7

Ça y est, la fête est finie. Je me retrouve seule, sous la pluie devant le feu éteint. Tous les invités sont partis et je me sens terriblement seule. Je m'assois sur le même rondin que tout à l'heure, contemplant, le douloureux paysage qui me fait face. Les immenses arbres bien verts me font sentir minuscule. La rivière parait bien plus calme que ne l'est mon esprit.

Le plus désolant est la plaine d'herbe et de pâquerettes, qui me fait remonter tant de souvenirs de mes moments passés avec ma sœur :

— Tu sais comment j'imagine le monde parfait ?

— Non.

Ma sœur arracha quelques fleurs, et les plaça dans mes tresses. Le soleil illuminait nos visages de ce bel après-midi d'été. Le ruissellement discret m'apaisait, je me sentais légère et heureuse. Eléonore aussi avait tressé ses cheveux blonds, mais des mèches s'échappaient. Son visage était déjà bronzé par ce début d'été.

— Un monde où on est tous heureux, tous intelligents, personne ne juge personne et chacun est libre de faire ce qu'il veut. Le rêve, non ?

Elle s'allongea dans l'herbe, les mains sous la tête, de manière à pouvoir observer les nuages.

— Oui, c'est le rêve. Mais si on était tous intelligents, on n'aurait rien à apprendre et s'ennuierait de notre vie.

— Mouais. T'es lourde, tu ne pourrais pas juste acquiescer et te taire, comme toutes les petites sœurs ? dit-elle en riant.

— J'te rappelles que t'as que seize ans, et moi quatorze, je te rattrape, attention !

— T'as trop cru.

On ria, pour la vie qui nous attendait devant nous.

— Des fois tu ne préfèrerais pas redevenir enfant ? ai-je demandé subitement.

— Crois-moi, Ly, je suis bien contente d'être ado. Libre de tout. Quand on était enfant, on devait demander trois semaines à l'avance pour être sûr qu'on pouvait aller à l'anniversaire d'une amie. Maintenant, on peut aller où on veut, quand on veut. Et c'est génial

— Tu ne penses pas plutôt, que c'est à cause de papa et maman ? Je veux dire, dans le sens qu'ils nous délaissent un peu.

— Non, ils voient qu'on grandi et nous laissent plus de libertés. C'est normal.

— Mouais m'enfin bon, ça peut être dangereux parfois de sortir seule. Je préfère largement lire un bon livre tranquillement.

Elle sourit, haussant les épaules :

— Ça c'est juste toi. Sans cette liberté, je n'aurais pas pu me rapprocher de Raphaël, par exemple.

Une pointe de jalousie traversa mon esprit, que je chassai sur le coup, regrettant immédiatement d'être jalouse de ma sœur. Je demandai :

— Tu peux me raconter comment ça s'est passé entre vous ?

Elle ferma les yeux, laissant apparaître un sourire niais sur son visage.

— On était dans la même classe en seconde. Ça date, ouais. Quand je pense que je vais entrer en terminale là... Bref. Il était venu me parler en premier, il me demandait de lui prêter ma blouse quand il avait SVT et pas moi. Je le trouvais vraiment beau, ses doux yeux bleus, ses cheveux blonds ébouriffés. Il me faisait rire, même s'il avait l'air plutôt calme et discret. Puis un jour, il avait laissé son numéro de téléphone dans ma blouse...

Je pouffai de rire, elle ouvrit les yeux, surprise de ma réaction.

— Oui, c'est ridicule ! Mais j'avais trouvé ça mignon à l'époque. Après, on a parlé par message, souvent. Puis on commençait à se voir seuls, au lycée, et en dehors.

— Vous êtes très différents, je trouve.

— C'est vrai. Je suis plutôt quelqu'un qui fonce, alors qu'il est calme et réfléchi. Mais justement, il me complète. Puis il est adorable et attentionné. Je l'aime vraiment. Les contraires s'attirent.

Je reviens à la réalité lorsque j'entends un orage gronder.

Eléonore et Raphaël utilisaient les mêmes expressions. Je frissonne et décide finalement de rentrer à la maison, les cheveux trempés, pour prendre une douche.

Bạn đang đọc truyện trên: AzTruyen.Top