Qu'avait-elle fait de mal pour mériter ce qui lui arrivait ?


La douleur l'empoisonnait, la détruisait. Lentement. Elle se laissait submerger par la colère que cette nouvelle rumeur lui provoquait. Son cœur semblait se décomposer, se remplir d'une grande noirceur.


Sa vue était totalement noire. Aussi noire que les ténèbres qui s'installaient en elle. L'odeur du sang lui parvint, sans qu'elle ne sache d'où est-ce qu'elle provenait exactement. Les bruits aux alentours s'intensifiaient, lui brisaient les tympans. Aika entendait des hurlements glaçants, horrifiques.


Elle voulait courir. Partir loin de l'enfer qui était en elle. Rejoindre au plus vite Hanako, rester avec lui pour l'éternité et sauver Yashiro. Mais tout cela n'était qu'un pauvre espoir auquel elle s'était raccrochée pendant trop longtemps.


Elle voulait encore s'agripper à cet espoir qui semblait devenir une utopie.


Tout ce qu'elle souhaitait, c'était de vivre aux côtés de ceux qu'elle aimait. Même de son vivant, ça n'avait pas été possible. Pourquoi ? Pourquoi la vie lui avait infligée autant de souffrance ?


Pourquoi n'avait-elle pas pu vivre comme tout le monde ?


Aika voulait vivre. Elle voulait tant partager de merveilleux moments avec les gens qu'elle aimait. Elle voulait encore passer du temps avec Hanako, l'aimer comme elle le voulait, l'admirer et l'embrasser simplement. Elle voulait observer les couchers et levers de soleil encore et encore.


C'était impossible. Elle avait fait un choix. Un choix qu'elle ne regrettait pas, qu'elle assumerait jusqu'au bout. Depuis le début, Aika savait comment tout allait se terminer, comment elle allait terminer. Cela l'affligeait, l'accablait, mais elle l'avait choisi.


Aika en voulait au monde. Je hais tout le monde. Je jalouse ceux qui mènent une belle vie, ceux qui profitent de leurs amis, leur famille.


Non, ce n'était pas vrai, ce n'était pas elle qui songeait à ça. C'était une autre voix, une autre personne dans sa tête. Qu'est-ce qui lui arrivait ? Ce n'était pas elle.


C'était sûrement sa transformation qui la lui apportait. Aika ne savait plus déceler ses propres envies, ses propres émotions, ses propres pensées. Elles se mélangeaient, se confondaient avec d'autres qui n'étaient pas les siennes.


Comment pouvait-elle maintenant savoir qui elle était vraiment ?


Aika, elle, n'avait jamais rien eu. Elle aurait tant voulu l'amour de ses parents, le réconfort de ses amis lorsque tout allait au plus mal.


Elle aurait voulu avoir le luxe de pleurer au moindre problème. D'être en colère pour un rien, faire la tête quand elle le souhaitait, ne plus parler à quelqu'un simplement parce qu'elle n'en avait plus envie.


Aika aurait voulu qu'on remarque quand elle n'allait pas bien, qu'on l'aime, qu'on la soutienne. Mais rien. Jamais de sa vie, elle n'avait eu quelque chose. Pourquoi son destin était-il seulement de la souffrance ?


Elle aurait voulu avoir cette vie et la prendre avec autant de légèreté qu'une chose que l'on peut jeter comme bon lui semble. Elle aurait voulu souhaiter de mourir quand elle le voulait, simplement parce qu'elle était de mauvaise humeur. Faire de faux "au revoir" sans même plus connaître son véritable sens.


Aika aurait dû avoir cette vie. Pourquoi ne l'avait-elle pas eu ? Pourquoi avait-elle reçu un destin plus compliqué que les autres ?


Cette petite fille si fragile qu'elle était. Toute sa vie n'était que des immenses problèmes qui s'enchaînaient encore et encore. Une boucle infernale qui se répétait. Pourquoi ? Elle ne méritait pas ça. Elle était bien trop douce, gentille et généreuse pour cette vie.


Mais en vérité, est-ce qu'Aika regrettait d'avoir vécu ? Était-elle tout de même heureuse de tout ce qui lui était arrivée ? Oui. Elle était heureuse de tout ça.


En grandissant, Aika s'était résolue à ce que la vie soit aussi injuste. Elle avait été formée, endurcie à la triste réalité. Elle avait appris la véritable valeur d'une vie, le véritable sens d'un "au revoir" et tant d'autres choses.


