Chapitre 20

Seulgi était clouée au lit, après un difficile dimanche où elle avait passé une bonne partie de la journée à regarder le brouillard qui était tombé pendant la nuit. Elle était restée emmitouflée dans le gros sweat noir de son ainée, allongée sur son lit. La jeune fille n'avait absolument rien mangé de la matinée et était simplement descendue dans la cuisine pour dire bonjour à ses parents.

Ses devoirs avaient été faits le vendredi soir, jusqu'à très tard pour être sûre d'être tranquille pendant le week-end. Pour une fois, elle avait eu une bonne idée, puisqu'il lui était impossible de travailler, tant son corps était épuisé. Elle avait mal partout, en plus d'une migraine qui lui tapait sur le système. Seulgi pouvait facilement être de mauvaise humeur en réalité, sa patience avait des limites très définies.

Le lundi matin, ses parents lui ordonnèrent de rester à la maison. Ils ne l'avaient réveillé que lorsqu'ils étaient prêts à partir au travail, ouvrant doucement la porte de sa chambre. Son père installé sur le bord de son lit, il avait doucement caressé ses cheveux, en lui embrassant la tempe. Il lui recouvra le front de sa paume, et il fronça les sourcils.

« Tu as toujours autant de température... Bois beaucoup d'eau aujourd'hui, j'irais à la pharmacie pendant ma pause et je te déposerai les médicaments, d'accord ? »

Seulgi marmonna quelques mots et s'enroula dans ses couvertures, ses cheveux humides par la sueur perlant sur sa peau. Son père était inquiet, il lui arrivait de plus en plus souvent de ne pas être dans son assiette, mais cette fois-ci, elle semblait couver quelque chose de grave. Elle n'arrivait même pas à ouvrir les yeux, et ses membres étaient tout engourdis et comme contusionnés d'après ses dires.

Sa mère avait conclu que ce n'était qu'une méchante grippe qui passerait avec beaucoup de repos, quelques médicaments pour l'aider et de bons repas bien chaud. Elle lui avait donc préparé une bonne soupe qui était dans un thermos sur le plan de travail de la cuisine, du riz était au chaud dans le cuiseur et le réfrigérateur était plein à craquer. Elle n'avait qu'à se lever et à manger ce qu'elle souhaitait.

Suho attendit que ses parents sortent de la chambre pour s'y faufiler, il se mit à genoux près de la tête de sa grande sœur, et il lui tapota l'épaule, pour qu'elle ouvre les yeux, en vain.

« Seulgi ? chuchota-t-il tout bas. Seulgi ! répéta-t-il plus fort, mais sans parler à voix haute.

- Quoi ? marmonna-t-elle en glissant son bras sur son front, avant de soupirer. Je suis fatiguée, laisse-moi.

- Tu voudrais pas me tousser dessus un peu ? Juste un peu hein, de quoi me filer quelques microbes.

- Suho... susurra la plus vieille en gémissant à demi.

- Ouai, qu'est-ce qu'il y a ? Tu veux un truc en échange ?

- Tu sais que ça fonctionne jamais...

- On sait jamais, allez, ça te coûte rien, insista-t-il en lui secouant doucement l'épaule, ne la lâchant pas d'une semelle.

- Okay, céda-t-elle en relevant doucement la tête, se forçant à lui tousser au visage. Ça te va comme ça ? Va en cours maintenant. »

Suho lui fit de longues louanges en la proclamant meilleure grande sœur de la terre, mais Seulgi n'en avait rien à faire, elle voulait juste être seule. Elle avait besoin de repos et de calme, pas d'un frère la harcelant pour qu'elle lui refile son virus. Suho lui remonta sa couverture, et il déposa sur sa table de chevet, une petite enveloppe violette.

