Cassette 3 - Face B

C'était un soir comme un autre dans cette grande entreprise vide pour Lourdes. Tout le monde était déjà rentré chez eux tandis qu'elle en profita pour rattraper un peu de retard, car les cours d'art avaient été annulés. Lourdes se sentait terriblement seule, mais avec une montagne de boulot à faire avant demain.

Tout doit toujours être fait avant demain de toute manière...

Complètement dans ses pensées elle sursauta lorsque quelqu'un frappa à sa porte la sortant immédiatement de ses rêveries. Elle espérait que ce soit Riley, car il devait effectivement rentrer aujourd'hui, ça faisait deux semaines qu'il était parti en voyage d'affaires, au fin fond du monde. Hélas, Lourdes n'avait reçu que des mails formels, car son départ s'était fait dans de très mauvaises conditions à cause d'une dispute qui les avait divisés.

— Entrez !

— Salut Lourdes, j'espérais te voir là. Remarque c'est rare de ne pas te voir là, en fin de soirée. Ça te dit qu'on aille boire un verre ? lui proposa un de ses collègues, gêné en triturant ses lunettes.

Elle lui sourit sachant qu'il allait falloir lui dire quelque chose de pas vraiment agréable à entendre. Lourdes se leva pour lui faire face en s'asseyant légèrement sur la tranche de son bureau.

— Écoute Stan, la dernière fois, nous deux... Ça n'aurait pas dû se produire...

Elle lui prit le bras espérant qu'il la regarde dans les yeux, mais Stan fuit son regard silencieusement.

— Pour être absolument honnête avec toi, j'ai des sentiments pour quelqu'un d'autre et je n'aurais jamais dû te donner de faux espoirs... Sache que je ne t'ai pas mis dans une position délicate. Je t'ai dit la vérité ce soir-là, lui et moi nous étions quittés et j'étais totalement libre. Je suis désolée, Stan.

Stan essaya de se reprendre et posa sa main tremblante sur l'épaule de Lourdes. Pour se donner une contenance probablement, c'est ce qu'elle pensa en tout cas.

— Je comprends Lourdes. J'espère par contre que ça ne changera rien à notre relation professionnelle pour nos collaborations futures.

Son ton n'était absolument pas larmoyant à contrario de son âme en larmes, il souriait. Stan avait cette faculté insensée de garder la tête froide en toute situation inconfortable pour lui, aujourd'hui ne faisait pas exception.

— Absolument pas, Stan, lui répondit-elle avec un sourire.

Il sortit laissant la porte ouverte tandis que Lourdes réfléchissait aux premières conséquences de ses actes. Oui, elle l'avait embrassé, mais oui elle était saoule à ce moment-là et également oui, elle s'est laissée aller, mais on ne l'y reprendrait plus. Elle se releva légèrement en réajustant sa robe cintrée et s'avança pour fermer la porte quand une magnifique tête, selon elle, apparut dans l'entrebâillement de la porte.

— Monsieur Tildeman, ravie de vous revoir même si, j'émettrais une nuance sur le niveau de ravissement.

Le ton de Lourdes était volontairement sec parce qu'elle avait peut-être très envie de le voir, il n'empêche qu'il n'avait pas envoyé une seule missive à son attention. Un mail n'est pas cher payé pour l'homme le plus fortuné de New York.

Ce n'est pas en faisant le mort qu'on avance.

Le caractère de Lourdes se forgea petit à petit grâce et à cause de cet homme : Riley Tildeman. Il savait y faire, c'est comme si son instinct premier était la chasse et non la survie comme tout à chacun. Alors Riley rapprocha son visage un peu plus de celui de Lourdes, ce qui affola son cœur meurtri. Elle avait passé des jours à le détester intérieurement, à s'imaginer tous les scénarios possibles pour son retour, mais celui de retourner si vite dans ses bras n'en faisait pas partie. Et elle aurait s'en tenir à ce que lui dictait son instinct au lieu de faire rentrer les sentiments en jeu. Il n'y a pas de sentiment quand on parle de survie.

— Mademoiselle Lil, votre insolence m'a manqué.

Riley Tildeman était quelqu'un à qui on ne dit pas non. Il savait user de ses charmes pour arriver à ses fins et ce n'est pas une petite employée qui allait lui résister alors il sortit son sourire parfait qui la fit bégayer.

Comme toujours. Il y a des choses qui ne changent pas. Et qui ne le doivent jamais.

Lourdes allait continuer à lui tenir tête, mais il posa un doigt sur sa bouche tout en la forçant à reculer jusqu'à son bureau.

Laisser croire à sa cible qu'elle n'est rien de plus qu'un animal piégé.

— Je n'aurais jamais dû essayer de contrôler tes relations... J'aurais dû te faire confiance quand tu m'as dit qu'il n'y avait jamais rien eu avec Stan. C'est ma faute, après tout nous n'avions pas vraiment défini nos termes.

Lui laisser croire qu'elle contrôle la situation avec un soupçon de culpabilisation. Rester le maître de la situation, de la relation, d'elle.

Lourdes d'une naïveté juvénile encore, tomba les pieds joints dans son piège, comme toujours. Elle le regarda avec de gros yeux, se sentant soudainement coupable et surprise. Pour expliquer cette surprise que Riley n'aurait jamais pu prévoir après leur dispute, Lourdes avait appelé Andy qui n'avait pas décroché. Puis a composé le numéro de Stan qui lui avait déjà dit plusieurs fois que si elle voulait discuter un soir après le boulot, ils iraient boire un verre avec plaisir. Et Lourdes avait cru que c'est de ça qu'elle avait besoin... Un verre. C'est exactement ce qu'elle a fait dans le bar d'ailleurs... Même un peu trop et ils avaient terminé la soirée chez lui, mais Lourdes s'était raisonnée quand elle avait senti la main de Stan passer sous sa jupe.

— Écoute Riley, à ce propos...

