Chapitre 8 - Noah
J'ai sous les yeux Capucine, la femme avec qui je discute depuis plusieurs semaines, celle à qui je me suis attaché par-delà nos écrits et que je voulais rencontrer.
Capucine Long. Mon employée.
Elle s'en est rendu compte avant moi. Il a fallu qu'elle se recule et m'appelle Monsieur. Dès que je l'ai aperçu, j'ai été subjugué par sa beauté, et plus elle avançait, plus j'avais l'impression de l'avoir déjà aperçu quelque part. Et pour cause ! Dans ma propre entreprise !
Capucine, la chroniqueuse littéraire de mon journal. Son nom aurait dû me mettre sur la voie, mais en parlant avec elle, je ne songe pas au boulot. Je n'ai dès lors pas fait le lien. Jusqu'à l'instant.
Cette femme qui attire mon regard dès que je l'aperçois de loin, celle qui reste recluse dans son coin, qui hoche à peine la tête lorsqu'on se croise — et autant dire que ce n'est pas souvent ! —, celle dont j'entends, parfois mon personnel se moquer.
Si je m'étais attendu à ça !
Je devrais annuler ce rendez-vous, lui dire de rentrer chez elle. Oui, je devrais. Mais je n'en fais rien. A la place, je l'invite à s'asseoir d'un mouvement de main et appel le serveur.
—Que bois-tu ?
—Un... chocolat chaud, s'il vous plaît.
Je souris tout en passant commande tandis qu'elle se défait de son attirail. Mon regard dévie sur son corps, dont je ne suis pas insensible. Capucine est une très belle femme, et j'ai pu constater, par nos écrits, qu'elle ne se voyait pas ainsi.
Le serveur repart.
—C'est une surprise, dis-je.
—Oui... Je ne devrais pas être ici, avec vous..., dit-elle sans me regarder.
Je perçois son malaise et je veux la rassurer. On ne fait rien de mal, après tout. Je pose ma main sur la sienne, gelée. Elle sursaute et relève les yeux vers moi.
—Rien ne change, lui affirmé-je.
—Mais, vous êtes mon patron !
—Non, Capucine, tutoie-moi, comme quand on s'écrit. Ce soir, tu es seulement Capucine, et moi Noah. Deux personnes qui discutent autour d'un verre, comme convenu.
—Je...
Elle passe sa langue sur ses lèvres, inspire et puis me dit :
—D'accord.
Son sourire est crispé. Je peux la comprendre. Je prends sa main entre les miennes. Ses joues se colorent un peu plus.
—Tu as froid !
—Je suis très frileuse !
Elle rit. Je frictionne sa main et lui prend l'autre pour faire de même.
—Vous... tu... n'es pas obligé.
Cependant, elle ne retire pas ses mains des miennes et je les presse pour lui insuffler ma chaleur.
Nos boissons arrivent, on rompt le contact physique et on parle de tout, sauf de boulot.
Nous passons un agréable moment, trop court à mon goût. Capucine se détend au fur et à mesure. Elle reste cependant timide et hésite parfois à poser les yeux sur moi.
Par ce comportement, je constate qu'elle n'est pas seulement réservée et solitaire. Et ça ne la rend que plus adorable à mes yeux.
En fin de soirée, je la raccompagne chez elle. Je ne veux pas la laisser repartir en métro et je dois bien avouer que je désire éterniser ce moment délicieux entre nous le plus possible.
Je me gare le long du trottoir et me tourne vers elle.
—J'ai beaucoup apprécié cette soirée, lui dis-je.
—Moi aussi.
—J'aimerais qu'on se revoie.
—Mais... c'est impossible !
—Parce que je suis ton patron ?
—Oui...
—Ce que l'on fait ne regarde que nous. Au bureau, rien ne change, mais on peut se voir en dehors en toute amitié. Mais cela doit rester entre toi et moi. C'est mieux. Pas que je veuille te cacher, mais tu sais mieux que moi que des rumeurs sans fondement circulent vite. Qu'en penses-tu ?
—Je... je peux y réfléchir ?
—Bien sûr. J'espère cependant que tu n'arrêteras pas de m'écrire. J'aime beaucoup nos échanges.
—Moi aussi...
Je lui souris, elle rougit. Je me penche vers elle et lui embrasse la joue. Cette fois, elle ne se recule pas.
—Passe une bonne nuit.
—Merci. Toi aussi. A bientôt.
Elle sort de ma voiture. Je la regarde jusqu'à ce qu'elle entre dans son immeuble puis souffle longuement.