« C'était dans la boite aux lettres, annonça-t-il en se relevant, remettant la lanière de son sac à dos sur son épaule. J'y vais, avant de rater mon bus, à ce soir. »

La maison des Kang devient tout à coup des plus calmes, et Seulgi leva les yeux pour regarder la lettre posée contre son verre d'eau fraîche. Elle soupira en fermant les yeux, elle n'était pas du tout en état pour lire, même si elle était impatiente d'avoir des nouvelles de Joohyun. Il fallait aussi qu'elle lui réponde et qu'elle lui dise qu'elles ne se verrait pas pendant une bonne partie de la semaine.

Pour une fois, elle fit des rêves, mais ces derniers n'étaient pas complètement joyeux. Il y avait souvent Joohyun à ses côtés, proche d'elle, dans ses bras même parfois, mais elle ne souriait jamais, comme si elle n'était pas heureuse avec Seulgi. Son sommeil était entrecoupé, et à chaque fois qu'elle refermait les yeux, c'était pire que la fois précédente.

Ce fut lorsqu'elle l'imagina la quitter pour toujours, qu'elle se releva. L'adolescente était complètement éveillée, et il lui faudrait un bon moment avant de se recoucher. Elle était pleine de sueur, le teint livide et les jambes pantelantes, lorsqu'elle se releva. La terre tournait beaucoup trop apparemment, car elle vacilla, en pressant ses doigts contre sa tempe. Seulgi ne se sentait pas bien du tout, son cœur était lourd et elle avait une nausée fulgurante.

Elle descendit tout de même au rez-de-chaussée, se servant du mur pour se soutenir. Il fallait qu'elle aille voir la maison de Joohyun, qu'elle confirme que tout allait bien. Elle ne faisait plus la différence entre ses cauchemars et la réalité. Peut-être même qu'elle rêvait d'aller chez son amie, et qu'elle était toujours dans son lit. Seulgi en aurait peut-être le cœur net en y allant.

Ses pieds glissèrent dans les baskets trop grandes de son petit frère. Il faisait bien trois ou quatre pointures de plus qu'elle, mais au moins, elle n'avait pas besoin de se baisser pour les enfiler, ou même de défaire les lacets. Elle attrapa ses clefs, et elle sortit, parcourant le court chemin jusqu'à chez Joohyun.

La politesse aurait été de toquer plusieurs fois pour annoncer sa présence, mais Seulgi ne pensait plus. Elle entra dans la vieille bâtisse, ses doigts glissant sur les murs pour se diriger. Même sans lumière, elle pouvait s'y diriger, ayant appris à se débrouiller entre toutes les pièces plongées dans l'obscurité.

« Joohyun... unnie... dit-elle en soufflant chaque mot entre ses lèvres à peine ouverte. Hyun... », répéta-t-elle avant d'avaler difficilement sa salive.

Elle n'avait pas remarqué qu'elle était assoiffée, et que sa gorge lui faisait mal comme si des dizaines d'aiguilles se plantaient dans son œsophage dès qu'elle essayait de déglutir.

« Mh ? Qui est là ?! », s'exclama la propriétaire de la maison en se relevant dans son lit, sa main tendue dans le vide.

Elle attrapa une petite lampe de poche qu'elle avait toujours sur sa table de chevet par précaution. La lumière plutôt faible -témoignant de la vieillesse des piles- se pointa sur l'intruse qui était prête à tomber dans les pommes.

« Unnie...

- Seulgi ?! demanda-t-elle alors que ses paupières papillonnaient. Qu'est-ce que tu fais là ? Tu n'as pas cours ? »

Elle attrapa les allumettes et en craqua une pour éclairer la pièce avec les multiples bougies. Ses pas furent ensuite d'une rapidité déconcertante vers sa cadette. Plus elle était proche, et plus elle voyait sa mine grisâtre et ses cernes tirant vers le violet, qui s'étendaient sous ses yeux.

« Qu'est-ce qu'il se passe ? Tu es malade ?

- T'es pas encore partie ? J'ai eu peur... geignit l'adolescente en tombant presque dans ses bras.