— Lourdes, j'ai vu comment Stan te regardait et juste après notre dispute j'ai eu la ferme impression que tu allais faire tout le contraire de ce que je te demandais. Comme d'habitude.

Ne jamais sous-estimer Riley Tildeman et ces coups d'avance.

Mais Riley gardait la face et surtout le menton bien haut regardant Lourdes comme s'il détaillait la plus magnifique des statues. Enfin ça c'est qu'il voulait lui faire croire, car en réalité il ne savait pas apprécier les gens à leur juste valeur. C'est simple, pour Riley Tildeman la valeur des gens se mesure à leur niveau d'utilité pour sa propre personne. Lourdes poussa un soupir de satisfaction que tout soit arrangé et qu'elle n'ait rien besoin de dire, à propos de Stan et elle... Mais tout ça a été prévu par Riley. Depuis leur première rencontre en vérité. Ce n'est pas la faute de Lourdes, elle est seulement le début et la fin. Quant à lui, il en profita pour passer ses mains sous ses cuisses afin de caler Lourdes sur son bureau tandis qu'un sourire carnassier se dessina sur son visage trahissant son âme profondément putride. Sa main chercha à tâtons quelque chose sous sa jupe sans trouver ce qu'il cherchait. Il la savait joueuse, mais il doit avouer qu'elle l'était beaucoup plus qu'il ne l'espérait et bien plus souvent qu'il ne voulait bien l'admettre. C'est pour ça qu'elle avait ce tel traitement de faveur. Lourdes approcha son visage innocent de son oreille pour l'orienter.

— Je déteste les collants !

Son sourire s'agrandit encore plus pour former un rictus fou dans le creux de son cou. C'est dans ses moments qu'elle a son respect.

Elle joue dans la cour des grands.

La main de Riley s'attarda donc plus bas, sur ses hanches avant de redescendre le long de son porte-jarretelle suivant ce fin bout de tissu qui réussit à lui faire oublier à lui tout seul toute pulsion violente. Elle passa un doigt sur sa bouche pour s'amuser de sa fébrilité qu'il essayait difficilement de cacher alors qu'en vérité tout était maitrisé, jusqu'à sa manière de paraître enfiévré.

— Entre les cuissardes, les bas et le porte-jarretelle tu pourrais me demander ce que tu veux, mais tu le sais ça ?

Riley ouvrit la bouche de Lourdes pour mettre son doigt entre ses dents, la laissant peu à peu succomber à son charme. C'est ce qu'il avait toujours aimé chez elle, cette pureté qu'il avait vulgairement souillée. Riley lui avait tout appris, chaque geste, chaque respiration, chaque aveuglement, l'idée ne lui avait pas traversé l'esprit tout d'abord. Il est vrai que la première fois qu'il l'a rencontré elle lui avait paru bien trop détachée et trop dévouée, il avait pensé qu'elle ne serait même pas intéressée. Et puis l'idée a germé dans sa tête comme un ver solitaire, elle s'est installée dans son cerveau. Ses pensées pour elle ressemblaient à une boulimie inavouée et incontrôlable. Pourtant un soir après plusieurs verres il a été devant son bureau et l'a regardé travailler toute la soirée jusqu'à tard dans la nuit. Comme une fascination morbide, il ne pouvait pas s'arrêter de la regarder. C'est à ce moment que l'idée est arrivée à son terme, elle allait être parfaite parce qu'il la ferait à son image. La pensée même d'avoir une femme vierge, une page blanche devant lui l'excitait tellement qu'il cassa son verre entre ses doigts.

— Cependant, ne crois pas que tu vas t'en sortir comme ça, pour ton insolence et ton batifolage avec ton très cher collègue... Stan.

Riley dit ses mots très lentement comme pour hypnotiser sa victime et s'assurer de son plein consentement. Il lui arrivait d'opter pour une approche très bestiale, mais avec Lourdes ce qui fonctionnait était la technique du serpent. Chanter à son oreille des belles paroles pour la soumettre de manière pleinement consciente de la surface et à la fois totalement naïve face à l'immensité de l'iceberg sous-jacent. Au fond, Lourdes pensait que l'histoire avec Stan l'avait réveillé, qu'il s'était rendu compte qu'elle ne lui appartenait pas et ça l'avait rendu un peu plus ouvert sur ses sentiments. Après tout, elle ne le laissait pas indifférent, il lui avait même dit. Pauvre petite.

J'ai cette faculté « absolument divine » selon lui, de le faire sortir de ses gonds.

Et c'est une partie du problème effectivement. Le couple enflammé était resté dans son bureau jusqu'à tant que la petite pièce ne suffise plus à monsieur et qu'il emmène Lourdes dans le sien, tout en grognant d'agacement.

— Pourquoi te rhabilles-tu toujours si vite ?

— Parce que nous sommes le 23 décembre Riley et qu'il fait un peu froid. Après je dis ça, mais peut-être que ton super canapé doit être chauffant donc tu ne t'attardes pas sur des détails insignifiants comme la température.

Lourdes fit exprès de poser son pied sur le canapé tout près de l'entre-jambes de Riley enfilant son bas dans une lenteur absolument contrôlée. Il regardait ses gestes sans rien dire, ces moments faisaient partie de ceux que détestait Riley.

— Que fais-tu demain ?

— Je travaille comme tous les jours, lui répondit Riley en se prélassant sur son canapé.

— Si tu viens ici il n'y aura personne, tu le sais ça ?

— Pourquoi ?

Lourdes se rapprocha de lui, tout en gardant un contact visuel constant tandis qu'il essaya d'y échapper un maximum en observant le plafond faisant mine de réfléchir. Elle pouvait voir l'épuisement sur son visage alors elle s'accroupit près de lui et lui embrassa la joue. Il se pourrait qu'il ait des émotions humaines, mais Lourdes avait réussi à parfois décoder ses manières pour essayer de toucher du doigt le vrai Riley. Avec succès pour elle, mais en réalité, elle était toujours dans la réalité que voulait lui montrer Riley. Il n'avait pas qu'une facette, mais des milliers et le temps qu'elle en face le tour il serait trop tard.

