Chapitre 1
Ce n'est pas souvent que je touche à une arme. Mais la sensation est toujours la même. Ce sentiment de supériorité... être invincible. Avoir le pouvoir de la protection et aussi d'être une source de danger pour quelqu'un.
Ouais... on dirait que je suis une psychopathe. Mais ne vous inquiétez pas, je suis humaine ! Il y a une semaine, en parcourant un dictionnaire, j'ai réussi à me couper le bout d'un doigt avec une page. Alors, je peux vous assurer que du sang coule bien dans mes veines et que je suis également dotée de terminaisons nerveuses qui marchent un peu trop bien à mon goût. Mon dieu, que je suis désespérante!
Revenons à nos moutons.
Lorsque je pointe le canon à l'endroit désiré sur ma victime, je me demande automatiquement à qui va-t-elle manquer si jamais sa vie s'éteint subitement. A-t-elle une famille ou des amis qui pleureront sa perte?
Pour me donner du courage, je me dis souvent que cette personne est un serial killer recherché par la CIA. Ça aide toujours. Je ne peux me persuader plus que de me dire que je fais une bonne action.
J'ai toujours ce besoin fort de m'améliorer, de viser plus juste. Puis, de me récompenser par la satisfaction de ma performance.
Dans mes débuts, j'étais mal à l'aise, mais à force, on s'y habitue.
Vous vous dites sûrement que je suis bizarre. Ça, je ne peux pas le nier. On ne peut pas fuir ce que l'on est. Juste atténuer mon caractère pour faire moins peur aux autres, même s'il y a des cas pires que moi.
Rassurez-vous, je ne fais cette activité qu'une fois par semaine depuis plus de deux ans, juste avant les cours.
Comme dit mon père: " Rien ne vaut mieux que se lever tôt dès le matin en tirant quelques balles". Et j'avoue que je ne peux pas le contredire. Il dit vrai. Un peu comme la boxe, tirer me permet de décompresser.
Si vous voulez, je ne tue jamais la même personne. Il faut bien diversifier son passe-temps ! Hein !
Et le plus important, je leur donne à chaque fois un petit nom, histoire de les rendre un minimum humain à mes yeux. Seul bémol, j'ai de moins en moins d'idées. En effet, mon stock de prénoms a subi l'épuisement par ces deux ans de pratiques peu légales.
Aujourd'hui, mon ami s'appelle Richard... heu... oui, on voit bien que l'inspiration se fait pratiquement inexistante.
Ce qui me déçoit chez ce Richard, c'est qu'il a la même tête que tous les autres. Alors, j'essaie de m'imaginer un vieux tatoué, avec son petit pétard en bouche et son air de Johnny Hallyday... C'est pas terrible, hein, mais c'est mieux que rien.
Bref.
Ce matin, j'ai décidé de changer.
Récemment, je me suis rendue compte que je ne laissais jamais ma victime parler ni même de me supplier de la laisser saine et sauve.
Évidemment, elle avait tout le temps la même position - prêt à me tirer dessus avec son arme à deux balles - du coup, bah, forcément, je me vengeais. Mais là, j'étais d'humeur à offrir une fleur à l'attention de mon adversaire. Qu'on se rassure, je ne suis pas une malade mentale. Mon côté bizarre est tout naturel chez moi.
- Alors... Tu as bien dormi? je lui demande avec un faux entrain amical.
Quoi? Il faut bien détendre l'atmosphère.
- Heu... ok... Tu fais quoi dans la vie? je tente de sympathiser pour montrer que je m'intéresse bien à lui.
Je me sens de plus en plus ridicule, au fur et à mesure que mes mots sortent de la bouche. On dit que le ridicule ne tue pas, mais je crois qu'il a bien pulvérisé le peu bonté que j'avais quelques secondes avant.
De toute façon, il est évident qu'il ne va pas me répondre. Sinon j'arrêterai définitivement les révisons du bac français jusqu'à deux heures du mat.
- Bon, ben... Adieu, je le salue en visant l'entre-jambe.
Je laisse passer quelques battements de coeur, puis je tire. Plusieurs fois. Le pauvre Richard ne pourra plus se reproduire.
Bien que je porte un casque, j'entends tout de même le désagréable bruit lorsque les balles font feu.
Je retire mon casque et mes lunettes de protection avant de poser mon arme sur une table devant moi. J'appuie nonchalamment sur le bouton rouge vissé à côté de moi et le cobaye en carton avance. Je vois que je lui ai bien amoché les parties intimes. Pauvre petit...
