-2-Ma première victime

Malgré mes yeux perçants, j'aperçois toujours que la silhouette de mon interlocuteur, perchée, dans l'ombre d'un toit, jusqu'à que celui-ci s'avance enfin dans la clarté.

J'ai devant moi un vampire, du moins c'est assez facile de deviner son espèce aux deux canines que j'entrevois dans sa bouche entrouverte. La créature à des yeux d'un bleu troublant. Il vêtu d'une redingote noire et d'une chemise rayée tachée de pourpre. Des cheveux crémeux, cachés sous un haut de forme à l'ancienne mode. Je sens enfin l'odeur de mort émanant du buveur de sang que je n'avais pas perçu auparavant.Camouflée par celle de la fumée, associée à bien d'autres senteurs d'une pestilence équivalente. La créature reprend la parole.

-Quelque chose me dit que vous allez tuer en pleine rue et nous faire repérer encore plus que les vagabonds qui s'amusent à le faire sur le territoire des clans. Eux au moins camouflent leurs morsures. « Quel imbécile vous a transformé pour ensuite vous abandonner ? C'est dangereux, les novices n'ont aucun contrôle sur leur soif ! me dit-il,d'un air vexé

-Je ne pense pas avoir le choix ; je suis assoiffé. Quant à celui qui m'a transformé, je doute qu'il en ait eu l'intention. Il a été interrompu dans son repas.

-C'est insensé ! Les novices sont dangereux sans supervision ! Lors de leur première décennie, ils sont en permanence sous la surveillance de leur créateur ! Quand à occire des humains, cela nous arrive en effet de temps à autres ; il faut bien se nourrir. Mais vous pouvez le faire sans alerter la ville entière et nous exposer. Pour cette fois, je vais vous faire l'honneur de partager avec vous mon repas. Suivez moi !

Et je suis le vampire à travers les ruelles délabrées et pestilentielles, en remontant le col de ma veste pour cacher mes crocs. Nous finissons par arriver dans une sorte de pub en étrangement bonne état pour le secteur. Je lis "Britannia" sur la devanture noire. En rentrant, je me rends compte que les vitres ont une couleur anormale et que la majorité des clients sont des vampires. Les quelques humains encore vivants, présentent de nombreuse morsures. J'emboite le pas immédiatement au vampire aux yeux bleus qui traverse de la curieuse enseigne jusqu'à la ruelle dernière qui pullule de prostitués. Ce dernier attrape par le bras la première qui passe près de lui et semble la subjugué par une sorte d'hypnose. Celle-ci s'arrête immédiatement de crier mais pas de se débattre. Mon guide temporaire retrousse la manche de la belle de nuit et me tend son poignet. Je ne comprends pas tout de suite ce qu'il attend de moi, jusqu'à qu'il m'ordonne.

-Mord ! me dit-il d'une voix enjôleuse.

Je ne me fais pas prier et referme mes crocs acérés sur les veines tentatrices du poignet tendu. La première gorgée fut des plus exquise, la seconde encore mieux. Loin du goût de fer que me présageait l'odeur. On dirait un vin millésimé. J'aperçois à peine l'autre créature mordre la prostituée à la gorge tandis que je bois goulûment. J'ai l'impression que mon corps se renforce. Je me sens comme invincible.

Quelques instant plus tard, j'absorbe les dernière gouttes d'hémoglobine avec un petit grognement frustré et comme ivre, je me laisse retomber le long du mur crasseux le plus proche, le yeux fermés de béatitude. Je me pourlèche les lèvres tachées de rouge. Redescendant peu à peu de cette utopie, je me rends enfin compte de mon acte. Mes seules traces de remords furent la larme de sang solitaire qui s'égara sur ma joue.

Quand mes yeux s'ouvrirent finalement, j'ai devant moi le vampire aux yeux bleus qui se rapproche soudain de moi, son regard plonger dans le mien. Il posa un de ses longs doigts sous mon menton pour m'inciter à relever la tête ; ce que je fis dans le plus grand calme. Il parut surpris à tel point qu'il mis un temps infini à briser le silence en s'exclamant.

-Je ne m'attendais pas à ce que tu sois un traqueur. C'est surprenant d'ailleurs. Quel est ton nom ? Moi, on me surnomme "Sorrow". Je suis un aristocrate. Je vais t'expliquer ce que ça signifie. Retournons à l'intérieur.

-Mon nom est Erwin Clifford.

-Un baron ? Sérieusement ? Je ne sais pas quel traqueur t'a transformé, mais il est fou.

Et je suis Sorrow à l'intérieur. Il s'arrête et prend le cadavre sur ses épaule avant de retourner dans l'étrange pub. Flânant à demi je lui emboite le pas sans un bruit. Il pose le corps sur une pile de dépouille humaine dans l'un des coins de la salle. Les vampires présents, nous regardent étrangement, J'accompagne Sorrow jusqu'à une alcôve où un serveur lui sert un verre d'absinthe puis se tourne vers moi. Je lève la main en signe de négation. Après avoir siroter une longue gorgée du sirupeux verdâtre, le vampire prend enfin la parole.