— Riley, d'abord on est le 24 décembre demain, c'est réveillon, personne ne travaille, en plus on est dimanche. Ce n'est pas toi le boss ? Je pensais que tu avais décrété ses règles. Qu'est-ce qu'il y a marqué déjà sur ta plaque devant ta porte ?

— J'ai des gens pour le faire. Tu fais quelque chose demain, toi ?

C'était en réalité une question piège, car Riley allait monopoliser Lourdes, il allait lui sucer son énergie telle une sangsue. Être seul pour lui était impossible, non, pas lui, pas le grand Riley Tildeman. Alors il reprit le contact visuel avec Lourdes en paraissant seulement, intéressé par sa réponse.

— Non... Je... non.

— « L'étoile du matin et du soir, si je dis que tu es alors tu seras. »

— Pardon ?

— C'est ce qu'il y a écrit sur ma porte.

C'était un indice, mais elle ne voulait pas le voir. Elle ne voyait dans cette phrase que la prose d'un homme riche qui a un humour spécial. Lourdes dans sa plus grande gentillesse ne voulait pas laisser un homme seul pour Noël, mais elle avait accepté l'invitation d'Andy. Malgré tout, elle ne souhaitait pas lui mettre de pression alors elle l'embrassa avant de partir. Comme souvent avec Riley elle s'éclipsa avec des regrets. Lourdes aurait aimé qu'ils passent leur premier Noël ensemble, qu'il découvre plus de choses sur elle. Un peu plus en tout cas que la petite dévergondée qui lui sert d'employée à temps partiel, c'est ce qu'elle pensait d'elle. Quelle ironie, l'agneau qui se prend pour un bouc.

À peine rentra-t-elle dans l'ascenseur que son téléphone sonna.

Savoir se faire désirer. La première des leçons.

On pourrait être deux pour Noël ? Même si je devrais quand même travailler, un peu.

Bien sûr, Riley savait toujours frapper les points sensibles et Lourdes eut le sourire aux lèvres et rappuya frénétiquement sur le bouton pour que l'ascenseur remonte. Mais il s'obstina à descendre s'arrêtant seulement à l'étage du dessous, le destin vous crie parfois ce qu'il faudrait faire tandis qu'on l'ignore avec le sourire. Les portes s'ouvrirent sur un Riley impeccablement rhabillé avec un sourire à qui on aurait donné le Bon Dieu sans confession.

— Visiblement, je connais mes ascenseurs mieux que vous, jeune fille.

— Ça se pourrait bien, mais j'ai entendu dire que ces ascenseurs avaient vu pas mal de choses dont vous n'avez probablement pas idée. Alors niveau connaissance je dirais 1 partout.

Riley cala sa main derrière le dos de sa proie tout en l'attirant vers lui, il pencha sa tête vers son oreille.

— Je crois pouvoir facilement imaginer. Au fait combien as-tu de dossiers à rendre « pour demain » ?

— Beaucoup trop pour une seule personne, mais loin de moi l'idée de me plaindre dans un endroit si exigu avec mon patron.

Une nouvelle fois, la vraie nature de Riley remonta celle d'une bête dominante. Il prit Lourdes par les joues, d'une seule main puissante qui lui fit grincer des dents, avant de l'embrasser en signe d'appartenance.

— Je pourrais t'aider, mais si tu n'as ni ton ordinateur ni ton portable ça risque d'être compliqué...

Prévoir une échappatoire au cas où la situation lui échappe, toujours. Le travail était sa meilleure excuse. D'ailleurs, son sadisme mesquin se manifesta un instant et il contempla le spectacle d'une Lourdes paniquée cherchant ses affaires, se demandant où elle les avait posés pour la dernière fois. Puis quand son besoin fut satisfait, il lui tendit ses affaires en rigolant. Un rire de façade bien sûr et aussi terrifiant quand on prend du recul.

— Au fait Monsieur, j'ai fait l'école du cirque, est-on constamment obligé de prendre la voiture ? Parce qu'il neige ce soir...

Lourdes était ce genre de personne à faire attention à ces petits plaisirs imprévus de la vie, laissant Riley pensif, mais elle, était extatique et le supplia presque de rentrer à pied. Pourtant il se dit qu'il pouvait bien faire ça pour elle, si ça pouvait lui faire plaisir, ça ne demandait pas trop d'efforts à sa petite personne. Sauf pour rattraper Lourdes qui avait failli s'étaler à terre royalement plusieurs fois.

— Ce serait ennuyeux si tu tombais par terre.

Lourdes en rit, mais lui ne riait pas, il était vraiment gêné de ne pas prendre une voiture aux vitres teintées. Malgré tout, il se contenta de ne rien dire, ce n'est pas pour le monde qu'il y avait dehors, mais quand même Riley n'a pas l'habitude de se mettre dans des situations inconfortables. Pendant ce temps, Lourdes l'imaginait tel un ours sauvage. Quand il est contrarié, il va dans sa tanière et personne ne peut l'en sortir ou même l'aider. C'est lui qui vient à vous. Elle pensait aussi qu'il était aussi tendre qu'un bonbon à l'intérieur alors qu'objectivement Riley était pourri de l'intérieur comme un vin tourné qui n'attend que le bon moment pour dévoiler sa véritable nature frelatée.

— En fait pourquoi ne sors-tu jamais sans Pablo ?

Riley leva un sourcil en observant Lourdes, cherchant des réponses à ses questions silencieuses.

— Ne fait pas l'étonner, tout le monde a un prénom et c'est plus agréable ainsi.

— C'est mon garde du corps, c'est comme ça. Il n'a pas de prénom pour moi, seulement une fonction.

— Ouuuuh alors je te fais prendre des risques !

Lourdes était encore jeune et elle avait dans son regard ce brin d'innocence intact, cette pureté qui n'imagine pas qu'un autre être humain puisse vous vouloir du mal. Riley détestait les humanistes, c'était donc une part de Lourdes qu'il se dit qu'il allait anéantir pour la façonner à son image. La fille parfaite. Rien que de l'imaginer Riley sourit et l'embrassa passionnément, c'était sa manière de briser le verre à nouveau.

