15
— Oh mon dieu, Lyane ! T'as un date, tu t'en rends compte ?? s'exclame Lucie, assise en tailleurs sur le tapis de ma chambre.
— Du calme, on va juste parler entre adultes sérieux.
— Mais c'est ultra romantique ! Vous deux, scrutant l'horizon, une douce brise balaye vos cheveux, il te sourit adorablement et vous vous regardez longuement dans les yeux, sous le soleil couchant qui est lui-même émerveillé par la beauté de la scène.
— Mais n'importe quoi ! dis-je en roulant des yeux. L'un de nous tombera à l'eau et se fera bouffer par les poissons, l'autre en voulant aider, tombera aussi et retournera la barque, et là, tous morts. Puis comment j'ai pu accepter ? Je peux pas faire confiance à un inconnu !
— Dans la vie, il faut savoir prendre des risques pour avancer... Plus sérieusement, c'est le meilleur ami de Raphaël, tu peux lui faire confiance, je pense. Puis il ne va pas te tuer.
— Qu'est-ce que j'en sais ?
— Il est beau ?
— Ben... Il a un certain charme...
Lucie attrape un coussin en ouvrant grand la bouche, les yeux pleins d'étoiles, elle me le lance en criant :
— Menteuse ! Tu rougis, il est magnifique mais tu ne veux pas l'avouer. Lyane est amoureuse, Lyane est amoureuse !
— Lucie, arrête ! Je ne suis pas amoureuse, ce gars est un gros lourd, il est chiant ! Il n'a pas arrêté de faire l'idiot, comment je pourrais aimer quelqu'un comme lui ? Je suis sûre que c'est le genre de gars qui veut trop faire l'intéressant. Je n'en ai rien à faire de lui. Tout ce que je veux c'est retrouver ma sœur, pas jouer aux tourtereaux avec un boulet prétentieux.
— T'y es allée un peu fort, là...
Je me lève, faisant quelques pas précipités dans ma chambre.
— Je sais, Lucie, mais tu m'énerves. Ma sœur a disparu y'a un mois et quelques semaines, c'est... peut-être trop tard pour la retrouver, je ne veux pas perdre mon temps avec un garçon, surtout s'il n'a rien d'intéressant à m'apporter.
Je me pose devant la fenêtre, des yeux brillants de nostalgie. La nuit enveloppe le jour de sa robe sombre et scintillante d'astres merveilleux. Si Eléonore n'est plus de ce monde, je veux qu'elle soit au Paradis, entourée d'anges adorables qui savent la rendre heureuse.
Un jour, ma sœur et moi n'avions pas eu de vraie discussion depuis longtemps, elle avait toujours été ma confidente, et l'inverse. C'était quelques semaines après sa rentrée en seconde, nous nous étions assises par terre, nos pieds nus dans l'eau de la rivière, au bout du jardin. Le soleil était bas dans le ciel, une agréable brise animait l'eau, qui reflétait les quelques arbres d'en face. J'avais demandé :
— C'est comment le lycée ?
— Bien, j'adore... J'ai fait de super connaissances, et... des gens me détestent, elle haussa les épaules, visiblement habituée pendant que je faisais une moue triste.
— Ils te détestent ? ai-je demandé en fronçant les sourcils. Pourquoi ?
— Je leur ai mal parlé. Mais comment elles me regardent aussi, elles se prennent trop pour des reines, alors je ne vais pas être gentille avec elles, faut pas croire.
— Elles sont jalouses. Parce que t'es belle et intelligente, elles veulent sûrement être mieux que toi.
— Mouais. Mais du coup je me suis mis un tas de filles à dos, ce n'est peut-être pas bien d'être joli, les gens nous pensent trop superficiels.
J'ai regardé ses longs cheveux de blé, lisses mais assez volumineux pour être magnifiques. Ses yeux bruns prenaient des couleurs plus claires sous le soleil couchant. Sa peau déjà bronzée captait plus facilement les rayons du soleil que moi.
Il m'arrivait d'être jalouse d'elle, mais jamais je n'ai pensé qu'elle était superficielle. Elle est si intelligente et maligne. J'aimerais pouvoir faire taire ces gens, j'aimerais être courageuse.
— Eléonore ?
— Oui ? répondit-elle, en jouant avec ma chevelure bouclée.
— Ces gens, est-ce qu'ils t'embêtent ou te détestent-t-ils juste ?
— Ils ne font rien, tu sais, ils ont trop peur de moi. Ils savent bien que je sais me défendre. J'ai juste à les regarder dans les yeux qu'ils les baissent. Ils me détestent en secret, mais je le sais. Ne t'en fais pas pour moi, Ly.
J'ai baissé les yeux sur nos pieds dans l'eau, elle était si gracieuse, contrairement à moi.
— Lyane ? Tu vas bien ?
Je détache mes yeux de la fenêtre, entendant Lucie me sortir de mes pensées.
— Oui, j'ai juste repensé à un truc...
— Ta sœur ?
Elle me rejoint près de la fenêtre, prends ma main dans la sienne.
— Ça va aller, Lyane, déclare-t-elle, la voix douce. Nous sommes la meilleure équipe, on trouvera toutes les réponses à nos questions. On trouvera cet argent, et on sauvera ta sœur. Compte sur nous.
— Merci, Lucie. T'es la meilleure.
— T'inquiète. Et si tu as besoin de conseil en amour, je suis là.
Elle agrémente sa phrase d'un clin d'œil, je lève les yeux au ciel et souris à nouveau, en songeant que peut-être, quelqu'un pourrait s'intéresser à moi.
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