24. UNE SECONDE PROMESSE

𝐒𝐘𝐌𝐏𝐇𝐎𝐍𝐈𝐄 𝐃𝐄 𝐍𝐎.𝟖
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chapitre vingt-quatre —— Une Seconde Promesse
« Ne faites pas de promesses que vous ne pouvez pas tenir, ou vous détruirez quelqu'un qui croyait en vous. »




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— Airi, ton concert se déroule bien demain, n'est-ce pas ? demanda la mère d'une voix pleine d'entrain. J'ai tellement hâte ! Je suis sûre que tu seras fabuleuse !

— Oui, tu vas être incroyable comme toujours, poursuivit le père d'un air approbateur. Tu te rends compte que tu es bien meilleure que tes deux autres sœurs alors que tu as seulement commencé le violon il y a quelques années ? C'est incroyable !

— Ne vous inquiétez pas, je ne vous décevrais jamais, leur assura la jeune fille de seize ans.


Malgré son air calme et indifférent qu'elle arborait, Airi explosait à l'intérieur. Elle n'en pouvait plus de ses parents, elle ferait n'importe quoi pour les envoyer valser dans les airs. Qu'ils meurent même.


A côté de l'adolescente, Aiko et Ai écoutaient silencieusement la conversation, le même sourire aux lèvres que d'habitude. Elles entendaient tout ce que leurs parents disaient, sans sourciller ni même réagir. Depuis le temps qu'elles entendaient les mêmes paroles à propos de leur sœur, elles étaient habituées à ce grand favoritisme.


Que pouvait-elle bien faire contre ses parents ? Comment Airi pouvait se débarrasser de cette charge qui pesait de plus en plus lourd sur ses épaules chaque jour ? Elle ne supportait plus sa vie, ni ce que ses parents lui infligeaient.


Seules ses deux sœurs la faisaient encore vivre.


Aiko et Ai étaient les choses qui comptaient le plus pour Airi. Elles étaient la prunelle de ses yeux, des petits soleils qui illuminaient sa journée.


Airi aurait tant aimé avoir un amour réciproque de ses sœurs. Mais c'était impossible. Elle avait besoin de se défouler, d'enlever cette pression et cette colère qu'elle gardait en elle. Et le seul moyen qu'Airi avait trouvé, c'était de battre ses sœurs, de leur porter des coups, tous plus violents que les précédents.


Et la jeune fille le savait : ses coups devenaient de plus en plus forts, un incident pourrait bien vite arriver si elle ne faisait pas plus attention.


Une fois le dîner passé et la table débarrassée, les parents partirent à leur soirée habituelle, tandis que les trois enfants se dirigèrent dans la chambre d'Airi, comme à leur habitude.


Il était l'heure de se défouler, d'extérioriser la haine que gardait Airi en elle.


Un coup, puis un deuxième, et la boucle continuait ainsi pendant de longues minutes. Aujourd'hui encore, c'était Aiko qui prenait. Elle ne disait rien, elle souffrait en silence, elle pleurait sans le moindre bruit.


Seul le faible sourire sur ses lèvres faisait comprendre à Airi qu'elle acceptait les coups.


Ai, la benjamine de dix ans, était recroquevillée dans un coin de la pièce, les yeux fermés et les oreilles bouchées par ses petites mains. Elle aussi, elle pleurait en silence.


— Vous ne pouvez pas savoir ce que je ressens, murmura Airi avec rage. Vous ne pouvez pas comprendre, vous ne pouvez rien comprendre ! Vous n'imaginez pas comme c'est dur et...

— Tu as raison, nous ne pouvons pas savoir ce que tu ressens, lâcha Aiko entre deux sanglots silencieux. Si tu as besoin de nous, nous serons toujours là pour...

— Arrête Aiko ! s'exclama soudaine Ai avec fureur.


Airi arrêta un instant ses coups pour écouter ce que sa petite sœur avait à dire.


— Arrête de penser qu'elle peut nous infliger ça, seulement parce qu'elle est malheureuse ! poursuivit l'enfant. Même si on ne comprend pas ce qu'elle ressent, ça ne lui donne pas le droit de nous infliger autant de douleur !