-Selon la légende, Lilith fut la première d'entre nous. De par sa morsure, elle transforma quatre humains qui deviendront bien plus tard les fondateurs des quatre lignées qui persistent encore de nos jours. Notre ascendance nous procure certaines spécificités. Si tout les vampires ont les yeux rouge quand ils sont en proie à la soif ou à de fortes émotions, la majorité du temps la couleur de nos yeux est l'un des principaux facteurs pour savoir la filiation d'un vampire. La première lignée et la plus prolifique est celle de Tepes ; surnommée "Les Dragons". Leurs yeux sont jaunes et ils possèdent une force bien plus développée que la majorité des vampires. Ce sont d'anciens guerriers avec un certain sens de l'honneur un peu décrépie.
La seconde est celle de Báthory ; surnommé "Les Aristocrates". Lignée à laquelle j'appartiens. En outre du fait d'être reconnaissables par nos yeux bleus, nous possédons un don mental très développé ; tel que le contrôle mental et l'hypnose. Et bien d'autres particularités encore.

La troisième mais également celle à laquelle tu appartiens est celle d'Azzo, surnommé "Les Traqueurs". Bien plus rare que celles que j'ai citées auparavant. , identifiables par leurs yeux argentés ainsi que leurs oreilles légèrement pointues. Leurs sens ; l'odorat, l'ouïe et même la vue sont incroyablement aiguisés mais également leur faculté de pouvoir se déplacer sans un son. Ils sont aussi pourvus d'un instinct de chasseur surdéveloppé. Ce sont de parfaits assassins. Aucune de leur proie ne leur échappe grâce à leur agilité et rapidité sans commune mesure. Cependant, ils sont pour la grande majorité sous les ordres directs du seigneur Azzo et quittent rarement sa forteresse dans les Carpates.

La dernière est celle de Ruthven ; "Les Diurnes". Les seuls vampires à pouvoir résister au soleil. Il ne se mêle pas à nous autres vampires nocturnes et ne respectent aucunes de nos lois. Quand à leur pouvoir, j'en sais rien. Ils se gardent bien de nous le dire, ils sont cachottiers au point que cela en devient humoristique.
Oh, petit oublie, les traqueurs sont les uniques vampires à pouvoir faire poussée à volonté des griffes particulièrement dangereuses.

Je réfléchis, une main passant dans mes cheveux décoiffée, en essayant de les arranger un minimum. Je touche par inadvertance mes oreilles ; oui en effet elles semblent bien plus pointues qu'avant. Je finis par rétorquer.

-Et, sauf votre respect, je vais devenir quoi moi ?

-Selon nos lois, si un novice est abandonné par son créateur, il est sous la tutelle du chef de sa ligné, donc Azzo. Tu as de la chance, ton seigneur, comme tous les chefs de lignée sont censés passer pour un congrès la semaine prochaine. Tu lui seras présenté à ce moment là. En attendant, tu seras avec moi. Après tout, tu es un Lord, tu dois donc avoir quelques manières ?! (car c'est une question rhétorique) Cela aurait pu être pire. Bon, suis moi.Je tiens pas à être coincé ici par l'aube.

Et je suis de nouveau la créature qui décide cette fois de passer par les toits londoniens. Le Big ben n'a jamais été aussi beau qu'en ce moment. Alors que je talonne l'aristocrate qui saute des toits dans la plus grande facilité. Tandis que lui semble légèrement se faire envahir par la complexité du parcours, moi je trouve des prises où il en existe aucune ; enfonçant parfois mes griffes dans le crépis pour escalader les endroit les plus improbables. Mon visage arbore un sourire heureux tandis que j'attends le vampire que j'ai distancé à mon insu. Mon regard se perd dans le paysage urbain des plus magnifiques.

Une sorte d'excitation ou d'adrénaline cours dans mes veines. Décidément la morsure est peut être la plus belle chose qui me soit arrivée. Vu que même sans poser la question, je sens que les moindres traces de mon cancer ont disparus. Je décide soudain qu'à la première occasion, je me lancerais sur la piste de celui qui m'a transformé et sauvée la vie. Je le jure sur ce qui me reste d'humain.

J'entends subitement un appel venir de ma droite, la créature aux yeux bleu m'a enfin rattraper. Quelques minutes plus tard, nous arrivons dans un manoir sublime, à la lisière d'une sombre forêt. Les murs de la bâtisse sont en pierre d'un noir d'encre à l'opposé des briques rouges communes dans la capitale anglaise. Les fenêtres sont hautes et ouvragées et le toit pentu et tortueux et arbore de nombreuse statues et gargouilles. Les gardes nous ouvrent en grand les portes ornée d'étonnante gravures, nous entrons dans la sublime demeure. Ici le velours est maître, le rouge et le noir se marient dans une harmonie des plus exquises. Malgré l'odeur omniprésente de sang dans ces lieux, je suis admiratif. Mon propre manoir à l'air d'un pitoyable jouet pour enfant à côté celui-ci.

Nous arrivons dans une chambre tout aussi grandiose que le reste du château, pourvu d'un colossal lit à baldaquin aux rideaux de soie écarlate. Sans même regarder le reste de la pièce, je m'écroule dans les draps noirs et soyeux. Étrangement, le lever du soleil m'a assommé. Le sommeil ne tarde pas à me happer.

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