Pdv extérieur

Guidés par le guerrier masqué, la générale Wayshley, les troopers et les soldats Geonosiens atteignirent bientôt la salle de commandement des mines.

Plus le groupe s'enfonçait dans les galeries et plus Kh'iarah sentait les vagues de force autour d'elle trembler. L'aura n'était pas malsaine, toutefois l'officière ne se sentait pas en sécurité. L'impalpable connexion qui reliait les soldats Geonosiens entre eux était tout aussi étrange. La générale ne savait cependant pas s'il s'agissait d'un lien unique qu'entretenait ce peuple avec la Force, ou bien si le trouble concernait leurs intentions.

En entrant dans la salle de commandant vide, Kh'iarah fut ensuite étonnée de sa taille. Large, elle finissait sur une grande verrière qui donnait sur le cœur des mines, toutes aussi vides. Les murs de la pièce, faits de terre cuite et de sable, étaient décorés de nombreuses consoles et de siège tandis qu'au milieu se trouvait une table à lecteur holographique. La générale songea immédiatement que cette pièce ressemblait à un véritable QG. Cela lui rappelait, à quelques dimensions près, la salle de commandement du Raddus, l'ancien croiseur amiral de la Résistance.

Kh'iarah voulut se tourner vers TZ-9806 pour lui demander de contacter Hux et lui transmettre discrètement ses observations, cependant Boden la coupa et l'invita à venir lire les informations de l'une des consoles. La Death Trooper sentit sans peine la frustration de sa supérieure et comprit que la situation risquait de leur devenir de plus en plus hostile.

Elle serra davantage son fusil blaster contre son armure et ne quitta pas la générale et la garde des yeux. TZ-9806 avait beau vouloir se concentrer sur les moindres faits et gestes des Geonosiens, elle ne pouvait empêcher ses pensées de divaguer vers des hypothèses pessimistes ou vers des prières, adressées à n'importe quel dieu qui voudrait bien l'entendre. Malgré toutes les simulations de combat qu'elle avait connues et les missions auxquelles elle avait pris part, la trooper était terrifiée par l'ambiance hypocrite et lourde de celle-ci. Le confort de son dortoir, des salles d'entraînements et des cantines du Premier Ordre lui manquaient atrocement.

Sous son regard perçant, Wayshley appuyait sur les boutons de la console désignée par Boden. La générale ne mit alors qu'un court instant avant de se rendre compte que tout était en ordre. Aucun radar ou aucune alarme ne semblait avoir détecté d'anomalie. Kh'iarah en avertit Boden puis jeta un rapide coup d'œil d'avertissement à TZ-9806. Cette dernière se mit immédiatement en alerte et rapprocha son doigt de la détente de son blaster, imitée de ses coéquipiers. Eux aussi sentaient l'inquiétude grandissante de leur générale, ils se préparèrent donc à agir en cas de besoin. Ils savaient à quel point la situation pouvait vite dégénérer.

- Peut-être les résistants sont-ils simplement partis... suggéra le garde d'une voix lasse.

- Et vous aviez besoin du Premier Ordre pour constater cela ?!

La réponse de la générale s'était faite bien plus ferme. Kh'iarah était aussi méfiante qu'agacée. Elle songea que si Hux avait été à sa place, les Geonosiens n'auraient pu se jouer du Premier Ordre aussi facilement. Le Suprême Leader les aurait remis à leur place bien plus tôt.

Le garde marmonna qu'il ne faisait que suivre les ordres du Gouverneur, mais Kh'iarah l'ignora et se dirigea vers la baie vitrée au bout de la pièce pour prendre le temps d'observer le croisement de plusieurs galeries en contre-bas. Une forme attira rapidement son attention et l'officière eut alors l'impression de discerner dans l'ombre une navette de transport ainsi qu'un airspeeder T-47, tels que ceux utilisés par les rebelles lors de la Guerre Civile et que la Résistance avait réquisitionnés par la suite. La générale n'avait cependant pas vu les radars afficher la moindre présence ennemie. Rien n'avait été détecté en tant que suspect.

Tout se bousculait dans sa tête tandis qu'elle commençait enfin à comprendre le sens de tout cela. Les résistants étaient peut-être bien là, finalement. Mais en tant qu'alliés des Geonosiens.

A peine eut-elle le temps de penser à se retourner qu'un métal froid se posa sur sa tempe.

- Posez-tous vos armes... grogna Vassili Boden.

