Moi et les femmes

J'aime bien m'envoyer en l'air avec des jolies filles. Les garçons c'est pas mon truc. Je préfère les filles. De toute manière, fille ou mec, le fond du problème est un peu le même. Moi, j'aime bien les filles pas trop chieuses. Enfin : un peu chieuses quand même, sinon je m'ennuie avec elles. Avec les chieuses, je sais que je dois faire attention à mes pouvoirs. Si je fricote avec une meuf trop lisse, trop gentille, je me connais : je pourrais me laisser aller et oublier sa présence et me mettre à me servir un jus d'orange post-coïtal avec ma télékynésie. Ça la foutrait mal. D'ailleurs ça a failli arriver une fois.

Esther est une jolie fille. Elle est douée pour les affaires de sexe. Je comprends pas pourquoi Maxence la trompe avec un tas de greluches. Je veux dire : si j'étais marié avec Esther, je pense qu'elle me suffirait amplement. J'ai jamais trop compris ce qui pousse certains mecs à toujours vouloir se taper des monceaux de connasses. Après tout, si on a la chance de tomber sur une fille pas trop conne, un peu jolie, avec qui on peut faire des activités et tout et avec qui on ne s'engueule pas tous les deux jours : pourquoi essayer de tout foutre en l'air ?

Mais peut-être qu'il y a certaines choses sur les relations et les interactions entre individus qui m'échappent. À dire vrai, je n'ai pas non plus une très grande expérience. Je suis sorti avec Maryline. Avec Mirabelle. Avec Esther. Plus quelques autres pouffiasses de temps en temps, mais surtout pour des histoires de fesses. Et je crois qu'un jour lors d'un séminaire, on s'est aussi un peu chauffé avec Rose-Marie, Il y a longtemps. Mais ça ne compte pas. Rose-Marie est une sale pute. Je la déteste.

Des fois, après avoir couché avec Esther, quand on vient de finir nos petites affaires et qu'elle est sous la douche, je reste à réfléchir dans le lit de Maxence.

Je repense à mes histoires de coeur. C'est un bien grand mot, mais il y a quand même eu deux femmes qui m'ont marquées depuis toutes ces années.

Maryline, évidement, puisque c'est grâce à elle – ou à cause d'elle – que je me suis rendu compte que je ne pourrais jamais avoir de vraies relations de couple.

Et puis Mirabelle.

Mirabelle et mon grand espoir. Avec elle, j'ai vraiment cru que je pourrais concilier un tas de choses dans ma vie : l'envie d'être en couple avec une gentille fille, assumer mes pouvoirs, montrer à l'univers entier que je suis quelqu'un de normal. Je voulais être en couple avec Mirabelle. Je le veux toujours. Je crois.

Mais à mon avis, c'est râpé. Je suis allé trop loin avec elle. J'ai déconné. Je me dis même parfois que ce qu'il m'arrive avec Sosnowski et les parents Eisenduler : ben, je l'ai bien cherché.

Quand Maryline est morte, je suis resté longtemps déprimé. Pas uniquement parce que je l'avais tuée ou parce que j'avais perdu mes pouvoirs dans l'accident. Ni même à cause de la rééducation qui me faisait mal et qui n'en finissait plus. Non. J'étais pas bien parce que je savais que je n'arriverai jamais à être heureux. En tout cas pas au sens où on l'entend d'habitude : s'épanouir, vivre à deux, fonder une famille, partir en voyage, voir les gosses grandir, profiter de la retraite et vieillir en se disant qu'on a eu une vie pas trop dégueu.

Pendant longtemps je ne voulais plus m'intéresser aux filles. Je veux dire : je ne me suis pas non plus intéressé aux garçons ou autre variétés de genre auxquelles je ne comprends rien. Non. En fait, je ne voulais plus revivre l'enfer comme avec Maryline. C'était trop dur pour moi. Je me suis enfermé dans un célibat forcé, mais de temps en temps, je tombais toujours sur une fille, sans le vouloir, qui me prenait en pitié et qui voulait jouer à la maman avec moi.

