Chapitre 7
-Et maintenant ?
Liam met sa main sur la mienne d'un geste qu'il veut réconfortant. Après des heures et des heures de route, nous sommes enfin arrivés à destination. Nous sommes à quelques kilomètres de cette zone 51. Je me souviendrais de ces quelques jours toute ma vie. Ça a été mouvementé.
Après avoir parlé à Emy, Liam est devenu froid et distant. J'ai bien essayé de détendre l'atmosphère à l'aide de blagues, mais ce n'est pas vraiment le domaine que je maîtrise le mieux. Cette ambiance me pesait. Il était si gentil avec moi, et j'ai tout gâché. Marre de tout ça, je me suis arrêtée sur le bas côté.
-Qu'est ce que tu fais ?
-Désolée, OK ?
Les mots sont sortis plus brusquement que je ne l'aurais voulu mais cette situation me pesait vraiment. En tant qu'équipe, nous devrions nous serrer les coudes si nous voulions réussir. Être en froid ne nous serait d'aucune utilité.
-Oui, j'ai envoyé un message à Emy car je n'ai pas confiance en toi ! Je ne voulais pas te blessé je... c'était juste un moyen pour me rassurer. Est-ce que tu vas vraiment me blâmer pour ça ?
Ma voix est partie dans les aiguës. Mes mains ont couvert mon visage.
-Je n'arrive juste pas à comprendre pourquoi tu acceptes de faire le voyage avec moi si tu ne me fais pas un minimum confiance. Depuis le premier jour de notre rencontre, je me suis montré gentil, j'ai essayé de te faire rire. Ce qui est loin d'être ton cas.
Un sourire amer s'est installé sur ses lèvres. C'est vrai que je n'ai pas toujours été très agréable avec lui.
-Je sais, et je le regrette. Tu es juste entré dans ma vie au mauvais moment. Je n'allais pas très bien. Je n'avais pas vraiment la tête à rire. Tout ce que je voulais, c'était qu'on me laisse tranquille.
-Ouf ! J'avais cru que tu étais comme ça à cause moi.
Son visage s'est déridé et un sourire a illuminé son visage. La glace était brisée.
-Non, du tout.
Je lui ai souris puis je lui ai tendu la main.
-Amis ?
Il a éclaté de rire.
-Et c'est moi l'enfant ?
Il a placé sa main dans la mienne pour la serrer.
-Amis.
Ensuite nous avons repris la route dans la bonne humeur mais ça n'a pas duré longtemps. Un des pneus du 4x4 s'est crevé, et une nouvelle dispute a éclaté car il ne savait pas comment le changer.
-Dis-moi que tu me fais marcher ? T'es un mec. Tous les mecs savent changer une roue !
-N'importe quoi ! Ne me dis pas que tu crois à tous ces stéréotypes ?
Une fois le problème réglé, nous avons continué notre périple. Le soir, dans le motel, nous n'avons pas fermé les yeux de la nuit. Le couple de la chambre d'à côté était tellement bruyant qu'il était impossible de dormir. Leurs ébats ont duré toute la nuit.
Le lendemain, c'est crevé que nous avons repris le volant. Nous étions tellement fatigué que nous avons oublié de faire attention à la jauge d'essence. Heureusement, nous n'étions seulement qu'à quelques kilomètres d'une station. Nous avons dû faire un aller retour avec des bidons d'essence. Et il y a eu aussi un énorme orage. La pluie était tellement forte, que nous n'y voyons rien sur le pare-brise. Les éclairs tombaient du ciel. J'ai demandé à Liam de s'arrêter, mais il ne voulait rien entendre. Il était hors de question de perdre du temps pour quelques gouttes et quelques flashs dans le ciel.
Petite, j'avais peur de ces phénomènes naturels. J'avais toujours peur que l'éclair s'abatte sur moi. Ou sur ma maison. Il paraît que c'est rare. Mais ça arrive. Finir foudroyée n'a jamais été la mort que je souhaitais. Je mentirai si je disais que cette peur ne me hante plus. J'ai toujours détesté les orages. Je trouve ça beau mais tellement terrifiant. Tout comme le feu. Si beau à regarder, mais brûlant. Il peut tout détruire sur son passage. Réduire une forêt en un amas de cendre.
Les choses les plus belles sont souvent celles qui sont les plus dangereuses. Une rose nous invite à la sentir. À la cueillir. Mais ses épines nous rappellent que cette fleur, si belle, peut blesser.
Une fois l'orage passée, je me suis détendue. Liam s'est moqué de moi. Avoir peur de l'éclair est ridicule pour lui. La peur est difficile à maîtriser. On aimerait la contrôler. S'en débarrasser. Mais elle nous colle à vie. Parfois elle s'estompe, cachée dans un recoin de notre cerveau. Parfois elle nous suit, nous hante. Telle une ombre. Insaisissable. Pourtant bien présente.
