Chapitre 9

- Tu veux qu'on en parle ? me demande Breeven pendant qu'on traverse les couloirs, à l'affût du moindre bruit suspect.

Depuis que nous nous sommes éloignés du corps d'Ashley avec notre butin laissé encore bien rempli par cette dernière, je ne dis plus un mot, trop obstinée à me chercher une excuse pour atténuer la gravité de mon acte.

Ne rien ressentir. Ne pas pleurer. Rester calme. Avancer.

J'ai l'impression d'avoir un cactus dans le crâne. Les douloureux souvenirs d'elle et moi font leur come-back. Je les refoule comme je le peux mais ils reviennent à la charge sans arrêt.

- Nan, je n'ai rien à dire. Elle a pointé son arme sur moi et j'ai riposté. Point final, dis-je en masquant mes émotions.

Il s'arrête et me fait face. Qu'est-ce qu'il peut être saoulant à vouloir absolument savoir ce que je pense! Encore heureuse de ne pas être tombée sur "Edward Cullen". Je ne vais pas m'amuser à commenter chacun de mes actes. C'est débile!

- Quoi ? je lui demande, énervée.

- Tu es sûre que tu vas bien? Parce que tu viens quand même de butter ton ancienne meilleure amie là.

Je roule des yeux en soupirant.

- Oui.

Non ? Non.

- C'est ton dernier mot ?

- Oui. On peut avancer maintenant ? je rétorque d'une voix agacée.

Il hoche la tête toujours un peu soucieux de mon état mental. Mais son visage devient souriant. Je suis tombée sur un bipolaire ?

- Contrairement à ce que tu m'a fait penser depuis le début d'année, tu es vraiment une lionne, me complimente-t-il en me balançant un sourire joueur qui aurai pu faire fondre un max de fille mais pas moi.

Je plisse les yeux, suspicieuse. Et voilà que ça drague ! Il lui manque une case. Les cadavres sont encore tout frais et lui, il fait le Don Juan. Ce gars m'épuise...

- Je le pense vraiment, insiste-t-il.

- Tu veux qu'on parle animaux ?

Il fronce les sourcils. J'aurais dû être plus claire.

- Tu es un paon, je déclare d'un trait.

- Un paon ? Ya plus cool comme piaf, s'indigne Breeven.

- Ils se la pètent avec leurs atouts, j'argumente.

Merde, je dois la fermer.

Ne se sentant pas du tout offensé, bien au contraire, il me lance fièrement:

- Que je me souvienne, ils utilisent la couleur de leurs plumes pour faire fuir leur adversaire. Ils sont donc également intelligents.

En plus de ça, il s'auto-complimente. J'aurais tout vu.

Il reprend:

- C'est vrai tu as complètement changé en une journée ! Avant tu étais bizarre mais ça c'était avant. Maintenant tu es juste ronchon.

- Ne m'oblige pas à utiliser mon arme contre toi, je le menace en pointant mon canon vers ses parties intimes.

- OK cool, dit-il en levant les mains en l'air en signe d'apaisement. Nan, en fait je retire ce que j'ai dit (je baisse mon arme vers le sol). Tu es toujours autant bizarre.

Je me retiens de lui faire la même chose qu'à Richard, le contourne et avance à grandes enjambées.

- Vérifie les classes, je vais voir si c'est OK pour les escaliers, j'ordonne par-dessus mon épaule à Breeven en visant devant moi, prête à faire feu au moindre mouvement.

- C'est comme si c'était fait, affirme-t-il.

Je rase les murs avec la souplesse et le silence d'un chat. Enfin le silence... Je ne vais pas nier que le premier bâtiment ressemble à une discothèque par rapport au nôtre. Là-bas, ça tire de partout. Je peux déjà en juger leur compétences rien qu'à les entendre.

Il va falloir faire des économies de balle car je suppose que nous n'aurons pas une deuxième ration d'armes toutes prêtes. L'expérience ne va donc pas tenir des lustres. Mais si nous n'avons tous plus d'arme, nous serons obligés d'en venir aux mains! Je ricane intérieurement. Je vais donc me faire terrasser par les autres.