C'est bizarre les filles. La plupart de celles que je connais veulent toujours dorloter les types comme moi : un peu fragiles, avec un sale caractère ou des soucis. Un peu comme si c'était une sorte d'instinct maternel qui les poussait à adopter des guignols. Genre, elles veulent me rassurer, m'installer dans leur salon pour s'occuper de moi, me faire à manger, m'acheter des fringues. En vrai j'aime bien ça : c'est toujours cool de se sentir le centre d'attention de quelqu'un. Par contre des fois, c'est un peu lourd et limite intrusif. Du coup, quand elles commencent à projeter un peu trop de fantasme sur le couple, la vie à deux, tout ça : je coupe les ponts. J'ai trop peur qu'elles découvrent que je suis un monstre. Je ne tiens pas à dézinguer toutes les pauvres connes qui tombent amoureuses de moi. C'est pas qu'il y en ai beaucoup, mais bon. Il y en a eu. Deux ou trois. Des fois je me demande si Rose-Marie n'est pas un peu dans cette catégorie. Ce qui expliquerai pourquoi elle n'arrête pas de me tourner autour. Mais jamais je ne céderai. Tout sauf une DRH.

À un moment pourtant, il a bien fallu que je m'invente un couple. À force d'être célibataire, j'ai commencé à subir la pression sociale. C'est pas "normal" d'être seul. La société exige pratiquement qu'on soit en couple. Peu importe que ça soit pour de mauvaises raisons ou que ça aille contre la nature profondes des gens. Faut pas s'étonner qu'il y ait des personnes qui cèdent à cette pression et qui s'embarquent dans des histoires nulles, juste pour faire plaisir à la famille, aux amis, aux collègues de boulot. Je le sais : je l'ai vécu. Les gens s'en foutent que vous soyez différents, pas adaptés au couple, gays, lesbiennes, asexuels, poly-amoureux, aromantique et autre – j'ai appris l'existence de tout ça dans PsychoMag –, l'essentiel, c'est que vous donniez une image de normalité. Un couple, c'est normal. Point. La pression sociale se fiche de ce qui se passe ensuite : si vous êtes incapable de coucher avec votre conjoint, si vous ne vous sentez pas bien avec lui, si vous ne voulez pas d'enfants, si vous le voulez mais que vous n'y arrivez pas, si vous vous engueuler en permanence, si vous vous tapez mutuellement, si vous allez voir ailleurs, si vous n'êtes pas heureux. Non. La pression sociale met tout ça sous le tapis et prétexte que c'est compliqué ce qui se passe dans l'intimité des couples. Pire : ça ne regarde qu'eux. Un peu comme si cette pression forçait les gens à entrer de force dans un cadre et se dédouanait complètement du résultat. Pire : des fois je me dis que les gens qui poussent les autres à faire les mêmes choix tout pourris que tout le monde, en fait, ils agissent uniquement pour que les autres partagent le même malaise universel. Une sorte de contagion du malheur et de la dépression.

Je déteste la société.

Pourtant, j'ai cédé moi aussi. J'ai voulu me mettre en couple avec Mirabelle. Cette pauvre cruche un peu débile, handicapée par une patte folle, pas très jolie et trop discrète. Je l'ai choisie alors qu'elle n'avait rien demandée à personne. Je l'ai poussé à accepter l'idée qu'il lui fallait un couple. Comme elle subissait la même pression que moi, c'était gagné d'avance. Elle a accepté et elle a joué le jeu.

On peut même dire qu'on est tous les deux tombés dans le piège. On s'entendait bien. On s'amusait. Niveau sexe c'était pas fou, mais on était presque amoureux. Je crois.

En tout cas, une chose est sûre : je l'aimais assez pour tenter le coup. Elle m'avait presque convaincu que je pouvais lui faire confiance. Que je pourrais lui montrer mes pouvoirs.

Mais le fantôme de Maryline planait toujours au-dessus de nos têtes. Je ne pouvais pas prendre le risque de tout lui révéler. Pas sans un filet de sécurité.

C'est là que j'ai commencé à déconner. Sévèrement.

L'idée m'était venue un soir au casino où j'avais sympathisé avec un abruti fini. Le mec était un sale gosse de riche mais il était marrant. On s'était déjà croisé à plusieurs reprises dans deux ou trois autres établissements. Comme moi, il aimait bien faire le tour des casinos de la région. Je m'étais laissé aller à boire quelques verres avec lui – mais beaucoup moins que lui. Un peu bourré, il s'était mis à me parler de son astuce. Il avait une technique pour choper des gonzesses très facilement. Quand il m'avait dit ça, j'avais trouvé un peu bizarre venant de la part d'un toquard comme lui. Avec sa tronche de cake ça ne semblait pas gagné et même avec beaucoup d'argent, je ne voyais pas comment il pouvait s'en sortir aussi bien qu'il le prétendait.

