Chapitre 1 : Cours de maths ; cours de Swap
J'étais en train de finaliser mon dessin. D'un œil critique, j'examinai le rendu qu'il donnait, et sans surprise, je trouvais que j'avais magnifiquement bien représenté ce terrain de base-ball, vu du batteur qui venait de renvoyer une balle d'un très joli coup.
Il aurait sans doute pu jouer aussi bien que moi, si je n'étais pas aussi bon.
« Et quelle est la dérivée de la fonction exponentielle ? »
La question vint à mes oreilles, mais je n'y prêtai pas attention, estimant que ça n'en valait pas la peine.
« Alors, Brian, une idée ? »
J'aurais donné tout ce que je possédais pour que ces quelques mots ne fussent jamais prononcés, mais malheureusement on m'avait interdit de résoudre ce problème comme ça...
Je daignai donc lever les yeux de ma feuille et en profitai pour observer les sourires narquois de mes camarades qui ne semblaient attendre qu'une chose : que je me plante en beauté.
Résolu à les contenter, je plantai mon regard dans celui de ma prof' et lâchai :
« Absolument aucune, madame. »
Et je reportai immédiatement mon attention sur un détail de la batte un peu bâclé.
« Pour votre information », siffla ma prof', « il s'agit par définition de la fonction exponentielle elle-même. »
J'eus envie de laisser échapper un las « super », avant de me rappeler qu'il était inutile d'envenimer les choses. Je laissai donc mon enseignante entamer un édifiant discours sur le chaos que serait mon avenir si je ne me décidai pas à travailler sérieusement, sans réagir. Et me mis à attendre avec de plus en plus d'impatience la fin de ce cours qui arriva, après, m'avait-il semblé, quelques millions d'années.
Cette fois-ci, c'était notre conseillère d'éducation qui était venue l'achever un peu plus tôt que prévu. Alors qu'un élève avait été choisi pour être torturé au tableau pendant les dernières minutes du cours, quelques coups retentirent à la porte. Notre prof' la fit entrer, elle et une jeune fille qui la suivait de près, et nous regardait d'une manière un peu angoissée. Intéressé, je lâchai mon crayon et reportai mon attention sur les deux arrivantes.
« Merci de me laisser interrompre votre cours », déclara t-elle alors que la prof' semblait faire une moue qui signifiait qu'elle n'avait pas bien eu le choix, « je viens vous présenter une nouvelle élève qui sera votre camarade pour l'année à venir ».
Les réactions furent nombreuses et diverses dans la classe : certains chuchotaient « Encore ? C'est la troisième nouvelle depuis le début de l'année », tandis que d'autres échangeaient des regards entendus.
Je faisais bien sûr partie de la deuxième catégorie, la première étant celle des gens trop bêtes pour comprendre.
Je lançai un clin d'œil à Lucas, à l'autre bout de la salle de classe, qui me le rendit bien vite.
Notre « CPE » nous dit alors :
« Bien, rendez-vous vite à votre prochain cours, vous allez être en retard. Ceux qui sont en option musique, vous restez ici, vous avez cours avec moi, on démarre tout de suite. »
Alors qu'une vingtaine d'élèves se levaient pour partir parmi la trentaine d'adolescents présents, des protestations s'élevaient de la part des autres :
« Mais on n'a pas de pause ? », m'exclamai-je, me sentant incapable de suivre un autre cours tout de suite.
« Pas de pause. », confirma t-elle avec un léger sourire.
Je pris mes affaires et allai m'installer à côté de Lucas, qui marmonna quelque chose d'incompréhensible quand je m'assis près de lui. Me refusant à essayer de savoir ce qu'il avait dit, j'attendis que tout ceux qui devaient s'en aller étaient bien partis, avant de reporter mon attention sur la CPE, qui contemplait la classe.
La nouvelle s'était installée à l'écart des autres et observait furtivement autour d'elle, comme si elle attendait que quelque chose d'extraordinaire se produise.
Finalement, la CPE déclara seulement : « Bien, nous sommes donc maintenant en salle 328. »
Toute la classe sembla accueillir l'information avec indifférence, exceptée la nouvelle :
« Attendez...on n'est pas entrées dans la bonne salle, si ? »
Alors, tout le monde sauf la prof' se mit à rire. Au moins, pensais-je, elle avait le sens de l'humour. Et puis, elle n'était pas désagréable à regarder.
« Nous sommes bien dans la bonne », déclara la prof, débordante de compréhension.
« Mais...je me souviens être entrée dans la salle 327, je ne suis pas folle, si ? »
Quelques élèves, dont moi, cessèrent de rire.
Finalement je m'étais trompé : soit elle avait un humour lourd, soit...on avait un problème.
La prof' fit une légère grimace et annonça :
« Votre attention tout le monde, notre nouvelle venue n'a encore aucune connaissance sur le Swap. Je vous demande donc de l'indulgence. »
On avait un problème.
Plus personne ne riait, je poussai moi-même un profond soupir :
« Ça fait trois fois qu'on reprend les bases, on ne peut pas avancer ? »
L'air farouche de la prof' acheva de me calmer.
« De l'indulgence. », répéta t-elle. « Reprendre les bases ne fera pas de mal. Et puisque vous êtes si sûr de vous, vous serez bien aimable de participer cette fois-ci. »
Le silence total se fit immédiatement. La prof' de Swap avait un don naturel singulier pour imposer son autorité.
« Expliquez donc à notre nouvelle venue le principe du Swap, mon cher Brian. »
L'intéressée semblait s'être figée, et pensait apparemment qu'elle venait de tomber dans une classe de fous, ou bien que j'allais prononcer les mots « Poisson d'avril ! » pour la sauver elle-même de la folie. Malheureusement pour elle, nous étions en plein mois de Novembre, et je m'exécutai donc pendant qu'elle me regardait fixement :
« Le Swap est une altération de la réalité provoquée par la simple force de volonté du Swaper. »
« Inexact », corrigea ma prof, « le Swap est un remplacement d'une réalité par une autre. »
« C'est ce que j'ai dit ! », protestai-je.
« Non, vous avez dit « altération », il y a une nuance. Et la force de volonté ne suffit pas pour pratiquer le Swap. Vous voyez, reprendre les bases ne vous fait pas de mal.»
« Elle a pas tort... », me murmura Lucas à côté de moi.
« Je sais. », bougonnai-je, excédé.
La fille semblait glacée par notre échange. Tout le monde ne réagit pas de la même façon quand il apprend l'existence du Swap. Quand j'ai appris que je pouvais le manier, personnellement, je me suis tout de suite senti supérieur aux autres, et j'étais surtout rempli d'un sentiment de joie. Les mauvaises langues vous diraient que le sentiment de me sentir supérieur n'est pas surprenant de ma part, mais ne les écoutez pas, elles font fausse route.
« Voyez-vous ma chère, le Swap est un don très particulier qui confère un grand pouvoir. Et vous êtes porteuse de ce don. Ma chère... ? »
« Elise », lâcha t-elle dans un souffle, comme sonnée et étonnée de se rappeler encore son prénom.
« La scène du « You're a wizard, Harry », avait quand même plus de classe. », fis-je remarquer à voix haute d'une voix narquoise.
« La ferme », me décocha Elise, « j'essaye de digérer ça. »
« Je suis d'accord avec notre nouvelle venue », déclara la prof' avec un grand sourire. « Ne vous inquiétez pas, nous allons tout vous expliquer. »
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