Je me dirige vers une intersection et tourne ma tête à droite pour m'assurer que la voix est libre.

Soudain, un pied sort de nulle part - de la gauche logiquement - et percute violemment le canon du AK-47. Sous la brutalité et la douleur, mes mains lâchent la crosse qui tombe en raisonnant dans le couloir, loin de moi.

- Fait chier ! je jure.

Encore surprise, je vois un garçon me mettre un uppercut dans le ventre. Je crie de douleur mais je réussis tout de même à lui décocher un coup de poing dans la mâchoire.

Aie ma main !

Je profite qu'il soit assommé pour prendre la fuite vers mon arme à quelques mètres de ma position. Mais une jambe apparaît au mauvais moment et me fait un croche patte. Je m'écroule par terre, la tête la première qui, comme une bonne nouvelle n'arrive jamais seule, se cogne au sol. La poisse quand tu nous tiens...

Il profite que je sois au pays des merveilles et des pommes pour monter sur moi et placer ses mains autour de mon cou.

Je commence à voir trouble et mes gestes pour le repousser son veines.

Je ne veux pas crever asphyxiée!

L'air ne rentre plus dans mes poumons. Ça ne m'étonnerait pas de ressembler à un schtroumf. Je me sens partir... Moi qui voulais mourir devant une caméra en faisant des adieux déchirant à ma famille, c'est raté.

J'entends une voix lointaine. Ça y est, alors c'est vrai? Mes grand parents m'attendent bien de l'autre côté ? C'est bizarre... c'est moi la meurtrière. Je devrais être en enfer !

- Hé toi là ! interpelle un garçon.

Breeven ? Qu'est-ce qu'il fout aux paradis ? Arrêter de me gruger ! Je ne suis pas venu ici pour...

Tout d'un coup, je sens distinctement le poids du garçon sur moi partir sur le côté et s'effondrer lourdement au sol, en libérant mon cou de son emprise.

Aoutch, ça doit faire mal.

Je tousse tandis que l'air remplit mes poumons. Ma vue se netifie. Dans le floue, j'aperçois Breeven sur le garçon riposter aux coups de poings fous de son adversaire. Puis, sans m'avertir, il prend sa tête entre ses bras et le tourne vivement. Le craquement des os me parviennent douloureusement aux oreilles. Son corps tombe tel de la gélatine à terre.

Je tourne ma tête de cette scène pour stopper mon envie de vomir. Ma figure passe sûrement du bleu " Avatar " au vert " géant vert ". Je respire à fond pour ne pas tomber dans les pommes.

Des bras. Ses bras viennent m'encercler et me soulever doucement.

- Ça va ? me demande-t-il.

- Ça pourrait aller mieux.

Mes mains tremblent mais je les caches. Je préfère qu'il croit que je suis opérationnelle.

- C'est bon je lui ai réglé son compte, m'annonce-t-il en soulevant mes cheveux pour les déplacer sur un côté de mon épaule.

Intriguée par cet acte inhabituel, je réussis tout de même à répondre.

- Oui j'avais entendu, je grimace au souvenir du bruit de la colonne vertébrale brisée.

Il passe ses doigts chauds sur mon cou en l'inspectant minutieusement.

Je frissonne et grimace de douleur.

- Tu as encore les traces rouges de ses doigts mais elles devront partir rapidement, m'assure-t-il sérieusement.

- De toute façon, ce n'est pas comme si j'allais faire un défilé de mode, je tente de vanner.

Il lève les yeux au ciel.

- C'est pas drôle Megan. Tu as failli mourir de peu et toi, tu fais des blagues.

- Je sais, je bougonne dans une moue infantile.

Bon c'est vrai, j'ai faillis y rester. Mais je ne vais quand même pas me mettre à pleurer à chaque fois qu'il m'arrive un truc !

Je me libère de ses mains, me baisse et récupère mon arme. Breeven fait de même avec la sienne.

