☾Partie 2/3

Mes jambes tremblaient, mes oreilles bourdonnaient, mes yeux étaient grand ouverts, et je me sentais fière. Cette fierté qui vous prend par surprise et vous donne la sensation de pouvoir tout faire. Peu importe la raison, peu importe le moment, je me sentais invincible. Je ne me trouvais plus faible ni insignifiante, une force nouvelle avait fait son apparition en moi. Mon courage était revenu, je le sentais, et il signifiait bien sa présence.

Toute cette population, remplie de reconnaissance, se jetait vers moi, vers nous. Les cris fusaient, les larmes coulaient, les cris sortaient. Mais de mon côté, je sentais ces sentiments nouveaux s'envoler pour laisser à nouveau place à la peur et l'angoisse habituelles.

Tous ces gens continuaient d'approcher, et je me tournais vers le professeur McKin. Ses yeux pétillaient et ses lèvres étaient tirées vers ses joues. Il était joyeux. Forcément, il était rentré, il était chez lui. Contrairement à moi, il savait où il allait, où il était. Alors que moi, je n'en avais toujours pas la moindre idée.

Il posa ses yeux verts sur moi. Ils étaient d'une si grande douceur, que je m'y perdis le temps d'une seconde.

Tout ce peuple se rapprochait toujours plus près, et je sentais l'ouragan dans ma tête se déchaîner.

"- Ne t'inquiète pas, tu n'as rien à craindre."

Je me répétais cette phrase en boucle, et j'eus l'impression de voir une scène au ralenti. D'un coup, ils me semblèrent lents, très lents. Tout était soudain différent autour de moi, même la poussière me semblait figée dans les airs. Les gardes placés à mes cotés semblaient tanguer vers l'avant, puis vers l'arrière. Ils devaient faire attention, ils allaient tomber. Je voulus les avertir, mais je ne parvins pas à articuler le moindre mot. Aucun son ne sortit et je ne les voyais à présent plus. Tout était noir, et le son s'amplifiait. Et cette planète tournait vite pour moi. Puis je me rendis compte que ce n'était pas Vivia qui tournait. J'étais au bord du gouffre, je le sentais m'attirer vers lui, mais j'en avais presque oublié que j'étais plus faible que ce monstre. Il fallait que je résiste. Seulement, je lui appartenais et je ne pouvais pas lui échapper.

Non, pas encore...

***

"- Tiens, elle se réveille enfin."

Cette unique phrase transforma mes doutes en réalité. Je m'étais encore évanouie. Encore une fois... Mais cette fois, ce n'était sûrement pas à cause de gaz toxiques.

J'ouvris vivement les yeux, et me retrouvais face à mon reflet. Un miroir était placé juste devant moi, et je vis ce visage, qui était le mien. Ce qui était sûr, c'est que ce changement considérable de vie sociale n'avait pas changé mon apparence physique... Mon teint, toujours aussi blanc, mes cheveux courts aussi clairs qu'auparavant. La seule différence était mes yeux. Toute la semaine, ils étaient bleus clairs, mais aujourd'hui, ils étaient gris. Bizarrement, ce changement ne m'étonna pas. Mes yeux changeaient souvent de couleur. Clyde disait qu'ils changeaient en fonction de mon humeur, mais je ne pensais pas que ce soit pour cette raison...

Puis quelqu'un se plaça devant le miroir, et mon corps disparut, pour laisser place à une jeune femme, entièrement vêtue de vert pâle. Elle semblait n'avoir pas plus de vingt ans et elle avait tout l'air d'une infirmière, avec une blouse, une charlotte et une seringue dans la main. Cette femme me rappela la vocation de médecin que je voulais prendre, plus jeune. Mais en voyant cette seringue, je me rappelai pourquoi j'avais renoncé. Je détestais les piqures.

Sa voix cristalline me tira de mes torpeurs.

"- Bonjour, je suis Théra, une des infirmières de l'hôpital. Je me demandais si je devais vous administrer quelque chose pour que vous repreniez connaissance, mais je n'en ai pas eu besoin. "

A ses mots, elle laissa apparaître ses dents parfaitement alignées en un sourire timide. En voyant que je ne réagissais pas, elle me dit:

"- Nous pensons que votre évanouissement a été causé par le changement d'oxygène soudain dont vous avez été sujette, au moment où vous êtes arrivée sur Vivia et à cause de vos blessures aux avant-bras, qui a causé une légère hémorragie. C'est ici les seules raisons que nous voyons. "

J'avais donc perdu du sang encore après mon évanouissement dans le vaisseau sans m'en rendre compte... En regardant mes avant-bras, mes doutes se confirmèrent quand je vis deux bandages légèrement tâchés de rouge entourer mes poignets blafards. On aurait dit une fille qui voulait mettre fin à ses jours en s'ouvrant les veines.