— Tu rigoleras moins si tu fais la une de tous les magazines people demain matin, au moins ça ne sera pas ta petite culotte qui la fera.

— Ouah, je vois les titres d'ici, la nouvelle petite employée occupe beaucoup le patron beau gosse ou mieux ! Le beau Tildeman se laisse aller dans les bras de sa protégée, une future journaliste.

— Ce serait pour les plus... soft, disons.

Riley entra dans l'appartement de Lourdes comme si c'était chez lui demandant préalablement la clé à celle-ci. Ce qu'elle lui pardonnait toujours, elle acceptait son besoin de contrôle tout en se persuadant que c'était quelqu'un d'influent et que ça avait fini par être une habitude chez lui. Elle n'avait pas tout à fait tort, mais le mal était beaucoup plus profond chez lui.

— Non, mais ne t'inquiètes pas je n'ai pas de vieux dossiers, j'ai toujours été une fille très sage !

— Espérons-le, sinon ce ne seront plus « de vieux dossiers » pour longtemps.

Lourdes y réfléchit une seconde avant de pouvoir l'assurer.

— Non c'est bon.

— Tu as hésité ?

— Non presque pas, je vérifiais juste au cas où, haha ! D'ailleurs, je me demande où est Andy...

En désespoir de ne pas l'avoir sous le coude avant demain, Lourdes lui laissa un message pour lui dire qu'elle était désolée, mais hélas... ! Elle ne pourrait pas venir demain. Andy allait comprendre et il ne lui en voudrait pas, non au contraire il invitera une énième conquête d'un soir, ce qui énervera sa mère et il sera heureux. C'est exactement le contraire de ce qu'elle aurait dû faire, mais le destin s'est assis pour une fois et c'était à son tour de sourire.

— Tiens, tu as fait la rencontre d'Hamlet, c'est le hamster d'Andy.

— Hamlet le hamster ?

— Absolument ! Ne me regarde pas comme ça, ce n'est pas le mien.

Lourdes sortit de la cuisine pour aller faire couler un bain dans sa salle de bain personnel tandis que Riley resta. S'il avait bien un plaisir dans sa vie, c'était d'avoir l'occasion de rentrer dans l'intimité des gens pour mieux les atteindre plus tard. Et ce salon ouvert lui semblait être un bon point de départ.

— Il n'est pas un peu... Gros, Hamlet ?

— Mais si, je n'arrête pas de lui dire, mais il ne m'écoute pas.

— Tu n'as aucune autorité.

Cette affirmation n'était pas un reproche, mais une sentence. Placide et froide. Lourdes retourna dans la cuisine ignorant sa remarque dans un premier temps, puis s'approcha de Riley jusqu'à se pendre à son col de chemise.

— Et toi tu en as assez pour deux.

Elle ne croyait pas si bien dire. Il se contenta de lui sourire faussement et l'embrassa tout en emmenant Lourdes dans la salle de bain. Le destin toujours assis dans un coin de la pièce se demandait ce qu'il avait bien pu manquer avec elle pour qu'elle soit si aveugle. À ce stade, il ne pouvait plus rien pour elle, personne ne le pouvait.

— Ça fait du bien, s'extasia-t-elle dans un soupir de satisfaction se laissant aller contre son petit ami, une fois dans la baignoire chaude.

Soudain, elle se réveilla en sursaut pensant avoir fermé les yeux qu'une seconde pourtant elle se réveilla en sursaut dans un bain gelé, frigorifié. Lourdes regarda derrière elle, mais Riley n'était plus là. Lui dormait tranquillement dans le lit, elle aurait pu avoir des doutes à ce moment, pourtant ce ne fût pas le cas, quel aveuglement. Il aurait pu se passer tellement de choses cette nuit dans ce bain, noyade, hypothermie... Mais elle était tellement fatiguée que son cerveau cette nuit-là s'est juste éteint. N'importe quelle personne saine d'esprit aurait réveillé sa belle au bois dormant, mais pas lui. Cette lubricité le rongeait tellement que son jugement en était totalement altéré.

Le soleil sortit Lourdes de ce sommeil si paisible dans lequel elle avait été plongée après sa sortie du bain en plein milieu de la nuit. Auprès de Riley, il lui semblait être à sa place, et quelle place... Lui qui n'avait absolument pas bougé de la nuit. Enfin si une fois pour s'extirper du bain et aller se coucher. Elle enfila sa chemise et la boutonna sur elle pour pouvoir humer le parfum de son doux compagnon quand son téléphone sonna dans la poche de la veste de Riley. Lourdes se dépêcha de répondre pour ne pas le réveiller avant de se diriger vers le balcon dans la cuisine. Après tout, elle pouvait se le permettre, elle était son assistante personnelle. D'ailleurs quand Riley ne voulait pas répondre il faisait transférer tous ces appels sur le portable de Lourdes. Dans ces moments, elle n'avait plus de vie, seulement un prolongement bourdonnant de sa main.

— Bonjour Stan, quel plaisir de t'avoir de si bon matin, un dimanche de fête en plus.

— Bonjour Lourdes, je suis désolé, mais notre dossier va prendre encore du retard. Je fais ce que je peux, enfin ON fait ce qu'on peut mon équipe et moi.

— Écoute-moi Stan, ça fait 2 semaines que ce dossier devait être rendu, alors attend.

Elle ouvrit et ferma sa porte d'entrée théâtralement.

— Non non hein, Stan sur ma porte il n'y a pas marqué « Bouc émissaire » alors à partir d'aujourd'hui tu vas envoyer un mail. Tous les soirs, à Monsieur Tildeman en lui expliquant combien vous pensez avoir de retard, quand le dossier sera rendu et ce que vous avez fait dans la journée. Moi je suis juste son assistante pas votre pigeon voyageur.

