Chapitre 1

Dans la nuit noire, un corps est rejeté sur les berges. Grignoté par le sel de l'océan, le corps avait déjà commencé son processus de décomposition, pourtant...

Pourtant certains traits restaient encore très reconnaissable, notamment ce grand tatouage qui partait du poignet pour recouvrir son bras et l'entièreté de son dos fripé par le temps et détruit par l'eau et les impacts sur les rochers meurtriers de la mer déchaînée. Ce dessin de tigre à dents de sabres ne pouvait représenter qu'une seule chose : ce corps appartenait à un clan de mafia.

Pourtant, alors que les eaux le rejetaient sur la plage sombre et silencieuse, un marcheur nocturne le trouva.

- C'est quoi ? se demanda t-il en le pointant du flash de son portable. Oh bordel ! He ! He ça va ?!

Il s'en approcha prudemment, attrapa une branche qui trainait par là et toucha le corps pour se rassurer que celui-ci était juste inconscient mais quand il le retourna en le poussant du bout de son bâton, le visage défiguré, l'œil unique ouvert, pointant dans sa direction, le marcheur partie en courant, hurlant sa peur et son dégoût.

Le matin des banderoles entouraient déjà les lieux et l'ont interdisait à quiconque de venir marcher autour de la scène de crime.

Les policiers, les journalistes, la télé, tous étaient en train d'inspecter les, lieux, mais attendaient surtout l'expertise du légiste et des agents de la crim' envoyé pour enquêter sur l'affaire.

Une voiture débarqua, se garant devant tous, faisant tourner les têtes et les objectifs pour se concentrer sur l'équipe de criminalité qui venait de débarquer. Une petite équipe qui pourtant avait déjà fait ses preuves sur des affaires très corsées. Ils s'avancèrent avec précautions et l'un d'eux demanda :

- On sait qui c'est ?
- Oui, c'est le chef du clan des Tigres d'Acier.

- Merde, ça va compliquer les choses ça. grommela le chef d'équipe. Vous deux vous aller parler au marcheur qui l'a découvert, voir ce qu'il a put faire ou dire. War et Nat vous allez parler avec les flics sur place. Je vais accompagner le légiste pour la relève.
- Oui chef ! s'exclamèrent les enquêteurs avant de se séparer pour exécuter les ordres qu'on leur avait donné, mais l'un d'entre eux n'était pas spécialement ravis de devoir enquêter sur ce corps qu'il n'avait pas encore vue.

Le corps était encore là, présent sur le sable de la plage, à peine protégé par les quelques nuages encore présents dans le ciel du matin. War s'en approcha et son cœur se serra.

War Wananrat était un enquêteur avec un passif lié à cet homme pourtant si puissant et au cœur aussi gros que le plus gros des joyaux de la couronne du monde.

- Mon oncle, murmura t-il en découvrant avec écœurement l'état de cet homme qui avait sauvé sa vie et celle de sa famille alors qu'il n'était encore qu'un tout jeune gamin. Qui vous a fait ça ? Pourquoi est-ce que c'est comme ça que vous finissez ?
- Nong, tu le connais ?
- Oui.

War n'avait pas envie d'en dire plus, il demanda à ce qu'on apporte de quoi faire un abri pour protéger le corps de cet homme si puissant réduit à l'état d'un corps brisé et grignoté par le sel et le sable.

- Il a un fils tu savais ? lui dit Nat, son collègue.
- Je sais. 
- Tu l'as déjà vu ?
- Pas depuis des années. Je ne sais plus depuis combien de temps je n'ai pas revu l'un ou l'autre... souffla le jeune homme dont le cœur pleurait cet homme qui avait eu une place si spéciale dans sa vie.

Mais que dirait-il si il croisait ce garçon qui ne devait probablement pas se douter que son père était mort depuis au moins plusieurs jours ?

- Yin... souffla l'enquéteur en se remémorant son ami d'enfance qui, malgré le temps et l'absence de contact volontaire entre eux deux, lui manquait.

Cet homme était le chef d'un clan réputé et très organisé dont le business était le plus florissant, faisant de la Thaïlande son empire de gestion, pourtant... War venait de découvrir la perte d'un homme qui avait fait en sorte qu'il devienne ce qu'il était aujourd'hui.