- Je devrais garder un oeil sur toi, tu commences à être meilleure que moi, dit une voix que je ne connais que trop bien.
Je sursaute, surprise par la voix grave dans ce lieu silencieux et me retourne. Mon coeur tambourine avec une telle force que j'en ai peur de casser quelques côtes. Je vois mon père adossé au mur.
- Tu trouves ça drôle de me surveiller comme ça sans que je le sache? je réplique froidement.
Au cas où vous ne l'aurez pas remarqué, je me trouve dans le sous-sol de la police.
Et là vous allez me dire: "Mais qu'est-ce que tu fous là-bas?"
Et je vais vous dire: " Mon père est policier, et pour une raison que je trouve louche il m'a initiée au tir"
Mouais, c'est pas trop de mon âge ça.
Comme vous le savez sûrement, il est interdit aux enfants d'utiliser une arme. Encore moins de s'entraîner avec. Alors comment vous dire que mon père risque gros si un de ses collègues me voit ici. D'ailleurs, c'est pour ça que je viens tôt le matin, les autres viennent le soir après leur journée de travail.
Mon père affiche un air fatigué mais il trouve quand même la force de me sourire.
Je décide de casser le long moment de blanc gênant.
- Papa... tu ne m'a jamais vraiment dit pourquoi je dois faire tout ça. Ta réponse du type "Si tu voudras avoir le même métier que ton vieux père plus tard, tu seras déjà préparée et tout sera un jeu d'enfant pour toi." Un père normal ne laisse pas sa fille faire mumuse avec une arme.
- J'y crois pas, ma fille réfléchit comme un être humain, se moque-t-il en rigolant.
Je lève les yeux au ciel. Qui m'a donné comme père un petit garçon à l'humour déplorable?
- Te fous pas de moi papa. J'ai le droit d'être victime d'un instant de normalité.
Son expression devient aussi sérieuse que la mienne. Il se décolle du mur et se campe devant moi, les bras croisés contre son torse. Il soupire. Son regard observe le vide au niveau de mes chaussures.
- Tu sais le monde n'est pas si rose qu'on le pense. Ce que tu vois aux informations te donne déjà un avant-goût de la réalité.
Je fronce les sourcils, ne comprenant pas où il veut en venir. Mon père le voit. Il reprend:
- Tu dois savoir te protéger des attaques extérieures. S'il y a un problème tu sauras quoi faire. J'en suis sûr.
- Mais tes coéquipiers et toi, vous êtes là pour nous protéger. Pas vrai?
- Il faut que tu saches que nous ne serons pas toujours là, Megan.
Ses explications me font flipper. Mais à quoi pouvais-je m'attendre? Sûrement pas à: "C'est juste pour le fun fillette!".
Quelques fois, lorsqu'il est fatigué, il lui arrive d'avoir des propos un peu exagéré. Ça ne m'étonne pas que nous ne le prenons pas toujours au sérieux. A croire que ses pauvres heures de sommeil ne lui servent strictement à rien.
Je ne sais pas quoi dire d'autre à part un petit:
- D'accord.
Il m'ouvre ses bras et je viens lui faire un câlin. Notons bien que cet acte est très rare, mais faisable. Dans notre famille, la simple phrase "Je t'aime." a été très peu utilisée. Le câlin est l'une des seules marques d'affection que nous nous autorisons.
- Je suis fière de ma fille, murmure-t-il.
Je souris à ses mots, heureuse de partager ce moment de tendresse avec mon père. Puis, je me détache de ses bras, la tête encore dans les nuages.
Mon père regarde sa montre.
- Si tu ne veux pas louper ton bus mieux vaut que tu partes tout de suite, m'informe-t'il.
Je reviens brusquement sur terre.
- Mince, j'aurai préféré que ta montre n'ait plus de piles, j'avoue en rangeant mon arme, le casque et les lunettes en un éclair.
- Pourquoi? me demande-t-il, intrigué.
- Pour justement louper mon bus et me dire " Tant qu'à être en retard au lycée le mieux c'est de ne pas y être du tout.", je le provoque avec un air trop sérieux pour être vrai.
- Dorénavant, je vérifierai ma montre pour que tu puisses avoir le bonheur de plonger ta petite tête blonde dans les cours de Mathématiques que tu aimes tant, répond mon père dans un sourire psychopathe.
Je fais semblant de vomir.
- Aller, ouste mauvaise troupe, ajoute-t-il.
En rigolant, je lui fais un rapide bisou sur la joue et file vers la sortie de secours.
- A ce soir papa, je lui lance dans la foulée.
Je n'entends pas sa réponse. Peut-être ne m'a-t-il pas entendu?