Je me fiche que ce soit mon employée. Je veux la revoir ! En dehors du bureau, évidemment. Mon amitié avec elle prend de l'ampleur et je n'ai pas envie d'y mettre fin.
J'espère que découvrir que je suis son patron ne changera rien entre elle et moi. Pour ma part, rien n'est différent.
***
Plusieurs jours se sont écoulés depuis mon rendez-vous avec Capucine. Au bureau, comme je l'avais prédit, rien n'est différent. Il est rare qu'on se croise et ça ne change pas. Cependant, Barry fait plus de ronde dans les étages. C'est quelque chose qu'il fait déjà régulièrement, d'un parce que discuter avec nos employés est très important, mais aussi pour suivre l'évolution de leur travail. J'ai annoncé à mon meilleur ami que certaines rumeurs étaient venues à mes oreilles, surtout à l'étage de Patrick. Comme quoi il ne se comportait pas toujours bien avec le personnel. Il m'a promis d'ouvrir l'œil et les oreilles.
Capucine ne m'a rien avoué, mais je n'ai pas oublié ce fameux soir où elle m'a dit que c'était parfois dur et encore moins cette fameuse question si parfois j'interprétais mal un regard. Je suis certain que ça avait un sens caché et je ne veux pas de ce genre de chose dans mon entreprise. Si un employé est maltraité verbalement par qui que ce soit, ça se passera très mal ! Je ne peux accepter un tel comportement !
Je continue d'échanger avec Capucine, mais elle ne fait plus d'allusion à son boulot. Sûrement parce qu'elle sait à présent que je suis son patron. Elle s'ouvrira à nouveau là-dessus, je ferais tout ce qu'il faut pour qu'elle comprenne qu'elle peut me faire confiance et que ça ne portera jamais préjudice sur son travail.
Je tiens à notre amitié.
Elle apporte dans ma vie une nouvelle bouffée d'air dont j'ai besoin depuis ma rupture avec Carol. Elle m'aide à remonter la pente, jour après jour. Je souffre moins. Le boulot ne pallie plus autant, mes échanges avec Capucine, mon nouveau lien avec elle, rempli un vide que je n'arrive plus à combler.
Il est passé vingt et une heure, et enfin, je vais pouvoir rentrer chez moi. Les journées sont longues, les réunions parfois lourdes, mais il faut de tout pour faire tourner une entreprise.
Barry entre dans mon bureau et se laisse choir sur le fauteuil en face de mon pupitre.
—Tout le monde est parti, il ne reste plus que nous !
—Elle était longue, cette réunion, soupiré-je.
—A qui le dis-tu !
J'attrape mon iPhone et constate que Capucine m'a envoyé un mail. Je souris, mais le range. Je lirais son mail quand je serais rentré.
—Tu vas me dire avec qui tu corresponds ? Serait-ce toujours avec cette fameuse personne que tu as rencontrée sur le site ?
—Possible, souris-je mystérieusement.
—Tu ne vas rien me dire de plus ?
—Pas pour l'instant.
—Dur en affaires, dis-donc !
—Tu me connais bien ! Et sinon, ton tour des étages, ça donne quoi ?
—Niveau boulot, ça ne change pas, ils sont tous au taquet. Par contre, Patrick, du 6ème étage est un peu dur avec les employés qui sont sous sa responsabilité.
—Tu entends quoi par là ?
—Il aboie tout le temps, les regardes parfois de travers. Surtout cette jolie brune qui baisse sans cesse la tête. Elle est gentille, trop gentille. J'ai déjà pu discuter avec elle. Capucine Long, critique littéraire d'une de nos rubriques. Elle fait un boulot top, mais Patrick ne semble jamais satisfait. Il la pousse dans ses retranchements. C'est bien, c'est ce qu'il faut, mais il en fait un peu trop. Je l'ai gentiment remis à sa place pour qu'il se calme un peu. Je vais le surveiller de près.
—Attention qu'il ne s'attaque pas à elle une fois que tu as le dos tourné !
—T'inquiète, je vais l'observer subtilement. Pas question qu'il l'attaque davantage ! Pas de ça dans notre entreprise !
—Je suis tout à fait d'accord. Et il n'y a qu'avec elle, qu'il est ainsi ?
—Non, mais elle n'a pas de mordant, alors il est facile de s'en prendre à elle. Roxanne, du service marketing, fusille souvent Patrick et n'a pas sa langue dans sa poche. Elle a un tempérament de feu !