- Pour moi c'est sûr, entendit-il tout proche, c'est son fils qui a fait ça !
- Pourquoi ça ?
- C'était le chef d'un grand gang, mais à sa mort c'est pas son fils qui doit hériter de tout ?
- Pourtant, de ce que j'en sais, son fils n'est même pas sur le continent depuis près de 15 ans.
- Hein ? QU'est-ce que tu me racontes ? Je l'ai croisé hier en allant faire mes courses !
- Ah ! Parce que tu sais à quoi il ressemble son fils peut-être ?
- Bah tiens regarde.
- Mais t'es un vrai teubé toi... C'est pas le fils légitime de Kan ça, c'est son neuveux !
- Mais qu'est-ce que tu me racontes ?

Trop, War décida de faire son travail et de se fermer au babillage infernal qu'il pouvait entendre, mettant à mal sa maîtrise de lui qu'il avait pourtant bien eu du mal à contenir durant ces dernières années.

Yin avait quitté le continent depuis 15 ans ? Ce n'était donc pas par envie qu'il avait cessé de lui parler mais parce qu'il avait été envoyé ailleurs ?

Oncle Kan, qu'est-ce que vous avez fait avec Yin pour qu'il ne me parle plus ? Pourquoi nous avoir éloigné ?

Tant de questions encore qui lui poluait l'esprit, mais il allait devoir se rendre dans cette résidence qu'il avait connu toute son enfance. Non, il ne le voulait pas, mais il n'y avait que lui pour s'y rendre car il y était affilié et savait quoi chercher, pourtant un tiraillement au coeur le fit hésiter quand à se proposer pour cette escapade : Yin Anan Wong.

Comment seraient leurs retrouvailles si venait à le croiser dans la grande résidence bien gardée ? D'ailleurs l'était-elle encore ?
Il devait y aller, il n'avait plus le choix.

- On embarque ! cria son chef d'équipe, rassemblant tous le monde ainsi que le corps qui allait partir avec eux pour une autopsie approfondie et il allait veiller à ce qu'il soit bien traité.

Mon oncle, vous devez me dire qui vous a fait ça pour que je vous venge et que je protège Yin. Je n'ai pas le choix que de le protéger à votre place.

War se fit la promesse solennelle de trouver qui avait bien put assassiner cet homme si grand et si important pour lui. Sa famille serait dévastée d'apprendre sa disparition.

Durant le trajet qui les ramenaient au QG, War écoutait que distraitement les suppositions saugrenues de ses coéquipiers dont visiblement l'avis était déjà tout tracé.

N'étaient-ils pas des enquêteurs ? Leur rôle n'était-il pas de chercher qui était le coupable au lieu de le pointer directement sans preuve ? La mafia ne fonctionnait qu'en partie ainsi, mais personne ne connaissait Kan et son fils aussi bien que lui. Il savait que Yin était trop attaché aux principes de la famille pour oser faire du mal à son père. Le tuer ? Oh War savait qu'il en était capable, il avait déjà tué devant lui pour lui sauver la vie à lui et son père, c'était d'ailleurs leur première rencontre. Il devait sa vie à un gamin d'à peine onze ans qui avait tenu un pistolet et une dague rustique, sans doute confectionnée avec rien, pour venir en aide à deux pauvres âmes chassées sur le territoire des Tigres parce qu'ils vendaient légalement des fruits qu'ils faisaient maigrement pousser dans leurs jardins.

La loi du commerce dans les bas quartiers était rude pour ceux qui n'arrivaient pas à aligner deux baths l'un sur l'autre et prouver qu'ils avaient encore au moins de quoi alimenter leurs chiens. War et sa famille avaient fait partie de cette catégorie jusqu'à ce que ce petit garçon ne tue trois hommes adultes et robustes à lui tout seul, le regard éclairé d'une colère froide et qui, l'instant d'après, exprimait une douceur déconcertante.

War se mit à sourire en se rappelant de l'état du garçon face à lui, le visage et les mains couvert de sang, les éclaboussures sur les vêtements qui semblaient assez luxueux pour un garçon des bas quartiers. Il lui avait tendu la main mais avait vite retiré celle-ci pour essuyer le sang sur son short et la lui tendre à nouveau afin de l'aider à se relever. Tout deux aidèrent le père encore choqué qu'un petit de cette taille et de son âge aie put réussir un tel exploit.