Lentement, les mains en l'air en signe de reddition, Kh'iarah se retourna face à la pièce. Le garde était celui qui la visait, tandis que les Geonosiens s'occupaient des trois Death troopers. Le regard de la générale croisa un rapide instant celui de TZ-9806, et aussitôt la trooper entreprit d'éviter le canon de l'arme qui la visait. Habilement, elle réussit à tuer de son blaster son détenteur puis atteignit un autre Geonosien, mais ce fut sa dernière action avant d'être criblée de balles. Son corps s'écroula mollement au sol, rapidement rejoint des deux autres troopers. Seule resta Kh'iarah.

L'officière avait bien entendu tenté de se saisir des blasters à sa ceinture en même temps que les autres, toutefois Boden s'y était attendu et avait envoyé Wayshley au sol d'un coup de crosse.

Il se pencha ensuite vers elle pour la tirer par le bras et la faire remettre debout.

- Vous ne savez pas dans quoi vous venez de vous mettre. Vous commettez une énorme erreur, le menaça Wayshley tandis que le garde saisissait ses blasters.

- Possible. En attendant, nous ne venons pas moins de capturer l'un des membres les plus importants du Premier Ordre.

Kh'iarah l'observa avec rage et se demanda ce qu'elle pouvait bien faire désormais. Elle n'osait même pas tourner ses yeux vers les corps de ses trois soldats.

- Pensez-vous vraiment que Geonosis ou même la Résistance font le poids contre le Premier Ordre ? demanda-t-elle.

Boden la dévisagea simplement. Il sentait malgré son ton voulu confiant à quel point la générale était désespérée.

- Le Suprême Leader est l'un des centres de gravité du Premier Ordre. Vous, vous êtes celui de Hux.

Le garde marqua alors une légère pause avant de reprendre d'une voix calme :

- Il ne pourra gérer votre disparition et coordonner les batailles en même temps. S'il vient vous chercher, il sera trop fier pour léguer son commandement et le Premier Ordre commencera à s'effondrer. S'il ne fait rien, il sera rongé de remords et ne tardera pas à lui-même chuter.

Aux yeux inquiets qu'elle fit, Boden comprit que Kh'iarah ne contrôlait décidément plus rien. Elle le réalisait elle-même.

L'officière tremblait, davantage de rage que de peur. Elle sentait que cette histoire était en train de très mal se terminer et regrettait profondément de ne pas avoir écouté Hux.

- Il avait si bien tenu jusqu'à maintenant... ajouta Vassili Boden d'un air atonique. Dommage qu'il se soit finalement attaché à vous.

Il se détourna alors de la générale et saisit le comlink que l'un de ses soldats venait lui tendre.

- Vous pouvez venir, elle est là, dit-il simplement avant de couper la connexion.

Fronçant les sourcils, Kh'iarah se retourna vers la porte de la salle des commandes. La personne avec qui communiquait Boden entra, et les yeux de la générale s'écarquillèrent immédiatement de surprise. Non pas du fait de voir un résistant ici, mais de le voir lui.

- Bonjour Kh'iarah, lui dit le nouveau venu.

Sa voix paraissait joyeuse et contrastait avec son visage fermé ainsi que les cernes qu'il avait sous les yeux. Cet homme autrefois enjoué semblait avoir grandement vieilli, c'était tout juste si Kh'iarah avait l'impression de se trouver face à la même personne. Sans doute les responsabilités de leader rebelle... pensa-t-elle.

Le résistant s'avança vers elle, la dévisageant aussi. Wayshley devina qu'il pensait plus ou moins la même chose d'elle. La courte époque où elle avait été dans la Résistance leur paraissait très lointaine, comme un vieux rêve. Sa réalité était désormais les croiseurs du Premier Ordre, les réunions de commandement, les rapports, les entraînements, les missions, Hux. Kh'iarah s'en était servi pour complétement oublier la Résistance et l'usine de Corellia.

Revoir un camarade de ce temps la bouleversait donc. D'autant plus que la situation n'était plus à l'avantage du Premier Ordre.

- Poe... souffla-t-elle inconsciemment.

Le résistant ne la lâcha pas du regard et fit un signe de mains aux soldats Geonosiens. Ils baissèrent alors leurs armes puis sortirent de la pièce, laissant leur collaborateur parler seul à seul avec la prisonnière. Le garde masqué attacha cependant les mains de l'officière dans son dos avant de les laisser à son tour.

- Te voilà devenue générale du Premier Ordre... commença Dameron lorsqu'ils furent tous sortis pour de bon. Je n'aurais jamais pensé ça de toi, dire que la moindre idée de combat te terrifiait lorsque la Résistance t'a recueillie...