— Ai, c'est notre sœur, tenta Aiko avec douceur, nous devons l'aider à se sentir mieux et...

— Je n'en peux plus de subir ça ! J'en ai marre ! s'écria Ai, montrant le fond de sa pensée pour la première fois. Marre de passer pour un fantôme dans la famille, marre de toujours garder le silence et de souffrir seule, marre de voir Aiko souffrir pour moi !


Elle ajouta dans un soupir :


— Les seules choses qui me permettent de rester en vie, c'est Aiko, et c'est de me dire que tout ça sera bientôt fini, et qu'un jour, Aiko et moi serons libres...


En une fraction de seconde, une vive colère éclata en Airi, prise d'une rage extrême. Comment ça, Ai ne voulait pas l'aider à aller mieux ? Elle ne voulait pas souffrir pour qu'Airi se sente bien ? Et dire que sa grande sœur l'aimait de tout son cœur, voilà comment elle était remerciée !


Sa douleur n'était rien comparée à celle d'Airi. Comment Ai pouvait oser se plaindre ? Et qu'entendait-elle par "ça sera bientôt fini" ? Alors quoi ? Elles allaient laisser Airi seule, avec les parents ? Il en était hors de question.


— Tu refuses de m'aider ?! hurla l'adolescente avec fureur. Tu es ma sœur et je t'aime, et toi, tu ne m'aimes pas et tu ne veux pas que je me sente mieux ? À quoi ça sert que tu vives à mes côtés, si tu n'es pas capable de comprendre que j'ai besoin de ton aide pour aller mieux ?

— Tu pense qu'on peut t'aimer alors que tu nous fais du mal ? cria à son tour Ai, pleurant à chaudes larmes. Moi, je ne t'aime pas ! Tu me fais du mal et surtout à Aiko, alors qu'elle, elle t'aime et ferait n'importe quoi pour t'aider !

— Justement, elle m'aide quand elle se laisse frapper !

— Il y a d'autres moyens pour qu'on t'aide sans que tu nous frappes ! Mais tu es tellement folle que tu as pensé à la solution la plus tordue et la plus douloureuse pour nous ! Toi, tu es tranquille, tu n'as pas mal. Alors que nous, nous souffrons tous les jours !

— Sale petite chieuse, tu ne comprends toujours pas qu'une douleur n'est pas forcément physique ?


Airi se jeta sur sa petite sœur et lui asséna des dizaines de coups-de-poing au ventre. La benjamine hurla de douleur, alors qu'Aiko suppliait son aînée d'arrêter.


— Arrête, je t'en prie, calme-toi ! s'exclama l'aveugle en pleurs. Je... Je vais t'aider à aller mieux ! Alors arrête de frapper Ai !

— Et comment, hein ? Qu'est-ce que tu vas faire ? Qu'est-ce que tu peux me dire ?

— Je... Pour le concert de fin d'année, je jouerais mieux que toi ! Papa et maman le reconnaîtront, ils ne te mettront plus la pression après ça !


Airi se stoppa net dans ses gestes, puis se tourna lentement vers sa petite sœur aveugle.


— Tu es bête ou quoi ? Si je fais ça, je les décevrai !

— Bien sûr que non, puisque tu n'auras commis aucune erreur ! poursuivit la blonde. Je jouerai juste une partition plus dure. À la fin, lorsqu'ils verront que j'ai mieux jouer que toi, ils s'intéresseront enfin à Ai et moi, nous serons une véritable famille ! Je te promets que je réussirais, fais moi confiance !

— Très bien, je te fais confiance alors, souffla Airi en se relevant. Tu me l'as promis Aiko, tu devras tenir ta promesse.


Et à ces mots, elle arrêta de martyriser Ai, puis passa devant Aiko, un sourire sincère aux lèvres.


Est-ce que son cauchemar allait enfin s'arrêter grâce à cette promesse ? Elle croyait de tout son cœur en sa petite sœur.




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CHAPITRE 24 TERMINÉ
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