- "Suivez-moi", leur avait-il seulement dit et les avait conduit vers sa demeure. 

Mais War et son père avaient refusé d'y entrer. Yin s'était approché de War et lui avait glissé ses petit doigts entre les siens pour l'inciter doucement à le suivre à l'intérieur. Forcés de suivre, par politesse, ce garçon qui était leur sauveur, ils avaient assez vite découvert qui était ce petit gars et l'amusement du père à ce moment là.

- Pourquoi tu souris War ? Toi aussi tu as hâte d'aller chercher le fils de Kan ?
- Non. répondit War, perdant subitement son sourire nostalgique, revenant brutalement à la réalité. 

Quinze ans avaient passé et il n'avait pas pu reprendre contact avec Yin depuis. Lui en voudrait-il d'être devenu un enquêteur de la crim' ? Il en doutait, pourtant il avait peur de cette confrontation autant qu'il l'attendait avec une sorte d'excitation de revoir son ami d'enfance.

Yin... pensa t-il alors qu'ils arrivaient à destination. Yin...

[...]

- Il est là, dit un homme portant des lunettes de soleil fumées sur le nez en montrant à un autre, un jeune homme grand, fin et assez athlétique, le port altier, les cheveux lui tombant sur la nuque d'un noir aux reflets bruns.
- Tu crois que c'est lui ?
- Il correspond à ce qu'on nous a envoyé.
- Suivons-le.

Le jeune homme se rendit à la porte où il devait y récupérer ses bagages, relevant ses lunettes sur sa tête, ramassant ses cheveux soyeux en arrière, il avait l'air d'un mannequin plutôt que d'un mafieux, mais le regard qu'il portait droit devant lui ne laissait aucun doute quand aux aptitudes qu'il pouvait avoir. Pourquoi était-il à l'aéroport alors qu'il avait tué son propre père ? Quelque chose ne collait pas. Mais les deux hommes qui le prenaient en filature n'en avaient strictement rien à faire pour eux, il était coupable dès le moment où il portait l'étiquette de "fils de mafia" sur le front.

Et puis... honnêtement... qui croirait à l'innocence d'un jeune homme comme lui ?

Il s'avança pour récupérer deux grosses valises qu'il mit sur son portant et le poussa vers l'extérieur. Il héla un taxis qui l'aida à mettre ses valises dans le coffre et quitta l'endroit.

La route entre l'aéroport et sa maison était longue et il y avait du monde, pourtant l'air pollué de Bangkok ne lui avait pas manqué. Rien ici ne lui avait manqué. Qui l'avait attendu ici ? Son père avait envoyé son fils loin de lui pour s'assurer qu'il étudie ce qu'il fallait pour reprendre les rênes de l'empire familiale et s'assurer qu'il soit assez endurci pour devenir le nouvel empereur.

Mais durant toutes ces années passées loin du pays, Yin n'avait fait que penser à quelqu'un. Ce petit garçon aux grand yeux étonnés et suppliant de l'épargné qui finalement était devenu indispensable à sa propre survie avant qu'il ne soit envoyé de l'autre côté du continent. Ce garçon, pourtant plus âgé que lui d'à peine 4 ans avait été son point de liaison avec le monde durant toutes ces années. 

L'avait-il oublié après tout ce temps ?

- On est suivit. lui dit le chauffeur.
- Je sais. Il pense que j'ai tué père.
- Alors c'est vrai ? Le Boss est vraiment refroidit ? Oh pardon... je ne voulais pas...
- J'ai reçu un appel me demandant de revenir au plus vite car il était mort. J'ai cru à un canular mais tout le monde semble en parler.
- Merde, je suis désolé jeune maître.
- Continue de rouler, je dois me rendre à la morgue en premier pour le voir.
- Vous voulez que...
- Non. Je dois y être seul et le faire rapatrier à la maison. Il doit recevoir la cérémonie qu'il voulait, à la maison.

La voiture roula jusqu'à ce lieu morbide et froid que Yin aurait préféré ne jamais voir pourtant, c'est une fois devant le corps enveloppé de son père que le petit garçon sombra dans une noirceur sans nom.

***

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