Il m'avait demandé de choisir deux filles dans le casino. Celles que je voulais. Un peu au pif, j'avais désigné une paire de copines qui s'amusaient sur une machine à sous un peu plus loin. Il m'avait fait signe de le suivre.

On était allé les voir. Il avait sorti des boniments de drague pas très fins et les filles ne réagissaient pas trop jusqu'au moment où il avait fait tomber une liasse de billets. Une très grosse liasse. Et là il s'était excusé de sa maladresse et pour déconner il avait sorti un truc du genre :"Oh ben maintenant que je suis démasqué, je vais devoir acheter votre silence : vous voulez un verre ? Ou une bouteille de champagne ? C'est moi qui offre." Les deux meufs avaient rigolé et après quelques vannes avaient fini par accepter, sans doute parce que de mon côté je me confondais en excuses et que je trouvais la méthode de mon partenaire particulièrement vulgaire.

Et c'est là que le type était passé aux choses sérieuse : il avait mis très discrètement des petits cachets dans le champagne des filles et un quart d'heure plus tard elles étaient à poil dans sa chambre, à deux kilomètres de là, dans un hôtel minable de la zone industrielle la plus proche. Moi, j'avais suivi, parce que je sentais le coup foireux arriver à plein nez.

Il m'avait expliqué que le cachet rendaient les filles très réceptives aux sollicitations. Genre : elles étaient dans une sorte d'état second et elles disaient oui à tout. Selon ce sale type, le principal inconvénient était que les filles restaient un peu molles au lit et qu'elles se contentaient de faire l'étoile de mer. Par contre, le très gros avantage de sa technique, c'était que les cachets effaçaient la mémoire des filles pendant tout le weekend, y compris la journée qui précédait. Il n'y avait donc aucun risque pour qu'elles se souviennent de lui et qu'elles portent plainte. Elles se réveillaient dix heures plus tard avec une énorme gueule de bois, à poil dans une chambre sans avoir la moindre idée de ce qui s'était passé depuis l'avant-veille. Le secret pour ne pas se faire repérer, c'était de sortir les filles du casino et de les emmener dans des hôtels minables, là où il n'y avait pas de caméra de surveillance dans les couloirs. Le genre d'hôtel qui accepte les règlements en liquide et qui vous laisse la clef du hall pour que vous puissiez rentrer tard sans avoir à prévenir un employé de nuit.

Je trouvais le principe génial. Je veux dire : pas violer des gamines de vingt ans sans leur consentement. Je suis un monstre, mais sûrement pas de ce genre là. Non. Ce qui m'intéressait réellement, c'était le côté perte de mémoire. L'idée avait fait tilt dans ma tête immédiatement. Avec ça, je pourrais montrer mes pouvoirs à quelqu'un, et lui faire oublier aussi tôt. Une grosse gueule de bois me semblait un prix acceptable à payer pour révéler même de manière momentanée mes pouvoirs.

Pendant que je réfléchissais aux implications de cette découverte, le type s'était défroqué et s'apprêtait à grimper sur la première fille qu'il venait de désapper.

Voir ces deux pauvres nanas un peu cruches étendues devant ce pervers m'a fait pété un câble. Il était évident que ce malade était en train de vivre ses dernières minutes. Mes réflexes de redresseur de tords venaient de remonter à la surface.

Je n'avais jamais rencontré de taré comme lui. Je voulais en savoir un peu plus avant de le buter.

Je lui faisait donc remarquer sa méthode était franchement dégueulasse. Lui me disait que ce n'était pas du viol, parce qu'elles avaient accepté de venir boire des coups avec nous et qu'elles étaient consentantes à ce moment là. Je lui faisais remarquer qu'elles n'avaient plus l'air très conscientes de ce qu'elles faisaient une fois toutes nues sur le matelas. Selon lui, sa méthode était en réalité un "gain de temps" parce que entre le moment où les filles acceptent de boire du champagne et le moment où elles acceptent de coucher, il peut se passer des heures, voire des mois. Lui, ne faisait qu'accélérer le processus avec un peu de chimie. Le secret, c'était d'emmener les filles

