☾Partie 2/3
En essayant de me frayer un chemin parmi la foule, je reçus plusieurs coups de coude dans les côtes et quelques croche-pieds, avant de me retrouver juste devant les deux combattants. D'un coup d'oeil, je vis Ariane encore à l'arrière du groupe et décidai de mettre fin à ce combat, malgré toutes ces personnes qui les encourageaient par des cris et des applaudissements. Sans réfléchir, je me jetai devant les deux rivaux et plaçai mes bras en croix pour les arrêter dans leur élan. Malheureusement, avant que l'un des deux ne se rende compte de ma présence, le jeune homme placé devant moi ne réussit pas à s'arrêter et son poing percuta mon visage de plein fouet.
Je lâchai un cri, tout en tenant le côté droit de mon visage, que je sentais déjà rougir et gonfler. Ma paupière se fermait sans mon accord, et mon oeil me piquait atrocement. J'avais l'impression que ma pommette, naturellement saillante, s'était enfoncée dans mà joue et cette sensation m'en donnait les larmes aux yeux. J'avais atrocement mal, mais restai tout de même debout devant ces deux ennemis, qui se mirent à se calmer en voyant ce qu'ils avaient causé. Le garçon derrière moi entra dans mon champ de vision, légèrement flou après la droite que je m'étais prise près de l'oeil. Au bout de quelques secondes, ma vision s'éclaircit et les deux visages en face de moi devinrent plus précis.
Les deux garçons étaient grands, beaucoup plus hauts que moi, qui mesurais seulement dans les un mètre soixante. L'un était d'un roux pétant, alors que l'autre avait des cheveux marron coupés au niveau des épaules. Celui-ci les recoiffa en arrière d'un geste de la main dans sa chevelure en bataille. Ses mèches de devant alors mises en arrière, je découvris deux grandes oreilles, dont la forme pointue au bout lui donnait un air de lutin. Le jeune homme à coté de lui soufflait bruyamment, ruisselant de sueur. Ses mains agrippées à ses genoux semblaient énormes, presque deux fois plus grandes que les miennes, et quand il releva la tête, je découvris son visage rouge et humide. Celui-ci était bouffi et sa combinaison noire moulait ses formes et ses bourrelets d'une manière peu esthétique.
Le deuxième, lui, était doté d'un corps athlétique qu'il se gardait bien de cacher. De la manière qu'il avait de placer ses bras en arrière pour montrer ses muscles saillants jusqu'au regard arrogant qu'il portait sur moi, je sus déjà que son égo était disproportionné. Quand il s'avança vers moi pour m'aider, je reculai encore d'un pas et l'observai d'un regard qui l'incita à rester à sa place. Au même moment, une jeune fille traversa le mur de personnes agglutinées autour de nous et sauta sur le garçon essoufflé et transpirant près de moi:
"- Oh, Adrian ! Est-ce que ça va ?"
Le prénommé Adrian n'eut pas le temps de répondre que la fille, apparemment en colère, se tourna vers l'homme à l'allure d'un athlète:
"- Qu'est-ce que tu lui as fait, espèce d'ordure ? T'es qu'un gros connard, Tristan !"
Sans attendre de réponse de quiconque, elle releva la tête d'Adrian et à ce moment là, leur ressemblance me frappa un court instant . Les mêmes cheveux roux et emmêlés, les yeux d'un bleu profond, la mâchoire carrée, le nez légèrement en trompette... tout était identique entre les deux. Aucun charme ne se dégageait réellement d'eux, mais quelque chose les rendait intéressants, presque attirants. Pourtant, je n'arrivai pas à trouver ce que c'était. La seule chose qui les différenciait, et ce qui m'avait empêché de me rendre compte de leur similitude, était leur morphologie. Le jeune homme avait plusieurs kilos en trop, alors que la fille était extrêmement mince, presque maigre. Elle se mit alors à me parler, d'une voix légèrement cassée:
"- Waouh, qui t'a fait ça au visage ? Tristan, je présume !"
Ses yeux lançaient des éclairs vers la personne postée à côté d'elle, mais elle continua:
"- Tu n'as pas trop mal ? En tout cas, ce n'est pas très beau à voir, j'ai même l'impression que ta joue vire légèrement au violet..."
Positionnée ainsi à coté de son frère, on aurait dit que les tâches de rousseur qui remplissaient leur visage étaient presque symétriques, quasiment placées de la même façon d'une tête à l'autre. Mais la douleur impactait peut-être sur ma vue... J'avais l'impression que l'amas de personne autour de nous s'était encore agrandi, et respirer normalement au milieu de tous ces adolescents était de plus en plus compliqué. La jeune fille, qui était apparue devant moi iI y a quelques secondes, se mit alors à crier d'une voix tonitruante sur Tristan :
"- Tu as vu ce que tu viens de faire ?"