La jeune fille ne regrettait rien, malgré la voix dans sa tête qui lui disait le contraire, lui dictait d'infliger toutes les souffrances qu'elle avait endurcies. Aika ne le ferait pas, elle garderait le contrôle.


Elle n'était pas du genre à se venger. Elle ne pouvait détester quelqu'un ni même en vouloir à une personne. Jusqu'à sa mort, elle restera juste et gentille avec tout le monde. Elle n'infligera aucune souffrance, même sous la contrainte.


Aika préférait mourir que de devoir faire subir la moindre douleur.


La voix dans sa tête continuait de lui parler, de l'influencer. Je devrais tous les tuer. Pourquoi n'ai-je pas reçu l'amour et l'affection que je méritais ? Pourquoi est-ce que je subis tout ça ?


Lentement, la jeune fille réussit à réduire la voix dans sa tête. Elle reprenait une respiration régulière, quelque peu saccadée et sifflante, mais elle parvenait à reprendre le contrôle.


Même si elle se tordait de douleur, que ses yeux se creusaient, elle souriait. Aika releva la tête, face à elle, même si elle ne voyait rien. Elle pouvait sentir des frissons la parcourir toute entière, des murmures morbides autour d'elle, lui chuchoter de tous les tuer, ou bien encore ses membres trembler tant ils paraissaient se briser.


De sa gorge serrée, d'une voix fébrile et douce, Aika prononça ces mots :


— Je ne ferais de mal à personne, personne ne mérite la moindre douleur.

Tu penses ? Tu es à présent la violoniste aux yeux crevés. Tu peux te venger de tous ceux qui te font subir d'horribles choses ! s'exclama la voix avec entrain. Je t'aiderai. Je ferai de toi la personne la plus heureuse au monde ! Tu te vengeras des gens que tu détestes, qui t'ont maltraités, n'es-tu pas heureuse ?


La voix dans sa tête paraissait se moquer d'elle.


— Nous n'avons pas tous la même vie, les mêmes valeurs, ni les mêmes pensées, souffla Aika d'une voix douce. Ma vie, je l'ai vécue, et j'ai vécu tout ce dont j'avais besoin. J'aurais voulu qu'elle se passe autrement, qu'elle soit juste comme tout le monde, mais ce fut impossible.

Alors, pourquoi t'obstines-tu à garder ce sourire niais ? Pourquoi ne veux-tu pas te venger des gens qui ont transformé ta vie ? Tu sais, sans eux, elle aurait pu être "comme tout le monde".

— Je ne veux pas que quelqu'un subisse ce que j'ai vécu, toute la douleur que j'ai ressenti ou même connaître la mort. J'ai appris qu'une vie est précieuse, qu'il ne faut pas la gâcher. C'est pour ça que je veux aider tout le monde, que je veux leur montrer comment vivre malgré les problèmes.

Mais réfléchis un peu ! Tu pourras aider les personnes qui étaient comme toi ! Tu les aideras à aller mieux en tuant tous les gens qui leur font du mal !

— Je ne veux pas les aider de cette façon... murmura tristement la jeune fille.


Elle entendit subitement des bruits de pas. Plusieurs même, assez saccadés et pressés. Si Aika en jugeait en fonction de leur poids et de leur bruit, elle devinait aisément qui était la personne qui courait à toute allure dans sa direction.


— J'aurais voulu aimer Hanako pendant au moins une éternité, devenir encore plus amie avec Nene, partager de bons moments avec Kou, aider tant d'autres élèves... Mais ça ne sera malheureusement pas possible. Peut-être dans une autre vie, qui sait ? Nous mourrons tous de toute façon. La justice est toujours rendue, Tsukasa mourra un jour ou l'autre.


Aucune réponse ne vient du garçon. Il était sûrement déjà partit depuis bien longtemps. Depuis combien de temps était-elle transformée ? Où se trouvait-elle d'ailleurs ? Était-elle toujours dans le territoire aux miroirs ? Depuis combien de temps était-elle seule ?


— Peu importe. Airi, Ai, je vais enfin vous rejoindre.


Et à ces mots, elle se tourna en direction du nouveau visiteur qui venait tout juste d'arriver, quelques mètres plus loin. Un sourire aux lèvres, le cœur bondissant dans sa poitrine, elle imaginait déjà sa réaction en la voyant.


— Hanako, je t'attendais... murmura-t-elle, à bout de souffle.




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CHAPITRE 34 TERMINÉ
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