- Partir où ? Il fait jour, ajouta Joohyun, complètement perdue à essayer de soutenir sa cadette qui pesait une tonne pour elle.

- Pour toujours, souffla-t-elle contre son oreille, la faisant grimacer.

- Nous nous sommes fait une promesse, Seulgi. Je ne partirais jamais sans toi.

- J'ai cru... », bafouilla la plus jeune en la serrant contre elle comme si elle avait peur de la voir s'enfuir devant ses propres yeux.

Joohyun souleva sa capuche, et elle enroula son bras autour de la taille de sa cadette. Il fallait qu'elle rentre chez elle et qu'elle se repose. S'il y avait besoin, elle pouvait rester veiller sur elle, mais il valait mieux qu'elle soit dans son propre lit. Elle fourra son masque dans sa poche et pour la première fois, elle sortit de chez elle sans se recouvrir entièrement.

Il n'y en avait même pas pour une minute de marche, mais cela lui était tout de même impossible depuis toujours. Heureusement, il n'y avait pratiquement pas de luminosité, les UV ne passaient pas vraiment au travers du brouillard et son visage était bien englouti sous sa capuche trois fois trop grande.

C'était la première fois qu'elle découvrait la maison de sa meilleure amie, malgré le fait qu'elle ne pouvait réellement rester que dans les endroits les plus sombres. Elle suivit les marmonnements de Seulgi, même s'il lui était facile de trouver la chambre de cette dernière. C'était la pièce la plus sombre, à être encore dans le noir, les volets à peine entrouvert. Il y avait un peu de lumière extérieure qui entrait dans les quelques mètres carrés, mais Joohyun n'allait jamais risquer de s'en approcher.

Elle déposa sa cadette au bord du lit, et elle l'obligea à enlever son gros sweat qui lui donnait encore plus chaud que sa propre fièvre. Il lui était impossible de dormir sans, c'était presque comme si elle ne s'en séparait jamais, le portant à chaque instant où elle le pouvait. Seulgi se permit donc de protester, et Joohyun laissa apparaître un sourire sur ses lèvres. N'importe qui en aurait eu peur d'ailleurs, mais l'adolescente en face d'elle était bien plus que différente des autres.

« Je t'en donnerai un autre, mh ? Il faut le mettre à laver celui-là, il est trempé de sueur, Seulgi.

- Non, je veux pas. Je vais le garder toute ma vie !

- Bien sûr, je te le donne si tu veux, annonça Joohyun d'une voix si douce qu'il en était presque impossible qu'elle soit humaine, mais il sent mauvais, il faut le passer à la machine. Tu seras bien mieux dans des habits et des draps frais qui sentent la lessive. »

Elle se retourna, par respect pour Seulgi, le temps qu'elle se change complètement, et elle lui demanda où était rangé les draps. Son ainée faisait absolument tout depuis des années, et elle avait été seule pendant si longtemps, qu'elle était heureuse de prendre soin de quelqu'un.

La jeune fille se jeta presque sur la chaise de son bureau, se retenant au dossier, posant sa joue contre le bras avec lequel elle se soutenait pour ne pas tomber. Elle la regarda, les yeux à demi-clos, regrettant d'être allée la voir. Joohyun était complètement plongée dans sa tâche, elle avait l'habitude de changer ses draps tous les dimanches, au contraire de la poussière, qu'elle laissait souvent s'accumuler sur ses meubles ou dans l'air. Aux rayons du soleil qui pouvaient filtrer à travers ses rideaux ou ses volets cassés, elle pouvait voir les fines particules qui volaient au moindre coup de vent.

Ses gestes étaient rapides et la couette était proprement remise dans une housse propre. L'adolescente prenait toujours un temps fou pour le faire à côté, se perdant dans les pans de tissus, s'emmêlant les pinceaux en inversant sa gauche et sa droite ou encore en laissant des plis dans l'édredon parce qu'elle n'avait plus de force pour le secouer.