Alors que je pensais réellement qu'elle allait me défendre, la jumelle continua:
"- Ce coup de poing, là, mon frère aurait pu se le prendre en plein dans la tronche et finir avec ce même oeil au beurre noir !"
Alors que les phrases de la jeune fille me perçaient les tympans, Tristan renchérit:
"- Mais calme-toi, Charlie, bordel ! Toujours à réagir au quart de tour, comme ça, ta tapette de frère est pas capable de se défendre seul ?
- Je lui ai toujours dit qu'il ne servait à rien de tenir tête devant des crétins."
La remarque de Charlie fit émettre par la foule des huées à l'attention de Tristan, et certains se mirent à siffler pour féliciter l'audace de la jeune fille. Mais celle-ci semblait ne pas vouloir rigoler, et gardait son visage intimidant fixé sur le jeune homme. La situation allait sûrement dégénérer, quand Ariane me sauva la mise en se mettant à crier plus fort que tout le monde:
"- Eh oh, on se calme ! Après avoir failli assommer mon acolyte, pourriez-vous vous calmer et tout nous expliquer, au lieu de continuer à vous entretuer ?"
Un long silence s'ensuivit, pendant lequel les rivaux se mitraillèrent du regard et où les spectateurs chuchotaient entre eux en mettant leurs mains devant leur bouche. Charlie répondit:
"- On peut régler tout ça, mais pas ici."
D'un regard entendu, Ariane et moi nous mîmes d'accord pour écarter la foule et emmener ces trois personnes à l'écart, afin d'en comprendre un peu plus sur cette dispute.
***
Une poche de glace posée contre ma joue, j'étais assise sur un banc, dans la première pièce vide que nous avions trouvé. Une salle de réunion, à premier abord. Une dizaine de chaises encerclaient une énorme table, dont le bois était caché par tous les dossiers posés dessus. Excepté moi, tout le monde se tenait debout, passant d'une jambe à l'autre pour contenir l'angoisse ou la colère qui les irradiait. Les deux garçons arboraient maintenant quelques bleus et griffures sur leurs bras et leur visage, mais j'étais tout de même la plus amochée du groupe.
Les glaçons que je tenais fermement me glaçaient les doigts, malgré le fait que le froid calmait les élancements que je ressentais à ma joue droite. Ma paupière, elle, était encore fermée et douloureuse. La tension était toujours palpable entre les trois personnes, mais Charlie se lança la première dans les explications:
"- Tristan, tu me répugnes, à te croire supérieur en harcelant toutes ces personnes, en particulier mon frère.
- Ce n'est pas ma faute si ton frangin est si facilement soumis, souleva ironiquement l'intéressé. Si se chamailler un petit peu revient à "harceler" des gens, je ne sais pas ce que l'on peut réellement faire, ici.
- Mais vous êtes allés jusqu'à vous frapper, pauvre type ! Qu'est-ce qui ne tourne pas rond, chez toi ?
- Si je pouvais te donner un conseil, Charlie, ça serait de lâcher ton frère. Laisse-le respirer, se faire une réputation ! Je pense que c'est surtout à cause de toi qu'il est aussi inférieur. Une vraie petite tapette, parce-que maman Charlie veut à tout prix protéger son frère. Mais Adrian n'a pas besoin de toi, mets-toi ça dans la tête !"
Tristan s'était approché de la jeune fille, et pointait son index sur son crâne en même temps qu'il lui criait ces paroles à la figure. Les yeux bleus de Charlie étaient rivés sur lui, légèrement humides mais intimidants:
"- Ne raconte pas des choses dont tu ne connais rien. Tu ne peux pas comprendre, parce-que protéger quelqu'un ne t'est jamais passé par la tête. Tu n'es qu'un simple égoïste, aussi narcissique qu'une princesse, sauf qu'il faudrait que tu penses à descendre de ton trône.
- Mais ferme-là, un peu, tu veux ? Regarde Adrian, il ne dit absolument rien, tout va bien pour lui, dans ce cas.
- Mais bordel, Adrian, dit quelque-chose, défends-toi ! cria Charlie à l'intention de son frère."
A présent, les larmes coulaient sur les joues de Charlie, alors qu'Adrian gardait son visage rivé vers le sol.
"- Affirme-toi, je t'en prie !"
Tristan se mit alors à ricaner, et sans que nous n'eûmes le temps de réagir, le poing d'Adrian vola et atterrit dans l'estomac du jeune homme. Alors que celui-ci se pliait en deux, le souffle court, le rouquin se tourna vers sa soeur:
"- Mais Charlie, j'ai arrêté de me défendre depuis bien longtemps. Tous mes efforts n'ont jamais servi à quelque chose, alors j'ai décidé de me faciliter la tâche depuis de nombreuses années. Tu devrais en faire autant."