Roxie. Ça doit être la meilleure amie de Capucine dont elle m'a parlé. Je ne pensais pas que c'était aussi, l'une de mes employées.
—Tu peux me dire de où tu as entendu les rumeurs, au fait ?
—Dans les couloirs, dis-je évasivement.
—Hum... Bon, je rentre ! Je suis claqué ! Tu devrais faire de même.
—C'est ce que je comptais faire.
Il se lève et s'en va dans un dernier signe de main. J'éteins tout et je fais pareil.
Quand je rentre chez moi, la même sensation que d'habitude me submerge. Décidément, je ne supporte plus d'être dans cette maison ! Mais cette sensation douloureuse s'atténue de plus en plus depuis que je discute avec Capucine.
Je me prends une bière et m'assois sur mon divan. Téléphone en main, je lis le mail de Capucine et lui en envoi un.
De : Noah Vincent
A : Capucine Long
Sujet : Fin de journée
Bonsoir, Capucine,
Merci de me soutenir dans mes longues journées, ça me touche beaucoup. Pas trop fatiguée de ton côté ?
Je bois une longue gorgée, attendant sa réponse. Car elle va m'envoyer un autre courriel, c'est un peu notre rituel du soir. On s'en envoi dans la journée, mais très peu. Le travail avant tout !
De : Capucine Long
A : Noah Vincent
Sujet : Re : Fin de journée
Bonsoir, Noah,
Tu viens de rentrer ?
Je suis crevée ! Mais j'ai une rédaction à finir. Il ne faudrait pas que je me fasse tirer les oreilles par mon boss^^
Je souris. Elle est vraiment adorable !
De : Noah Vincent
A : Capucine Long
Sujet : Re Re : Fin de journée
Oui, et je suis épuisé !
Ne travaille pas trop tard ! Tu dois aussi te reposer !
C'est de moi que tu parles, ou de Patrick ?
J'ai lancé la perche. J'aimerais vraiment qu'elle me parle de ses rapports avec lui !
De : Capucine Long
A : Noah Vincent
Sujet : Re Re Re Re : Fin de journée
Les deux.
De : Noah Vincent
A : Capucine Long
Sujet : Re Re Re Re Re : Fin de journée
Tu ne m'attireras pas mes foudres, tu fais du bon boulot ;) Barry te l'aurais fait remarquer, sinon.
De : Capucine Long
A : Noah Vincent
Sujet : Re Re Re Re Re Re : Fin de journée
Si je ne rends pas mon travail à temps, Patrick ne sera pas content, et toi encore moins.
Est-ce que par hasard, tu as envoyé Barry parler à mon chef de service ?
De : Noah Vincent
A : Capucine Long
Sujet : Re : Fin de journée
Barry fait des rondes régulièrement. Pourquoi, on t'a dit quelque chose ?
De : Capucine Long
A : Noah Vincent
Sujet : Re : Fin de journée
Patrick n'avait pas l'air très content, c'est tout.
De : Noah Vincent
A : Capucine Long
Sujet : Re : Fin de journée
S'il est désagréable avec toi, j'aimerais que tu me le dises. Je t'ai promis que rien ne changerais entre nous, mais il n'est pas question qu'un chef de service s'en prenne à mes employés.
De : Capucine Long
A : Noah Vincent
Sujet : Re : Fin de journée
Ne t'inquiète pas :)
De : Noah Vincent
A : Capucine Long
Sujet : Re : Fin de journée
J'ai envie de te revoir. Tu es libre ce week-end ? Un resto', ça te tente ? Samedi soir. Si tu es disponible et que tu as aussi envie de me voir, bien entendu.
De : Capucine Long
A : Noah Vincent
Sujet : Re : Fin de journée
D'accord :)
Je souris et vide ma bière. Tout d'un coup, je suis impatient d'y être !Vivement que la semaine se termine pour que je puisse la revoir !
****
Ce week-end, j'ai retrouvé avec plaisir Capucine et Noah, hier j'ai bien écrit 5 chapitres! L'histoire avance lentement, je le conçois, mais aller trop vite entre eux ne rimerait à rien.
Nos deux tourtereaux se retrouve en situation très délicate, vont-ils pouvoir y faire face? Passer la ligne rouge? Ou tout restera platonique car ils ne peuvent vivre aucune relation étant donné leur position? Vous aurez les réponses au fil de la lecture!
J'espère que vous avez passé un agréable moment avec eux et que tous se porte bien chez vous ♥
#restezchezvousprenezsoindevous
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