C'était la pire corvée qui soit pour elle, au point qu'elle préférait même passer la serpillière. Joohyun replia les draps et elle s'approcha de Seulgi pour la relever. Elle lui ordonna de se recoucher, et s'installa à ses côtés, collant le dos de sa main contre son front, puis contre sa joue humide.

« Ta fièvre ne va pas retomber de sitôt, Seulgi, tu n'as pas de traitement ? »

La jeune fille secoua la tête, et avala difficilement sa salive. Joohyun soupira, ses épaules s'affaissant, alors que sa main attrapait le verre d'eau sur la table de chevet. Elle lui fit boire plusieurs gorgées, alors qu'elle était agacée par cette situation qu'elle trouvait injuste. Il fallait qu'elle trouve quelque chose pour l'aider à aller mieux.

« Mon père doit venir après, il va acheter des médicaments.

- D'accord, alors repose-toi pour l'instant, je reviens », répondit la femme en ramassant le tas de linge à mettre à laver.

Seulgi voulait protester bien sûr, mais elle n'en avait pas la force. Elle attendit simplement que son ainée revienne, se sentant plus seule que jamais. Les dix-sept premières années de sa vie avaient été des plus solitaires et difficiles et pourtant, c'était à ce moment précis, qu'elle avait eu l'impression de mourir à l'intérieur.

C'était un énième signe lui montrant qu'elle était bien trop attachée à elle. Seulgi avait toujours pensé être une personne froide et n'ayant besoin de personne d'autre que d'elle-même pour être heureuse. Ce n'était que parce qu'elle n'avait jamais trouvé chaussure à son pied, parce que personne n'avait jamais voulu l'accepter comme elle était. Jusqu'à ce qu'elle choisisse de marcher sur le chemin de Joohyun.

« Seulgi, pourquoi est-ce que tu pleures ? chuchota la plus vieille en se jetant presque sur le lit à ses côtés. Tu as mal quelque part ? Tu as besoin de quelque chose ?

- Je suis désolée... répondit l'adolescente en secouant la tête, essuyant ses larmes qui avaient coulé sans même qu'elle ne le remarque. Tu devrais être en train de dormir et de te reposer.

- Allons, ne t'excuse pas, ce n'est pas ta faute si tu es malade, tu n'as rien demandé, alors ne culpabilise pas pour ça, assura Joohyun en lui souriant doucement, lui caressant les cheveux. Je vais prendre soin de toi aujourd'hui, comme toutes les fois où tu m'as tenu compagnie, et aidé comme en faisant mes courses quand j'avais une crise ».

La jeune femme se glissa à ses côtés, et Seulgi se roula en boule contre elle, se blottissant dans ses frêles bras. Son odeur était rassurante, plus forte que le sweat qu'elle avait gardé et qu'elle avait beaucoup trop porté. Joohyun glissa sa main dans les cheveux de sa cadette et cette dernière geignit, mal à l'aise.

« J'ai les cheveux sales, marmonna-t-elle en collant sa joue contre la poitrine de son ainée, faisant une moue boudeuse.

- Et alors ? Tu m'as déjà vu dans un bien pire état, je crois, répliqua-elle en formant une question qui n'avait pas besoin de réponse. Je m'en fiche complètement de s'ils sont propres ou sales, et même si tu étais pleine de vomi, je te prendrais quand même dans mes bras pour te consoler si ça ne va pas. Enfin non, peut-être pas, c'est un peu trop crade quand même », plaisanta-t-elle en la serrant un peu plus dans ses bras.

Elle avala sa salive, en réfléchissant. Elle se sentait d'un coup, un peu trop à sa place.

-

Bonjour, bonsoir, ça fait un bail, n'est-ce pas ? J'avais beaucoup de choses à faire depuis la dernière update et moi qui espérait avancer de mon côté, je n'ai absolument rien fait. Néanmoins, il était temps que je corrige et poste le chapitre 20 et j'espère que mes chapitres apparaitrons bien plus vite à l'avenir, même si j'ai de moins en moins d'avance...

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