Et sans un mot de plus, il assena encore un coup de pied dans le tibia de son adversaire, avant de quitter la pièce, le dos courbé et le visage déformé par la rage. A ce moment là, je me demandai ce qu'Ariane et moi faisions là, assises sur un banc en assistant à une dispute qui ne nous concernait pas. Tristan lâchait des gémissements en se tenant le ventre et en repliant sa jambe blessée. Charlie, la voix remplie de sanglots, lui lança:
"- Tu l'as bien mérité, salaud !"
A sa phrase, le garçon devant elle se releva, le ton soudain dur, et sortit à son tour de la pièce, la colère irradiant tout son corps, en même temps que la douleur. Alors que la porte claqua dans son dos, Charlie se mit soudain à éclater en sanglots, ses larmes salées coulant le long de son nez jusqu'à son menton tremblant. Devant cet élan de tristesse et de pleurs, je me sentis mal à l'aise, en même temps compréhensive et extrêmement gênée. Sur le coup, je laissai Ariane rassurer la jeune fille en lui frictionnant l'épaule et en lui intimant de se calmer.
Les pleurs durèrent encore longtemps, avant que Charlie s'ouvre enfin à nous. Et ce fut entrecoupée de sanglots, qu'elle nous raconta:
"- J'ai peur. J'ai tout le temps peur, en fait. Je suis toujours sur mes gardes, agressive comme une lionne avec ses petits. J'aime Adrian plus que tout au monde, et le voir aussi soumis me fend le coeur, surtout quand je sais que je ne peux rien faire pour l'aider. J'ai tout essayé, tout regretté. Nous avons seulement quelques secondes d'écart mais pourtant, parfois, je crois que j'ai cinq ans de plus que lui. J'ai l'impression d'être sa grande soeur. C'est bête mais je pensais qu'en quittant la Terre, en laissant derrière nous toutes ces personnes qui persécutaient Adrian, la vie redeviendrait plus belle. Sauf que des cons, il y en a partout, même sur une autre planète..."
Elle laissa échapper un rire sarcastique, avant de continuer:
"- Mais ici, le plus terrifiant est que s'il ne se défend pas devant des personnes comme Tristan, le fera-t-il devant les bombes et les balles visées sur lui ?"
A nouveau, Charlie ne put rien ajouter sans éclater en sanglots une nouvelle fois. Cette fois-ci, aucune de nous deux, entre Ariane et moi, n'eûmes le courage de la consoler. Sans rien ajouter, elle souffla et s'affaissa sur le banc, posant sa tête contre le mur froid. Ses paroles me firent alors réfléchir, et je me rendis compte que tout le monde, ici, ressentait la même pression au sujet de ce qui nous attendait d'ici peu.
Nous discutâmes encore longtemps de nos états d'âmes, de nos sentiments, de nos peurs... sans aucun tabou ou aucune gêne. Les paroles coulaient à flots, même si nous essayions difficilement de garder nos yeux secs. Je réussis également à placer ma sortie avec le professeur McKin dans la conversation, ce qui étonna mes deux interlocutrices. Cela dura longtemps. Combien de temps, exactement ? Trente minutes ou deux heures, le poids sur mon coeur était en tout cas devenu plus léger.
***
Beaucoup de temps plus tard, Charlie décida de sortir de la pièce et d'aller parler à son frère, une bonne fois pour toute. "Il faut qu'il arrête de se faire marcher sur les pieds, ou il ne résistera pas longtemps sur le champ de bataille, nous dit-elle avant de partir." Ariane et moi nous retrouvâmes seules sur le banc noir. La pièce était maintenant plongée dans l'obscurité, comme si le soleil voulait lui-même nous faire revenir à la réalité. Pourtant, nous ne bougeâmes pas. Ariane enroula son bras autour de mon épaule, et j'émis un petit cri en sentant son épaule percuter ma joue amochée, ce qui la fit rire. Je claquai ma main sur sa cuisse pour la faire taire, mais cela lui fit l'effet inverse. Son rire résonna dans la pièce, et je posai ma tête sur son épaule en l'accompagnant de mes ricanements discrets. A ce moment là, je me sentis bien, la chaleur de mon amie contre mon visage et ses doigts faisant des cercles sur ma jambe.
Et alors que j'allais presque m'assoupir contre Ariane, celle-ci me chuchota à l'oreille:
"- Oh, j'allais oublier. Clyde aimerait te voir, ce soir. Il a des choses à te dire, à ce qui paraît."
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Alors, ces trois nouvelles personnes? Vont-elles rester dans "l'aventure" ? 🤪
Des commentaires à donner sur ces nouveaux équipiers ? 😆
Et ce rendez-vous avec Clyde ? 🤔
Pour plus d'action... votons !! 🌟
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