Rendez-vous à la bande d'arrêt d'urgence
S'arrêtant sur une idée, Elodie demanda une nouvelle courte pause dans la conversation. L'autre en profita pour noter encore des informations. La copilote bloqua de nouveau le micro avec sa main.
-Amélie, arrête-toi et appelle les flics.
Cette dernière crut que son amie lui demandait d'appeler et de tout avouer. Elle refusa en secouant la tête. L'homme étrange se remit à parler. Elodie frémit, et reprit, toujours d'une voix neutre, la suite de la conversation. L'homme, au bout du fil, s' y connaissait, en cadavres frais et en décomposition. Bien qu'intéressée, Elodie se posait bien des questions sur le connaisseur. Au bout d'un moment, elle n'y tint plus.
-Comment pouvez-vous savoir tout ça, monsieur ?
-Comme vous, mademoiselle. Internet.
-Avec autant de détails ?
-J'ai de bonnes sources.
-Et tous ces meurtres, un peu partout en Europe ?
-Oh, ça...
Il réfléchit.
-J'ai beaucoup voyagé dernièrement, et vu les scènes de crime.
-J'hésite à dire que vous êtes l'homme le plus chanceux, pour voyager autant et échapper au meurtrier, ou le plus malchanceux pour voir autant de scènes de crimes.
Amélie remarqua, enfin, que l'autre transpirait abondamment. D'abord elles tuaient un type, maintenant une sorte de maniaque tenait la jambe à Elodie... Bon sang. Elodie lui demanda le chargeur.
Elodie demanda ensuite quel métier faisait le mystérieux interlocuteur. Il lui demanda à quoi elle pensait.
-Pour en savoir autant, vous devez être policier, non ?
-Pas vraiment.
-Alors vous êtes le tueur.
-Qu'est-ce qui vous fait penser ça, mademoiselle ?
-Vous savez beaucoup de choses, sur ces meurtres en Europe. Donc je suppose que vous travaillez dessus, d'une façon ou d'une autre.
-Le raisonnement peut se tenir.
Les deux poursuivirent sur les habitudes qui pouvaient mener à la mort. La sédentarité, les carences, les déséquilibres alimentaires plus ou moins sévères. Leurs conséquences sur l'organisme. Certaines informations que donnait Elodie retenaient l'attention de l'autre, qui prenait le temps de tout écrire. Malgré l'étrangeté de la situation, elle aimait partager ses connaissances. La façon dont l'eau pouvait tuer, les effets de sept litres de bière sur le corps humain. Après un nouveau blanc, l'inconnu proposa une rencontre. Il savait sur quelle autoroute se trouvait la jeune femme, et se situait assez près. L'annonce glaça Elodie. Il lui proposa une première rencontre en bande d'arrêt d'urgence, avant de partager un café à l'aire de repos la plus proche. Après tout, ils avaient un certain nombre de connaissances à échanger.
-Pourquoi ne pas se rencontrer directement à l'ère de repos ? s'enquit Elodie.
Elle jeta un regard noir à Amélie. Si elle avait appelé les flics tout de suite, elles seraient certainement entourées de professionnels, à présent. Plutôt que seules aux prises avec ce type, qui avait localisé le téléphone. Avec la connexion internet, à tous les coups.
-Je préfère ne pas risquer de vous rater, mademoiselle.
Le double sens la terrifia. Il devenait impératif d'appeler les flics.
-Malgré le fait que vous ayez géolocalisé l'appel ?
-Cet outil reste imprécis. Arrêtez-vous donc, je vous rejoins dans une vingtaine de minutes.
Il ne raccrocha pas pour autant. Elodie imposa à la conductrice de s'arrêter, là, maintenant, sur la bande d'arrêt d'urgence. Et surtout, d'appeler les flics. Ça devenait urgent.
-Pourquoi on doit s'arrêter, maintenant ? se hérissa Amélie.
-Parce qu'il nous a géolocalisées, que je ne veux pas savoir ce qui se passerait si on désobéissait, et que dans vingt minutes il arrive. Et j'aimerais que les flics arrivent avant lui.
-Tu... veux me dénoncer ?
-Te dénoncer, non. Lui mettre ça sur le dos, oui. Donc, on s'arrête. On nettoie la voiture, en disant qu'il s'agissait d'un hérisson. Et demande aux flics d'arriver en civils. Tu vois le topo ?
-Ca marchera pas... gémit Amélie, en s'arrêtant malgré tout.
Elle s'inquiétait de la suite des événements. Un dingue, les flics, Elodie qui suivait une logique étrange... Enfin, Amélie ne pensait pas pouvoir appeler ça de la logique. De la folie, tout simplement. Comment s'étaient-elles fourrées dans cette galère ?
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