Je le vois regarder un peu trop longtemps mon agresseur.

- Oh toi ! Tu me caches quelque chose, je déduis.

- Non...

Pas très convaincu par sa réponse, je lève un sourcil.

- Breeven...

- Si nous réussissons à nous en sortir de tout ça, une de mes potes ne va pas me louper pour me tuer, dit-t-il en crispant sa mâchoire.

- Parce qu'elle a compris que son ami est un macho tueur de gamins ? je blague pour éloigner le moment où je vais entendre sa réponse.

- Pire, murmure-t-il. Je viens d'assassiner son petit copain.

Déstabilisée, je balbutie.

- Oh ! Heu... Je... Je suis désolé.

- T'en fais pas, me rassure-t-il tristement. Elle comprendra.

Il se retourne pour observer par la fenêtre.

Non, elle ne comprendra pas. Personne ne peut comprendre. Par ma faute, il vient de tuer une personne chère à son amie. C'est lui qui en paye le prix. J'aurais dû regarder à gauche avant et tuer le garçon en première, pour qu'il n'ai pas l'impression d'être un traître. Malheureusement, il va vivre avec ça sur sa conscience.

- J'espère, je marmonne dans ma barbe.

- Il y a une caméra de surveillance dehors, commence-t-il. Je suis certain qu'elle a tout filmé. Anna est sûrement déjà au courant pour Quentin.

Vient ensuite la minute de silence troublée par les tirs. Après tout, Quentin est la première victime de Breeven. J'essaierai de faire mon possible pour qu'il n'en tue pas plus. Il ne mérite pas d'être hanté par ses victimes.

Je décide d'écourter ce moment, trop occupée à élaborer un plan.

- On est à l'abri de rien ici, je déclare. Nous n'avons pas assez de balles pour tuer le reste du lycée. Et puis, il nous faut être au maximum de notre force.

- Qu'est-ce que tu proposes ? me demande-t-il tandis qu'on descend les dernières marches des escaliers nous menant au rez-de-chaussée, non sans oublier de s'assurer que la voix est libre.

- On doit quitter le lycée maintenant.

Il lance un regard vers la cour, sa main se pose sur mon épaule et je le regarde, interrogatrice. Breeven pointe du doigt les portes vitrées.

J'allais lui répliquer " C'est bien tu connais l'existence des portes ! " quand mes yeux discernent deux personnes qui traversent la cour et s'engouffrent dans le premier bâtiment.

- Y en a qui ont vraiment envie de mourir, commente Breeven de son ton grave.

- Au moins ils nous ont libéré l'accès à cet étage, je relativise.

C'est moche à dire mais ils ont choisi leur destin et écourté leur espérance de vie. A nous d'agrandir la nôtre.

Il se tourne vers moi.

- Revenons-en à notre " petite évasion ", déclare-t-il.

Je regarde autour de moi pour avoir une idée.

- On passe par où ? je demande.

- Par la cours, c'est plus rapide pour atteindre le grillage qui entoure le lycée, propose-t-il fièrement.

Il est évident que nous n'allons pas ressortir par la grille d'entrée. Il faut être suicidaire pour traverser la cour. Autant faire de grands signes avec nos mains et crier " Houhou c'est nous ! Bande de couille molle on arrive ! "

- On ne va pas être discret si on sort par la cour. A peine on mettra un pied dehors qu'il se fera exploser par un taré ! je rétorque.

- T'as une meilleure idée, S'énerve-t-il.

- On s'enfuit par la fenêtre d'une classe et on longe le mur, je propose. Personne ne nous verra.

- C'est trop long, remarque-t-il. Quelqu'un réussira à nous trouver et nous aura dans son viseur.

Je soupire. Il va me contredire pendant longtemps ?

- OK très bien. Mais ne te pleins pas s'il te manquera une partie de ton corps, je m'agace.

Sur ce, Breeven s'élance dans la cour. Moi sur ses talons.

Et merde, on enchaîne les mauvaises idées !

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