Désormais, nous sommes à quelques kilomètres de notre destination, et je n'ai jamais été aussi anxieuse de toute ma vie. Liam a éteint le moteur de sa voiture. Il fixe l'horizon. Il semble soucieux. Il réfléchit peut-être à la suite des événements. Il réalise sans doute que, maintenant que nous sommes arrivés à destination, il ne reste plus rien à faire. Mis à part faire demi-tour. En acceptant de faire le voyage, je savais que la mission serait un échec. Pénétrer dans une base est impossible. Sauf si on cherche à se faire tuer. J'ai bien aimé faire cette expédition avec Liam. Je me suis ouverte à lui de jours en jours. J'ai réussi à lui donner ma confiance. Je m'ouvre très rarement. Avec Liam c'est facile. Assez naturel même. Sa bonne humeur, sa joie de vivre, son entrain sont communicatifs.
Je l'interroge du regard, attendant la suite. Qu'est-ce qu'il prévoit de faire à présent que nous avons fini le voyage ? On repart et on recommence ? Je ne dirai pas non.
-Maintenant, on dort.
-T'es sérieux ?
-Il fait encore jour, Hope. Il vaudrait mieux attendre la nuit pour pénétrer dans la zone pour éviter d'être vus. On laissera la voiture ici et on ira à pieds pour être le plus discret possible. Ça te va ?
-Tu veux vraiment tenter le coup ?
-Bah oui. Pas toi ?
Je ne dis rien.
-C'est pour ça qu'on est ici, non ?
Je hoche la tête. Nous y sommes. J'ai envie de vomir. Il veut réellement essayer. Je ne le pensais pas si fou. Ou suicidaire. Cela dépend du point de vue.
Les heures défilent et il m'est impossible de dormir. J'ai une boule au ventre. Je ferme pour la quinzième fois les yeux, dans l'espoir de tomber dans les bras de Morphée, mais c'est inutile. Je ne dormirai pas. Lasse de cette situation, un soupir de frustration franchit mes lèvres.
-Qu'est ce qui ne va pas ?
Je me tourne vers Liam. Il me fixe d'un air inquiet.
-Je n'arrive pas à dormir.
-Moi non plus, soupire t-il.
-Qu'est ce qu'on fait alors ? Je n'en peux plus d'attendre. Puis je trouve qu'il fait assez noir.
-Oui, tu as raison. Allons-y.
On sort de la voiture et on marche en direction de cette fameuse zone.
-Bon, on va faire des règles.
Je le regarde perplexe.
-Règle numéro 1 : Parler que si nécessaire. Règle numéro 2 : Chuchoter. Règle numéro 3 : Rester groupés.
Je lâche un petite rire.
-J'ai dit quelque chose de drôle ?
-Et bien on est seulement deux donc je ne pense pas que ça va être très compliqué de rester ''groupés'' comme tu dis.
-Détrompe toi. Dans la panique, on peut facilement se séparer.
Je hoche la tête.
-Pas faux. T'as pas intérêt à me laisser, ou sinon c'est l'infarctus direct
Il rit.
-Je ne pensais pas que c'était si facile de te tuer. Je garde ça en tête pour une prochaine fois. On ne sait jamais, si un jour j'en ai marre de toi.
Je lui donne un coup de coude qui augmente son hilarité.
-D'autres règles ?
-Une dernière. Règle numéro 4 : Courir si on se fait repérer.
-Ça me semble bien. Mais si on court, ils risquent de nous tirer dessus, non ?
-Qu'on court ou pas, s'ils nous voient, ils tireront, sourit-il.
Sur ces mots, il accélère le pas. J'espère qu'il dit ça pour rire. Je pensais que mon stress avait atteint son seuil maximal, et bien j'avais tort. Il vient encore de monter d'un cran. Je ne sais pas si c'est pareil pour Liam mais je tiens à la vie. C'est souvent quand le moment fatidique approche qu'on se dit qu'on fait peut-être une erreur. Il est encore temps de faire demi-tour. Des fois, il vaut mieux reculer qu'avancer. Se prendre un mur n'a jamais été agréable.
Mes yeux se posent sur Liam qui marche devant moi. Lui, il serait plus du genre à l'escalader. Faire marche arrière n'est pas vraiment dans son caractère. Je le vois plutôt foncer tête baissé tel un taureau. On va se faire tuer. On va se faire tuer.