Moi, j'ai quand même considéré que cet enfoiré était un putain de psychopathe. Avec ma télékynésie, je l'ai arraché de la fille avant qu'il commence à l'usiner et je l'ai plaqué contre le mur. Toujours avec mon pouvoir, je lui ai tordu les articulations des doigts pour les péter un par un, jusqu'à ce qu'il me raconte toute son histoire. J'ai appris qu'il arpentait les stations balnéaires de tout le pays à la recherche de filles à baiser. Il faisait ça un weekend sur trois depuis deux ans. Il m'a aussi révélé qu'il avait un stock de pilules dans le coffre de sa bagnole, que je pouvais les prendre si je voulais et qu'il ne dirait jamais rien. Pour preuve de sa bonne foi, il voulait bien en avaler deux ou trois, comme ça il ne se souviendrait pas de moi et il ne pourrait pas dire qu'il avait croisé un type avec des pouvoirs magiques.

Je lui ai pété à peu près toutes articulations sans le faire saigner. J'ai rhabillé les filles. Mis tout le fric du salopard dans leurs sacs à main.

Et puis j'ai ouvert la fenêtre de la chambre. Elle donnait sur une immense baie. Au loin, il y avait un pétrolier qui longeait la côte. J'ai visé l'arrière du bateau, là où il y avait les remous des hélices et j'ai balancé le type par la fenêtre. Il faisait nuit noire. Je me suis envolé à mon tour et j'ai récupéré les cachets dans le coffre de la bagnole. Il y en avait des centaines.

Quelques mois après, j'ai testé les cachets sur Mirabelle pour être bien sûr que ça marchait. Un vendredi soir, je lui ai demandé si elle voulait aller au restau avec moi. Elle a accepté.

Ça faisait des mois qu'on se tournait autour tous les deux et je connaissais déjà pas mal de choses sur elle. Je me doutais qu'elle accepterait facilement. On a passé un très bon moment. Après le dîner on est allés dans un club de musique, puis dans un bar à cocktail qu'elle aimait bien. Après la fermeture, on est restés discuter très longtemps sur les quais.

Mirabelle avait beaucoup de choses à me dire. Elle était contente que j'accepte enfin de sortir avec elle après tous ces mois à nous tourner autour. J'avais même pas à prendre mon mal en patience : je m'apercevais peu à peu que Mirabelle n'était pas la greluche écervelée que je m'étais imaginé.

On a fini chez elle. On a fait l'amour. C'était bien. Le lendemain on est restés au lit pendant presque toute la journée à regarder des films avant de ressortir et d'aller manger une pizza. Puis de retourner boire des cocktails et refaire l'amour. Le dimanche soir, on était presque amoureux. Je lui ai fait boire le cachet et je lui ai dit bonne nuit avant de rentrer chez moi.

Le lendemain elle n'est pas venue bosser. Ni le jour d'après. Le mercredi elle est revenue au boulot avec un mot du docteur. Elle m'a dit qu'elle était désolée de son comportement pendant le weekend : elle avait dû trop picoler parce qu'elle ne se souvenait pas bien de ce qui s'était passé après qu'on se soit quitté le vendredi soir.

Le vendredi soir ! Ça marchait vraiment.

On a continué à flirter et à coucher ensemble. À se raconter, à se découvrir. C'était génial. On a vécu de beaux moments, un peu comme quand on est ado et qu'on est tout excité et amoureux. Les moments avec les papillons dans le ventre, avant que la routine s'installe.

Et puis quand j'ai senti que c'était le bon moment, je lui ai montré mes pouvoirs. Elle a paniquée. Je lui ai filé un cachet. Elle a tout oublié.

Le weekend d'après, je m'y prenais un peu mieux et j'amenais la chose plus progressivement. J'avais préparé tout un discours pour l'apaiser et la mettre en confiance. Pour qu'elle puisse mieux accepter l'idée. Quand j'ai eu toute son attention, je lui ai montré mes pouvoirs. Elle a paniquée. Je lui ai filé un cachet.

J'ai revu mon discours, je lui ai montré des films de super-héros, j'ai pris mon temps, mais à chaque fois, elle pétait un plomb quand elle voyait la télékynésie. Même en limitant le plus possible mon pouvoir. Même en faisant semblant de force comme un malade pour faire bouger une petite voiture sur la table basse.

Pas moyen : à chacune de mes tentatives elle faisait une crise d'angoisse et elle partait en sucette.

Du coup, cachet, perte de mémoire, gueule de bois, arrêt maladie de trois ou quatre jours... on je recommençais quelques jours plus tard.

