☾Partie 1/2

Au milieu de l'agitation de la cantine, l'habituelle sonnerie stridente retentit et le calme se fit en quelques secondes. Après quelques grésillements venant des haut-parleurs, la voix d'Hemna se fit soudain entendre:

"- Bonjour à tous, voici une annonce à votre intention. Une nouvelle activité virtuelle est organisée pour ce matin-même, d'ici quarante-cinq minutes. Veuillez vous rendre dans la salle habituelle d'entraînement à l'heure demandée. Merci."

A peine le dernier mot d'Hemna fut-il prononcé que les éclats de voix et le tintement des couverts reprirent. Sans que je ne m'en rende compte, Ariane et Esmée s'assirent à côté de moi et mon amie aux cheveux rasés me fit sursauter:

"- Alors, hier ? Raconte !"

Je n'eus pas le temps d'ouvrir la bouche qu'Esmée demanda ce qui s'était passé, l'air plutôt inquiet. D'un regard sévère, je fis comprendre à Ariane qu'elle n'avait pas besoin de parler de ça maintenant, mais je n'eus qu'à me résoudre à tout expliquer. Je racontai en détails tout ce que j'avais vécu hier sur le toit, au milieu des gloussements d'Ariane à certains moments et du regard sérieux que me jetait Esmée, en essayant de comprendre. Au bout de quelques minutes, lorsque je me mis à parler de l'ordre des tatouages, les yeux de mes amies se firent plus durs, plus tristes:

"- Je suis vraiment désolée pour toi, chuchota Esmée.

- Ouais, c'est vraiment chaud, renchérit Ariane. Mais personne ne dit que c'est vrai.

- Personne ne dit que c'est faux non plus...

- Mais même si tu dois aller en première ligne, je ne te laisserai pas tomber, lança Ariane.

- Et si je dois mourir là bas ?

- Alors ça aussi, on le fera ensemble, renchérit Esmée."

Je ne répondis pas à leurs remarques, et me relevai de table, mon plateau vide. Cette information me donnait encore la chair de poule, et en parler ainsi était encore compliqué, pour moi. Mais la phrase d'Ariane ne me laissa pas non plus de marbre. Elle avait raison, ce que Clyde m'avait dit n'était qu'une de ses hypothèse, cela ne voulait peut-être rien dire. Avant de sortir de la pièce, j'entendis Esmée ajouter:

"- Et moi alors, où est-ce que j'irais, à ce moment là ? Je n'ai aucun tatouage ! cria-t-elle en montrant son épaule à Ariane."

***

"- A la fin du compte à rebours, l'entraînement commencera en réalité augmentée. 3...2..."

J'entendis la voix de Marc, l'entraîneur, et l'angoisse monta en quelques secondes. Je me forçai alors à me rappeler les paroles de l'homme pour garder les idées claires : "Votre but, aujourd'hui, est de dégoter le drapeau adverse en premier. Vous êtes divisés en deux équipes ennemies, et la couleur sur votre combinaison vous indiquera dans laquelle vous vous trouvez."

La capture de l'étendard... un grand classique ! Mais cette idée me rassura, je n'avais pas à trop me creuser la tête pour être sûre de tout comprendre. Aujourd'hui, le seul changement était que nous étions montés sur câbles, tenus par des harnais de quelques kilos, qui me pesaient déjà sur les hanches.

"Ici, l'esprit d'équipe est bien vu, mais la jouer solo pourra peut-être vous faciliter la tâche. Les deux drapeaux peuvent être cachés n'importe où, à vous de les retrouver. Assurément, les armes sont autorisées."

La dernière phrase me fit frissonner. Bien sûr que les armes étaient autorisées, car la violence était ce qu'ils attendaient le plus de nous.