— Mais Lourdes c'est un travail considérable en plus de ce qu'on doit déjà abattre !

— Oui, tout ça juste pour toi Stan et crois-moi, si jamais j'entends que c'est quelqu'un d'autre que toi qui t'en charge je ne serais plus aussi patiente. Bonnes fêtes Stan.

Les mains tremblantes, Lourdes ne se reconnaissait pas. Son cœur palpitait dans sa cage thoracique et une petite voix au fond d'elle lui disait que c'était mal, que ce qu'elle faisait ne lui ressemblait pas, mais elle la fit taire. Si elle devait devenir un requin parmi les requins, alors qu'il en soit ainsi. Elle pensa à Riley, après tout ça lui avait bien réussit d'écraser la masse. À ce moment, les êtres humains n'avaient plus de visages, plus de vies, plus de familles pour elle. Ce n'était que des obstacles à sa réussite. La gangrène est contagieuse.

— Je vois que tu as commencé à utiliser une différente approche avec Stan, commenta Riley derrière elle, amusé.

Il était accoudé à l'encadrement de la porte, en caleçon profitant du spectacle de sa jument qui obéit de mieux en mieux à son maître. La maladie se répand et seule l'origine du mal peut le voir. À cet instant, la fébrilité coulait dans ses veines et l'image du verre cassé se rappela à lui, sa délectation était telle que son sang coulant dans ses veines lui semblait aussi doux et sucré que du miel.

— Mais je te promets on dirait qu'il fait exprès de m'énerver tout le temps ! Alors j'hésite entre un complexe de machisme, un complexe d'infériorité ou autre chose, mais là on atteint des sommets !

— Je suis quand même fier de voir que tu prends bien tes marques et que tu suis mon conseil à propos de ton idiosyncrasie.

Ce n'était pas vrai du tout, mais il fallait qu'elle le croie, qu'elle se sente au centre de son monde. C'était vrai d'un côté, mais pas au bon endroit. Lourdes n'a jamais cru en l'Enfer et au Paradis comme un endroit. Pour elle, ce sont des concepts abstraits inventés pour créer une moralité afin d'élever la société à un autre rang. Par contre, elle est certaine qu'on renferme tous un coin lumineux, le meilleur de l'âme humaine pouvant être représentée justement par le Paradis et une partie sombre, si obscure que seul l'Enfer semble un mot assez fort. Tous les autres mots ne seraient qu'euphémisme. Si elle savait comme elle a raison ! Pendant qu'elle se pensait au Paradis de Riley, elle n'était que dans son Enfer et sa plus belle cage s'il vous plaît. La dorée.

— Merci, lui chuchota-t-elle en s'approchant de lui pour l'embrasser.

Pourtant il l'esquiva en pointant son épaule du bout du doigt.

— Tu as quelque chose qui m'appartient.

La chemise, effectivement. Lourdes se sentit d'abord gênée de devoir l'enlever si soudainement devant lui, car elle n'avait que sa nuisette en dessous, mais s'exécuta, mal à l'aise. Le pouvoir réside dans ses moments où l'autre se retranche, c'est là que le torse est bombé comme un gorille victorieux et la confiance en soi nourrit par les sentiments négatifs suintants du perdant.

— Excusez-moi Monsieur Tildeman, je me suis probablement mépris sur la provenance de cette chemise.

— Il va me falloir plus que des excuses pour ça, Mademoiselle Lil.

— Je pense savoir de quoi vous parlez, Monsieur Tildeman.

Il l'entoura de ses bras en l'embrassant avant de se jeter ensemble sur le matelas de Lourdes. Chaque fois que le moment venait d'être plus « intime » avec Riley, c'était les rares moments où Lourdes avait des indices. Elle sentait qu'il mettait toujours cette barrière entre eux qui semblaient lui demander beaucoup d'énergie à garder érigé. C'était toujours aussi déstabilisant pour elle. Même si avec le temps il s'était quand même plus déridé face à elle, Lourdes restait le plus à l'affût possible sans pour autant avoir le recul nécessaire pour analyser les informations que son cerveau assimilait. Il s'ouvrait à elle comme un démon qui ferait accepter sa vraie nature en montrant chaque jour le minimum afin que son vrai visage à la fin ne soit que la finalité normale. Sauf que pour Riley la fin serait le début alors que pour Lourdes le début serait la fin.

— Riley ? L'appela Lourdes allongée dans la couette à côté de lui.

— Pourquoi es-tu constamment obligé de me faire dire des phrases, qui n'en sont même pas d'ailleurs, et qui en plus de ça sont parfaitement inutiles ?

— Oui ma petite Lourdes, qu'est-ce qui te tracasse ? Et bien puisque tu le demandes mon gentil Riley, j'ai une question que je voudrais te poser.

Avec le temps, Lourdes a compris que parfois elle serait obligée de faire question-réponse face au désintérêt total de son patron et amant. D'ailleurs, il tourna sa tête vers elle, mais Lourdes se ravisa intérieurement, elle ne pensait pas que ce soit encore le moment de lui demander qu'est-ce qu'il voulait dire par : « C'est ma faute, après tout nous n'avions pas vraiment défini notre relation ». Alors elle choisit un sujet plus trivial, de peur de déclencher une dispute, d'aller contre son sens, d'entendre la réponse... ?

— Tu as faim ?

Elle remarqua dans son regard qu'il n'était pas dupe pourtant il ne l'exhorta pas de questions.

— Je prépare quelque chose pour ce midi, tu n'as qu'à aller te changer chez toi et on se rejoint chez moi.

— Je n'aime pas les surprises, se plaignit détestablement Riley.

— Il n'y a que les enfants gâtées qui se plaignent, rétorqua immédiatement Lourdes instinctivement.