Kh'iarah tâcha d'ignorer le mal-être qui se mit à envelopper son cœur. Elle eut beau aussi essayer de cacher sa culpabilité, elle ne put malgré tout s'empêcher de demander :

- Comment vont Kaydel et Tallie ?

Dameron la regarda droit dans les yeux quelques secondes avant de lâcher :

- Mortes. Bombardement dans un hangar pour Tallie. Quant à Kaydel, c'était il y a quelques jours ; lors de la contre-attaque sur Coruscant.

Wayshley ferma les yeux un instant. Elle aurait finalement voulu ne jamais savoir, ou ne serait-ce que pouvoir chasser le souvenir de ses deux amies, toutefois elle ne pouvait nier toujours ressentir de l'affection pour elles. La nouvelle de leurs morts l'attristait bien plus qu'elle n'aurait pu l'imaginer.

Elle refusait cependant de se laisser aller à l'idée que tout cela avait été une erreur, qu'elle n'aurait jamais dû faire confiance à un meurtrier et le suivre, en abandonnant ce qui se rapprochait le plus de ses valeurs.

L'ancien pilote résistant dû percevoir son trouble car il rajouta :

- Je ne te pardonnerai jamais ce que tu as fait, mais tu peux toujours tenter de te racheter auprès des autres. Peut-être qu'en collaborant avec nous tu auras le droit à une peine aménagée.

La proposition flotta le temps de très courtes secondes dans l'esprit de l'officière. Puis, elle se rappela les raisons qui l'avaient guidées autrefois et elle n'eut plus de doutes.

Peut-être se berçait-elle d'illusions, mais elle aimait Armitage et ne voulait être ailleurs qu'avec lui. Son rêve était de voir ceux de Hux se réaliser. Elle avait juré de rester avec lui jusqu'à la fin et ne reviendrait pas sur sa parole. Kh'iarah continuerait jusqu'à son dernier souffle et ne lâcherait rien tant qu'il ne serait pas enfin totalement apaisé et vengé. Elle savait que la vengeance ne le mènerait à rien, l'officière avait déjà pensé à l'en dissuader, mais rien ne le ferait changer d'avis. C'était pour cela qu'elle le suivrait, l'aiderait à détruire la Résistance et à montrer aux autres sa vraie valeur. Il était pour elle tout sauf un cinglé, arrogant, prétentieux et envieux.

Kh'iarah savait que sa vie avait été compliquée et était sans doute ce qui avait contribué à faire de lui quelqu'un de parfois mauvais, mais c'était aussi ce qui lui donnait envie de l'aider à devenir meilleur.

Wayshley hocha donc négativement la tête, puis accrocha le regard de Dameron pour lui dire d'une voix étonnement calme :

- Je me fiche dans quel camp je suis et qui j'affronte, je veux juste être avec Hux alors ce n'est pas parce que tu essayes de me faire culpabiliser que je vais abandonner ce en quoi je crois.

- Il t'a rendu aveugle... T'es devenue le pantin d'un criminel, Kh'iarah. Ce n'est pas parce que Hux est possiblement un bon compagnon qu'il n'est pas aussi l'être le plus abject de cette galaxie.

- Je t'assure que tu te trompes.

L'officière marqua une pause avant d'ajouter :

- Quand bien même tu aurais raison, je me sens avec lui comme je ne me suis jamais sentie avec personne et, pour cela, je lui donnerai ma vie. Il n'y a que lui pour me rendre heureuse et je ferais tout pour qu'il le soit à son tour.

Dameron la regarda droit dans les yeux et se répéta qu'elle devait être folle. Complètement tarée.

Néanmoins, intérieurement, il pouvait assez bien comprendre de quoi la générale Wayshley parlait. Il n'aurait simplement pas pu imaginer qu'une personne comme Hux puisse être ainsi aimé. L'intensité des sentiments de Kh'iarah le dépassait.

« On ne gagnera pas la guerre en pourchassant ceux qu'on déteste mais en protégeant ceux qu'on aime. » Le résistant se souvenait de cette phrase ; son ami Finn avait raconté que, lors de la bataille de Crait, Rose lui avait dit ces mots avant de l'embrasser. Le pilote soupira, se disant que cette fois cela engendrerait plutôt la chute du Suprême Leader Hux.

Poe appela Vassili Boden avant de se tourner vers l'officière d'un air sombre.

- Si tu as raison et que tu es aussi importante à ses yeux que lui aux tiens, la guerre sera bientôt finie. Et vous aurez tout perdu.

*** ***