Au bout d'un moment, ça devenait un peu répétitif et Mirabelle était de plus en plus fatiguée et absente à cause des cachets. J'ai réduit les doses et on ne se voyait plus qu'un weekend sur deux, puis sur trois, puis une fois par mois. Et maintenant plus du tout, parce que son neurologue l'a mise en arrêt pour six mois et lui a interdit de me revoir.

Je me dis que j'aurais pas dû déconner. Pas avec Mirabelle. Elle ne méritait pas ça. J'espère qu'elle ira mieux bientôt, même si j'en doute.

Des fois je me sens triste. Je me rappelle de ce que j'ai fait aux filles qui ont eu le malheur de tomber amoureuses de moi.

Putain de pouvoir !

— Tu rêves, Didier ?

Esther vient de sortir de la douche. Elle est jolie toute nue et toute mouillée. Ses cheveux bouclent un peu au niveau des pointes. J'ai envie de lui refaire l'amour.

— À quoi tu penses, grand dadais ?

— Je pensais à toutes les filles avec qui j'ai couché.

— Ah ben, sympa ! Et alors ? Verdict ? Je suis dans ton top trois ?

— Mouais !

— En bonne position ?

— Pas trop mal.

— Laisse moi vingt minutes et je suis sûre que je peux remonter dans le rangement.

— On va être en retard au restau.

— Tu perds rien pour attendre !

— J'espère bien.

— Allez, rhabille-toi, j'ai réservé pour moins le quart vingt heures.

J'aime bien aller au restau.

D'une part parce que je déteste me faire à manger. Je veux dire : je suis nul en cuisine et je n'ai pas la patience de préparer des trucs. Quand j'essaie, c'est toujours tout moisi, limite dégueu. Et puis comme j'ai pas trop de difficultés financièrement, j'en profite aussi.

Esther a sorti la grande tenue. Robe de soirée, grand décolleté, boucles d'oreille d'aparât. Elle est un peu trop voyante à mon goût. Je n'aime pas attirer l'attention sur moi. Tant pis : au moins, j'ai un peu la classe en sa compagnie.

Le restaurant sert des plats traditionnels français "sans viande". C'est sympa, mais j'ai connu mieux. Au moins j'aurai essayé. Je ne suis pas fan de toutes ces conneries de végan de mes deux.

Esther papote en grignotant. Comme elle est un peu dyslexique elle a tendance à inverser des mots et à passer du coq à l'âne. C'est pas toujours facile à suivre.

— Hey ! Salut, Esther. Comment va ?

— Ho, salut, Rose. Ça va, merci, bien. Et Toi ?

Rose ? Oh bordel de

— Bonsoir.

— Euh... B... Bonsoir

— Didier : je te présente Rose-Marie. C'est une copine à moi. On est inscrites dans le même cours fessiers-abdos à la salle de gym. Rose, ça c'est Didier : un copain de Maxence, mon mari. Tu sais, je t'ai déjà parlé de lui.

— Ah, oui, d'accord. C'est lui. Tu ne m'avais pas donné son nom. Enchanté, Didier. On ne s'est pas déjà rencontrés quelque part ?

— Euh... Si. Peut-être. Là tout de suite, votre visage me dit quelque chose. Mais je n'arrive pas à

— Rhoo ! T'es méchante, Rose-Marie ! Tu vois bien qu'il est gêné. Didier : Rose est déjà au courant pour nous deux. Je lui ai dit que je voyais quelqu'un qui travaille avec elle.

— Ah !

— Bon ! Je ne vous dérange pas plus longtemps. C'est un peu gênant, non ?

— Pas tant que ça : j'ai décidé de m'en foutre ! Maxence m'a encore raconté des bobards alors il peut aller se faire foutre. Soit disant il devait aller à un weekend de chasse à cour. C'est pas ce qui était écrit dans les textos de son téléphone en tout cas. Sauf si la "Coralie ptit cul" est une variété de chevreuils du marais Poitevin.

Rose-Marie glousse en se massant la nuque. Esther rigole de sa blague. Et moi je transpire à grosses gouttes.

Je déteste Angevilliers : tout le monde connaît tout le monde et moi je ne suis jamais au courant de rien. C'est insupportable !

En plus, l'autre connard de Sosnowski est garé juste de l'autre côté de la baie vitrée du restaurant. Il ne se cache même plus pour me photographier en public.

J'en ai marre de toutes ces conneries. Mais j'en ai marre. Mais d'une force ! 

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