Des idées noires m'envahissent. Elles m'entraînent vers une inquiétude profonde. Je me sens emporter par elles jusqu'à finir noyée. Dans cet océan de panique et de doute. Je décide donc de compter le nombre de mes pas pour penser à autre chose : un, deux, trois,quatre... mille-huit-cents... Six-mille-trois-cent-quarante-deux... Tellement obnubilée par mes foulées, je ne vois pas Liam s'arrêter, et je lui rentre dedans.
-Hey ! Préviens quand tu t'arrêtes !
Il se retourne et m'intime de me taire en posant son index sur ses lèvres. Oups, je crois que j'ai enfreint les deux premières règles. Je suis vraiment un boulet. Je lui mime le mot ''désolée'' avec ma bouche. D'un geste de la main, il m'indique de le suivre. On arrive devant un grillage. Et maintenant ? On ne va quand même pas escalader ? Il pose un genou à terre et joint ses deux mains. Il veut me faire la courte échelle. Je secoue la tête. Il est hors de question que j'escalade ce foutu grillage. En plus, si ça se trouve il est électrifié.
-Dépêche-toi ! chuchote t-il
-T'es malade ! Si ça se trouve il y a de l'électricité qui passe !
-Mais non ! Fais-moi confiance.
-Comment peux-tu en être sûr ?
-Je me suis renseigné. Allez Hope !
-Si je passe ce grillage, je me retrouverai séparé de toi. C'est contre une de tes fichues règles !
-Non, parce que je te suivrai. Et puis si elles sont si nulles que ça mes règles pourquoi tu les suis ?
Toute notre conversation s'est faite en chuchotant. Son regard est implorant. Je l'ai déjà blessé une fois et je n'ai pas l'intention de réitérer l'expérience. Je soupire et c'est vaincue que je pose mon pied sur ses mains jointes. Il me hisse en haut du grillage avec facilité. Je retombe de l'autre côté sur les fesses. La souplesse ne fait pas partie de mes aptitudes.
-Tu as poussé trop fort !
À peine les mots sortent de ma bouche, qu'une lumière vive m'éclaire. Quelqu'un parle dans ce qui semble être un mégaphone.
-Ne bougez plus ! Vous êtes dans une zone strictement interdite au public !
Je sens mon cœur accéléré. Il résonne jusque dans mes tempes. Qu'est-ce que je fais ? À partir de ce moment là, tout semble se dérouler au ralenti. Mes jambes qui me soulèvent du sol. Liam qui m'intime de courir. Mes pieds qui se mettent à se mouvoir à toute vitesse. J'entends des voix. On m'intime l'ordre de m'arrêter. Si je m'arrête, je meurs. C'est ce que m'a dit Liam.
Je continue de courir sans savoir où je vais. Je suis poursuivie. Mes jambes me portent. L'adrénaline parcourt tout mon être, me permettant d'aller à un rythme presque inhumain. Ma gorge me brûle à cause de l'effort. J'ai peur. Je cours. Toujours plus loin. Je tourne la tête en quête d'un échappatoire mais je ne sais pas où aller, donc je continue tout droit. Les voix se rapprochent. J'essaye d'avancer plus vite. S'il faisait jour, j'aurais pu au moins me repérer dans l'espace. Mais là je cours à l'aveuglette. Il faut que je trouve une sortie ou une cachette.
Je décide de tourner à droite où je distingue un bâtiment. Mon instinct me crie de me cacher. Ma raison, elle, me hurle de sortir de cette zone. L'instinct est plus fort. C'est lui qu'on suit quand on est en danger. Notre corps l'écoute sans qu'on ne demande rien. Tout se fait automatiquement. On se laisse guider. Emporter.
Soudain, une douleur vive au niveau du dos me fait tomber. Je suis touchée. J'ai mal. J'essaye de me relever mais sans succès. Je sens des bras m'agripper. Avec le peu de force qu'il me reste, je me débats. Je sens mes mains et mes jambes toucher un corps. Un grognement se fait entendre. Un coup sur ma tempe me fait voir les étoiles. Ma tête heurte le sol. C'est fini, Hope. Le jeu est terminé. Sauf que ce n'était pas un jeu. Tout était réel. Pris par l'excitation, j'en avais oublié le danger.
La tête me tourne. Je vais mourir. Des gouttes d'eau salées inondent mes joues. Je t'aime, Maman. Je t'aime, Papa. Désolée de t'avoir menti Emy. J'espère que tu t'en sortiras, Liam. Mes forces me quittent. Il y a du mouvement tout autour de moi. Des personnes se parlent. Je ne saisi pas ce qu'ils disent. Tout me parvient de loin. Comme si j'avais quitté mon corps. Comme si je ne touchais plus la terre. Est-ce ça la mort ? Cette impression de flotter ?Je sens qu'on me soulève. Des bras me portent. Puis je sombre.
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