- Depuis quand suis-je inconsciente ? demandais-je d'une voix un peu trop agressive.

- Quelques heures. Environ cinq, il me semble."

Cinq heures... J'avais perdu la notion du temps et avais du mal à tout assimiler.

"- Maintenant que vous êtes ici, je pense que vous devez être fière d'enfin pouvoir servir notre pays, de pouvoir nous sauver du pétrin dans lequel nous sommes."

Servir son pays... C'est comme cela qu'elle me voyait ? Qu'elle nous voyait tous, ces terriens qui avaient dû quitter la Terre sans avoir le choix ?

Je lui jetais un regard chargé d'électricité et lui répondis:

"- Absolument pas. On ne m'a pas vraiment laissé le choix, si vous voyez ce que je veux dire."

Cette phrase, bien audible et ponctuée, la laissa pantoise et elle émit une toux gênée. Elle prit finalement le choix d'oublier les dernières paroles échangées entre nous, et changea de sujet:

"- Hum, hum... Après les quelques vaccins et soins que nous vous avons donnée, je pense que vous pouvez maintenant sortir, vous êtes rétablie. Votre responsable, le professeur McKin, vous attend dans la salle d'attente. Il devra simplement signer une décharge pour attester votre départ. Vous n'avez normalement pas besoin de soins extérieurs. "

Sans un mot, je me levais du lit d'hôpital, un peu trop vivement au goût de mon cerveau. Celui-ci me le fit ressentir en m'envoyant des douleurs aigues à l'avant de mon crâne. Je me mis à tanguer vers la porte, sous le regard interrogateur de Théra, et réussis enfin à retrouver un semblant d'équilibre.

Sans rien laisser paraître, je sortis de la chambre en saluant poliment l'infirmière, qui était toujours aussi immobile devant le lit d'hôpital.
Mais j'entendis à nouveau sa voix cristalline, alors que j'étais déjà dans le couloir :
" - Attendez, s'il vous plaît ! »

Elle sortit à son tour de ma chambre et s'arrêta devant moi. 

" - Je m'excuse si je vous ai blessée avant, mais je voulais vous souhaiter bon courage. Sachez qu'auprès de McKin, vous ne risquez rien. Il était vraiment impatient de vous compter parmi nous.»

Son regard brûlant semblait sincère, mais je ne comprenais pas l'envie du professeur McKin de me rencontrer.

Soucieuse, je reculais légèrement, émis un hochement de tête compréhensif -même si il ne l'était pas- et la salua. Elle me regarda encore quelques secondes, me sourit et tourna les talons en me souhaitant à nouveau bonne chance.

Je me tournai alors vers la salle d'attente, mais je fus frappée par la blancheur du couloir.
Si ma chambre d'hôpital était assez lumineuse, la clarté aveuglante du couloir me donna à nouveau le vertige. Je me retins de mettre ma main devant mes yeux, et continuai mon chemin en paraissant naturelle, même si mes rétines me brûlaient atrocement.

Comme m'avait dit Théra, le professeur McKin m'attendait dans la salle d'attente, l'air songeur. Affalé sur son fauteuil, il se releva vivement à mon arrivée. Il essaya de donner bonne impression, me sourit, me demanda si je n'avais rien, mais je ne lui répondis pas. J'étais encore trop sous le choc, trop énervée et trop humiliée pour lui pardonner. Lui pardonner d'avoir bouleversé mon existence.
Mais derrière toute cette haine, je savais bien qu'il se cachait un semblant de reconnaissance. Je lui étais reconnaissante de m'avoir attendue de nombreuses heures dans cette salle, à se demander comment j'allais, mais surtout, je lui étais reconnaissante d'avoir justement changé ma vie, car elle ne pouvait pas être pire qu'elle ne l'avait été

Simplement, ce que j'aurais voulu, c'est qu'il m'ait laissée la liberté de choisir, de peser le pour et le contre et d'enfin, savoir de mon plein grès que je voulais partir et changer définitivement de vie. 

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