Le "bonne chance" de Marc atteignit mes oreilles, et l'entraînement virtuel se mit en marche. Je n'eus pas le temps de cligner des yeux, qu'une bourrasque de vent sembla me glacer les os, et cette soudaine fraîcheur eut le don de complètement me sortir de ma léthargie. Il ne me fallut pas beaucoup de temps pour comprendre qu'après la chaleur et l'humidité, rien de mieux que le froid pour nous mettre à l'épreuve... Cette froideur instantanée me fit grincer des dents, mon visage me faisait encore souffrir. Etonnamment, le harnais semblait avoir disparu, je ne sentais plus le moindre pois contre mes hanches.

Je pris tout de même le temps d'observer ce qui m'entourait, mais je ne vis pas grand chose, excepté la neige qui recouvrait tout le paysage. Ce temps hivernal me rappela un moment mon départ pour Vivia, quand j'étais partie alors que les flocons étaient tombés la nuit dernière. Je n'avais laissé de ma présence que la trace de mes pas dans cette poudreuse immaculée. Mais la nostalgie n'eut pas le temps de prendre le dessus dans mon esprit, car la lumière qui indiquait mon équipe se mit à clignoter: j'etais dans l'équipe verte, et je vis à quelques mètres de moi la couleur rouge scintiller et contraster avec la blancheur omniprésente. Un ennemi.

La neige est censée étouffer une grande partie du bruit, voilà pourquoi le monde semble soudain silencieux et endormi quand elle commence à envelopper les villes. Mais ici, on pouvait tout de suite se rendre compte que ceci était une simulation, car les cris et les bruit de pas me parvenaient clairement et agressaient mes oreilles.

J'entendis soudain une voix, ordonnant à l'équipe rouge de se regrouper. Elle semblait venir d'un homme, et je vis tout de suite l'ennemi qui se trouvait près de moi s'éloigner, à la recherche de cette personne. Pas très malin, pensai-je. Il me suffirait de suivre cet adversaire pour intégrer son équipe et mettre fin à leurs plans, mais cette lumière sur mon torse me différenciait suffisament pour que cette idée s'efface de mon esprit.

Je sentais mon visage durcir à cause du froid mordant qui se dirigeait vers moi en bourrasques de vent, mais ce souffle glacé n'arrivait tout de même pas à m'éclaircir les idées. Il fallait que j'agisse, avant de me transformer en bonhomme de neige ou glaçon humain, mais je ne savais absolument pas quoi faire. Ma première intention fut alors de retrouver au moins un de mes acolytes. Histoire de continuer accompagnée... Sur ce, j'enjambai un monceau de neige devant moi -qui ne devait être que de l'air dans la salle d'entraînement- et me mis à la recherche d'une petit lupiotte verte qui aurait l'impression de voler, transportée par ces puissants blizzards.

Je laissai mes pas sur la neige fraîche, mais cette impression de s'enfoncer dans la poudreuse était inexistante, et cela me tourmenta un moment. Il me semblait que ma combinaison était trempée, et je tremblai de froid, mais je cherchai toujours vainement un partenaire. Au bout de quelques minutes, je trouvai enfin un reflet de la même couleur que mon équipe, et me mis à courir pour le retrouver. Un jeune homme à l'air enfantin se tenait là, tenant son arc sur son épaule et grelottant autant que moi. En regardant derrière lui, je ressentis un réel soulagement en découvrant Esmée, dans la même équipe que moi.

Quand elle me vit, son excitation accompagna ma consolation, et elle m'étreignis avec force. Son costume, aussi humide que le mien, me fit à nouveau frissonner, mais je ne laissai rien paraître. Le fusil de mon amie était devenu blanc, et presque invisible au milieu de cette même couleur éclatante. Sa voix chantante et claire me fit sourire:

"- Oh, Jo, je suis tellement contente de te voir ! C'est vraiment cool qu'on soit ensemble, ça me redonne un peu espoir."

Elle s'approcha de moi et se pencha vers mon visage avant de continuer:

"- Parce-que ce n'est pas avec ce prénommé Giles, qu'on allait trouver le drapeau adverse, crois-moi..."

Son air soudain soucieux me fit légèrement rigoler, avant que je ne réponde:

"- T'inquiète, avec moi dans ton équipe, tu vas tout déchirer."