Riley légèrement agacé partit rapidement tandis que Lourdes se mit à faire la cuisine avec amour avant de prendre une douche, se coiffer, se maquiller et s'habiller. Elle prit le soin de se boucler les cheveux, légèrement, juste pour faire les boucles libres qu'adorait Riley. Et une fois devant son armoire, elle choisit minutieusement une robe avec un col bateau noir assez près du corps qui finissait par une bande en dentelle transparente. En mettant ses bas, elle sourit en pensant à Riley, elle avait tout fait pour lui faire plaisir, comme chaque jour, chaque minute que Dieu faisait.

J'arrive ! Surtout, reste à la maison.

Le texto venait d'Andy. Elle se demanda pourquoi il n'avait toujours pas pris la route alors que ses parents habitaient à au moins 2 heures de route et qu'il était attendu en plus. Mais elle se rassura mentalement en prétextant de fausses excuses sans chercher plus loin. Pourtant ça devait être urgent s'il lui demandait si expressément de ne pas quitter la maison alors une partie d'elle espéra que ce soit lui tout de même quand on sonna à la porte. Lourdes se dépêcha d'aller ouvrir pensant avoir le fin mot de l'histoire, mais c'était Riley.

— Ça te dérange si on attend que Parker arrive il m'a...

— Clairement oui, on y va.

Lourdes mit sa froideur sur le dos du manque d'engouement face aux surprises qu'il n'aimait visiblement pas. Elle aurait pu à ce moment, se poser la plus petite question quant à son regard furieux, son caractère changeant ou cette peur qu'elle ressentait parfois en sa présence. Mais le problème c'est qu'elle avait déjà tous les indices, mais ne croisait aucun de ses comportements ensemble. Et individuellement, chaque chose avait son excuse.

— Tu es sublime en tout cas, ça te va à la perfection. Allez viens ! Je suis sûr que ça peut attendre ton retour ce soir.

Lourdes n'avait pas vraiment l'habitude d'entendre des compliments de la part de Riley donc elle s'en contenta et ferma la porte, derrière elle. Il s'était brusquement calmé alors rien ne l'alarma. Alors que ce changement de comportement coïncidait étrangement avec le caractère urgent du message d'Andy, Lourdes le suivit. Pourquoi en aurait-elle fait autrement ?

— Comme tu as pu le deviner, j'ai un accent légèrement différent. Viens, on marche, je veux t'emmener quelque part, le tira gaiment Lourdes.

— Tu reviens d'un échange international de 6 mois en Europe, je crois.

Lourdes savait qu'il ne « croyait » pas, il était sûr de ce qu'il disait, et ça aurait dû l'inquiéter. Hélas, ce n'était qu'un indice de plus ignoré.

— En France exactement, d'où mon accent. Là-bas, il y a des boulangeries absolument partout et j'en ai repéré quelques-unes ici aussi.

— J'avoue ne jamais m'y être aventuré.

Évidemment, le restaurant gastronomique était plus le type « d'aventure » de Riley Tildeman, il laissait volontiers les miettes pour les autres. Cet homme n'avait également aucun respect pour le travail manuel alors autant dire que les boulangers et autres pâtissiers n'avait sa considération qu'en fonction de leurs renommées. Précisons que ces quelques artisans à pouvoir s'en vanter se comptent sur les doigts d'une main. Mais après tout qu'est ce qu'était l'approbation de Riley Tildeman à part quelques millions d'abonnés et une boulangerie qui ne tourne que sur commande.

— Ça, je le sais, c'est moi qui fais ton emploi du temps. Et c'est pourquoi je voulais qu'on fasse un brunch à la française. En plus, j'ai remarqué que nous n'avions aucun investisseur français donc j'en ai déduit qu'à part exception de voyage hors affaires tu n'y avais jamais été. En sachant également que tu ne prends jamais de vacances, le voyage de « loisirs » était exclu. Donc en France, le matin on petit déjeune que du sucré, boisson chaude, jus, et viennoiserie(s) pour les plus chanceux. Quand j'étais là-bas, le dimanche, ma famille d'accueil allait à la boulangerie, prenait des viennoiseries, de la brioche, des tartelettes, des chouquettes, des baguettes, des baguettes apéros, des sandwichs et elle mettait tout ça sur la table et ça nous faisait le repas du matin et du midi. Je me suis dit que c'était une bonne idée comme nous avons tous les deux du travail ainsi qu'une famine importante.

— Ça me va.

Non ça ne lui allait pas, mais au point où il en était. Depuis quand le pain nourrit-il ? Et puis le pain c'est pour le peuple, et la brioche encore pire. Un sourire se dessina sur son visage en pensant à la phrase jamais prononcée la plus célèbre de tous les temps qui poursuit aujourd'hui encore Marie-Antoinette. En arrivant, la vendeuse reconnut Lourdes qui commanda tout ce dont elle avait besoin en français. En partant, Riley fit un effort qui fit fondre le cœur d'artichaut de sa petite amie.

— Au revoir, dit-il avec un fort accent américain.

Oui, il avait appris quelques mots après un week-end fort intéressant à Londres, passé dans une chambre d'hôtel avec un mannequin français. Toute expérience est bonne à prendre, voyez-vous ?

— Je te dis tout ça Riley parce que je veux que tu me connaisses et que tu fasses partie de ma vie, en dehors du travail. Tu n'es absolument pas obligé de répondre. Je voulais le partager avec toi parce que j'ai envie de te le dire tout simplement.

— Tu sais que je ne me sens jamais obligé de rien.

Pour une fois, Lourdes fut honnête avec elle-même, sa réponse n'était pas adaptée et elle l'avait déçue. Lourdes ressentit soudain la pression de ce fameux mur qu'érigeait Riley entre eux, ce qui la rendit pensive.

Comment peut-on souffler à ce point le chaud et le froid ? C'est épuisant.

In fine, son cerveau lui rappela toutes les fois où elle n'avait pas trouvé son cher et tendre à la hauteur. C'était beaucoup. Riley dut s'en apercevoir, comme si quelque chose lui échappait d'une manière ou d'une autre, parce qu'il n'arrêtait pas de lui jeter des coups d'œil. Mais qu'est-ce qu'un malade dans son genre peut dire pour rassurer sa proie ? Tu es ma préférée ? J'aime bien ton lit ? Ton corps ? Cette fois, c'est un tout autre genre de sentiment qui fit serrer les poings de Riley.

