- Dépêchez- vous! lança une voix.

Sitôt les trois personnes accélèrent leur pas, montèrent les marches deux à deux et finalement entrèrent dans la salle déjà remplie. Ils durent se restreindre à observer la scène debout. Au fond sur une estrade, le chef du clan de la forêt Wald, trempa avec douceur une feuille de cerisier puis vint la déposer sur le front d'une nouveau-née qui poussa un gloussement au contact froid.

- Aujourd'hui, clama l'homme, je suis fier d'accueillir dans notre tribu un membre de plus : Svetelny fille de Tynervech et Láska!

Des applaudissements tonnèrent et les deux parents prirent l'enfant dans leurs bras et lui sourirent. Nombreux vinrent dire un mot chaleureux au couple, la salle se remplit rapidement d'un léger brouhaha de discussions.
Peu à peu la pièce se vida, et Arweinyd, chef de cette tribu d'elfes sylvains, alla rejoindre le couple.

- Mon vieil ami, j'espère que ton enfant sera une aussi bonne chasseresse que son père, lui dit-il le sourire aux lèvres. Ou une soigneuse, ajouta-t-il à l'égard de la mère qui lui rendit le sourire.

- Merci beaucoup Arweinyd, elle sera digne de notre clan, dit Tynervech tout en observant l'enfant qui s'était endormie dans le creux des bras de la mère.

- Bien sûr. murmura le chef tout en caressant du bout de ses doigts le front de la nouveau-née d'où poussaient déjà quelques mèches de cheveux platines.

Les trois elfes s'inclinèrent avec respect, le chef fit un mouvement de la main, puis ils se séparèrent. Le père avait retenu sa respiration, ce geste discret qui pourrait paraître anodin, était un signe de convocation et il ne pouvait refuser. Le soir venu, il sortit sous le regard intrigué de sa femme, qu'il rassura immédiatement. La nuit le protégeait des regards des autres sylvains qui dormaient paisiblement. Il arriva enfin dans la demeure du chef perchée dans un vieux châtaignier. Un garde lui indiqua une salle à l'écart de celle des audiences, et sans bruit il y pénétra. Arweinyd se tenait dos tourné, accoudé sur le rebord d'une fenêtre. La question brûlait trop les lèvres du chasseur, il abrégea les politesses :

- Arweinyd, pourquoi m'as-tu convoqué?

Ce dernier soupira, et répondit, son regard toujours absorbé par le paysage.

- Mon cher, nous nous connaissons que trop bien, je ne veux que te mettre en garde.

- En garde? répéta-t-il dans un murmure confus. Contre qui?

Un petit rire s'échappa de gorge du chef, il se retourna enfin, ses longs cheveux dorés suivirent le mouvement, et ses yeux violets observèrent l'ami.

- Toi-même, finit-il par souffler.

Désorienté, il cligna moult fois des yeux, et avant qu'il ne put répondre quoi que ce soit, Arweinyd le devança:

- Merci, tu peux disposer.

Le dirigeant reprit sa position contre la fenêtre, tandis que Tynervech reculait pas à pas, cherchant un sens à ces propos.

~oOOo~

Au cœur de la forêt Wald, vivait une centaine d'elfes majoritairement sylvains. Ils constituaient un des plus nombreux groupe d'elfes. De ce fait le respect et la solidarité étaient essentiels, c'est pourquoi chacun était convié au baptême d'un nouveau-né.

Dix années s'écoulèrent depuis cette entrevue. La routine s'était rapidement imposée. Chaque matin Svetelny se levait de bonne heure et mettait son uniforme, puis courait dans la cuisine à la recherche de nourriture. Elle escaladait la chaise, et s'asseyait en tailleur. Des étincelles de joie pétillaient dans ses prunelles, à dix ans tout n'était que bonheur. Láska s'amusait à coiffer les cheveux platines de sa fille qui engloutissait les tartines recouvertes de confiture. Quand elle était enfin prête, elle déposait un léger bisou sur la joue de ses parents, puis elle courait en direction de l'école qui se situait à l'écart. Contrairement à toutes les habitations sylvaines qui sont bâties dans les branches des arbres, celle-ci est à terre, construite autour d'un vieux chêne. L'enfant s'engouffra dans sa salle de cours. Des élèves lui firent signe de la main, et elle alla s'asseoir à côté d'eux. Des petites têtes multicolores jacassaient ensemble, et quand la maîtresse entra, une trentaine de paires d'yeux la regardèrent et le silence se fit. La femme brune à peau mate se mouva avec grâce, afin d'être devant chaque enfant.

- Bonjour à tous, finit-elle par chantonner.

- Bonjour Madame Elvenwald, répondit un chœur.

- Aujourd'hui, nous allons continuer le cours sur la nature. Alors prenez vos carnets, des stylos, et allons dehors. expliqua la femme un sourire bienveillant aux lèvres.

Cette annonce fut accueillie par des éclats de joie, et en deux secondes la petite classe de trente fut dehors. Les enfants de 12 à 9 ans avaient cours ensemble, étant donné du petit nombre d'enfants. Durant les premières années, ils apprenaient la langue officielle parlée par toutes les races, puis l'elfique et finalement un dialecte. Cette semaine-là, ils se promenaient dans la mer d'arbres dans le but de connaître toute la végétation et l'environnement dans lequel ils vivaient.

A la fin des cours, c'est-à-dire en début d'après-midi, Lochach prit ses deux meilleures amies Dinnfreil et Svetelny à part.

- Suivez-moi, j'ai trouvé un super truc! dit-elle en attisant la curiosité de deux petites elfes.

Quand elle commença à prendre la direction opposée du camp, celle qui ne mène que vers la flore abondante, Dinnfreil répliqua aussitôt :

- Mais on n'a pas le droit d'aller dans la forêt sans un adulte!

- Ce n'est pas loin., promit la guide. Allez! Suivez-moi!

- Svetelny, dis quelque chose. supplia la malheureuse.

- Eh bien, je pense qu'on peut faire confiance à Lochach. répondit-elle la main sur la nuque, embarrassée d'être le juge.

Dinnfreil soupira en signe de défaite, et enfin les trois amies partirent. Après dix minutes de marche, Lochach s'arrêta glorieusement devant un arbre massif et le montra de sa main.

- Lochach, c'est un châtaignier. commenta Dinnfreil la plus douée en faune et flore. Et vu l'épaisseur de son tronc, et son hauteur, il doit avoir un cinquantaine d'années.

- Je m'en fiche de ce que c'est, se vexa à moitié l'enfant. On peut faire une cabane en haut de l'arbre, un endroit rien qu'à nous.

- C'est super comme idée, dit tout de suite Svetelny avec un immense sourire.

- On commence quand? ajouta Dinnfreil.

Après un rire de joie collectif, le trio retourna dans leur demeure respective en quête de matériel. Bien sûr, sans en dire un mot à quelqu'un.

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Premier chapitre fini, merci d'avoir lu jusqu'au bout !
Le deux est en route !