Ma remarque ne se voulait absolument pas sérieuse, et eut le don de nous faire rigoler. Le garçon à côté de nous semblait nous jauger du regard, ses bras autour de la taille pour garder un peu de chaleur. Quand nous nous rendîmes à nouveau compte de sa présence, nous nous calmâmes et commençâmes à marcher, sans réellement chercher un endroit précis. Mais au bout de plusieurs minutes, nous dûmes nous décider à élaborer une stratégie qui nous permettrait d'enfin trouver cet étendard rouge. Notre première idée fut d'essayer de trouver d'autre acolytes, afin d'avoir le plus grand effectif possible.

Malheureusement, aucune nouvelle lumière verte ne scintillait au loin, et nous dûmes trouver autre chose. Esmée eut l'idée de capturer un adversaire pour lui demander le lieu de leur cachette, mais je lui rappelai qu'ils n'en savaient rien, tout comme nous. Si quelqu'un dénichait un quelcquonque drapeau, ce serait une découverte pour tout le monde.

Toutes nos idées se trouvaient irréalisables, et l'inspiration commença à ne plus se renouveler. En plus de ça, la neige tombait à gros flocons sur nous, semblant vouloir nous aveugler et nous intimer d'abandonner. Dans mon dos, j'avais l'impression que la poudreuse était plus lourde, beaucoup plus lourde que ce qui nous recouvrait aux autres endroits. En me retournant, je me pris soudain quelque chose dans le visage, mais je n'arrivai pas à me rendre compte de ce que c'était. Et cette fois-ci, ce n'était pas la neige qui me cachait la vue, mais il n'y avait réellement rien derrière moi. Je touchais donc quelque chose qui ne faisait pas partie de l'actvité virtuelle.

En même temps que j'en informais mes deux compagnons, je passai attentivement mes mains sur la chose rugueuse qui m'avait griffé le visage. En laissant danser mes doigts, je découvris une sorte de corde, sûrement accrochée au plafond. Sa présence là était-elle voulue ? Ce devait sûrement être un oubli de l'équipe d'aménagement, mais je ne réfléchis pas longtemps, avant de décider de m'en servir. Comme dans tout livre de stratégie, j'avais lu qu'il fallait prendre de la hauteur pour un meilleur champ de vision. Cette corde pourra me permettre de voir si cette technique était réellement la bonne.

Après m'être assurée de sa solidité, et sous les yeux angoissés d'Esmée, je tendis les bras, l'agrippai et levai les jambes d'un seul coup. Mes muscles se crispèrent et je commençai ma montée sur cette corde invisible, essayant de garder mon équilibre avec ce blizzard glacé. Je ne croyais toujours pas à cette chance que nous venions d'avoir. Je tenais actuellement un bonus entre mes mains, c'était certain !

"- Fais gaffe, me cria Esmée."

Je l'entendis malgré le sifflement du vent, mais ne lui répondis pas, préférant me concentrer sur mon ascension. Au fur et à mesure que je montais, l'étendue infiniment blanche s'élargit, et différentes lumières apparurent, comme des lanternes sur un chemin de Noël. Une grande lignée rouge avançait, alors que quelques traces vertes volaient ici et là. En plissant les yeux, je parvins à discerner le drapeau couleur émeraude, à moitié caché dans une sorte de taverne. Pas réellement difficile à trouver, pensai-je...

Plus que satisfaite de cette technique de hauteur, je ne mis pas longtemps à essayer de trouver l'étendard ennemi. Cela dura plusieurs minutes, mais je finis finalement par le trouver et manquai de lâcher la corde quand je le découvris.

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Et voilà, le début d'une nouvelle activité virtuelle ! Elle sera moins longue que la dernière, mais je l'espère, tout aussi bien 😊

A votre avis, où pourrait être ce drapeau ennemi ? 🚩

Tout ça n'est-il pas un peu trop "facile" ? J'ai l'impression que la  chance sourit trop à Jo, cette fois-ci... 😐

Pour plus d'action... votons !! 🌟

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