Évidemment d'un seul coup Lourdes regardait ses pieds en silence. Elle ne l'a jamais été autant avec lui d'ailleurs, même quand elle travaille il lui arrive de marmonner ou de discuter en même temps. Riley s'était souvent moqué d'elle à ce sujet, lui reprochant que ses seuls moments de calme fussent lorsqu'elle boudait, mais là elle n'avait pas vraiment envie de rire.

Que dire ?

Pour une fois, ces deux personnes oxymoriques partageaient la même pensée. Quand ils sont remontés dans l'appartement, il n'y avait toujours pas de signe d'Andy alors Lourdes ne s'inquiéta pas plus que ça. Il n'y avait pas de quoi, pas pour le moment. Elle se mit alors à tout préparer toute seule dans la cuisine pour leur fameux petit brunch quand Riley déposa sa veste sur un dossier de chaise et vînt en se remontant les manches. Un petit sourire hautain ourlait ses lèvres comme le diable le ferait s'il faisait une bonne action et qu'il quémanderait la charité.

— Tu peux couper les sandwichs, les baguettes apéros, le pain, le pain d'épices et la brioche si tu veux.

Lourdes se retourna pour préparer le reste des affaires sur le plan de travail derrière lui alors qu'il serra des dents si fort que ses dents grincèrent. Elle pouvait très clairement l'entendre respirer, mais pas jurer dans sa tête qu'on ne le reprendrait pas à se faire diriger par une femme.

— Lourdes, tu ne t'en es probablement pas rendu compte, mais depuis ce matin-là dans l'ascenseur pour ton premier rendez-vous, tu as fait partie de ma vie. Les nuits suivantes, je me demandais qui tu pouvais être et cette alchimie entre nous a continué à me hanter. Tu ne vas pas me croire, mais je ne savais pas qui tu étais quand tu as pris la place de mon ancienne assistante. Je m'en suis rendu compte un peu après quand tu as commencé à être insolente pour les premières fois avec moi. Ça m'a plu. Tu me répondais constamment et je n'attendais que ça. Plus les jours passaient et plus on se rapprochait comme si c'était évident et j'ai retrouvé cette alchimie. Ce truc qui fait que c'est si simple entre nous qu'on en oublie que je suis ton patron et que tu es mon employée, qui fait de nous simplement deux êtres humains qui n'aspirent qu'à être ensemble.

Mais donnez un oscar à cet homme ! Lourdes le sentit se retourner alors elle l'imita avant qu'il ne prenne sa tête entre ses mains plantant ses yeux dans les siens.

— J'ai eu la sensation de te blesser tout à l'heure et je n'ai jamais aimé ça. Je trouve qu'on a fait des efforts depuis qu'on se connaît pour s'apprivoiser. J'ai vu que tu as beaucoup changé en acceptant certaines de mes remarques comme tout à l'heure. Mais parfois, je suis un peu brutal, je n'ai pas vraiment l'habitude d'être « doux » dans mon travail, dans ma vie, partout en fait. Alors, n'hésite pas à m'en parler. Je ne te le dis pas forcément, mais j'aime tellement passer du temps avec toi même si ce n'est que s'endormir dans un bain, ou aller à la boulangerie. Tu changes la vision que j'ai de ma vie Lourdes et depuis le début.

Les violons étaient de sortie dans la tête de Lourdes, et pas que là d'ailleurs, tandis qu'il colla sa tête contre la sienne. Quelques larmes maculèrent l'innocente peau de cette beauté tandis que cet homme venait tranquillement de replacer le voile sur ses yeux. Le serpent en avait trop montré sans étourdir suffisamment. Quelle erreur de débutant.

— Non, non, non je n'ai pas dit ça pour que tu pleures.

Oh si, il l'avait fait exprès et il prenait son pied à la voir espérer et ramper à ces pieds de cette manière. Riley souleva délicatement son visage et essuya ses larmes du bout de ses doigts pour que sa peau s'en empreigne au plus profond de son être pustuleux. Lourdes pesant ses mots prit une profonde inspiration avant de lui répondre parce qu'elle voulait être honnête.

— Je ne sais pas quoi te dire qui serait à la hauteur de tes mots, c'est... surréaliste.

— Ca je suis assez d'accord. Aller on finit, j'ai faim !

Riley la prit entre ses bras et resta dans cette position en l'aidant à couper tout ce qu'elle lui avait demandé. À ce moment, cette abjection avait réussi à amener sa licorne dans un rêve, il la soulevait si haut que lorsque la chute allait arriver, ce serait terrible. Tandis que Lourdes se berçait de nouveau, d'illusions.

LE Riley Tildeman que toutes les filles rêveraient de voir ne serait-ce qu'une seconde venait de me faire une déclaration.

— Riley ?

— Tu recommences.

— Quoi donc ?

— Et tu t'améliores chaque fois un peu plus, c'est magnifique.

— Maiiiiis, il faut que tu me laisses parler ! Pourquoi pars-tu à 19 h 30 ?

— C'est Noël comme tu l'as justement fait remarquer et ma sœur a prévu un repas ensemble comme tous les ans. Serait-ce de la jalousie ?

— Non une recherche d'information motivée par le fait que cette entrevue n'était notée nulle part.

— Ouh, mademoiselle deviendrait une accro du contrôle ! Et même si c'était le cas, j'aurais le droit d'avoir des rendez-vous avec ma sœur tout de même ?

Et on remet un petit peu de culpabilisation, il n'y en a pas assez pour soumettre à sa guise.

— Absolument pas... je... bégaya-t-elle.

Pour arrêter le moindre débat, il embrassa ses épaules nues jusque dans son cou, ce qui lui donna de délicieux frissons. Le brunch se passa ensuite heureusement sans accro, mais le texto d'Andy restait tout de même dans un coin de la tête de Lourdes.

