Chapitre 4

MEGAN HUNTER.

Je relis de nombreuses fois mon nom, me persuadant à chaque fois que j'ai mal lu. Mais non. C'est bien moi.

La nouvelle met un peu de temps à monter au cerveau. Pour moi, je ne suis pas cette fille. Je ne veux pas réaliser que mon identité est affichée en gros devant mes yeux. Je passe tout de même outre la photo qui ne me met pas en valeur, mais ça, on s'en fiche.

- Ce n'est pas moi. Ce n'est pas moi. Ce n'est pas moi, je me répète tout bas comme une folle à lier en agrippant la racine de mes cheveux.

Tout va trop vite. Je n'arrive pas à suivre le rythme que prennent les événements. Je n'entends personne comme si une bulle me coupe de l'extérieur. Les battements du sang dans mes oreilles sont les seuls bruits qui me parviennent aux tympans. Je remarque que mon coeur bat au ralentit. Quand arrêtera-t-il de battre tout court ?

Il y a une heure, je me disais que j'avais encore le temps de penser à mon avenir. Que je devais prendre mon temps et avoir la meilleure décision. Mais maintenant, je me dis que je n'ai aucunement besoin d'y réfléchir puisque je le sais déjà. Ma tombe est certainement déjà creusée à l'heure qu'il est. Prête à l'emploi, en m'accueillant de ses grands bras fantomatiques.

Cela vaut mieux, que je ne me mette pas à paniquer en une fraction de seconde. Ça m'aurait provoqué une crise cardiaque. Peut-être, aurait-il fallu que je meure tout de suite pour ne pas retarder mon éternel séjour sous terre. Mes souffrances auraient été abrégées.

Sans me prévenir, mes esprits reviennent à la réalité.

Ma première réaction est de me retenir par le mur derrière moi. J'ai mal au coeur. Ma tête tourne. Ma vue se brouille. J'ai chaud. Mon ventre se pince en une douleur telle que j'ai l'impression qu'on m'embroche lentement avec un couteau.

Je vois Elodie et Marine se rapprocher, leur visage peiné. Il ne le faut pas. Elles doivent se réjouir d'être vivantes.

Ma seconde réaction est de fuir ce lieu, cet endroit qui avait été ma seconde maison pendant deux ans. Je veux partir, rentrer chez moi, siroter un milkshake vanille en suivant les derniers épisodes de The Vampires Diaries. Continuer ma vie comme si ce mauvais passage n'a jamais existé. Et que tout le monde me laisse tranquille !

C'est au pas de course que je déboule dans le hall du premier bâtiment. Je me dirige vers la sortie quand je remarque que les grilles sont fermées. Je crie de rage. Faites-moi sortir de ce cauchemar. RÉVEILLEZ-MOI BORDEL !!

Mes parents ne sont au courant de rien. Il faut que je leur demande de venir me chercher.

Où est-ce que je peux trouver un téléphone ?

Sans plus attendre, mon regard se porte sur l'accueil. Je m'en approche en courant et passe ma tête par l'ouverture du mur. L'objet de mes désirs n'y est pas. Son emplacement est vide.

Je sens deux présences derrière mon dos. Elodie et Marine. Je me retourne et les observe pendant un petit moment, personne ne m'avait préparé à faire des adieux. Que dois-je dire ?
À dans un mois ?
Bonnes vacances ?
A mon enterrement ?

Et à ma famille ! Ils ne savent même pas ce qu'il se passe ici. Ils sont persuadés de me voir rentrer à la maison, accompagné d'Emmy cherchée à la sortie de son école.

J'imagine déjà la scène où un collègue à mon père vient les voir pour leur annoncer la nouvelle de ma mort. Mes parents ne méritent pas une seconde fois de souffrir, les derniers événements sont encore trop frais dans nos esprits. Trois ans auparavant, ma mère a dû se battre férocement contre un cancer. Ça été terrible de la voir affaiblie. Il ne se passait pas un jour sans que nous nous demandions si elle sera vivante le lendemain matin à notre réveil.

Du haut de ses trois ans, Emmy, ma petite soeur, me demandait : Pourquoi maman ne vient pas jouer avec nous ? Que voulez-vous que je lui dise? Parce que maman est en train de crever dans son lit d'hôpital ? Tous les jours je lui répondait que maman était très fatiguée et qu'il ne fallait pas la réveiller. Que lui dira-t-on à mon sujet ?

Tout ça est irréaliste. Pourtant, je ne me suis pas droguée ce matin. La poudre de mes balles de tir ne fait même pas halluciner !

Mes yeux se posent un peu partout. Mais je sais que c'est déjà fini pour moi. Je suis prise au piège.

