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En rentrant à la maison, mes parents, sur le canapé, restent bouche bée en me voyant arriver. Moi, mes yeux gonflés, les joues pleines de larmes, les cheveux ébouriffés, les ongles rongés. J'ai l'air de quelqu'un qui vient de se faire poursuivre par un ours.
Ma mère et mon père se précipitent vers moi, prêts à m'assaillir de questions.
— Lyane ? Que s'est-il passé ?
— C'est... Eléonore...
— Quoi ? Qu'est-ce qu'elle a ? me demandent-t-ils, sans comprendre où je veux en venir.
— Elle est morte, putain. Morte. Vous n'avez rien fait. Vous vous en foutiez, « la police s'en occupe, pense à autre chose ». Bah oui, elle s'en est très bien occupée, vous voyez ?!
Ma mère porte ses mains à sa bouche, et mon père essaie de me rattraper par le bras pendant que je m'en vais en courant dans ma chambre. Je ferme la porte, et m'assois contre celle-ci, le cœur brisé en morceaux. J'ouvre rageusement l'enveloppe qui contient la lettre d'Eléonore, sentant d'autres larmes monter. Le cœur battant, je commence à lire :
« Ma très chère sœur, ma belle Lyane.
Si tu lis cette lettre actuellement, c'est que tu as rencontré l'affreux Amibal, et c'est aussi que je ne suis plus de ce monde. Mais crois-moi, j'emporte avec moi tous les plus beaux souvenirs, tous les beaux moments que nous avons passés ensemble. Je pense que je te dois des explications. Amibal était mon dealer. Et oui, je me droguais, mais à petite dose. C'était un peu mon échappatoire. Je haïssais ma vie, être considérée simplement comme une fille superficielle, avoir des amis hypocrites, plus rien n'allait. C'était la solution, qui me faisait être heureuse le temps d'un instant. Ly, ne fais jamais ça, ne sois jamais comme moi. Si tu savais comme j'ai honte. J'ai arrêté de payer, parce que je n'avais plus d'argent tout simplement, ça devenait de plus en plus compliqué pour moi. Il m'a enlevée. Il m'a prise en otage en croyant que tu seras capable de trouver cinq mille euros. Mais quelle blague, c'est incroyable. Au début je le trouvais naïf, de croire qu'une ado de seize ans pourrait trouver autant d'argent en peu de temps. Mais si tu en es là, c'est qu'il a réussi, que tu as réussi. Bravo, félicitations. Ly, si tu savais comment j'espérais que tu ne trouves pas cet argent, que tu me laisse pourrir dans cet endroit minable, c'était ce que je méritais au fond. J'étais à ma place. Après toutes les conneries que j'ai faites, j'espère que j'irais en enfer, et toi au paradis. Je ne mérite pas la vie. C'est pour ça que je suis partie. J'ai longuement menacé Amibal de me suicider, je lui disais « Je meurs, et tu les laisse en paix. ». Il ne voulait rien entendre, évidemment, il voulait l'argent, pas ma vie. Je crois que je suis devenue folle, à ne pas voir la lumière du jour tout ce temps, à manger la même chose, à n'avoir personne d'autre à qui parler qu'un vieux rat. J'étais devenue extérieurement ce que j'étais à l'intérieur. Folle, hideuse, seule. Peut-être que la mort n'est pas une bonne idée, peut-être que je devrais vous laisser la peine de me sauver. Non, je ne peux pas. Je ne mérite ni ton aide, ni ton amour, Lyane. Je ne mérite rien d'autre que la souffrance éternelle. Tu dois te demander pourquoi je répète ça sans cesse. (Mon dieu ce que j'aimerais pouvoir te dire tout ça en face). C'est à cause de moi que les parents se détestent, j'attisais la haine, c'est à cause de moi qu'un de mes amis d'enfance est mort dans un accident de voiture, c'est moi qui l'avais poussé à prendre la voiture, c'est à cause de moi si tu ne sais pas vraiment qui tu es. Tout ce temps où je te faisais croire que j'étais parfaite, où je te foutais des complexes. Putain, tu dois me détester, c'était une fausse image de moi. Je suis si laide, si horrible à l'intérieur. Je me montrais toujours sous mon meilleur jour, même avec toi, peut-être que je voulais juste me sentir supérieure, pour une fois. J'en suis désolée. Parce qu'au fond, je me sens si inférieure à tout le monde, j'ai l'impression de juste être fausse.
Je suis désolée de partir comme ça, sans un dernier au revoir, sans un dernier je t'aime, sans rien du tout. Mais voilà, tu es ma petite sœur, et même si je suis brisée à l'intérieur et que je t'ai montré une fausse image de moi, j'espère que tu me pardonneras. Je veux que tu sois heureuse, et que tu t'aimes comme tu es. Tu es la personne que j'aimais le plus au monde, merci pour tout. Ne refais pas les mêmes erreurs que moi, si tu savais comme j'ai honte.
I love you, goodbye. »
Je sens mon cœur se briser, se déchirer, exploser en mille morceaux retombant sur le sol, pendant que je lis ces lignes. Mon âme quitte mon corps, s'envole loin de moi, loin de tout ça, loin de ces horreurs que je vis. Loin de la douloureuse absence de ma sœur qui me ronge depuis deux mois. Je n'ai même plus de larmes dans mon corps pour pleurer, plus de force pour me porter, je me sens vide. Plus aucun rêve, plus un seul espoir, plus rien ne me donne la force de vivre. Comment peut-elle se trouver affreuse ? Même si elle a fait des erreurs, même si elle a des défauts qu'elle cache, même si elle m'a menti, je suis prête à tout pour la pardonner, et je l'aimerai toujours.
Je me lève avec difficulté, me couche sur mon lit, et déclare à voix haute :
— C'est bon, tout ça n'était qu'un rêve, je vais dormir, me réveiller, et tout redeviendra comme avant. Hein, Eléonore ? Merci pour la lettre, ça me donne l'impression de te parler une dernière fois. Et saches que je t'aime malgré tout. A demain...
Comme si elle était là, près de moi, je peux l'entendre murmurer qu'elle m'aime. Elle est là, j'en suis sûre, je sens sa présence. Elle m'avait manqué.
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Salut... Cette partie, la lettre d'Eléonore, ça me rend trop triste.
Je voulais savoir, comment vous voyiez Eléonore avant, et maintenant ? Est-ce que vous, vous la pardonneriez ?
Merci encore de lire et je suis vraiment désolées si y'a des maladresses, j'ai un peu de mal à écrire sur ce sujet ^^
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