— En règle générale, j'ai tout aimé. Ta famille d'accueil avait très bon goût, vraiment, la félicita-t-il.

— A. Ma famille d'accueil a très bon goût, ils ne sont pas morts.

Riley l'aida à débarrasser et ils se sont attelés aux quelques vingtaines de dossiers que Lourdes devait rendre « ce soir » en théorie. Elle se fit la réflexion que c'était très étrange de travailler avec le responsable de votre supplice, mais elle préféra rire de la situation dans sa tête. Il vaut mieux parfois pour aider à relativiser la situation, parce que rien n'était normal.

L'après-midi se passa sans que Lourdes ne s'en rende compte alors que Riley lui, s'était bien tenu informé régulièrement de l'heure et à peine 19 h 30 sonna qu'il était déjà parti. Lourdes maintenant qu'elle était lancée décida de continuer à bosser ses dossiers jusqu'à ce que la vingtaine soit réglée et envoyée. Elle se sentit satisfaite et exténuée à 23 h 30 quand elle eût enfin fini, elle partit tout de suite au lit sans demander son reste.

Le lendemain matin, fut probablement le plus dur de toute sa vie. Il n'y pensait plus à ce texto, mais Andy n'avait pas pour habitude de s'inquiéter pour rien. Aujourd'hui, Riley avait donné sa journée à tous les employés pour le jour de Noël, comme Picsou. Alors elle en profita pour prendre son temps dans son lit quand on tambourina à la porte.

— Lourdes, mets-toi sous la couette et ouvre, je dois te parler !

Andy ouvrit la porte à la volée avant de prendre Lourdes dans ses bras. Légèrement hébétée de le voir là, un hoquet de stupeur sorti de sa bouche. Andy se jeta sur son lit juste en face d'elle pour la réceptionner dès qu'elle en aurait besoin. Parce qu'aujourd'hui était le jour frabieux.

— Écoute-moi bien, sache que je suis désolé, d'accord ? Peu importe ce que tu choisiras, je te soutiendrais.

Lourdes perdue, chercha à attraper le journal que cachait Andy dans son dos avant d'enfin l'attraper et de se décomposer devant la première page.

Non, il n'est pas en couple avec une secrétaire. Phixie Tildeman raconte le quotidien de sa famille extraordinaire.

Lourdes feuilleta les pages rapidement sans arriver à croire tout ce qu'il y avait écrit dessus. Phixie avait fait un entretien avec un journal people se vantant de connaître la vie de son frère. Selon elle, Lourdes n'était pas sa petite amie, mais une partenaire occasionnelle, avec qui il aime avoir des relations plus poussées en dehors du travail. Elle y détaillait des choses intimes qui lui donnèrent envie de vomir tandis que Lourdes n'arrivait rapidement plus à contrôler ses pleurs commençant même à suffoquer. Phixie racontait comment il aimait contrôler tout révélant des détails explicites sur le couple. Elle avait également donné le nom de l'école de journalisme et d'art de Lourdes la laissant vulnérable à n'importe quelle attaque par des détraqués. Andy la serra contre lui et elle dut arrêter sa lecture puisqu'elle ne pouvait même plus voir à travers la barrière de larmes qui s'était formée.

— Ce n'est pas possible... Elle doit forcément... Elle dit ça pour l'argent ? N'est-ce pas Parker ? Parker...

Andy sentant que Lourdes ne se calmait pas partit dans la cuisine chercher une poche qu'ils utilisaient pour remplir le vrac à l'épicerie avant de la rejoindre à nouveau dans sa chambre. Il lui fit souffler dedans le plus calmement possible tout en étant dans le même état de sidération et de dégoût qu'elle.

— Il faut que tu voies la vérité en face Lourdes... Toi qui es journaliste, tu n'as jamais trouvé ça bizarre que son passé soit si opaque ? Chaque personne qui a été avec lui a signé une clause de confidentialité... Ne me dis pas que tu as fait pareil Lourdes...

— Parker qu'est-ce... Que je... Vais bien pouvoir... faire ? Ma réputation est MORTE !

— Respire là-dedans, ça va aller.

Lourdes essayait lamentablement de parler, de lui expliquer qu'elle ne pourrait jamais être journaliste à cause de ça, mais elle suffoquait toujours plus. Par contre, elle n'a pas remis la parole d'Andy une seule seconde en cause, elle aurait pu au vu de son niveau d'implication, mais non. C'est le premier bon choix qu'elle avait fait pour elle depuis très longtemps et ils ne feront que s'enchaîner par la suite. Elle ne s'en rendit pas compte, mais Phixie avait sauvé sa vie ce jour-là. Elle l'avait brusquement éjecté des Enfers, hélas, il n'y avait qu'un moyen pour en sortir et un prix. Un bout de son âme.

— Je le sais. Je suis venu dès que j'ai vu ce tas de torchons, respire dans la poche. C'est ça qu'il fallait que je te dise hier, mais je ne t'ai pas trouvé ! Et je voulais être sûr de mes infos aussi. Écoute moi bien Lourdes, ce gars c'est un taré, est-ce que tu veux vraiment rester avec lui ou est-ce que tu me fais confiance si je te dis que je peux tout arranger ? Alors tu prends tes fringues, pas tes meubles ni rien d'encombrant juste tes affaires à toi. Mon frère est en ville au cas où tu décides ça. Donc tu prends TOUTES tes affaires tu ne laisses rien d'important parce que nous ne reviendrons pas et ma mère a proposé de nous loger le temps que tu te remettes, d'accord ? Mais, je crois en toi, tu es quelqu'un de tellement forte Lourdes alors libère-toi, braque-toi et survis.

Lourdes secoua la tête comprenant avec la violence d'impact d'un semi-remorque à pleine puissance que pour une fois dans sa vie elle voyait. Comme une aveugle à qui on aurait rendu la vue, tout lui paraissait brillant et aveuglant, mais elle pourra bientôt revenir chez les vivants.

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