Marine vient en me prenant dans ses bras tout comme mon père ce matin. Elle pleure. Elodie aussi. Je me détache de Marine et vient dans les bras d'Elo.

- Vous allez me manquer, je leur confie. Prenez soin de vous les filles. Vous venez de passer à côté d'un cruel destin alors... essayez de profiter de la vie tant qu'elle vous est encore accessible.

- C'est tellement injuste ce qui t'arrive Megan ! pleure Marine. Pourquoi toi ?

Je n'arrive pas à verser une larme. Mon corps ne réagit plus normalement. Et puis, s'il faut que je survive à ce qui m'attend, je dois être forte. En fait, je ne sais même plus ce que je veux. Mon instinct de survie m'ordonne de vivre. Mon corps me supplie de mourir pour abréger mes souffrances. Que faire ? Je sais déjà ce qui m'attend. Un rat de laboratoire, voilà ma nouvelle vie.

Nous n'avons pas le temps de prendre de décision. Ni de réfléchir. J'ai surtout l'impression de ne pas m'être réveillée ce matin. Qui me dit que je ne suis pas encore dans mon lit à cauchemarder? Ou, justement, dormir en plein cours de math ? Qui peut me dire que j'invente tout et que mon imagination me joue des tours ? Personne peut-être, puisqu'ils ont tous l'air d'être véritablement effrayés.

Pourquoi ne pas me tuer tout de suite si c'est le but même de cette expérience ? Mais ils risqueraient de prendre une autre personne de ma classe pour me remplacer. En plus, c'est égoïste de ma part de mourir pour laisser ma place et mon destin tout tracé à quelqu'un d'autre.

- Promettez moi que vous partirez loin en emmenant vos familles et la mienne avec vous.

- Bien sûr Meg, affirme Elodie.

- On fera notre devoirs comme les autres exigent que tu fasses le tient, dit Marine en essuyant une larme.

- On fera en sorte que tu sois fière de nous, dis Elo.

- Nan les filles, vous êtes super. Ne changez pas. Je suis déjà fière de vous.

Elles me sourient en voulant me cacher leur profonde tristesse. La vie veut me les arracher violemment. Comment avoir de l'espoir sans être à leur côté ?

Tout d'un coup, une porte grince. Nous levons nos regards vers l'accès à la cour.

Un homme débarque par la même porte par lequel je suis passée juste avant. Il a un air de Sirius Black (un des meilleurs personnages dans Harry Potter) - la même barbe de trois jours, ses  cheveux foncés mi-long jusqu'aux épaules et son air de rockeur - mais en plus sombre.

Il s'arrête à deux mètres de nous.

- Mr Burngan vous appelle, me lance-t-il de son ton méprisant.

- Et bien... dites-lui d'aller se faire voir, je réplique, glaciale.

Il a l'air d'hésiter quelques secondes. Il secoue la tête tout en sortant un objet de sa poche arrière et le pointe dans la direction de mes amies.

Il se permet de les viser avec son arme. C'est moi qui dois mourir pas elles !

- Ne m'oblige pas à le répéter une deuxième fois, m'ordonne-il en me regardant froidement.

- Megan fait ce qu'il te dit, me supplie Marine. Rappelle-toi qu'on t'aime et qu'on te soutiendra sur tout ce que tu entreprendras. Tu vas survivre. J'en suis certaine.

Je ne dois pas les mettre en danger. Ravale ta fierté Megan et bouge-toi !

Je hoche la tête.

- Je vous aime les filles, je leur annonce en me dirigeant vers l'homme.

Il m'empoigne, sans oublier d'enfoncer ses doigts dans mon bras gauche, et m'entraîne vers la cour pendant que je jette des coups d'oeil tristes en direction de mes amies. Elles me manquent déjà.

L'homme me pousse en direction de la scène en me faisant contourner la foule d'élèves apeurés.

Je monte avec difficulté les trois marches des escaliers et me retrouve aux côtés de Breeven, qui n'a pas non plus l'air d'avoir envie d'être sous les feux des projecteurs devant plus d'une centaines de personnes.

- Afin d'entrer définitivement parmi les premiers sujets à cette expérience vous devez citer une seule phrase, déclare mr Burngan en un fin sourire fière.

Il me tend une feuille. Je la lis dans ma tête. Il me l'a reprend pour la donner à Breeven.

- A vous de commencer, me dit-il en me passant son micro.

Au loin, je vois mes amies me fixer en m'encourageant de leur visage attristé.

A contre coeur, j'exécute l'ordre.

- Moi, Megan Hunter, je m'engage à survivre pour le bien de l'expérience.

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