Au pas de course, je mets mes écouteurs et lance ma playlist.
Il commence sur Attention de Charlie Puth. Ma chanson préférée du moment.
En fredonnant les paroles tout en parcourant les trottoirs, je repense aux mots de mon père à propos de ma sécurité. J'ai un mauvais pressentiment. Son attitude généralement moins émotive me rend perplexe.
Une petite voix dans ma tête me dit: " Arrête de réfléchir pour rien. Met toi plutôt à bosser pour ton bac! Tu serviras à quelque chose!"
Je fais taire mes questions et entre dans mon bus. Je dois d'abord récupérer mon sac à la maison.
*
De retour chez moi, je fais mon sac à la vitesse de la lumière.
Je n'oublie pas non plus de changer de T-shirt - l'odeur de poudre à canon est trop perceptible.
En montant au premier étage, je marche sur la pointe des pieds pour ne pas réveiller ma petite soeur.
Ma mère rentrera bientôt, elle déposera ma soeur à l'école avant d'aller se coucher.
Elle est infirmière de nuit. Son métier la pousse à copier la vie des hiboux (niveau sommeil je parle bien).
Vous avez le droit de vous demander si elle sait que je me lève tôt le matin pour pratiquer une activité illégale. Eh bien, non. Elle est dans l'ignorance complète. Ça vaut mieux pour elle et pour moi. Sinon interdiction de sortie jusqu'à mes 18 ans.
En passant devant la porte de la chambre de ma petite soeur, Emmelyne, 6 ans, je décide d'y entrer voir si elle dort bien. Et en effet, je la trouve en position "étoile de mer" en plein milieu de son lit La reine des neiges. Je trouve sa peluche au sol. Une abeille qui s'appelle Yaya. Quand elle était bébé, Emmy ne pouvait pas prononcer Maya correctement alors il fallait bien avoir un plan B pour son prénom. Je prends donc sa peluche et le replace à côté de la petite tête brune de ma soeur, puis sans bruit, repars de la maison.
Cette fois-ci, je suis rejointe dans le bus par une de mes amies, Marine (ma petite rousse). Cette dernière a arrêté de se battre contre ses cheveux bouclés, lui donnant une allure plus...sauvage. Elle accueille cette réflexion avec un regard noir qui me fait instantanément rire.
Durant tout le trajet, elle n'arrête pas de réciter à voix haute tout le cours de math, pensant qu'il y aurait un contrôle surprise.
- Arrête tu vas m'embrouiller l'esprit avec tes produits scalaires, je grommelle.
- J'ai peur d'oublier, dit-elle anxieuse.
- Mais non tu ne vas pas oublier ces foutues formules! Tu es une bonne élève alors détend toi et respire, je lui conseille.
Sur-ce, j'enlève un de mes écouteurs et le lui place dans l'oreille, lui faisant écouter Happy de Pharell William.
Notre arrêt de bus se situe juste après le lycée, nous avons quelques secondes encore pour apprécier la musique.
Soudain, Marine me sort de mes pensées.
- Heu... Meg?
- Oui? je croasse, tandis que je fais défiler tous les titres de mon IPod.
Je lève mon regard à l'attention de Marine et la vois tournée vers la fenêtre en affichant un air apeuré.
- Tu sais pourquoi ils sont là ? me demande-t-elle en pointant du doigt l'extérieur.
Sans lui répondre, je me retourne pour voir par moi-même. Et j'observe, incrédule, qu'une quinzaine de soldats lourdement armés patrouillent devant le lycée. Ils n'ont pas l'air d'être " happy" bien au contraire.
Ça ne sent pas bon du tout.
***
Hey! Mon premier chapitre est enfin sortit! Oui je sais, il n'y a pas beaucoup de dialogue mais il y en aura un peu plus dans le second chapitre. En tout cas, j'espère que celui-ci vous a quand même plu.
Ça y est, j'ai reçu mon emplois du temps et je sais maintenant quels seront mes jours de publications.
* Roulement de tambour *
Attente...
( Je fais les gros yeux au mec qui joue du tambour parce qu'à un moment donné il faut bien me laisser parler )
Ce sera donc le mercredi et le dimanche, après-midi ou soir ( ça dépend de mon timing ).
Et pour ce qui est des vacances de la Toussaint, je ne sais pas si je pourrai changer de rythme de publication puisque mes profs vont sûrement vouloir me donner des montagnes de devoirs-maison et de contrôles. D'autant plus que c'est l'année de mon bac.
Sur ce, à la semaine prochaine 😉
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